843 • Le juge ordinaire, qu’il soit administratif ou judiciaire, est, en vertu du principe de subsidiarité et en tant que juge national, le « juge primaire » de la ConvEDH, ou, si l’on peut dire, le juge naturel de la protection des droits fondamentaux. C’est à lui qu’il revient d’interpréter et d’appliquer le droit interne à la lumière des principes mis en place dans le texte européen et d’écarter, si nécessaire, la loi nationale lorsqu’elle n’est pas compatible avec les exigences de la ConvEDH. Les juges se sont ainsi appropriés progressivement les principes européens. Le processus a même été plutôt long en dépit d’un cadre juridique constitutionnel plutôt favorable et il n’a trouvé son plein aboutissement que récemment. Les craintes liées à la montée en puissance d’un droit étranger au sein d’un système juridique souverainont certainement été à l’origine de cette méfiance initiale. Mais depuis que les juges ordinaires réussissent à concilier davantage et de façon plus sereine les exigences liées au texte avec leur propre tradition juridique, force est de constater que l’appropriation de la ConvEDH par les juges ordinaires n’a pas fondamentalement modifié leur travail quotidien. Le constat peut paraitre paradoxal si on se réfère, au cours de ces dernières années, aux tensions et critiques particulièrement vives dont a fait l’objet la CourEDH ou aux craintes, maintes fois répétées, quant à la déstabilisation possible de notre système juridique. C’est le fait de s’approprier concrètement le texte mais aussi d’avoir entamé un véritable dialogue avec le juge européen qui a permis finalement à ce que les changements soient de moindre mesure dans l’intégration progressive du nouvel Etat de droit (2). Au-delà de cette constatation, les changements et les apports qui ont pu intervenir ont surtout eu un caractère positif sur l’organisation et le fonctionnement des juridictions ordinaires. Les droits et libertés que le texte proclame ne sont pas tous nés avec ce texte, la plupart ayant déjà été consacrés par les juges ordinaires à travers les PGD ou par le Conseil constitutionnel à travers les PVC. Mais, sous l’influence de la jurisprudence de la CourEDH, le juge national a souvent été conduit à étendre la portée de ces droits et libertés (ex : l’impartialité objective du juge ; le délai raisonnable de jugement). Cela n’a pu être permis que par la reconnaissance effective de la portée de la jurisprudence européenne en droit interne (1).
1 – La portée de la jurisprudence de la CourEDH en droit interne
→ Les méthodes d’interprétation particulières de la CourEDH
La démarche pragmatique du juge permettant de dégager des garanties et des références implicites
844 • Le juge européen a développé des méthodes d’interprétation du droit européen assez particulières et assez éloignées du raisonnement juridique traditionnel français. C’est une démarche pragmatique de type anglo-saxonne à laquelle se livre le juge, une démarche où la situation individuelle du requérant prédomine. Cette démarche est d’autant plus difficile à cerner qu’elle se fonde sur le flou des notions utilisées par les rédacteurs de la ConvEDH (Cf. Melchior, « Notions vagues ou indéterminées et lacunes dans la ConvEDH », Mélanges Wiarda, Cologne, Carl Heymanns Verlag, 1988, p. 411 ; M. Delmas-Marty, « Vers une autre logique : à propos de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme », D. 1988, chron. n°221). Ce sont ainsi les concepts ou idéaux de « prééminence du droit » et d’ « exigences d’une société démocratique » que le juge européen tend à promouvoir dans son contrôle. Eu égard à la noblesse de ses objectifs, la Cour ne se donne pas de limites dans l’interprétation des textes et s’autorise ainsi à dégager des garanties implicites liées aux dispositions de la ConvEDH (comme par exemple le droit d’accès à un juge, élément inhérent aux droits qu’énonce l’article 6-1 ConvEDH). Elle peut même faire appel aux sources internationales extérieures pour interpréter telle ou telle disposition. Elle s’est, par exemple, fondée, pêle-mêle et à la fois, sur un protocole additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale, une Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains ou encore la jurisprudence du Tribunal pénal international pour l’ex‑Yougoslavie pour inclure le trafic d’être humain dans l’interprétation de l’article 4 ConvEDH (CourEDH, 7 janvier 2010, Rantsev contre Chypre et Russie, req. n°25965/04, §142 et suivants). Le juge européen se sert du droit de l’Union et plus particulièrement de la Charte des droits fondamentaux (CDFUE) dont la prise en compte ne date pas du Traité de Lisbonne par lequel elle a acquis valeur juridique. Elle a pour la première fois fait référence à la CDFUE dans l’affaire « Goodwin contre Royaume-Uni » (CourEDH, 11 juillet 2002, Goodwin contre Royaume-Uni, req. n°28957/95, §100 où elle cite comme référence l’article 9 de la Charte qui consacre le droit de se marier sans référence à l’homme ou à la femme) avant de multiplier les références après le Traité. Elle est même allée jusqu’à se référer à la jurisprudence du juge de l’Union interprétant la Charte pour traiter de la violation de l’article 4 du Protocole n°7 à la Convention consacrant le principe non bis in idem (CourEDH, 4 mars 2014, Grande Stevens et autres contre Italie, req. n°18640/10, 18647/10, 18663/10, 18668/10 et 18698/10, §229 où la cour se réfère à l’interprétation faites par la Cour de justice du principe non bis in idem énoncé à l’article 50 de la Charte : CJUE, 26 février 2013, Åklagaren contre Hans Åkerberg Fransson, Aff. n° C-617/10).
La méthode des « notions autonomes » et la « marge d’appréciation » mesurée laissée aux Etats
845 • Dans un but d’unification, c’est la méthode dite de l’autonomie des notions qui est employée par le juge. Les concepts développés dans les textes doivent être lus comme désignant des concepts autres que ceux traditionnellement admis dans les droits nationaux. Des concepts tels que la « matière pénale », les « obligations de caractère civil », la notion de « biens » ou de « peine », la « fonction publique » ou encore la notion même de « loi » ont ainsi été marqués par cette règle de l’autonomie. On a pu voir déjà que le juge européen apportait un correctif à cette règle par la méthode dite de la marge d’appréciation laissée aux Etats directement lié au principe de subsidiarité. Si des standards minimums peuvent être imposés à l’ensemble des Etats membres, cela n’implique pas l’uniformisation ou la suppression de toute différence entre les Etats. Pour autant la notion de marge d’appréciation reste un instrument d’ajustement sous le contrôle de la Cour pour trois raisons. La 1ère raison tient au fait qu’elle s’efforce souvent, dans une approche consensuelle, de se référer à des principes juridiques communs ou à la notion de « consensus européen » ce qui réduit la marge d’appréciation des Etats. La 2nde raison tient au fait que le juge européen ne définit pas le champ d’application de la notion. Pour la Cour, l’étendue de la marge d’appréciation « varie selon les circonstances, les domaines et le contexte » (CourEDH, 28 novembre 1984, Rasmussen contre Danemark, série A, n°87, §40). La 3ème raison découle du fait que la Cour met en balance cette marge d’appréciation avec la nécessité d’un contrôle européen strict sur la loi et les décisions qui l’appliquent eu égard à l’importance des droits protégés par la Convention (CourEDH, 26 octobre 1988, Norris, série A, n°142, §45). Au-delà de l’appréciation autonome des notions, le contrôle du juge européen ne se limite pas à la matérialité des faits, il s’accompagne aussi de la vérification de la finalité de la mesure prise (dans le cadre du droit à la liberté et à la sureté visé par l’article 5 ConvEDH, pour être admise, la privation de liberté doit répondre au but qu’elle vise) et de l’effectivité du droit dont la garantie est demandée (on le sait, « le but de la ConvEDH consiste à protéger des droits non pas théoriques ou illusoires, mais concrets et effectifs » (CourEDH, 9 octobre 1979, Airey contre Irlande, req. n°6289/73, § 24 ou, parmi beaucoup d’autres, les arrêts CourEDH, 23 septembre 1982, Sporrong et Lönnroth contre Suède, req. n°7151/75, § 63 ; CourEDH, 10 février 1995, Allenet de Ribemond contre France, req. n°15175/89, § 35, ou encore, pour une application récente, CourEDH, 1er février 2007, Nerumberg contre Roumanie, req. n°2726/02, § 37). Au point que, désormais, la juridiction européenne a érigé « l’effectivité qui sous-tend la Convention » en un véritable « principe » (CourEDH, 18 décembre 1996, Loizidou contre Turquie, req. n°15318/89, § 50).
Le contrôle de la proportionnalité des atteintes légitimes portées aux droits garanties par la ConvEDH
846 • C’est le texte conventionnel qui établit d’abord un principe de conciliation permettant d’apporter un équilibre dans les rapports entre les droits fondamentaux et les objectifs d’intérêt général poursuivis par les autorités étatiques. Il reconnait, de façon express, à cet effet, la possible limitation de l’exercice des droits protégés lorsque cette restriction « constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire » à la sauvegarde de certains objectifs dont la sécurité nationale, la défense de l’ordre et la protection des droits et libertés d’autrui (articles 8 à 11 ConvEDH). Ce faisant, le texte introduit la notion de « contrôle de proportionnalité » de la mesure prise en violation d’une liberté. En dehors de ces cas, la CourEDH fait, ensuite, un usage quasi-systématique du contrôle de proportionnalité. Elle a ainsi fait émerger, sur le fondement de l’article 14 ConvEDH qui prohibe toute discrimination, la notion de « rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens et le but visé » (CourEDH, 23 juillet 1968, Affaire relative à certains aspects du régime linguistique de l’enseignement en Belgique contre Belgique, req. n°1474/62, §5 et §10 ; Cf. L. Sermet, «Le contrôle de la proportionnalité dans la Convention européenne des droits de l’homme: présentation générale », LPA 2009, 5 mars, n°46, p. 26). La ConvEDH et l’interprétation qui en est faite par la CourEDH ont fait progresser l’appréciation quant à la balance relative des éléments vers une logique plus libérale et donc plus protectrice des droits et des libertés. Les libertés et les droits ne sauraient, en effet, être l’objet de restrictions que dans le cadre de situations que la jurisprudence encadre strictement (Cf. L’exemple de la logique développée par la CourEDH en matière de liberté d’expression. Elle met en avant le fait que l’atteinte nécessaire à la liberté d’expression doit être établie de manière sure et certaine par la preuve d’un « besoin social impérieux » en raison de l’intérêt de la société démocratique visant à assurer et à maintenir la liberté d’expression, notamment en ce qui concerne la liberté de la presse. Le contrôle exercé par le juge sur ces éléments étant très « scrupuleux » (CourEDH, 26 novembre 1991, Sunday Times contre Royaume-Uni, req. n°13166/87, §50 ; CourEDH, 27 mars 1996, Goodwin contre Royaume-Uni, req. n°17488/90, §40)).
→ Un mécanisme hybride de contrôle des arrêts de la CourEDH : la compétence du Comité des ministres et de la CourEDH elle-même
Des arrêts de la CourEDH qui n’ont pas de force obligatoire
847 • La portée des arrêts de la CourEDH est définie à l’article 46-1 ConvEDH qui dispose que « les hautes parties contractantes s’engagent à se conformer aux arrêts définitifs de la Cour dans les litiges auxquels elles sont parties ». Les arrêts définitifs ne sont pas forcément les arrêts rendus par une chambre de la Cour puisque depuis l’entrée en vigueur du protocole n°11 au 1er novembre 1998, les parties peuvent demander un réexamen de l’affaire par la Grande chambre dans un délai de 3 mois. Un arrêt rendu par une simple chambre ne peut donc être considéré comme définitif lorsque les parties ont expressément renoncé à user de cette dernière voie de recours, après l’expiration de ce délai de 3 mois ou encore quand le collège des 5 juges de la grande chambre aura rejeté la demande. Dans le cas où le collège se déclare compétent (lorsque « l’affaire soulève une question grave relative à l’interprétation ou à l’application de la Convention ou de ses protocoles, ou encore une question grave de caractère général » (art. 44-2 ConvEDH)), seul l’arrêt de la grande Chambre sera considéré comme définitif et comme ayant autorité de chose jugée. La « force obligatoire » de l’article 46-1 ConvEDH se déplace, cependant et ensuite, librement dans les ordres nationaux, sans qu’il y ait de procédure intermédiaire et sans mécanisme d’exequatur, il n’y a aucune condition en quelque sorte. Les arrêts n’ont pas de force exécutoire dans la mesure où ils ne s’analysent pas comme des titres exécutoires sur le territoire de l’Etat condamné. L’arrêt du juge européen ne corrige pas l’autorité de la chose jugée par le juge national, qui prime toujours. Dans l’hypothèse où il y a condamnation de l’Etat, parce qu’une loi n’est pas conforme à un droit défini dans la ConvEDH, le Parlement et les autorités publiques ont juridiquement l’obligation de se conformer. Mais il n’existe aucune coercition juridique forçant le Parlement à modifier la loi. En cas de violation de la Convention (arrêts déclaratoires), l’exécution relève de la bonne volonté de l’Etat qui a, pour ce faire, le libre choix des moyens.
Le principe de l’effacement de la violation constatée
848 • Le principe est celui de l’effacement de la violation constatée afin de permettre, autant que faire se peut, une restitutio in integrum. Cette dernière consistant à rétablir le statu quo ante, c’est-à-dire la situation qui existait avant la survenance du fait illicite ou la situation qui aurait existé si le fait illicite n’avait pas été commis. Mais si l’Etat condamné n’est pas en mesure d’en supprimer les effets, même « qu’imparfaitement », le juge européen accordera à la partie lésée, mais de façon subsidiaire, une satisfaction équitable (art. 41 ConvEDH, on parle alors d’arrêts de prestation). Par contre, la victime bénéficiaire, en l’espèce, de la satisfaction équitable ne pourra pas actionner les voies d’exécution contre l’Etat. Ce dernier est préservé par une immunité de saisie qui interdit toute contrainte sur les biens du domaine public et qui empêche tout processus de contrainte contre les agents publics. Il faut relever que la CourEDH se prononce, le plus souvent, immédiatement, sur le montant de l’indemnisation quand elle sait que l’Etat ne prendra pas les mesures permettant de remédier à son constat de violation (cas notamment quand il n’existe pas de procédure pour réexaminer une affaire définitivement jugée). Le juge européen a coutume d’exposer avec beaucoup de détails, dans ses arrêts, les conditions d’exécution de la satisfaction équitable (délai, bénéficiaire, monnaie, intérêts moratoires, etc…) même si le paiement peut soulever des questions complexes (par exemple, relatives au mandat, au caractère acceptable du taux de change fixé, à l’impact d’une importante dévaluation sur la monnaie de paiement, à la validité de la saisie et de la taxation des sommes octroyées, etc…).
Une exécution prioritairement confiée au Comité des ministres du Conseil de l’Europe
849 • La surveillance de l’obligation des Etats de se conformer aux arrêts définitifs de la CourEDH revêt d’abord un caractère politique. C’est au Comité des ministres (composé du Ministre des affaires étrangères de chaque Etat), en vertu de l’article 46 ConvEDH, que l’arrêt définitif de la CourEDH est d’abord soumis. Pour en surveiller l’exécution, il tient des réunions régulières, dites réunions « Droits de l’homme » et engage un dialogue avec l’Etat concerné pour envisager les mesures à prendre, individuelles ou générales, pour garantir l’exécution de l’arrêt. L’idée n’est pas de mettre en place un contrôle inquisitoire mais plutôt d’établir, dans une optique de concertation, une sorte de partage des responsabilités. Le Comité respecte le libre choix des moyens dont dispose les Etats pour mettre en œuvre dans leur ordre juridique l’exécution des arrêts. Mais, en veillant au bon déroulement de l’exécution, il ne se contente pas d’enregistrer les informations, il s’assure aussi que les mesures annoncées par l’Etat sont effectivement prises et appliquées en pratique. Il faut aussi noter que l’office même du Comité s’est davantage juridictionalisé notamment depuis la mise en place du protocole n°14 additionnel à la ConvEDH. Dans le cas où des garanties sont données, le Comité des ministres clôt l’examen de l’affaire. Dans le cas où demeure une difficulté d’interprétation d’un arrêt de la Cour, qui empêche son exécution, la majorité des 2/3 des représentants est en mesure de choisir à nouveau la saisine de la Cour pour lui demander son interprétation (art. 46-3 ConvEDH). Si l’Etat persiste dans son refus de ne pas exécuter la décision, le Comité des Ministres peut le mettre en demeure, puis à la majorité des 2/3, saisir la Grande chambre de la Cour de la question après un délai de six mois suivant la mise en demeure (cela laisse le temps à l’Etat de régulariser). Enfin, dans le cas où la CourEDH reconnait la violation, elle renvoie au Comité des Ministres pour examiner les mesures à prendre (art. 46-4 ConvEDH). Dans cette logique, le recours en manquement met une forte pression politique sur l’Etat. Il doit être motivé et traduire les multiples opinions exprimées au sein du Comité des Ministres, en particulier celle de l’Etat concerné. Il ne sera utilisé qu’en cas de circonstances exceptionnelles. Au-delà de ces deux recours, le Comité exerce, comme la CourEDH, un véritable contrôle de conventionalité qui va bien au-delà du respect de la latitude classique réservée à l’Etat. Il peut, par exemple, demander l’adoption de nouvelles mesures qu’elles soient individuelles ou générales voire se montrer plus strict que ne l’a été la CourEDH.
Le premier recours en manquement rendu sur le fondement de l’art. 46 ConvEDH : l’arrêt « Mammadov »
850 • C’est le 5 décembre 2017 que le comité des ministres a décidé d’activer l’article 46 § 4 pour la première fois face au refus d’un Etat d’exécuter un arrêt. L’affaire concernait l’arrestation puis la détention d’un opposant politique en Azerbaïdjan. Le juge européen (CourEDH, 22 mai 2014, Mammadov contre Azerbaïdjan, req. n°15172/13) a considéré qu’aucun fait ou aucune information n’avait été produit donnant lieu à des soupçons justifiant les accusation portées contre le requérant ce qui violait l’article 5-1 ConvEDH (droit à la liberté et à la sureté). Il a aussi rappelé le but exact de ces mesures qui avait été de réduire au silence ou de punir l’opposant politique pour avoir émis des critiques à l’égard du gouvernement (entrainant ainsi une violation de l’article 18 ConvEDH sur la limitation de l’usage des restrictions aux droits). La mesure d’exécution qui devait alors être prise par l’Etat était la libération immédiate et inconditionnelle du requérant. En 2017, l’opposant était toujours en prison justifiant la décision du comité de mettre en demeure le gouvernement azerbaïdjanais de se conformer à l’arrêt définitif de la Cour. La mise en demeure étant resté sans réponse, le comité lança la procédure du recours en manquement. C’est à l’unanimité que la grande chambre de la Cour va alors affirmer que l’Azerbaïdjan a manqué à l’obligation de se conformer à l’arrêt de 2014 confirmant le constat effectué par le comité (CourEDH, GC, 29 mai 2019, Mammadov contre Azerbaïdjan, req. n°15172/13). Elle a pris soin, de façon très pédagogique, de fixer le cadre de son intervention et de son office eu égard à la fonction politique du Comité des ministres en précisant, notamment, que son appréciation juridique pouvait être différente de celle du Comité et qu’elle était définitive (§ 168). Certains auteurs ont pu alors souligné les faiblesses de ce « point d’arrivée » du mécanisme d’exécution des arrêts parlant plutôt de « point de départ » (J. Andriantsimbazovina « Premier arrêt en manquement rendu sur le fondement de l’article 46, paragraphe 4, de la Convention européenne des droits de l’Homme », GP 2019, 9 juillet, n° 355, p. 18) pour ensuite « mettre en place une procédure de concrétisation effective des conséquences juridiques d’un refus d’exécuter un arrêt définitif de la Cour » (Ibid.) qui ne peut se présenter que sous la forme d’ « une astreinte financière » (Ibid.). Si l’affaire « Mammadov » est un pas en avant important, elle reste néanmoins le symbole des limites de la procédure en manquement. Le constat de violation intervenant après la libération du requérant prononcée sur des fondements juridiques sans lien direct avec l’exécution de l’arrêt de la ConvEDH (le 13 août 2018, la cour d’appel de Shaki a réexaminé sa peine. La cour a remplacé les deux dernières années de la peine de sept ans d’emprisonnement par une peine avec sursis).
Un Comité des ministres aux moyens plus contraignants
851 • Aux moyens classiques tenant à la pression diplomatique, la suspension du droit de représentation ou l’exclusion du Conseil de l’Europe, se sont rajoutées des résolutions intérimaires pouvant aller du simple encouragement à des menaces plus explicites, « la terminologie utilisée étant plus insistante, voire plus agressive, au fil du temps » (J.-F. Flauss, « L’effectivité des arrêts de la CourEDH : du politique au juridique et vice versa », RTDH 2007, p. 27 et suiv.). Ces moyens contraignent les Etats qui entendent sauvegarder leur image de « pays de droits de l’Homme » sur la scène internationale à se conformer aux condamnations. Le Comité n’est ainsi pas le seul organe européen à agir sur la question de la visibilité de l’exécution des arrêts. L’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe multiplie les visites sur le terrain, adresse des résolutions aux Etats ou des recommandations au Comité ou peut aussi auditionner les délégations étatiques. Le commissaire des droits de l’homme dont la mission est de promouvoir la prise de conscience et le respect des droits de l’homme dans les États membres joue aussi un rôle fondamental dans l’adoption des mesures générales nécessaires à l’effectivité des arrêts de la Cour Le Commissaire coopère également avec de nombreux partenaires comme l’UE, l’ONU et ses agences spécialisées, des universités et des cercles de réflexion ainsi que les grandes ONG de défense des droits de l’homme qui peuvent notamment mettre à disposition du Comité toute communication concernant l’exécution des arrêts (Règle n°9-2 du Comité des Ministres pour la surveillance de l’exécution des arrêts et des termes des règlements amiables telles qu’adoptées par le Comité des Ministres le 10 mai 2006, lors de la 964ème réunion des Délégués des Ministres et amendées le 18 janvier 2017, lors de la 1275ème réunion des Délégués des Ministres).
Un Comité des ministres aux moyens plus transparents
852 • Dans le cadre d’une certaine transparence, le Comité des ministres dispose d’un site Internet, accessible au public où l’on retrouve un portail consacré à l’exécution des arrêts permettant de catégoriser chaque Etat sur la scène internationale et d’établir les comportements adoptés par chacun dans l’exécution des arrêts (https://www.coe.int/fr/web/cm/execution-judgments ; on trouve sur ce portail des « fiches » pays avec, notamment, des éléments statistiques sur le nombre de condamnations de chaque Etat ou sur l’effectivité de l’exécution de chacun des arrêts, mais aussi un moteur de recherche pour suivre l’exécution des arrêts : http://hudoc.exec.coe.int, les rapports annuels, les différentes décisions, résolutions, etc…). Le Comité publie enfin depuis 2007 un rapport annuel intitulé « Surveillance de l’exécution des arrêts de la CourEDH » (on y trouve les montants payés par les Etats, la portée du contrôle, les difficultés de certains Etats dans l’exécution, etc…) qui participe à l’émergence d’un véritable droit à l’exécution nationale des arrêts de la CourEDH. Le dernier rapport en date (12ème rapport annuel pour l’année 2018 (https://rm.coe.int) illustre les efforts déployés pour garantir le système. Le rapport souligne que 72 % des affaires pendantes devant la CEDH concernent six pays (Russie, Roumanie, Ukraine, Turquie, Italie et Azerbaïdjan). La Russie est le plus gros pourvoyeur d’affaires (ce qui « témoigne de la confiance que les ressortissants russes accordent au mécanisme européen de protection des droits de l’homme et de l’importance qu’il représente pour eux », avant- propos, p. 7). S’agissant de la France, 871 requêtes concernant la France ont été attribuées à une formation judiciaire de la Cour en 2018 et 37 ont donné lieu à des arrêts. Le rapport souligne, notamment, l’extraordinaire succès du Réseau des cours supérieures. Il avait été lancé en octobre 2015 avec les deux juridictions suprêmes françaises (Conseil d’Etat et Cour de cassation), il fait aujourd’hui participer 64 Cours supérieures. C’est l’un des outils prépondérants de la subsidiarité voulue par la Cour et l’ensemble du système. Celui-ci permettra, au même titre que le protocole n°16 d’arriver à une véritable institutionnalisation des rapports entre le juge européen et les différentes cours suprêmes nationales.
Une redéfinition, par la CourEDH, des obligations générales qui pèsent sur les Etats quant à l’exécution des décisions de justice
853 • Le juge européen s’est longtemps interdit d’ordonner des mesures particulières d’exécution de ses arrêts. Dans l’affaire « Selmouni contre France » (CourEDH, 289 juillet 1999, Selmouni contre France, req. n°25803/94) ayant donné lieu à une condamnation retentissante de la France pour torture, les juges de Strasbourg avaient donné raison à un trafiquant de drogue qui avait été gravement tabassé par des policiers de la Seine-Saint-Denis pendant sa garde à vue. Mais les juges avaient considéré qu’ils n’avaient pas compétence pour adresser à l’Etat français une injonction de transférer le requérant, ressortissant néerlandais, dans une prison dans son pays d’origine alors même que le requérant le demandait et que les Pays-Bas appuyaient cette demande. La position de la Cour a commencé à changer quand elle a fait du principe de l’exécution des décisions de justice un droit fondamental inhérent au droit à un procès équitable (Cf. CourEDH, 19 mars 1997, Hornsby contre Grèce, req. n°18357/91, §. 40). Sur la base de ce principe, elle a redéfini l’obligation générale qui pèse sur les Etats quant à l’exécution de ses arrêts en donnant, elle-même, dans ses arrêts, des indications quant aux mesures d’exécution à prendre allant, parfois, ordonner directement la mesure à adopter. Elle a d’abord appliqué un premier type de mesures, les mesures individuelles, visant les requérants. Cela peut amener à rouvrir une procédure pénale jugée inéquitable, à détruire des informations obtenues en violation du droit au respect de la vie privée, exécuter un jugement interne qui n’a pas été appliqué ou encore à révoquer un arrêté d’expulsion établi malgré le risque réel de torture ou d’autres formes de mauvais traitement dans le pays de destination. Le second type de mesures pouvant être appliquées s’identifie à travers des mesures générales. Ces dernières sont plutôt associées à l’obligation d’éviter de nouvelles violations semblables à celles qui ont déjà été constatées ou de faire cesser des violations continues. Elles peuvent nécessiter, dans certaines circonstances, le fait de prévoir des voies de recours internes efficaces, le fait de revenir sur la législation, les règlements ou la pratique judiciaire pour parer aux violations. Parfois, l’obligation peut même engendrer des modifications de la Constitution. Il y a encore d’autres mesures qui peuvent être nécessaire comme la remise en état d’une prison, l’accroissement du nombre de juges ou du personnel pénitentiaire ou encore la rectification de formalités ou procédures administratives. Des mesures provisoires peuvent aussi être nécessaires pour modérer les conséquences négatives des violations pour les requérants et, plus globalement, empêcher ses mêmes violations jusqu’à l’adoption de mesures plus exhaustives ou définitives. Comme peuvent le relever des auteurs de l’Institut de droit européen des droits de l’homme, il est porté « un sérieux coup de canif au caractère déclaratoire des arrêts, à leur autorité relative et à l’obligation par principe de résultat pesant sur l’Etat » (K. Blay-Grabarczyk, M. Afroukh et A. Schahmaneche, « Le contrôle de l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme. Aspects européens : acteurs politiques et acteurs juridictionnels », RFDA 2014, p. 935 et suiv.).
→ L’importance du pouvoir d’injonction de la CourEDH
L’indication des mesures à adopter par la CourEDH
854 • En indiquant les mesures individuelles ou générales susceptibles d’être prises par les Etats, le juge européen a d’abord la volonté de guider l’Etat simplement vers le moyen le plus adéquat que celui-ci pourrait mettre en œuvre pour s’acquitter de son obligation d’exécution. Elle peut ainsi estimer, pour mettre fin à la violation, que le « redressement le plus approprié serait de faire rejuger le requérant en temps utile par un tribunal indépendant et impartial » (CourEDH, 23 octobre 2003, Gencel contre Turquie, req. n°53431/99, § 27) ou « serait de terminer le procès le plus rapidement possible, en prenant en considération les exigences d’une bonne administration de la justice, ou de libérer le requérant pendant la procédure » (CourEDH, 6 mars 2007, Yakisan contre Turquie, req. n°11339/03, § 49). Mais il arrive, tout de même, au juge européen de formuler de véritables injonctions. Si ces dernières laissent alors que très peu de latitude à l’Etat concerné, elles sont néanmoins cantonnées aux hypothèses où il n’y a qu’une seule mesure d’exécution envisageable ou lorsqu’est en cause un cas d’atteinte à la liberté individuelle ou l’intégrité physique du requérant. Des directives individuelles peuvent ainsi être adressées aux Etats consistant, par exemple, en une remise en liberté dans les plus brefs délais (CourEDH, GCh, 8 avril 2004, Assanidze contre Géorgie, req. n°71503/01, § 203) ou dans le placement dans un établissement médical capable de dispenser un traitement médical adéquat (CourEDH, 3 mars 2009, Ghavtadze contre Géorgie, req. n° 23204/07, § 106). Cela peut aussi concerner des directives générales qu’on retrouve essentiellement dans les arrêts « pilotes » traitant de grands groupes d’affaires identiques tirant leur origine d’un même problème sous-jacent. On parle d’affaires répétitives ayant la même cause. Dans cette hypothèse, la CourEDH peut décider de cibler une décision ou alors plusieurs pour les examiner en priorité et parvenir à une solution qui dépasse le ou les cas particuliers et qui s’appliquerait alors à toutes les affaires similaires soulevant la même question. La procédure vise ainsi à aider les autorités nationales à éliminer le problème systémique ou structurel mis en évidence par la Cour. La première procédure de l’arrêt pilote a été dirigée contre la Pologne en 2004 à propos des affaires « relatives à la rivière Boug » (CourEDH, GCh, 22 juin 2004, Broniowski contre Pologne, no 31443/96, § 188 à 194) et a conduit à l’adoption d’une nouvelle législation et a été suivie du règlement des affaires pendantes suite à l’injonction de la Cour de « garantir par des mesures légales et administratives appropriées la réalisation effective et rapide du droit en question » (§194). Le juge européen a pu prescrire, par la suite, dans le cadre de l’article 46 ConvEDH, à l’Etat défendeur, « d’assurer au requérant, dans les plus brefs délais, des conditions adéquates de détention dans un établissement apte à lui fournir le traitement psychiatrique nécessaire et un suivi médical constant » (CourEDH, 20 janvier 2009, Slawomir Musial contre Pologne, req. n°28300/06, § 108) ou demander à l’Etat défendeur de « mettre en place, dans un délai d’un an, un recours ou un ensemble de recours internes apte à offrir un redressement dans le cas de dépassement de délai raisonnable des procédures devant les juridictions pénales » (CourEDH, 3 avril 2012, Michelioudakis contre Grèce, req. n°54447/10, §78).
La France, la procédure des « arrêts pilotes » et le cas particulier de la surpopulation carcérale
855 • A ce jour la France n’a fait l’objet d’aucun « arrêt pilote » mais elle est de moins en moins à l’abri notamment dans le cadre du problème de la surpopulation carcérale. Les « arrêts pilotes » Torregiani et autres contre Italie (CourEDH, 8 janvier 2013, Torregiani et autres contre Italie, req. n°43517/09) et Rezmives et autres contre Roumanie (CourEDH, 25 avril 2017, Rezmives et autres contre Roumanie req. n°61467/12, n°39516/13, n°48231/13 et n°68191/13), devraient susciter l’inquiétude des autorités françaises et plus particulièrement celles qui ont en charge l’entretien des établissements pénitentiaires. La Cour considère en effet que les conditions de détention dans les prisons italiennes et roumaines constituent une violation de l’article 3 de la ConvEDH qui sanctionne les traitements inhumains et dégradants et a ordonné, en conséquence, aux Etats concernés, des mesures générales précises à prendre pour y remédier. Des arrêts pilotes prononcés contre la Pologne (CourEDH, 22 octobre 2009, Norbert Sikorski contre Pologne, req. n°17599/05 et Orchowski contre Pologne, req. n°17885/04) ou la Russie (CourEDH, 10 janvier 2012, Ananyev et autres contre Russie, req. n°42525/07 et n°60800/08) ont aussi constaté des problèmes structurels et systémiques du même ordre et prescrit aux autorités de ces pays les mesures précises à prendre pour y remédier. La France est aujourd’hui directement menacée. Le surpeuplement carcéral en particulier peut s’analyser comme un problème structurel, lié au retard pris dans la construction de nouveaux établissements pénitentiaires. L’arrêt « Rezmives » évoque un taux d’occupation qui varie en Roumanie entre 149 et 154 % (équivalent en France voire supérieur dans les établissements d’Ile de France). La menace d’une condamnation par « arrêt pilote » est donc bien présente, d’autant que les conditions d’incarcération dans les établissements pénitentiaires de notre pays ont déjà été sanctionnées par la Cour sur le même fondement (CourEDH, 25 avril 2013, Enzo Canali contre France, req. n°40119/09 où le juge a sanctionné la vétusté des conditions de détention de la maison d’arrêt Charles III de Nancy, établissement qui avait finalement fermé ses portes en 2009 et CourEDH, 21 mai 2015, Yengo contre France, req. n°50494/12 où la prison de Nouméa a été mise en cause, à la fois pour ses conditions de détention et pour l’absence de recours pour les faire cesser). A noter qu’après le rejet par le Conseil d’Etat de la requête récente de l’Observatoire international des prisons (OIP)sur les conditions de détention jugées particulièrement critiques à la maison d’arrêt de Fresnes, ce dernier vient de saisir la CourEDH. Si le Conseil d’Etat a reconnu que les conditions de détention à Fresnes « sont de nature tant à porter atteinte à la vie privée des détenus [ainsi] qu’à les exposer à un traitement inhumain et dégradant », il a admis qu’il n’y avait pas d’atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, l’autorité administrative, ayant déjà entrepris différentes mesures pour améliorer ces conditions de détention et n’ayant pas en outre la maîtrise du nombre de détenus, ni les moyens matériels (CE, 28 juillet 2017, Section française de l’observatoire international des prisons, req. n°410677).
Le pouvoir de la CourEDH de condamner un Etat quand les juridictions nationales ne respectent pas ses arrêts
856 • C’est la tendance actuelle dans ce cadre. On peut citer, à cet égard, le pouvoir que se reconnait la CourEDH de condamner un Etat lorsque ses juridictions n’ont pas donné effet aux principes posés dans l’un de ses arrêts. Elle considère que sa jurisprudence s’impose au juge national pour toutes les affaires qui soulèvent une question similaire au regard de la ConvEDH à condition que la solution dégagée soit précise et complète (CourEDH, 29 novembre 1991, Vermeire contre Belgique, req. n°12849/87, série A n°214-C,§ 26 ; CourEDH, 22 février 1994, Vallée contre France, req. n°22121/93, série A, n°289, § 47). En conséquence, le juge national doit considérer qu’un droit interne déclaré non conforme est inapplicable si la constatation de la violation est précise et complète. Cette jurisprudence a notamment été confirmée assez récemment par l’affaire « Fabris contre France » dans le cadre d’une non-discrimination envers les enfants adultérins (CourEDH, 7 février 2013, Fabris contre France, req. n°16574/08, §75). Dans le même sens, s’il peut exister une certaine ambiguïté quant au fait de savoir si la CourEDH peut être saisie d’un recours d’un individu invoquant une violation de l’article 46 ConvEDH du fait de l’inexécution d’un arrêt constatant une atteinte à ses droits (Voir notamment : CourEDH, 10 avril 2003, Mehemi n°2 contre France, req. n°53470/99, §43 ; CourEDH, 1er mars 2005, Komanicky et autres contre Allemagne, req. n°32106/96 ; CourEDH, 16 juillet 2010, Ocalan contre Turquie, req. n°5980/07 où la Cour a plus ou moins décliné sa compétence), la Cour s’est néanmoins considérée comme compétente pour connaitre d’un grief selon lequel la réouverture d’une procédure en droit interne en vue d’exécuter l’un de ses arrêts avait donné lieu à une nouvelle violation de la ConvEDH (CourEDH, 4 octobre 2007, Verein gegen Tierfabriken Schweiz (VGT) contre Suisse, req. n°32772/02). A noter, cependant, que pour préserver un fonctionnement efficient du mécanisme européen de protection des droits de l’homme, le juge européen peut choisir de radier des affaires dans le cadre « d’arrêts pilotes » sur le fondement de l’article 37-1 ConvEDH sans traiter la violation et la satisfaction équitable. Il l’a récemment fait dans le cadre du traitement des violations structurelles et systémiques ayant fait l’objet préalablement d’un arrêt pilote à l’encontre de l’Ukraine. La Cour avait été saisie de 12148 requêtes en raison de dysfonctionnements du système juridique quant à l’exécution de jugements définitifs et de l’absence de voies de recours internes effectives pour pallier cette défaillance. Cette violation avait déjà été sanctionnée par la Cour (CourEDH, 15 octobre 2009, Ivanov contre Ukraine, req. n°40450/04) dans un arrêt pilote indiquant les mesures à mettre en œuvre mais cet arrêt n’a jamais été suivi d’effets et les violations et les requêtes se sont multipliées (29000 requêtes) obligeant la Cour à choisir la radiation pour privilégier l’approche par le Conseil des ministres (CourEDH, 12 octobre 2017, Burmych et autres contre Ukraine, req. n°46852/13).
Le cas particulier de la réformation de l’acte juridictionnel déclaré non conforme à la ConvEDH : la procédure de réexamen des affaires pénales et affaire civiles d’état des personnes
857 • Certains Etats connaissent ce type de procédure (Belgique, Luxembourg, Suisse par exemple) mais la France ne l’a d’abord instaurée que dans le cadre de la matière pénale. La loi du 15 juin 2000 (loi n°2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes) a institué une procédure exceptionnelle de réexamen des affaires pénales suite à une condamnation de la France par la CourEDH (Voir, par ex., C. Pettiti, « Le réexamen d’une décision pénale française après un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme : la loi française du 15 juin 2000 », RTDH 2001, p. 3). Il s’agit d’une troisième voie de recours extraordinaire, aux côtés du pourvoi en cassation et de la demande en révision, qui permet de reconnaître en droit interne les effets des arrêts rendus par le juge européen. La loi du 20 juin 2014 (loi n°2014-640 du 20 juin 2014 relative à la réforme des procédures de révision et de réexamen d’une condamnation pénale définitive) a apporté plusieurs modifications touchant les conditions et la procédure de réexamen. Elle a également créé une nouvelle juridiction unique : la « Cour de révision et de réexamen » qui agit dorénavant en lieu et place de l’ancienne « Commission de réexamen » d’une décision pénale consécutif au prononcé d’un arrêt de la Cour. Le réexamen est enfermé dans d’étroites conditions de forme et de fond (articles 622 à 626-1 du Code de procédure pénale). L’ancienne Commission de réexamen était composée de sept magistrats de la Cour de cassation, de conseillers et conseillers référendaires désignés par l’assemblée générale de cette juridiction et jouait le rôle d’un filtre préalable car elle se bornait à vérifier si la demande était recevable et bien fondée au regard des conditions légales. Depuis le 1eroctobre 2014, la demande de réexamen est adressée à une Cour de révision et de réexamen, compétente, comme son nom l’indique, pour connaître à la fois des demandes en révision et en réexamen et composée de dix-huit magistrats issus de toutes les chambres de la Cour de cassation. Plus précisément, la demande en réexamen est adressée à la commission d’instruction des demandes en révision et en réexamen, qui se prononce sur sa recevabilité (art. 624 al. 1er CPP). A noter enfin qu’en matière civile, le législateur permet, depuis le 18 mai 2017 (date d’entrée en vigueur de la loi dite « loi J21 » : loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle), le réexamen d’une décision civile définitive rendue en matière d’état des personnes lorsque l’affaire a donné lieu à une condamnation de la France par le juge européen (art. L. 452-1 à L. 452-6 COJ). Le champ d’application est cependant limité à l’état des personnes et la violation, par sa nature et sa gravité, doit avoir entrainé des conséquences dommageables auxquelles la satisfaction équitable accordée par la CourEDH ne pourrait pas mettre fin. La violation constatée doit donc être d’une gravité suffisante pour justifier un réexamen de la décision interne définitive.
Le cas particulier de la réformation de l’acte juridictionnel déclaré non conforme à la ConvEDH : pas de réouverture d’une voie de recours pour les juges suprêmes
858 • Le Conseil d’Etat a refusé de rouvrir une voie de recours par la voie prétorienne (CE, 11 février 2004, Chevrol, req. n°257682, RFDA 2005, p. 163, note J. Andriantsimbazovina, D 2004, p. 1414, concl. R. Schwartz) suite à une condamnation de la France concernant l’une des dernières illustrations de ce que l’on avait appelé la « théorie du ministre-juge » (CourEDH, 3 février 2003, Chevrol contre France, req. n°49636, série A, n°99 où le juge européen sanctionne le fait que le Conseil d’Etat s’estime lié par l’avis du Ministre du ministre des affaires étrangères sur le respect de la condition de réciprocité dans l’application des traités internationaux et se prive ainsi de la compétence d’examiner lui-même et de façon autonome la question). Le juge administratif a, par la suite, souligné que l’exécution de l’arrêt du juge européen ne pouvait, en l’absence de procédures prévues pour réexaminer une affaire définitivement jugée, avoir pour effet de priver les décisions juridictionnelles de leur caractère exécutoire (CE, 4 octobre 2012, M. Baumet, req. n°328502). Par contre, si la violation constatée par la Cour concerne une sanction administrative devenue définitive, le constat effectué par la CourEDH établi, pour le Conseil d’Etat, un « élément nouveau » qui doit être pris en considération par l’autorité investie du pouvoir de sanction. Cette dernière est tenue de réapprécier la poursuite de cette sanction lorsque cette dernière continue à produire des effets. Elle peut y mettre fin, en tout ou partie, eu égard aux intérêts dont elle a la charge et à la gravité des manquements constatés par la Cour (CE, Ass., 30 juillet 2014, M. Vernes I, req. n°358564, Rec. CE, p. 260, concl. S. von Coester, AJDA 2014, p.1929, chron. J. Lessi et L. Dutheillet de Lamothe, RFDA 2014, p. 945, concl. S. von Coester). Un arrêt « Vernes II » rendu le 9 mars 2016 amenuise cependant l’utilité de cette procédure en procédant à une interprétation très restrictive de la notion d’« élément nouveau ». Par exemple, le critère temporel (temps écoulé depuis le prononcé de la sanction) comme le comportement du requérant depuis le prononcé de la sanction ne sont pas pris en compte pour apprécier la notion. Le juge administratif fait aussi une distinction entre la violation des droits procéduraux et la violation des droits substantiels. Il met en place, de la sorte, une hiérarchie dans la violation des droits conventionnellement garantis qui ne trouve aucun fondement dans la jurisprudence européenne. Dès lors, pour les droitsprocéduraux, seule une violation « d’une gravité telle qu’un doute sérieux serait jeté sur la sanction prononcée » peut justifier de mettre un terme à l’exécution de celle-ci (CE, 9 mars 2016, Vernes II, req. n°392782, Rec. CE, p. 63, AJDA 2016, p. 517, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet).
2 – L’apport de la jurisprudence européenne à l’office des juges ordinaires et à la protection de l’Etat de droit
859 • La ConvEDH est un formidable instrument de pouvoir entre les mains des juges français, judiciaire ou administratif, puisqu’elle est d’application directe et qu’en vertu de l’article 55 C°, elle a une autorité supérieure à celle des lois ordinaires. Le contrôle de conventionnalité ainsi pratiquée se fait, dans l’ordre interne, sous le contrôle de la Cour de cassation et du Conseil d’Etat et, dans l’ordre supranational, sous le contrôle de la CourEDH. Il appartient donc, de par ce mécanisme, aux juges de corriger les incompatibilités du droit interne avec les principes de la ConvEDH et, ceci, avant que n’intervienne une éventuelle correction ou modification par le législateur. Ce sont les juges ordinaires qui sont donc souvent les premiers acteurs de la mise en compatibilité du droit interne avec les exigences européennes ou le principal canal d’application du texte. Si la prise en compte juridictionnelle de la ConvEDH offre en ce sens l’avantage de la souplesse et de la rapidité, elle provoque néanmoins des difficultés à l’égard de l’exécutif et du législatif qui n’acceptent pas sans réticences les pouvoirs ainsi dévolus aux juges sur des dispositions législatives ou réglementaires nationales et leur possible remise en cause.
→ La référence progressive des juges ordinaires à l’autorité des arrêts de la CourEDH
Une « force persuasive » pour le Conseil d’Etat
860 • La notion d’autorité de « chose interprétée » imputable, dans le droit de l’UE, à la compétence d’interprétation préjudicielle de la CJUE n’est pas retranscrit droit né de la ConvEDH. Le contexte institutionnel et juridique est, en effet, différent. En suivant une jurisprudence traditionnelle, le Conseil d’Etat déclare que les arrêts de la CourEDH n’ont qu’une « autorité relative de chose jugée » (CE, 24 novembre 1997, Ministre de l’économie et des finances contre Société Amibu Inc., req. n°171929, Rec. CE, p.441, D. 1998, p. 159, note G. Tixier et A.-G. Hamonic-Gaux, RFDA 1998, p. 978, note J. Andriantsimbazovina). Par contre, en pratique, le constat est plus simple puisque le Conseil d’Etat se conforme, la plupart du temps, à la jurisprudence de la CourEDH à laquelle il a reconnu, peut-être pas en droit mais au moins dans les faits, des effets erga omnes. L’ex-vice-président du Conseil d’Etat, M. Jean-Marc Sauvé parlait, à cet égard, à propos de la jurisprudence de la Cour, de « réelle force persuasive » et même d’une « assez claire autorité interprétative » (J.-M. Sauvé, « La subsidiarité : une médaille à deux faces ? »,www.conseil-etat.fr, 30 janvier 2015) ce dont témoigne la jurisprudence « Maubleu » rendue près d’un an avant l’arrêt « Société Amibu » (CE, Ass., 14 février 1996, Maubleu, req. n°132369, en ce qui concerne l’application de l’article 6 ConvEDH à la publicité des audiences devant le Conseil de l’Ordre des avocats). Le Conseil d’Etat n’est plus réticent à adopter une interprétation de la ConvEDH conforme à celle du juge européen. C’est le juge des référés qui a cité, la première fois, la jurisprudence européenne en reprenant la motivation d’un arrêt de la CourEDH (CourEDH, 1er juillet 1961, Lawless contre. Irlande (n°3), req. n°332/57) sans forcément le nommer (CE, ord., 14 novembre 2005, Rolin, req. n°286835, AJDA 2006, p. 501, note P. Chrestia) avant de franchir, dans un second temps, le pas de la citation expresse en citant dans les visas l’arrêt pertinent de la CourEDH (CE, ord., 20 décembre 2005, Meyet, req. n°288253 qui cite CourEDH, 27 avril 1988, Boyle et Rice contre Royaume-Uni, série A, n°131, req. n°9659/82 et n°9658/82, § 52 à 55). La pratique ainsi initiée n’a pas fait fortune par la suite même si le Conseil d’Etat a pu parfois utiliser la formule, plus familière de la Cour de cassation, « tel qu’interprété par la CourEDH » (CE, 25 mai 2007, Courty, req. n°296327, AJDA 2007, p. 1424, concl. R. Keller). On peut citer un exemple où le juge administratif retient la vision du juge européen et les obligations positives retenues. C’est la jurisprudence « Association juristes pour l’enfance » (CE, 12 décembre 2014, Association juristes pour l’enfance, req. n°367324). Le juge y conforte la légalité d’une circulaire ministérielle relative à la délivrance de certificats de nationalité à des enfants nés à l’étranger de Français ayant eu recours à une convention de gestation pour le compte d’autrui (GPA). Cette circulaire, qui avait, notamment, fait l’objet de nombreuses réactions dans les médias, accusant la Ministre de la justice d’ouvrir la voie à la GPA, avait été établi à la lumière d’arrêts rendus par le juge européen ayant condamné la France au titre de l’article 8 ConvEDH et tendant à un renforcement des droits de l’enfant (CourEDH, 26 juin 2014, Menesson contre France, req. n°65192/11 et Labassée contre France, req. n°65941/11). Le Conseil d’Etat s’est aussi, récemment, rallié à la conception européenne de la notion de « loi » qui est définie par le juge européen au sens matériel du terme comme étant assimilé à la « règle de droit » (CourEDH, 26 avril 1979, Sunday Times contre Royaume-Uni, req. n°6538/74, § 47) et non comme, au sens formel du terme, « l’acte émanant du Parlement ». Le juge administratif affichant, en outre, le dialogue avec le juge européen par une référence expresse à la jurisprudence européenne (CE, 6 mai 2015, M. B., req. n°377487, GP 2015, 25 juin, n°176, p. 17, obs. M. Guyomar, JCP 2015, A, n°2227, note J.-F. Giacuzzo, RTDCiv 2015, p. 575, note P. Deumier).
Une « autorité interprétative » pour la Cour de cassation
861 • Si les chambres civiles de la Cour de cassation, quant à elles, ont, à l’origine, manifesté quelques réticences, une évolution inverse s’est progressivement mise en place. Le premier arrêt à avoir reconnu « l’autorité interprétative » des arrêts du juge européen l’a été bien avant ceux du Conseil d’Etat puisqu’il date de 1984 (Cass., 1ère civ., 10 janvier 1984, Renneman, n° de pourvoi : 82-16.968, JCP 1984, G, II, n°20210, concl. Gulphe, également à propos de la procédure disciplinaire des avocats), l’arrêt se référant expressément à la jurisprudence européenne (CourEDH, 23 juin 1981, Le Compte, Van Leuven et de Meyere contre Belgique, req. n°6878/75 et n°7238/75). De nombreux arrêts ont tenu compte, par la suite, des solutions préconisées par le juge européen, notamment en droit processuel, sans forcément avoir une logique commune. Certains ne laissent rien transparaitre d’une réaction à une condamnation de la France (Cf. le revirement opéré par le juge judiciaire en matière de transsexualisme : Cass., Ass. Plén., 11 décembre 1992, n° de pourvoi : 91-11.900, JCP 1993, G, II, n°21991, concl. M. Jehol et note G. Mémeteau ; celui-ci ne fait pas référence à la condamnation de la France par le juge européen : CourEDH, 25 mars 1992, B. contre France, req. n°13343/8), d’autres se réfèrent par une formule vague à la jurisprudence européenne, l’interprétation résultant de la « jurisprudence de la CourEDH » ou de l’évocation de la « ConvEDH telle qu’interprétée par la CourEDH » (Cass., soc., 14 janvier 1999, req. n°97-12.487, D. 1999, p. 334, note J.-P. Marguénaud et J. Mouly, JCP 1999, G, II, n°10082, note F. Sudre). Il faut attendre une décision de 2007 pour que la chambre sociale mentionne très précisément un arrêt de condamnation de la France qui plus est non pas dans les motifs de l’arrêt mais en l’élevant au rang de visa (Cass., soc., 13 juin 2007, APAEI du bocage Virois et de la Suisse Normande, n° de pourvoi : 05.45.694, D. 2007, p. 2439, note C. Pérès, RTDC 2007, p. 536, note P. Deumier ; voir aussi Cass., com., 12 juillet 2004, req. n°01-11.403, Bull. civ. IV, n°153). Enfin, c’est par deux arrêts de rejet et un arrêt de cassation partielle relatifs à la garde à vue que la Cour de cassation reconnait à partir des arrêts « Salduz » et « Dayanan », rendus l’un et l’autre contre la Turquie (CourEDH, 27 novembre 2008, Salduz contre Turquie, req. n°36391/02 et CourEDH, 13 octobre 2009, Dayanan contre Turquie, req. n°7377/03) l’autorité interprétative de la CourEDH (Cass., Ass. Plén., 15 avril 2011, n° de pourvoi : 10-17.049, 10-30.313 et 10-30.316, RTDC 2011, note J.-P. Marguénaud, RSC 2011, p. 410, obs. A. Giudicelli, D. 2011, p. 1713, obs. V. Bernaud et L. Gay).
→ L’intégration progressive d’un nouvel Etat de droit et la mise en cohérence de l’ordre juridique par les juges ordinaires
862 • En prenant en compte l’interprétation de la CourEDH, le juge ordinaire assure la mise en cohérence de l’ordre juridique en supprimant toute contradiction entre les normes internes et les garanties de la ConvEDH. Il y a, en effet, des situations appelant en droit interne, au regard du texte européen, des qualifications juridiques variées. Ces dernières sont gommées par une application des garanties de la ConvEDH selon les principes d’application et les méthodes d’interprétation fixés par la jurisprudence européenne, le juge ordinaire s’appropriant les concepts ou les catégories juridiques issues de ces décisions.
L’applicabilité contentieuse du droit au procès équitable (article 6-1 ConvEDH) : le champ pénal
863 • C’est l’appropriation par les juges internes des notions de « matière pénale » et de « contestations sur des droits et obligations de caractère civil », telles qu’interprétées par le juge européen, qui a permis d’établir des standards processuels communs. Le Conseil d’Etat a ainsi considéré que relevaient du champ pénal de l’article 6-1 ConvEDH les pénalités fiscales (CE, avis, Section, 31 mars 1995, Ministre du budget contre Auto-Industrie Méric, req. n°164008, Rec. CE, p. 154,RJF 1995, 5, p. 326 concl. J. Arrighi de Casanova), la Cour de discipline budgétaire et financière lorsqu’elle prononce des amendes (CE, 30 octobre 1998, Lorenzi, req. n°159444, Rec. CE, p. 374), la Cour des comptes ou les chambres régionales des comptes lorsqu’elles sont saisies d’agissements pouvant donner lieu aux amendes pour gestion de fait (CE, 16 novembre 1998, Sarl Deltana et Perrin, req. n°172820, Rec. CE, p. 415), l’Office des migrations internationales (CE, Section, 28 juillet 1999, GIE Mumm-Perriet-Jouet, req. n°188973, Rec. CE, p. 257,AJDA 1999, p. 783, chron. P. Fombeur et M. Guyomar), les sanctions pécuniaires prononcées par la Commission bancaire (CE, 29 novembre 1999, Société Rivoli Exchange, req. n°194721, Rec. CE, p. 366), le Conseil des marchés financiers (CE, Ass., 3 décembre 1999, Didier, req. n°207434, Rec. CE, p. 399, RFDA 2000, p. 584, concl. A. Seban) le Conseil de discipline des OPCVM (CE, 16 juin 1999, M. Letertre, req. n°171465, Rec. CE, tables, p. 651), s’agissant du ou encore le Conseil de la discipline de la gestion financière (CE, 31 mars 2004, Société Etna Finance et Parent, req. n°243579, Rec. CE, tables, p. 33) et, pour terminer, par la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (CE, 4 février 2005, Société GSD gestions et M. G., req. n°269001). L’ancienne Commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance (CCAMIP) doit être regardée également comme décidant du bien-fondé d’accusations en matière pénale (CE 30 mars 2007, Société Prédica, req. no 277991, AJDA 2007, p. 720, obs. Aubert ). Quant au retrait de points du permis de conduire, le Conseil a adopté la même solution que la Cour dans son arrêt Malige contre France (CourEDH, 23 septembre 1998, Malige contre France, req. n°68/1997/852/1059) près d’un an après (CE, avis contentieux, 27 septembre 1999, Rouxel, req. n°208242, Rec. CE, p. 280).
L’applicabilité contentieuse du droit au procès équitable (article 6-1 ConvEDH) : le champ civil (1)
864 • Les juges ordinaires nationaux ont aussi considéré que relevaient du champ civil de l’article 6-1 ConvEDH le fonctionnement des juridictions disciplinaires ordinales (CE, Ass., 14 février 1996, Maubleu, req. n°132369, Rec. CE, p. 34, concl. Sanson, AJDA 996, p. 358, note J.-H. Stahl et D. Chauvaux, RFDA 1996, p. 1186, concl. Sanson et CE, 30 décembre 1996, L’Hermitte, RTDH 1998, p. 365, note J. Andriantsimbazovina à la suite de l’arrêt CourEDH, 26 septembre 1995, Diennet contre France, req. n°25/1994/472/553). Le Conseil d’Etat a confirmé sa jurisprudence « Maubleu » pour les chirurgiens-dentistes (CE, 26 juillet 1996, M. Pierre Pandit, req. n°143106), les experts comptables et comptables agréés (CE, 3 février 1999, M. X., req. n°161541), les conseils en propriété intellectuelle (CE, 17 mai 1999, M. Jacques-Louis Chereau, req. n°180537) les géomètres experts (CE, 28 juillet 1999, M. Le Goff, req. n°165523), les usagers des établissements publics d’enseignement supérieur (CE, 3 novembre 1999, M. Ralph Zurmely, req. n°203748, RFDA 2000, p. 1079, concl. Roul), les médecins (CE, 3 décembre 1999, Leriche, req. n°195512), les personnels enseignants et hospitaliers des CHU (CE, 23 février 2000, L’Hermite, req. n°192480, JCP 2000, G, II, note C. Moniolle), les architectes (CE, 20 mars 2000, M. Touchet, req. n°198085) les magistrats de l’ordre judiciaire à propos de la procédure devant le Conseil supérieur de la magistrature (CE, 12 décembre 2007, M. A., req. n°293301, LPA 2008, 29 avril, concl. Guyomar, AJDA 2008, p. 932, note E. Tsalpatouros appliquant le nouveau critère d’applicabilité retenu par l’arrêt CourEDH, GC, 19 avril 2007, Vilho Eskelinen et autres contre Finlande, req. n°63235/00) ou encore les enseignants-chercheurs universitaires (CE, 20 mars 2009, M. Gilles G. contre le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) statuant en matière disciplinaire, req.n°320837, AJDA 2009, p. 1212, note O. Dord). Cette jurisprudence s’applique à l’ensemble des instances disciplinaires des professions de santé (pharmaciens, sages-femmes, infirmiers et infirmières), aux sections des assurances sociales de ces mêmes conseils de discipline, au contentieux disciplinaire de la fonction publique (CE, 13 novembre 2013, Dahan, req. n°347704, AJDA 2013, p. 2432, chron. A. Bretonneau et J. Lessi, D. 2013, p. 2699, obs. M.-C. de Monteclerc, RFDA 2013, p. 1175, concl. Keller) ainsi qu’à celui dépendant de la Cour de cassation (par exemple, le contentieux disciplinaire des experts près les tribunaux : Cass., 1ère civ., 7 avril 1999, n° de pourvoi : 96-13.332, Bull. civ. I, n°122).
L’applicabilité contentieuse du droit au procès équitable (article 6-1 ConvEDH) : le champ civil (2)
865 • Le juge administratif applique également cette jurisprudence aux procédures disciplinaires menées en milieu carcéral, des mesures de surveillances élevées ou des placements en cellule de sécurité entrainant des restrictions aux contacts avec les familles et ayant une retombée patrimoniale justifiant ainsi le lien avec le volet civil de l’article 6 (CE, 11 juillet 2012, Section française de l’observatoire international des prisons, req. n°347146). C’est le cas aussi pour la Cour nationale de l’incapacité et de la tarification de l’assurance des accidents du travail (CNITAAT) (Cass., Ass. Plén., 22 décembre 2000, n° de pourvoi : 99-11.303, 99-11.615, 98-19.376, 98-15.567, 98-21.238, Bull. civ, Ass. Plén., n°12 ; Voir, D. Roman, « Le contentieux technique de la Sécurité sociale à l’épreuve du procès équitable », Droit social 2001, p. 734), les commissions départementales de travailleurs handicapés, des mutilés de guerre et assimilés (CE, 6 décembre 2002, Aïn-Lhout, req. n°221319, AJDA 2003, p. 492, chron. F. Donnat et D. Casas), les juridictions financières lorsqu’elles interviennent dans le cadre du volet civil (à la suite des arrêts CourEDH, 7 octobre 2003, Mme Richard-Dubarry contre France, req ; n°53929/00 et CourEDH, 13 janvier 2004, Martinie contre France, req. n°58675/00), l’intégralité de la procédure de gestion de fait étant désormais soumise aux règles du procès équitable d’une part (CE 30 décembre 2003, M. Beausoleil et Mme Richard-Dubarry, req. n°251120, RFDA 2004, p. 365, concl. Guyomar et note Coutant, AJDA 2004, p. 1301, note F. Rolin) ainsi que la procédure de jugement des comptes des comptables publics « dès lors qu’est en cause la mise en débet du comptable » d’autre part (CE, 30 mai 2007, Garnier, req. n°270410).
L’applicabilité contentieuse du droit au procès équitable (article 6-1 ConvEDH) : la mixité du champ pénal et civil à travers le cas des réductions de peine
866 • Le Conseil d’Etat s’est prononcé en faveur de l’applicabilité des garanties du procès équitable, à la fois à travers le champ pénal comme du champ civil, à propos des décisions du juge de l’application des peines (JAP) en matière de retrait de réduction de peine (CE, 24 octobre 2014, M. A.B. contre 1er Ministre, req. n° 368580, AJDA 2015, p. 1374, note J. Falxa, AJ pénal 2015, p. 39, note J.-P. Céré et CE, 18 février 2015, M. B. contre 1er Ministre, req. n°375765, D. 2015, p. 1122, obs. J.-P. Céré, M. Herzog-Evans et E. Péchillon, AJ pénal 2015, p. 195, note M. Herzog-Evans et E. Péchillon). Les réductions de peine agrègent un contentieux particulièrement important, qui s’est développé devant l’ensemble des juridictions nationales et devant la CourEDH. La Commission européenne avait déjà constaté en 1986 qu’une infraction disciplinaire qui constituait également un délit impliquait que l’infraction en question devait recevoir une double qualification, à la fois disciplinaire et pénale (ComEDH, 10 octobre 1986, Pelle contre France, req. no 11691/85). Cette nature « mixte » a été confirmée depuis par la CourEDH à de nombreuses reprises (CourEDH, 28 juin 1984, Campbell et Fell contre Royaume-Uni, série A, n°80, req. n°7819/77 ; CourEDH, 9 octobre 2003, Ezeh et Connors contre Royaume-Uni, req. n°39665/98 ; CourEDH, GC, 21 octobre 2013, Del Rio Prada contre Espagne, req. n° 42750/09) y compris vis-à-vis de la France (CourEDH, 20 janvier 2011, Payet contre France, req. n°19606/08). La chambre criminelle de la Cour de cassation, à la suite du Conseil d’Etat, a également admis, même si implicitement, l’applicabilité des garanties de l’article 6-1 ConvEDH et la nécessité de la prise en compte de l’article 13 ConvEDH sans en tirer néanmoins toutes les conséquences (Cass., crim., 15 avril 2015, no de pourvoi : 14-80.417, AJ pénal 2015, p. 444, obs. J. Falxa).
Une définition extensive de la notion de « tribunal » au sens de l’article 6-1 ConvEDH
867 • Bien que les autorités de régulation ne soient pas considérées comme des juridictions en droit interne, le juge administratif considère, en application de la jurisprudence européenne, que les sanctions qu’elles prononcent constituent des décisions sur le bien-fondé d’accusations en matière pénale au sens de l’article 6-1 ConvEDH. Par la même, un organisme administratif, tel qu’une autorité de régulation, peut, « eu égard à sa nature, à sa composition et à ses attributions […] être qualifiée de tribunal au sens de l’article 6-1 […] » (CE, 20 novembre 2000, Société Habib Bank Limited, req. no180122, AJDA 2000, p. 1001, chron. M. Guyomar et P. Collin et p. 1072, note P. Subra de Bieuses). Le Conseil d’Etat a initié cette logique extensive de la notion de « tribunal » en conférant cette qualité à l’ancien Conseil des marchés financiers (CE, Ass., 3 décembre 1999, Didier, req. n°207434, AJDA 2000, p. 126, chron. M. Guyomar et P. Collin, D. 2000, p. 62, obs. M. Boizard, RFDA 2000, p. 584, concl. A. Seban, JCP 2000, G, II, n°10267, note F. Sudre), à l’Autorité de régulation des télécommunications (devenue Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, CE, 28 juillet 2000, Société Copper Communication, req. n°199773), à la Commission bancaire (devenue Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, CE, 20 novembre 2000, Société Habib Bank Limited précité), à la Commission de contrôle des assurances, mutuelles et des institutions de prévoyance (devenue aussi Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, CE, 28 octobre 2002, Laurent, req. n°222188, AJDA 2002, p. 1492, note D. Costa), à l’Autorité des marchés financiers (CE, 4 février 2005, Société GSD Gestion, req. n°269001, D. 2005, jurisp., p. 717, note A. Liniard, LPA 2005, n°82, p. 5, concl. M. Guyomar) au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CE, 6 janvier 2006, Société Lebanese Communication Group, req. n°279596, Rec. CE, p. 1). La Cour de cassation, de son côté, avait fait de même concernant l’ancienne Commission des opérations de bourse (Cass, Ass. Plén., 5 février 1999, Commission des opérations de Bourse contre Oury, n° de pourvoi : 97-16.440 et 97-16.441, Bull. civ., Ass. Plén., no1) et l’ancien Conseil de la concurrence (Cass., com., 5 octobre 1999, Campenon-Bernard, D. 1999, jurisp., p. 44, obs. A.M., JCP 2000, G, II, n°10255, note E. Cadou). Les dispositions de l’article 6-1 ConvEDH ne peuvent être invoquées qu’à l’encontre des mesures de sanction décidées par les autorités de régulation. Elles ne peuvent pas, en revanche, être invoquées à l’appui d’un recours contre des décisions qui ne sont pas relatives au bien-fondé d’accusations en matière pénale. La formation restreinte de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), lorsqu’elle est saisie d’agissements pouvant donner lieu à sanction, doit être regardée comme décidant du bien-fondé d’accusations en matière pénale (CE, 12 mars 2014, Société Pages Jaunes Groupe, req. no353193). Mais une mise en demeure du CSA n’a pas le caractère d’une accusation en matière pénale (CE, 11 décembre 2006, Société Vortex, req. no281617). Il en va de même de la décision par laquelle la CNIL adresse un avertissement à une personne (CE, Ass., 3 décembre 1999, Caisse de crédit mutuel de Bain-Tresbœuf, req. no 197060).
L’interprétation extensive de la notion de « bien » au sens de l’article 1er du 1er protocole additionnel à la ConvEDH : la notion d’espérance légitime (1)
868 • L’applicabilité de l’article 1er du 1er protocole additionnel à la ConvEDH consacrant le droit de propriété a été élargi progressivement par la CourEDH dans les années 1990 (par ex., CourEDH, 29 novembre 1991, Pine Valley Developments LTD et autres contre Irlande, req. n°12742/87 ; CourEDH, 20 novembre 1995, Pressos Compania Naviera S.A. et autres contre Belgique, req. n°17849/91), pour inclure les prestations sociales, les droits à pension, le bénéfice d’une jurisprudence bien établie et pour protéger jusqu’à « l’espérance légitime » du justiciable à recouvrir une créance qu’il pense concrète et exigible (CourEDH, 28 septembre 2004, Kopecky contre Slovaquie, req. n°44912/98, §49). Pour ce faire et utiliser ainsi cette notion, le juge européen a évincé de sa jurisprudence les concepts juridiquement voisins de « sécurité juridique » ou de « confiance légitime ». Les juges français n’ont pas opté pour une référence terminologique exclusive à la notion « d’espérance légitime » mais privilégient une appréhension sémantique généralement plus vague, celle « d’attente légitime » (voir, en ce sens, C. Blanc-Fily, « La notion conventionnelle d’espérance légitime : convergences et divergences entre appréhensions prétoriennes nationale et européenne », RFDA 2015, p.527) et elles se limitent à utiliser cette notion dans le seul cadre du droit de propriété de l’article 1er du 1erprotocole additionnel à la ConvEDH. Il en est ainsi dans les affaires liées notamment à la rétroactivité de la loi dite « anti-Perruche » (Cass., 1ère civ., 15 décembre 2011, n° de pourvoi : 10-27.473, D. 2012, p. 323, obs. I. Gallmeister, note D. Vigneau, RFDA 2012, p. 364, avis P. Chevalier, RTDCiv. 2012, p. 75, obs. P. Deumier ; CE, Ass., 13 mai 2011, Mme L. et Mme D. et M. V., req. n°329290 et n°317808, AJDA 2011, obs. S. Brondel et p. 1136, chron. X. Domino et A. Bretonneau ; CourEDH, 6 octobre 2005, Maurice et Draon contre France, req. n°11810/03 et n°1513/03 ; CE, 24 février 2006, M. et Mme L., req. n°250704 ; Cass., 1ère civ., 24 janvier 2006, n° de pourvoi : 01-16.684 et 01-17.042 (1er arrêt), no de pourvoi : 02-12.260 (2nd arrêt) et n° de pourvoi : 02-13.775 (3ème arrêt)), aux privations de biens par les autorités publiques (par ex., Cass., soc., 21 mars 2012, n° de pourvoi : 04-47.532) à des dispositifs fiscaux qui peuvent aussi créer une espérance légitime (CE, 9 mai 2012, Ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique contre société Epi, req. n°308996, AJDA 2012, p. 1392, chron. X. Domino et J. Bretonneau) ou encore dans le cadre de la responsabilité médicale (en ce qui concerne le caractère définitivement acquis de sommes versées à une victime d’une faute médicale, sur le fondement d’une règle jurisprudentielle qui n’est plus en vigueur : CE, 22 octobre 2014, Centre hospitalier de Dinan, req. n°368904).
L’interprétation extensive de la notion de « bien » au sens de l’article 1er du 1er protocole additionnel à la ConvEDH : la notion d’espérance légitime (2)
869 • Contrairement au juge européen, les juridictions internes ne vont pas au-delà du champ d’application du droit de propriété. La notion n’est ainsi pas applicable dans les affaires relatives au droit à l’image (Cass., 1ère civ., 27 février 2007, n° de pourvoi : 06-10.393 à propos de la diffusion de clichés privés du Prince Albert de Monaco avec un enfant et Cass., 1ère civ., 13 mai 2014, n° de pourvoi : 13-15.819 en sens contraire de CourEDH, GC, 7 février 2012, Von Hannovercontre Allemagne (n° 2), req. n°40660/08 et n°60641/08, § 97), sur le terrain du droit à un procès équitable (en sens contraire de CourEDH, 9 novembre 2006, req. n°65411/01, Sacilor Lormines contre France, § 60) ou sur le terrain du droit des étrangers (CourEDH, 28 mai 2009, Bigaeva contre Grèce, req. n°26713/05, § 32 et §35). Le Conseil d’Etat reprend aujourd’hui explicitement le concept d’espérance légitime ce qui témoigne d’un net rapprochement avec la jurisprudence européenne (CE, 19 novembre 2008, req. n°292948, Société Getecom, Rec. CE, p. 425, AJDA 2008, p. 2205, obs. E. Royer) et le juge fait preuve d’une certaine continuité (CE, 23 juin 2014, Ministre du budget contre SAS Eurovia Basse-Normandie, req. n° 370101 concernant le remboursement de sommes concernant la taxe professionnelle d’une société). La Cour de cassation est cependant restée longtemps en retrait par rapport à la jurisprudence du Conseil d’Etat (Voir, par ex., Cass., 1ère civ., 20 juin 2000, n° de pourvoi : 97-22.394, D. 2000, p. 699, note M.-L. Niboyet, RFDA 2000, p. 1189, concl. J. Sainte-Rose, RTDCiv. 2000, p. 670, obs. N. Molfessis ; Cass., 1ère civ., 13 novembre 2002, n° de pourvoi : 00-11.415, RDI 2003, p. 254, obs. H. Heugas-Darraspen) avant de changer quelque peu d’attitude (par ex., Cass., soc., 24 novembre 2010, n° de pourvoi : 08-44.181, D. 2010, p. 2914, obs. L. Perrin ; Cass., soc., 21 mars 2012, n° de pourvoi : 04-47.532).
L’applicabilité extensive du droit au respect de la vie familiale (article 8 ConvEDH) (1)
870 • Le contenu largement indéterminé de l’article 8 ConvEDH a amené le juge européen à réaliser entièrement une jurisprudence très constructive sur le droit au respect de la vie familiale. Il n’y a jamais eu de définition claire, le juge européen voulant « coller » au mieux aux changements sociaux et à l’évolution des mœurs. En ce sens, la CourEDH s’est voulue indifférente à l’égard des liens juridiques unissant les membres de la famille, l’application de l’article 8 ConvEDH concernant tout aussi bien les familles légitimes que les familles naturelles (CourEDH, 13 juin 1979, Marckx contre Belgique, req. n°6833/74), peu importe l’existence d’une relation adultérine, d’un divorce, d’une différence de nationalité, d’enfants issus de parents adoptifs ou d’une famille d’accueil, peu importe le degré de parenté, le sexe ou l’absence de cohabitation. Par contre, lorsque la cellule familiale comprend des enfants, le maintien de l’unité de la famille et le droit au regroupement familial constitue un élément indispensable au respect de l’article 8 ConvEDH (CourEDH, 21 juin 1988, Berrehab contre Pays-Bas, série A, n°138, req. n° 10730/84 ; CourEDH, 18 février 1991, Moustaquim contre Belgique, série A, no 193, req. n°12313/86 ; CourEDH, 26 mars 1992, Beldjoudi contre France, série A, no 234-A, req. n°12083/86). Les autorités nationales doivent faire primer l’intérêt supérieur des enfants, peu importe les circonstances (CourEDH, 10 juillet 2014, Tanda-Muzinga contre France, req. no 2260/10, Mugenzi contre France, req. no 52701/09, Senigo Longue et autres contre France, req. no 19113/09 où le juge européen reconnait la violation de l’article 8 ConvEDH par rapport au refus des autorités consulaires de délivrer des visas aux enfants des requérants en raison de difficultés à établir l’état civil de ces derniers).
L’applicabilité extensive du droit au respect de la vie familiale (article 8 ConvEDH) (2)
871 • Le Conseil d’Etat a jugé, dès 1978, que les étrangers résidant régulièrement en France avaient, comme les nationaux, le droit de mener une vie privée et familiale normale et la faculté de faire venir auprès d’eux leur conjoint et leurs enfants mineurs (CE, Ass., 8 décembre 1978, GISTI, req. n°10097, Rec. CE, p. 493, D. 1979, p. 94, obs. P. Delvolvé et p. 661, note L. Hamon, AJDA 1979, p. 38, obs. Y. Robineau et p. 54, obs. O. Dutheillet de Lamothe, Droit social 1979, p. 57, concl. P. Dondoux). Cette jurisprudence a ensuite été appliquée au contentieux de l’éloignement forcé du territoire (par ex., CE, Ass., 19 avril 1991, Belgacem et Mme Babas, req. n°107470 et n°117680, Rec. CE, p. 152 et p. 280, concl. R. Abraham, AJDA 1991, p. 551, note F. Julien-Laferrière, D. 1991, p. 399, note X. Prétot, RFDA 1991, p. 497, concl. R. Abraham ; CE 28 déc. 2009, Mme B., req. no 308231) ou au contentieux pour l’obtention de visa (CE 4 mars 2010, Mme S. et Mlle B., req. no 336700). À noter que pour la question de l’éloignement forcé des étrangers, le juge européen a revu sa position sur l’éloignement des « malades » étrangers. Il considérait, traditionnellement, que le renvoi d’un étranger gravement malade dans son pays n’était pas constitutif d’un traitement inhumain ou dégradant contraire à l’article 3 ConvEDH, les mesures d’éloignement ne relevant du caractère « inhumain et dégradant » qu’en cas de risque réel de mourir et de circonstances très exceptionnelles. Le risque de décéder à brève échéance une fois arrivé dans son pays d’origine ou de réduction significative de l’espérance de vie n’était pas considéré comme constitutif d’une violation (CourEDH, 2 mai 1997, D. contre Royaume-Uni, req. n°30240/96 ; CourEDH, 27 mai 2008, N. contre Royaume-Uni, no 26565/05 ; CourEDH, 12 novembre 2015, G. S. contre France, req. n°39747/15). Après de multiples tergiversations et de virulentes critiques doctrinales, la Cour a assoupli sa position en considérant qu’il y avait risque de violation de l’article 3 ConvEDH en cas de « réduction significative de l’espérance de vie » ou de « souffrances intenses » dues au défaut de soins (CourEDH, GC, 13 décembre 2016, Paposhvili contre Belgique, req. n°41738/10). Le Conseil d’Etat avait déjà pu réaffirmer la protection contre l’éloignement et le droit au séjour des étrangers malades résidant en France n’ayant pas un accès effectif aux soins dans leur pays d’origine (CE, Sect., 7 avril 2010, Ministre de l’Intérieur contre Jabnoun, req. n°301640, Ministre de l’Immigration contre Mme Diallo épouse Bialy, req. n°31662).
L’applicabilité extensive du droit au respect de la vie familiale (article 8 ConvEDH) (3)
872 • Parmi les points qui fâchent dans le cadre de l’application de l’article 8 ConvEDH, figure, en bonne place, la lutte contre les discriminations pouvant frapper les membres de la famille. Le juge européen a cherché, petit à petit, à faire disparaitre les différences de traitement non justifiées frappant les enfants, les parents, voire même les partenaires des couples. En utilisant les articles 8 et 14 ConvEDH (interdiction de discrimination), la CourEDH s’est d’abord attachée à lutter contre les discriminations liées au statut juridique des membres de la famille. C’est l’égalité successorale des enfants qui est d’abord consacrée quelle que soit la nature de leur filiation (CourEDH, 13 juin 1979, Marckx contre Belgique précité). La différence de traitement entre enfants adultérins et enfants légitimes étant discriminatoire (CourEDH, 1er février 2000, Mazurek contre France, req. n°34406/97 et CourEDH, GC, 7 février 2013, Fabris contre France, req. n°16574/08). Il a fallu attendre longtemps et une ordonnance du 4 juillet 2005 (Ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation, JO, 6 juillet 2005, p. 11159) pour que la Cour de cassation modifie sa jurisprudence au visa des articles 8 et 14 ConvEDH (Cass., 1reciv., 14 février 2006, n° de pourvoi : 05-13.006 ; Cass., 1reciv., 25 avril 2006, n° de pourvoi : n°04-19.341 ; Cass., 1reciv., 13 mars 2007, n° de pourvoi : 06-16.675).
L’applicabilité extensive du droit au respect de la vie familiale (article 8 ConvEDH) (4)
873 • Les juges se sont ensuite attaché à lutter contre les discriminations liées au sexe. La lutte ayant permis de faire évoluer la perception des couples et des familles homosexuels en les banalisant et en alignant leurs droits sur ceux de leurs homologues hétérosexuels. Dans un arrêt du 13 mars 2007 (Cass., 1reciv., 13 mars 2007, n° pourvoi : 05-16.627, Bull. civ. 2007, I, n°113,) la première chambre civile, statuant en formation plénière, s’est prononcée, par un arrêt de principe, sur la régularité d’un mariage entre personnes de même sexe, en donnant une définition du mariage en droit positif, définition qui ne figure pas dans le code civil. Si le juge européen ne s’est jamais prononcé sur la question du mariage entre personnes homosexuelles, il a rendu un certain nombre de décisions concernant les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle au regard des articles 8 et 14 ConvEDH (CourEDH, 11 juillet 2002, Christine Goodwin contre Royaume-Uni, req. n°28957/95 dans lequel la Cour reconnaît le droit à une identité sexuelle ainsi que le droit de se marier pour les transsexuels ; CourEDH, 21 décembre 1999, Salgueiro Da Silva Mouta contre Portugal, req. n°33290/96 où condamnation du refus d’une autorité parentale en raison de l’orientation sexuelle d’un parent, puis après l’arrêt rendu par la Cour de cassation, CourEDH, GC, 22 janvier 2008, E. B. contre France, req. n°43546/02 qui juge qu’un rejet de demande d’agrément en vue d’adopter ne peut être fondé sur la seule orientation sexuelle du demandeur ou encore CourEDH, 19 février 2013, X. et autres contre Autriche, req. n°19010/07, § 151 qui juge que l’exclusion non justifiée des couples homosexuels des procédures d’adoption constitue une discrimination).
→ L’évolution des missions des juges internes : un rapprochement vers l’Etat de droit à travers une protection accrue de l’individu face aux pouvoirs publics
874 • L’appropriation de la ConvEDH par les juges internes français a d’abord eu une incidence sur le plan du travail juridictionnel et de la procédure contentieuse. Il y a eu, à ce sujet, des critiques particulièrement vives à l’encontre du juge européen et de sa doctrine allant jusqu’à faire craindre une déstabilisation entière de notre système juridique. Cela n’a pas été le cas. D’abord parce que tout ce qui fait la tradition du fonctionnement de nos juridictions, notamment celle de la juridiction administrative, a finalement été regardé, par le juge européen, comme participant pleinement à la qualité de la justice rendue. Mais aussi, ensuite, parce que les juges ont pris le parti de ne pas résister aux évolutions induites par l’application du texte européen et de véritablement dialoguer avec la CourEDH. Les changements intervenus dans la procédure juridictionnelle et dans l’organisation des juridictions, sous l’effet de la ConvEDH, peuvent être regardés comme ayant eu un caractère positif tout en replaçant encore davantage le justiciable au cœur des préoccupations.
Les changements concernant l’organisation et le fonctionnement des juridictions internes : la généralisation des principes du procès équitable (1)
875 • Les juges français se sont aujourd’hui largement alignés sur la jurisprudence européenne concernant les garanties afférentes au procès équitable. Cela n’a pas conduit à une remise en cause structurelle, mais plutôt à des aménagements des méthodes de travail et d’examen des dossiers. C’est d’abord le cas pour la Cour de cassation même si c’est à un degré moindre par rapport au Conseil d’Etat. Par exemple, le rôle et les prérogatives procédurales traditionnelles du parquet général avaient été mises en question par le juge européen à l’occasion de l’examen de la conformité de la procédure du pourvoi en cassation aux exigences du procès équitable (CourEDH, 31 mars 1998, Reinhardt et Slimane-Kaïd contre France, req. n°23043 et n°22921/93). La Cour avait jugé que le défaut de communication au requérant, avant l’audience, du rapport du conseiller rapporteur dans des conditions identiques à l’avocat général ne s’accordait pas avec les exigences du procès équitable. La Cour de cassation a depuis modifié les modalités d’instruction et de jugement de ses affaires. Sont désormais connus des parties le rapport examinant les points de droit faisant difficulté à juger et l’avis de l’avocat général, l’avis du rapporteur et les projets d’arrêt étant quant à eux couverts par le secret du délibéré, délibéré auquel n’assiste pas l’avocat général. Le juge européen ayant, au surplus, admis la conventionnalité du dispositif (CourEDH, 23 mai 2006, Marion contre France, req. n°43751/02 ; Cf. V. Lamanda, « L’influence de la ConvEDH sur l’organisation et le fonctionnement de la Cour de cassation », www.courdecassation.fr). Les remises en cause ont été plus perceptibles concernant le Conseil d’Etat. On peut, à cet égard, signaler certains exemples significatifs sans forcément être exhaustif.
Les changements concernant l’organisation et le fonctionnement des juridictions internes : la généralisation des principes du procès équitable (2)
876 • Ainsi la jurisprudence européenne relative à l’accès au juge (CourEDH, 28 octobre 1999, Zielinski, Pradal et Gonzales contre France, req. n°24846/94) à amener à resserrer le contrôle des juges sur les lois de validation (CE, 28 juillet 2000, M. Tête et association du collectif pour la gratuité contre le racket, req. n°202798). Par les arrêts Procola, Kleyn et Sacilor-Lormines, (CourEDH, 28 septembre 1995, Procola contre Luxembourg, req. n°14570/89 ; CourEDH, GC, 6 mai 2003, Kleyn et autres contre Pays-Bas, req. n°39343/98, n°39651/98, n°43147/98 et n°46664/99 ; CourEDH, 9 novembre 2006, Sacilor-Lormines contre France, req. n°65411/01), le juge européen a remis en cause l’impartialité subjective ou personnelle des membres de la juridiction. Il y avait, en effet, une contradiction avec le respect de la règle visant, en toutes circonstances, à ce qu’une même personne ne puisse successivement être désigné conseiller et juge sur une même affaire. Les textes précisent désormais qu’aucun membre du Conseil d’Etat ne peut participer au jugement d’un recours dirigé contre un acte pris après avis du Conseil d’Etat, s’il a pris part à la délibération de cet avis (art. R.122-21-1 CJA tel qu’issu du décret n° 2008-225 du 6 mars 2008 (JO, 7 mars 2008, p. 4244) relatif à l’organisation et au fonctionnement du Conseil d’Etat). Pour veiller à ce que cette règle soit respectée, les parties peuvent solliciter la liste des personnes ayant participé à la délibération de l’avis du Conseil d’Etat sur le texte pendant au contentieux (art. R.122-21-2 CJA tel qu’issu du décret n° 2008-225 du 6 mars 2008 précité). De même, les membres d’une formation de jugement ne sont pas en mesure de consulter les dossiers des formations consultatives, ni avoir connaissance des avis éventuellement rendus par le Conseil d’Etat sur les actes attaqués devant lui (art. R. 122-21-3 CJA tel qu’issu du décret n° 2011-1950 du 23 décembre 2011(JO, 27 décembre 2011, p. 22294) modifiant le CJA). Au niveau de l’impartialité objective ou structurelle, le décret du 6 mars 2008 précité a permis de mettre en place une séparation plus claire entre les formations juridictionnelles et consultatives du Conseil d’Etat en modifiant la composition de ces formations de jugement et, en particulier, celle de l’Assemblée du contentieux (les représentants des sections administratives ne peuvent plus désormais siéger dans la formation ordinaire des 9 membres, ce sont les sous-sections réunies et la section du contentieux siégeant en formation de jugement ; les membres de l’assemblée du contentieux sont portés à 17 et le président de la section administrative, qui a eu à délibérer, ne siège plus même s’il n’a pas siégé le jour où l’affaire a été examinée par sa section administrative). Un décret du 7 janvier 2009 (Décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 (JO, 8 janvier 2009, p. 479) relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l’audience devant ces juridictions) a donné au commissaire du gouvernement la dénomination plus conforme à la réalité de ses fonctions de rapporteur public en même temps qu’il a modifié le déroulement de l’audience : informées avant celle-ci du sens des conclusions, les parties peuvent reprendre la parole après leur prononcé. Le juge européen a, par la suite, consacré la conformité de cette organisation au principe d’impartialité (CourEDH, 30 juin 2009, UFC Que choisir de Côte d’Or contre France, req. n°39699/03 ; CourEDH, 8 mars 2011, Philippe Escoffier contre France, req. n°8615/08 ; CourEDH, 4 juin 2013, Marc-Antoine contre France, req. n°54984/09).
Les changements concernant l’organisation et le fonctionnement des juridictions internes : la généralisation des principes du procès équitable (3)
877 • Au niveau de la règle de la publicité des débats, le Conseil d’Etat, alors qu’il avait déclaré qu’elle constituait un principe général du droit devant les juridictions judiciaires (CE, Ass., 4 octobre 1974, Dame David, Rec. CE, p. 474, concl. M. Gentot ; à noter Cass., 1èreciv., 28 avril 1998, n° de pourvoi : 96-11.637, Bull. Civ I, n° 155, p. 102 où la règle est considéré comme une « règle d’ordre public » et « un principe général du droit » quand applicabilité article 6-1), ne l’appliquait pas aux juridictions administratives. Il s’est rallié à la position du juge européen (par ex., CourEDH, 26 septembre 2000, Guisset contre France, req. n°33933/96 pour la CDBF) et admet maintenant qu’elle s’applique dès que l’article 6-1 ConvEDH est applicable (par ex., CE, 30 octobre 1998, Lorenzi, req. n°149662 pour la CDBF ; CE, 3 novembre 1999, Ralph Zurmely, n°203748 pour les juridictions universitaires ou encore CE, 2 octobre 2006, Krikorian, req. n°282028 pour les litiges du travail concernant les avocats). Sur la règle du délai raisonnable, une condamnation du juge européen assez retentissante de l’Etat polonais du fait de la lenteur de ses procédures juridictionnelles (CourEDH, 26 octobre 2000, Kudla contre Pologne, req. n°30210/96), a amené un changement de perspective assez important sur la question. Un recours en responsabilité pour fonctionnement défectueux du service de la justice (art. 141-1 COJ) peut être tenté par le requérant en cas de durée excessive d’une procédure judiciaire. L’exercice de ce recours étant nécessaire au préalable sous peine d’irrecevabilité si volonté de poursuivre devant la CourEDH (CourEDH, 12 juin 2001, Giummarra contre France, req. n°61166/00). Le Conseil d’Etat accepte aussi, désormais, d’indemniser un préjudice lié à la lenteur de la justice administrative sur le fondement d’une faute simple (CE, Ass., 28 juin 2002, Magiera, req. n°239575 qui revient sur CE, Ass., 29 décembre 1978, Darmont, req. n°96004). Ce recours doit là encore être exercé au préalable avant la saisine du juge européen (CourEDH, 21 octobre 2003, Broca et Texier-Micault contre France, req. n°27928/02).
Le mouvement de subjectivisation du droit et la protection accrue de l’individu
878 • L’essor du contrôle de conventionnalité, en favorisant la diffusion des droits et principes protégés par la ConvEDH donc des droits subjectifs, a transformé le juge administratif, gardien de la légalité et des droits objectifs, en une véritable « juridiction des droits de l’homme » (R. Chapus, L’administration et son juge, Paris, PUF, 1999, p. 15). L’individu, plus encore qu’il ne l’était avant, se trouve placé au cœur des préoccupations du nouveau juge administratif. Comme peut le noter Timothée Paris, « la juridiction administrative avait depuis longtemps elle-même évolué dans le sens d’une prise en considération accrue de la présence et de l’intérêt des justiciables, la convention européenne des droits de l’homme ou même, plus particulièrement, la jurisprudence de la Cour européenne a largement contribué à accélérer ce processus, voire à le faire aboutir » (T. Paris « Le juge administratif français et la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : du droit international au droit interne ? », www.comitasgentium.com). Le droit européen a ainsi conduit à un rééquilibrage de la relation entre l’administré et la puissance publique. La ConvEDH a été conçu pour protéger l’individu contre l’Etat, pour faire primer les intérêts individuels sur l’intérêt général quitte à la réduire à son strict nécessaire. La logique autoritaire et inégalitaire de l’action administrative a ainsi pu être contredite dans beaucoup de secteurs (police des étrangers, fonction publique, établissements pénitentiaires, hôpitaux psychiatriques et internement d’office, droit disciplinaire, …). La protection des droits fondamentaux et, plus généralement, des droits des personnes, est ainsi placée au cœur de l’office du juge. Si le juge administratif s’est construit avec l’administration, il se perfectionne avec le droit européen en remplissant pleinement son office qui change ainsi de paradigme. Mais, il faut relever, comme Jean-Marc Sauvé, que « ce dernier n’a pas renoncé à son office historique de juge de la légalité objective. Il n’y a pas eu substitution, inversion ou abandon de rôle, mais complémentarité et enrichissement du rôle initial du juge. Au total, le juge administratif français a conservé ses acquis historiques, tout en sachant combler ses insuffisances » (J.-M. Sauvé, « Le juge administratif et les droits fondamentaux », AJDA 2016, p. 2420)
→ L’extension du contrôle de l’activité de l’administration par la création de nouveaux recours internes
879 • En érigeant les matières qui généralisent le champ d’application du procès équitable, à savoir la « matière civile » comme la « matière pénale », en notions autonomes (Voir pour les « droits et obligations de caractère civil » : CourEDH, 28 juin 1978, König contre Allemagne, req. n°6232/73 et pour le « bien fondé d’accusations en matière pénale » : CourEDH, 8 juin 1976, Engel contre Pays-Bas, req. n°5100/71), le juge européen a permis d’attirer progressivement dans le champ du procès équitable la quasi-totalité des contentieux nationaux : administratif, social, ordinal voire plus précisément le contentieux de sanctions administratives ou des sanctions fiscales. L’appropriation du texte européen a ainsi impliqué la création de nouveaux recours internes. Outre le fait, par exemple, que le juge administratif ait consacré la responsabilité du fait des lois contraires aux engagements internationaux de la France (CE, Ass., 8 février 2007, Gardedieu, req. n°279522, Rec. CE, p. 78), ce qui sert incontestablement l’effectivité de la ConvEDH, il existait jusqu’à une période récente des domaines de l’action administrative sur lesquels le juge n’exerçait aucun contrôle, les requêtes présentées devant lui étant déclarées irrecevables. Le premier domaine concerné est celui de la catégorie dite des « mesures d’ordre intérieur » correspondant à des situations particulières (prisons, écoles, armée, …) où le juge a longtemps estimé que l’autorité administrative devait disposer d’une marge de manœuvre étendue alors que ces mesures étaient attentatoires aux droits fondamentaux. Le second domaine concerné même si l’évolution est moins perceptible est celui des « actes de gouvernement », domaine toujours bien présent mais dont les atteintes sont, sous l’influence indirecte du texte européen, de plus en plus marquantes. Le dernier domaine concerné est celui des actes de « droit souple », à savoir les avis ou recommandations exerçant une influence significative sur les comportements des personnes ou ayant des effets économiques notables. C’est un nouveau et récent terrain de conquête du juge administratif qui ne découle pas directement de la jurisprudence européenne mais dans l’essor s’inscrit dans la logique et les principes développés par le juge européen.
La réduction progressive de la catégorie des « mesures d’ordre intérieur »
880 • Ces mesures d’ordre intérieurs (MEI) connaissent trois domaines de prédilection : l’armée, la prison, les établissements d’enseignement. C’est indiscutablement sous l’influence de la CourEDH que la jurisprudence du Conseil d’Etat a évolué en faisant très largement reculer la notion de MEI (Voir notamment CourEDH, 21 février 1975, Golder contre Royaume-Uni, req. n°4451/70 et CourEDH, 28 juin 1984, Campbell contre Royaume-Uni, req. n°7819/77 et n°7878/77). C’est d’abord le règlement intérieur d’un établissement scolaire qui a été jugé comme ne relevant plus de la catégorie (CE, 2 novembre 1992, Kherouaa, req. n°130394, Rec. CE, p. 389, AJDA 1992, p. 788, chron. C. Maugüé et R. Schwartz, D. 1993, p. 108, note G. Koubi, RFDA 1993, p. 112, concl. D. Kessler), puis les sanctions prises contre des militaires (CE, Ass., 17 février 1995, Hardoin, req. n°107766, Rec. CE, p. 82, AJDA 1995, p. 379, chron. L. Touvet et J.-H. Stahl, D. 1995, p. 381, note N. Belloubet-Frier, RFDA 1995, p. 353, concl. P. Frydman à propos d’une mise à pied de dix jours) ou les détenus (CE, Ass., 17 févr. 1995, Marie, req. n° 97754, Rec. CE, p. 85, concl. P. Frydman, AJDA 1995, p. 379, chron. L. Touvet et J.-H. Stahl, D. 1995, p. 381, note N. Belloubet-Frier, RFDA 1995, p. 353, concl. P. Frydman, p. 822, note F. Moderne, p. 826, note J.-P. Céré). Dans ce dernier cas, il faut citer, au titre des MEI dorénavant susceptibles de recours, une mesure de placement d’un détenu à l’isolement (CE, 30 juillet 2003, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice contre Remli, req. n° 252712, Rec. CE, p. 366 et CE, 17 décembre 2008, Section française de l’observatoire international des prisons, req. n°293786) un changement d’affectation d’un détenu d’une maison centrale à une maison d’arrêt (CE, Ass., 14 décembre 2007, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice contre Boussouar, req. n°290730, Rec. CE, p. 495), un déclassement d’emploi (CE, Ass., 14 décembre 2007, Planchenault, req. n°290420, Rec. CE, p. 474), le placement d’un détenu sous le régime des rotations de sécurité (CE, Ass., 14 décembre 2007, Payet, req. n°306432, Rec. CE, p. 498), une décision de changement d’affectation entre des établissements pénitentiaires de même nature, sous réserve que soient en cause des libertés et des droits fondamentaux des détenus (CE, 27 mai 2009, Khaled Mustapha A., req. n°322148 et CE, 13 novembre 2013, M. P., req. n°355742), une décision de droit de visite des détenus (CE, 26 novembre 2010, Ministre d’Etat, Garde des sceaux, Ministre de la Justice contre Bompard, req. n°329564, Rec. CE, p. 465), une décision de placement d’un détenu du régime différencié dans un secteur de détention dit « portes fermées » (CE, 28 mars 2011, Garde des sceaux, Ministre de la Justice contre Bennay, req. n°316977, Rec. CE, p. 137) ainsi que la décision de l’y maintenir (CE, 6 décembre 2012, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice et des Libertés contre David, req. n°344995, Rec. CE, p. 397), une décision de changement d’affectation d’un établissement pour peines à une maison d’arrêt (CE, 13 novembre 2013, M. Puci et Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, req. n°355742, Rec. CE, tables, p. 749), une demande d’un détenu de changement d’établissement, sous réserve que soient en cause ses libertés et ses droits fondamentaux (CE, 13 novembre 2013, Agamemnon, req. n°338720), les décisions par lesquelles le président de la commission de discipline prononce une sanction d’avertissement (CE, 21 mai 2014, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice contre Guimon, req. n°359672, Rec. CE, p. 139). Il a été enfin décidé, plus largement, que n’appartiennent pas à la catégorie des MEI insusceptibles de recours les mesures qui portent atteinte « à l’exercice [de leurs] droits et libertés fondamentaux » (CE, sect., 25 septembre 2015, Mme Bourjolly, req. n°372624, AJDA 2015, p. 2147, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet, RFDA 2015, p. 1107, concl. G. Pelissier et p. 75, note B. Defoort).
La réduction en devenir de la catégorie des « actes de gouvernement » : l’application du droit européen
881 • L’immunité contentieuse de l’acte de gouvernement a été contestée par rapport aux exigences de l’article 13 ConvEDH consacrant le droit au recours et par le biais de l’article 1erdu 1er protocole additionnel à la ConvEDH consacrant le droit au respect des biens dans la mesure où l’immunité contentieuse s’étend aussi au contentieux de la responsabilité (CE, 25 mars 1988, Société Sapvin, req. n°65022, Rec. CE, p. 133, D. 1989, p. 120, obs. F. Moderne) et que l’impossibilité d’obtenir réparation financière d’un préjudice est susceptible de méconnaître le droit au respect des biens (CE, 22 octobre 2014, Centre hospitalier de Dinan, req. n°368904, Rec. CE, p. 316, DA 2015, comm. n°16, note G. Eveillard, GP 2014, 26 novembre, p. 18, note M. Guyomar). S’il est évident que le régime d’immunité contentieuse des actes de gouvernement prive les administrés de leur droit au recours au sens de l’article 13 ConvEDH, la théorie reste toujours bien vivante en droit français (voir, pour quelques exemples récents confirmant une telle qualification : CE, sect., 28 mars 2014, De Baynast, req. n° 373064, Rec. CE, p. 58, DA 2014, comm. n°43, note G. Eveillard, CE, 23 mai 2014, Daoud, req. n° 380560, Rec. CE, tables, p. 486, DA 2014, comm. n°57, note A. de Montis ; CE, 27 octobre 2015, Fédération démocratique alsacienne, req. n°388807 ; TC, 18 mai 2015, M. Krikorian, req. n°3995, AJDA 2016, p. 265, note E. Carpentier ; CE, 30 décembre 2015, Dupin, req. n°384321, Rec. CE, p. 486, DA 2016, n°6, comm. n°35, note G. Eveillard ; CE, 12 février 2016, M. A. B., req. n°387931). En effet, selon le juge européen, si tous les actes de gouvernement devraient nécessairement pouvoir faire l’objet d’un recours juridictionnel, cela dépend aussi du fait de savoir si ces actes sont, ou non, de nature à porter atteinte à un droit ou à une liberté garantie par la ConvEDH (CommEDH, 4 décembre 1995, Narvii Tauira et autres contre France, req. n°28204/95 à propos de la décision de reprendre les essais nucléaires considérant que l’article 13 ConvEDH ne pouvait être invoqué dès lors qu’aucun grief défendable n’était soulevé ; CourEDH, 14 décembre 2006, Markovic et autres contre Italie, req. n°1398/03 ; Voir M. Vonsy, « Actes de gouvernement et droit au juge », RFDA 2008, p. 728). Or, compte tenu de leur objet, rares sont les actes de gouvernement qui sont susceptibles d’avoir un tel effet.
La réduction en devenir de la catégorie des « actes de gouvernement » : la théorie des actes détachables
882 • Les atteintes aux droits et libertés engendrées par les actes de gouvernement ont été pris en compte par le juge administratif depuis bien longtemps et elles font, probablement, partie des principales considérations ayant motivé la « disqualification » de certains actes de gouvernement. Les actes concernant, par exemple, la conduite des relations internationales sont insusceptibles de faire l’objet d’un recours contentieux mais lorsque des éléments juridiques peuvent être détachés de l’acte, ils ne seront pas, eux-mêmes, qualifiés comme tels et pourront dès lors être soumis au contrôle du juge administratif. C’est la théorie des actes détachables. Il en est ainsi, par exemple, des décisions rejetant une demande d’extradition (CE Ass., 15 octobre 1993, Royaume-Uni de Grande Bretagne et d’Irlande du Nord, Gouverneur de la Colonie royale de Hong-Kong, req. n°142578, Rec. CE, p. 267, concl. C. Vigouroux, RFDA 1993, p. 1179, concl. C. Vigouroux, AJDA 1993, p. 886, chron. C. Maugüé et L. Touvet, RDP 1994, p. 525, note F. Fines, D. 1994, p. 108, note F. Julien-Laferrière) ou retirant un décret d’extradition (CE, 14 décembre 1994, Gouvernement Suisse, req. n°156490, Rec. CE, p. 549, AJDA 1995, p. 56, concl. C. Vigouroux, RDP 1995, p. 781, note J. Chappez, RFDA 1995, p. 109, obs. H. Labayle). Mais certaines décisions prêtent à discussion et seraient encore susceptibles d’aboutir à une condamnation de la France notamment lorsque l’intérêt de l’Etat l’emporte encore sur le respect des droits fondamentaux individuels. Il en est ainsi lorsque le lien entre les saisies et les opérations de guerre l’emporte sur l’atteinte invoquée au droit de propriété, le Conseil d’Etat ayant jugé que les actes de saisie des œuvres MNR, c’est-à-dire inscrits au répertoire des musées nationaux récupération, ayant été saisies par les forces alliées de la France, dans les zones de combat ou d’occupation, ou par les administrations françaises placées sous l’autorité du commandement militaire pendant les opérations de guerre ou d’occupation sont « inséparables de la conduite des opérations de guerre et des relations internationales et ne sont, par suite, pas susceptibles d’être discutés devant le juge de l’excès de pouvoir » (CE, Ass., 30 juillet 2014, Mme Kodric et Mme Heer, req. n°349789, Rec. CE, p. 247, AJDA 2014, p. 2145, note J.-M. Pontier, D. 2015, p. 194, note G. Cagnon, RFDA 2014, p. 1092, note C. Lavialle, JCP 2014, G, n°995, note S. Biagini-Girard ; Voir, en ce sens, G. Eveillard, « La conventionnalité du régime contentieux des actes de gouvernement », DA 2016, n°6, comm. n°35 )
La réduction en devenir de la catégorie des « actes de gouvernement » : l’exemple de la contestation du refus d’ordonner le rapatriement de ressortissantes françaises et de leurs enfants retenus en Syrie
883 • Cf. § n°472 et suiv.
Le contrôle juridictionnel des actes de « droit souple » : un contrôle d’abord limité à l’activité de régulation
884 • Le juge administratif a, dans la période récente, sensiblement élargi la catégorie des décisions administratives faisant grief susceptibles de faire l’objet d’un recours en excès de pouvoir. Il a, en effet, accepté de prendre en compte les effets non strictement juridiques qui s’attachent aux actes de « droit souple » (adaptation française de l’expression soft law issue du droit international) des autorités de régulation, au nom de l’encadrement juridictionnel du pouvoir d’influence exercé par ces dernières. Pour le Conseil d’Etat, les avis, recommandations, mises en garde et prises de position adoptés par les autorités de régulation dans l’exercice des missions dont elles sont investies peuvent être déférés au juge de l’excès de pouvoir dans deux cas. D’abord lorsqu’ils revêtent le caractère de dispositions générales et impératives ou lorsqu’ils énoncent des prescriptions individuelles dont ces autorités pourraient ultérieurement censurer la méconnaissance mais aussi, ensuite, lorsqu’ils sont de nature à produire des effets notables, notamment de nature économique, ou ont pour objet d’influer de manière significative sur les comportements des personnes auxquelles ils s’adressent (CE, Ass., 21 mars 2016, Société Fairvesta International Gmbh, req. n°368082, AJDA 2016, p. 717, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet, D. 2016, p. 715, obs. M.-C. de Montecler, RFDA 2016, p. 497, concl. S. Von Coester, RTDCiv. 2016, p. 571, obs. P. Deumier à propos de communiqués émis par l’AMF afin de mettre les investisseurs en garde contre les conditions dans lesquelles sont commercialisés certains produits de placement ; CE, 21 mars 2016, Société NC Numéricable, n° 390023, AJDA 2016, p. 717, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet, RFDA 2016, p. 506, concl. V. Daumas, RTDCiv. 2016, p. 571, obs. P. Deumier, JCP 2016, G, n° 623, note T. Perroud, Droit fiscal 2016, p. 297, étude O. Fouquet à propos d’une prise de position adoptée par l’Autorité de la concurrence pour l’exécution d’une décision de concentration). Si, au fond, les recours sont rejetés, une 3èmedécision a abouti à l’annulation d’une communication de la Commission de régulation de l’énergie sur les contrats pouvant être conclus entre ERDF et les fournisseurs d’électricité, position ayant pour effet d’exclure GDF Suez (CE, 13 juillet 2016, Société GDF Suez, req. n°388150, AJDA 2016, p. 1481, voir aussi pour des requêtes à nouveau rejetées : CE, 10 novembre 2016, Mme Marcilhacy et autres, req. n°384691, AJDA 2017, p. 121, concl. L. Marion à propos d’une délibération du CSA prenant parti sur le caractère publicitaire d’un message télévisuel et des communiqués de presse par lesquels le CSA précise la portée de son intervention ; à noter que la décision du Défenseur des droits d’intervenir devant une juridiction a été jugé insusceptible de recours : CAA de Paris, 6 avril 2017, Société Exane SA, req. n°15PA03145, AJDA 2017, p. 1186, concl. M. Romnicianu).
Le contrôle juridictionnel des actes de « droit souple » : un contrôle désormais étendu au-delà des activités de régulation
885 • Comme peut le noter Pascale Deumier, « en ouvrant le contentieux le plus légaliste aux normes informelles, le Conseil d’Etat a ouvert une brèche dans la conception même du droit, dont il a rapidement été relevé qu’elle serait difficile à maintenir dans de strictes limites » (P. Deumier, « Quand le droit souple rencontre le juge dur », RTDCiv. 2016, p. 571). La notion d’autorité de régulation semblait limiter la nouvelle voie de droit ouverte à la contestation des actes de ces autorités. Mais le Conseil d’Etat est allé plus loin en dépassant d’abord la sphère de la régulation économique (CE, 10 novembre 2016, Marcilhacy et autres, req. n°384691 et autres, DA 2017, comm. n°9, note R. Lanneau où recevabilité d’un REP contre une délibération du CSA et deux communiqués de presse relatifs à un message télévisuel) même s’il ne dépassait pas, d’un prime abord, le cadre de l’activité de régulation (CE, 22 mai 2019, M. A., req. n°414410 où les recommandations du Défenseur des droits, non rendues publiques, alors même qu’elles auraient une portée générale, ne constituent pas des décisions administratives susceptibles de faire l’objet d’un REP). Il a franchi le pas dans une décision d’Assemblée Mme Le Pen du 19 juillet 2019 où il a décidé d’étendre la définition des actes de droit souple susceptibles de recours au-delà de la notion de régulation (CE, Ass., 9 juillet 2019, Le Pen, req. n°426389, à propos d’une prise de position d’une autorité administrative, ici la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, qui fait grief lorsque, rendue publique, elle est de nature à produire, sur la personne qu’elle concerne, des effets notables en termes de réputation). Enfin, le Conseil d’Etat, dans une décision rendue le 24 juillet 2019 dans le cadre du contentieux sur l’EPR (réacteur à eau pressurisée) de Flamanville, a aussi déclaré irrecevable un recours dirigé contre un avis de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), eu égard à l’objet et à la portée de cet avis (CE, 24 juillet 2019, Associations Réseau « Sortir du nucléaire », Greenpeace France, CRILAN et Stop EPR ni à Penly ni ailleurs, req. n°416140, AJDA 2020, p. 55, note F. Lichère). La recevabilité des recours contre les actes de droit souple n’est ainsi pas forcément liée à l’activité administrative. Ce qui compte c’est l’objet et la portée de l’acte. Ce n’est pas en lui-même qu’un acte de « droit souple » fait ou non grief, c’est en fonction de la personne qui en demande l’annulation. En l’espèce, l’avis ne faisait pas grief aux associations requérantes d’où l’absence de recours possible. (En ce sens, F. Lichère, « De la fission nucléaire à la fiction juridictionnelle ? », AJDA 2020, p. 55 et suiv.). L’ouverture ainsi décrite dans le cadre de ce contentieux des actes de « droit souple », même si elle n’ait pas le fait d’un alignement sur la jurisprudence du juge européen, participe à la mise en place d’une nouvelle conception de la norme juridique qui est justement celle défendue par ce même juge européen, celle qui tend, de plus en plus, vers cette subjectivisation du contentieux administratif.
Le contrôle juridictionnel des actes de « droit souple » : un contrôle étendu aux « documents de portée générale », nouvelle catégorie d’actes administratifs : l’arrêt « GISTI »
885-1 • Après l’arrêt « Le Pen » précité, le juge administratif a poursuivi son ouverture du contentieux administratif aux actes de droit souple. Il a d’abord étendu sa jurisprudence à des communiqués de presse de la CNIL (CE, 16 octobre 2019, La quadrature du Net, req. n°433069), aux recommandations de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) (CE, 21 octobre 2019, Association française de l’industrie pharmaceutique pour une automédication responsable, req. n°419996 et n°419997). Si le juge constate l’abrogation implicite d’un acte de droit souple dont l’annulation lui était demandée, il peut enjoindre à une autorité administrative de mentionner que l’acte en question figurant sur son site internet a été abrogé par une décision plus récente (CE, 4 décembre 2019, Fédération des entreprises de la beauté, req. n° 416798). Les délibérations du CSA sur la diffusion d’un programme télévisé font également grief et sont donc susceptibles d’annulation (CE, 31 décembre 2019, Société BFM TV, req. n°431164 et 432634) tout comme les avis déontologiques comme ceux émis par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) lorsque cette dernière se prononce, par exemple, sur la compatibilité d’un projet d’activité privée lucrative avec les fonctions exercées précédemment par un fonctionnaire (CE, 4 novembre 2020, M. A. B., req. n°440963). Le Conseil d’Etat a, ensuite, dans une décision de section, renouvelé sa grille de lecture en harmonisant les règles de contestation des actes de droit souple, des lignes directrices et des circulaires par la création d’une nouvelle catégorie d’actes administratifs susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation : « les documents de portée générale » (CE, sect., 12 juin 2020, GISTI, req. n°418142). Ces derniers s’ajoutent donc aux actes décisoires faisant grief. C’est une note d’actualité émanant de la division de l’expertise en fraude documentaire et à l’identité de la direction centrale de la police aux frontières qui était en cause dans l’arrêt d’espèce.
Le contrôle juridictionnel des actes de droit souple : une restriction néanmoins des moyens invocables à l’appui du REP dirigé contre le refus d’abroger un acte de droit souple
885-2 • La nouvelle formulation du principe fixé par l’arrêt « GISTI » est reproduit dans des décisions ultérieures (par ex., CE, 21 juin 2021, Société Forseti, n°428321 à propos d’une note du garde des sceaux sur l’accès aux décisions de justice susceptible donc de recours). Le Conseil d’Etat poursuit aussi la construction de sa jurisprudence puisque la délibération de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) interprétant la portée de la clause de suspension pour cause de force majeure des accords-cadres conclus avec EDF pour l’ARENH a été reconnu comme un acte de droit souple (CE, 10 décembre 2021, Société Hydroption, req. n°439944). Par contre, sous couvert du principe de sécurité juridique et dans la droite ligne de sa jurisprudence faisant prédominer ce principe sur celui du principe de légalité (par ex., CE, Ass., 18 mai 2018, CFDT Finances, req. n°414583) limité les moyens opérants à l’appui d’un recours dirigé contre le refus d’abroger un acte de droit souple (CE, 7 juillet 2021, Association Adikia et autres, req. n°438712), ce qui amoindrit la portée du contrôle juridictionnel. Seuls les moyens tirés de la légalité du contenu de l’acte, de la compétence de son auteur et de l’existence d’un détournement de pouvoir peuvent être utilement soulevés. Les moyens formels tenant aux conditions d’édiction de l’acte, aux vices de forme et de procédure ne peuvent être soulevés que dans le cadre du recours pour excès de pouvoir à l’encontre de l’acte de droit souple lui-même.
→ L’approfondissement du contrôle opéré sur l’action de l’administration
886 • Dans beaucoup d’hypothèses, le juge administratif n’exerçait à la fin des années 1980 qu’un contrôle restreint sur la qualification juridique des faits. Ce contrôle ne conduisait à censurer que les erreurs les plus grossières, les « erreurs manifestes d’appréciation ». A la faveur de l’appropriation progressive de la ConvEDH, les domaines dans lesquels le juge laissait à l’administration une grande marge de manœuvre se sont réduits. C’est le contrôle de proportionnalité, déjà pratiqué par le juge administratif, qui s’est alors étendu et renforcé. Ce contrôle est primordial dans la protection des droits fondamentaux parce qu’il permet un contrôle étroit de l’action de l’Etat. Ce ne sont plus simplement les erreurs grossières qui sont sanctionnées mais il est, dorénavant, imposé à l’administration de ne pas dépasser les limites strictement nécessaires à l’accomplissement de ces missions. L’exercice d’un tel contrôle est ainsi apparu plus conforme à la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui affirme que le principe de proportionnalité, qui découle de la nécessité des peines, s’applique à toute sanction ayant le caractère d’une punition (Cf. Par ex., CC, n˚86-215 DC, 3 septembre 1986, Loi relative à la lutte contre la criminalité et la délinquance, Rec. CC, p. 130, JO, 5 septembre 1986, p. 10 788, ou CC, n˚87-237, 30 décembre 1987, Loi de finances pour 1988, Rec. CC, p. 63, JO, 31 décembre 1987, p. 15 761), qu’elle soit juridictionnelle ou administrative mais il s’est aussi révélé plus conforme à la jurisprudence de la CourEDH.
Un contrôle entier voulu par le juge européen
887 • La CourEDH considère, aujourd’hui, concernant les organes en dehors des juridictions ordinaires qui ne présentent pas les garanties du procès équitable, que leurs décisions doivent faire l’objet d’un contrôle par un organe judiciaire de « pleine juridiction » (CourEDH, 10 février 1983, Albert et Le Compte contre Belgique, req. n°7299/75 et n°7496/76, § 29) sachant que l’expression reste quelque peu malheureuse et qu’il faudrait, plutôt, parler de « recours de pleine légalité »(Selon l’expression employée par M. Melchior, « La notion de compétence de pleine juridiction en matière civile dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme », Mélanges Jacques Velu, Bruylant, Bruxelles, 1992, p. 1327 et suiv.), le recours ne devant pas nécessairement être défini comme un recours de plein contentieux, le recours pour excès de pouvoir pouvant suffire. Lorsqu’elle statue en « matière pénale », la CourEDH précise que cela suppose « le pouvoir de réformer la décision en tous points, en fait comme en droit » (Cf. par ex., CourEDH, 23 octobre 1995, Gradinger contre Autriche, req. n°15963/90, série A, n°328, § 44) allant même jusqu’à examiner si le juge national a pu « vérifier l’adéquation de la sanction à l’infraction commise et le cas échéant [aurait] pu remplacer la sanction » (CourEDH, 27 décembre 2011, Menarini Diagnostics S.R.L. contre Italie, req. n°43509/08, § 65 à propos d’une amende à caractère pénal infligée par le Conseil d’Etat italien). Si la Cour se montre parfois moins exigeante en « matière civile » sur le degré de contrôle du juge national, il lui arrive quand même de rappeler l’exigence de « pouvoir réformer en tout point la décision critiquée » (CourEDH, 7 juin 2012, req. n°4837/06, § 55, à propos d’un contentieux fiscal qui ne fait pas partie de la matière pénale et relève donc de la matière civile), ce qui peut apporter une certaine confusion sur les exigences requises (Cf. En ce sens, R. Tinière, « La notion de « pleine juridiction » au sens de la Convention européenne des droits de l’homme et l’office du juge administratif », RFDA 2009, p. 729 et suivantes).
Un législateur qui œuvre d’abord pour l’application d’un contrôle plus poussé
888 • L’extension du contrôle s’est d’abord manifesté par l’extension des cas de recours de pleine juridiction dans la mesure où, comme ces recours permettent au juge de substituer sa propre décision à celle de l’administration, ils sont jugés plus efficaces et ont, a priori, davantage les faveurs du juge européen. C’est le législateur, lui-même, qui a d’abord œuvré vers l’application d’un contrôle plus poussé. Il a préconisé notamment un contrôle normal de l’adéquation de la sanction aux faits reprochés pour les salariés du secteur privé en vertu de l’article L. 1333-2 du Code du travail (Pour une application, voir, en ce sens, Cass., soc., 14 novembre 2000, n˚98-45.309, Droit social 2001, p. 207, obs. J. Savatier). Il a précisé, de même, avec beaucoup de soin, par exemple, que les recours contre les sanctions prises par des autorités administratives indépendantes ou autorités de régulation n’étaient plus des recours pour excès de pouvoir mais des recours de plein contentieux. On peut citer, à titre d’exemple, les recours contre les sanctions infligées par le CSA (art. 42-8 et 48-8 de la loi n˚ 86-1067 du 30 septembre 1986, JO, 1er octobre 1986, p. 11 755, relative à la liberté de communication), par l’ARCEP (art. L. 5-3 et L. 36-11 VI CPCE), par la CRE (art. L. 134-34 CDE) ou encore par l’AMF (art. R. 621-45 CMF). Même quand des décisions relèvent du juge judiciaire et plus précisément de la Cour d’appel de Paris (le recours est porté devant la Cour d’appel de Paris quand l’Autorité n’exerce qu’un seul type de pouvoir, par exemple l’Autorité de la concurrence qui sanctionne les comportements anticoncurrentiels mais n’est pas doté de pouvoir réglementaire ou d’agrément ou quand les pouvoirs sont diversifiés, l’exercice du pouvoir réglementaire relevant alors du Conseil d’Etat et le pouvoir de règlement des différends de la Cour d’appel de Paris), le législateur a pris soin de prévoir l’exercice d’un « recours en annulation ou réformation » (art. L. 464-7 du Code du commerce pour l’ADLC ; pour les décisions tranchant les différends, art. L. 5-6 et L. 36-8 CPCE pour l’ARCEP, L. 134-24 du Code de l’énergie pour la CRE et art. 7 de la loi n°2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l’énergie pour le CORDIS Comité de règlement des différends et des sanctions, art. 16 de la loi n°2009-1503 du 8 décembre 2009 pour l’ARAFER, art. L. 331-32 CPI pour l’HADOPI). C’est toute la façon de faire du juge administratif qui est ainsi reprise. Plus précisément, la Cour d’appel de Paris peut se borner à annuler la décision en renvoyant si besoin les parties devant l’autorité auteur de la décision mais elle peut également annuler la décision et régler elle-même le différend ou réformer la décision attaquée tout comme le ferait un juge administratif de plein contentieux. Au-delà du contentieux des décisions des autorités de régulation, des propositions de loi ont aussi été déposées en vue, par exemple, de réformer le Code de justice administrative en posant le principe selon lequel : « les recours contre les décisions individuelles relèvent du plein contentieux » (Proposition de loi au Sénat n˚ 806 déposée par Mme Hélène Lipietz le 24 juillet 2013 et visant à intégrer, après l’article L. 11, un article L. 12 au CJA ainsi rédigé : « les recours contre les décisions individuelles relèvent du plein contentieux, à l’exclusion des décisions relatives à l’attribution des diplômes titres et décorations et des expulsions des ressortissants étrangers » (enregistré à la présidence du sénat le 24 juillet 2013)).
Un juge interne qui établit aussi des recours de pleine juridiction
889 • Le contentieux le plus marquant est, encore une fois, celui des sanctions prononcées par l’administration. Le domaine des sanctions administratives a connu l’évolution la plus radicale dans la mesure où il y a eu un transfert des recours les concernant dans le contentieux de pleine juridiction. Si c’est le législateur, comme on a pu le voir, qui a d’abord insisté sur ce fait, c’est le juge qui a, surtout aussi déterminé son office dans le silence des textes. Depuis la décision « Société ATOM » (CE, Ass., 16 février 2009, Société ATOM, req. n˚274000, Rec. CE, p. 25, concl. Legras, JCP 2009, A, n˚2089, note D. Bailleul, RFDA, 2009, p. 259, concl. C. Legras), les sanctions « que l’administration inflige à un administré » sont soumises à un recours de pleine juridiction. Cette solution a été appliquée aux sanctions administratives prononcées par Pôle Emploi en matière de revenu de remplacement des demandeurs d’emploi (CE, 23 février 2011, Cambessede, req. n˚332837), aux sanctions de retrait de points d’un permis de conduire (CE, avis, 9 juillet 2010, M. Jean-Luc Berthaud, n˚336556, Rec. CE, p. 287, AJDA 2010, p. 2162, note D. Ginocchi), aux décisions de retrait de carte de séjour des résidents (CE, 10 juin 2009, Zheng, req. n˚318898). Le Conseil d’Etat a également jugé que les recours dirigés contre des sanctions des autorités de régulation étaient des recours de plein contentieux (par ex., CE, 30 janvier 2013, Caisse de crédit municipal de Toulon, req. n°347357 s’agissant des sanctions prononcées par l’Autorité de contrôle prudentiel ou CE, Ass., 21 décembre 2012, Société Groupe Canal Plus et Société Vivendi Universal, req. n˚353856, AJDA 2013, p. 2015, chron. X. Domino et A. Bretonneau, RFDA 2013, p. 55, concl. V. Daumas s’agissant des mesures prises par l’Autorité de la concurrence sur le fondement du IV de l’article L. 430-8 Code du commerce en matière de contrôle des concentrations économiques, ces mesures ayant le caractère d’une sanction). Le Conseil d’Etat se fixe, néanmoins, parfois des limites puisqu’il a pu juger que, lorsqu’il est saisi d’un tel recours et qu’il a annulé la décision de sanction, il ne lui appartient pas de se substituer à l’autorité administrative pour apprécier s’il y a lieu d’infliger à l’intéressé une sanction en raison des faits qui lui sont reprochés (CE, 11 avril 2018, M. B., req. n°413349 à propos des sanctions prononcées par l’Agence française de lutte contre le dopage, voir art. L. 232-34 du Code du sport qui prévoit un recours de plein contentieux).
Un juge interne qui favorise le plus souvent le contrôle normal dans le contentieux d’excès de pouvoir
890 • Si le Conseil d’Etat refuse d’appliquer la jurisprudence « Société ATOM » aux sanctions disciplinaires dont le contentieux appartient toujours à l’excès de pouvoir, le contrôle normal du juge y est progressivement substitué au contrôle restreint en ce qui concerne le choix de la mesure infligée. Le juge exerce déjà depuis très longue date un contrôle dit « normal » sur l’exactitude matérielle des faits reprochés (CE, 4 février 1916, Camino, req. n°59619 et n°59679, Rec. CE, p. 15), l’erreur de droit (CE, 29 mars 1901, Sauvé, Rec. CE, p. 361), sur le caractère fautif des faits reprochés (CE, 4 avril 1914, Gomel, req. n°55125, Rec. CE, p. 488) ou encore sur le détournement de pouvoir (CE, 16 novembre 1900, Maugras, req. n° 96980, Rec. CE, p. 617 www.revuegeneraledudroit.eu/?p=14759). C’est le cas pour les sanctions prises contre les élèves des établissements scolaires publics (CE, 27 novembre 1996, Ligue islamique du nord et M. et Mme Tlaouziti, req. n˚170207 et req. n˚170208, Rec. CE, p. 461, RFDA 1997, p.51, note C. Durand-Prinborgne),celles infligées par le Ministre des transports à un pilote d’avion (CE, 28 février 1997, Monka, req. n°172280), celles prononcées par les ordres professionnels (CE, Sect., 22 juin 2007, Arfi, req. n˚272650, Rec. CE, p. 263, concl. Guyomar, RDFA 2007, p. 1199, concl. Guyomar), ou encore les fédérations sportives (CE, 2 mars 2010, Fédération française d’athlétisme, req. n˚324439, Rec. CE, Tables, p. 925, AJDA, 2010, p. 664, chron. S.-J. Lieber et D. Botteghi). C’est aussi le cas pour des contentieux analogues aux contentieux disciplinaires comme celui de la révocation d’un maire (CE, 2 mars 2010, Dalongeville, req. n˚328843, Rec. CE, p. 65, AJDA, 2010, p. 664, chron. S.-J. Lieber et D. Botteghi), des sanctions infligées à un magistrat judiciaire, qu’il soit du parquet (CE, 27 mai 2009, Hontang, req. n˚310493, Rec. CE, p. 20733) ou du siège (CE, 30 juin 2010, Ponsard, req. n˚325319, Rec. CE, tables, p. 934) ou à un conseiller des prud’hommes (CE, 20 mai 2011, Lecat, req. n°332451, tables, pp. 1100-1177). Les fonctionnaires se retrouvaient seuls, avec les détenus (CE, 20 mai 2011, Letona Biteri, req n˚326084, Rec. CE, p. 246, AJDA 2011, p. 1364, chron. X. Domino et A. Bretonneau) et les militaires (CE, 12 janvier 2011, Matelly, req. n˚338461, Rec. CE, p. 3, AJDA 2011, p. 623, note E. Aubin) à voir leurs sanctions privées d’un entier contrôle.
Un juge interne qui favorise dorénavant le contrôle normal dans le contrôle des sanctions infligées aux fonctionnaires, détenus et militaires
891 • Aujourd’hui, les trois catégorie sus mentionnées font l’objet d’un contrôle normal. Celui-ci a, d’abord, été appliqué au contrôle des sanctions disciplinaires infligées aux fonctionnaires (CE, Ass., 13 novembre 2013, Dahan, req. n˚347704, Rec. CE, p. 279, JCP 2014, A, n˚ 2076, note F. Melleray, n˚2093, note D. Jean-Pierre et n˚2241, note D. Bailleul, JCP 2014, G, n°149, note C. Vautrot-Schwarz, DA 2014,comm. n˚11, note A. Duranthon, RFDA, 2013, p. 1175, concl. R. Keller, AJDA 2013, p. 2432, chron. A. Bretonneau et J. Lessi). Cela a ensuite été confirmé à propos de la procédure particulière existant dans la fonction publique territoriale et le contrôle d’un avis de conseil de discipline de recours (CE, 16 février 2015, Commune de Saint-Dié-des-Vosges, req. n˚369831), à propos des sanctions infligées par l’ordre des médecins (CE, 20 décembre 2014, M. B., req. n°381245) ou encore à propos de celle infligées aux détenus (CE, 1er juin 2015, M. B. A. contre Maison centrale de Clairveaux, req. n˚380449, AJDA 2015, p. 1596, concl. A. Bretonneau ; Cf. A. Planchard, « Le contrôle de proportionnalité des sanctions disciplinaires franchit les portes des prisons », RDH 2015, juillet). Restait le cas des militaires. Le juge européen a d’abord reconnu que l’interdiction absolue des syndicats au sein de l’armée française était contraire aux règles et principes définis dans la ConvEDH. Cf. A ce sujet : L.-M. Le Rouzic, « Vers la fin du cantonnement juridiques des militaires ? », AJDA 2015, p. 204 à propos des arrêts CourEDH, 2 octobre 2014, Matelly contre France, req. n°10609/10 et CourEDH, 2 octobre 2014, Adefdromil contre France, req. n°32191/09) ce qui a amené à la légalisation des associations professionnelles de militaires (art. L. 4126-1 du Code de la défense). Puis c’est le juge administratif qui s’est prononcé pour un contrôle de proportionnalité sur la sanction infligée aux militaires (CE, 25 janvier 2016, M. C. A., req. n°391178, AJFP 2016, p. 235, obs. J.-C. Videlin)
Un juge interne qui a également forgé d’autres instruments lui permettant d’intensifier ses contrôles (1)
892 • L’application du principe de subsidiarité tel que défini par le juge européen a engendré une intensification des contrôles opérés par le juge national renforçant ainsi l’Etat de droit. Le juge administratif ne se contente plus, en excès de pouvoir, de censurer une décision, il rapproche ainsi son office de celui du juge de plein contentieux. C’est l’essor des droits subjectifs, sous l’influence du juge européen, qui a amené la nécessité d’assurer, au-delà de la soumission de l’administration au droit, une protection efficace des droits fondamentaux des personnes. Il peut maintenant, par exemple, procéder à une substitution de base légale (CE, 3 décembre 2003, Préfet de la Seine-Maritime contre El Bahi, req. n°240267, Rec. CE, p. 480, concl. J.-H. Stahl, AJDA 2004, p. 202, chron. F. Donnat et D. Casas, RFDA 2004, p. 733, concl. J.-H. Stahl), ou à une substitution de motifs (CE, sect., 6 février 2004, Mme Hallal, req. n°240560, Rec. CE, p. 48, AJDA 2004, p. 436, chron. F. Donnat et D. Casas, RFDA 2004, p. 740, concl. I. de Silva). Le juge a également appliqué le principe de sécurité juridique (CE, Ass., 24 mars 2006, Société KPMG et autres, Rec. CE, p. 154, AJDA 2006, p. 1028, chron. C. Landais et F. Lenica, RFDA 2006, p. 463, concl. Y Aguila et note F. Moderne), ce qui l’a conduit à accepter de moduler dans le temps les effets de ses annulations contentieuses (CE, Ass., 11 mai 2004, Association AC, req. n°255886, Rec. CE, p. 197, AJDA 2004, p. 1049, tribune J.-C. Bonichot, p. 1183, chron. C. Landais et F. Lenica, p. 1219, note F. Berguin, RFDA 2004, p. 438, note J.-H. Stahl et A. Courrèges, p. 454, concl. C. Devys) ou de ses changements de jurisprudence (CE, Ass., 16 juillet 2007, Société Tropic Travaux Signalisation, req. n°291545, Rec. CE, p. 360, AJDA 2007, p. 1577, chron. F. Lenica et J. Boucher, RFDA 2007, p. 696, concl. D. Casas, p. 917, note F. Moderne, p. 923, note D. Pouyaud, p. 953, note M. Canedo-Paris, LPA 2007, n° 147, p. 9, note M. Gaudemet, DA 2007, comm. n°10, p. 34, note P. Cossalter).
Un juge interne qui a également forgé d’autres instruments lui permettant d’intensifier ses contrôles (2)
893 • On note aussi un développement des pouvoirs d’injonction du juge notamment en référé, lorsqu’existe un danger caractérisé et imminent pour la vie des personnes (voir, notamment, en ce qui concerne le droit des détenus : CE, ord., 22 décembre 2012, Section française de l’observatoire international des prisons, req. n°364584 sur les conditions de vie aux Baumettes où le Conseil d’Etat, estimant que les dispositions prises en vue de l’éradication des espèces nuisibles ne remédiaient pas efficacement à la situation, a ainsi ordonné de faire procéder dans un délai de dix jours « à une opération d’envergure susceptible de permettre la dératisation et la désinsectisation de l’ensemble des locaux »). Le Conseil d’Etat a aussi, récemment, consacrer l’efficience en référé du moyen tiré de l’inconventionnalité de la loi tout en faisant évoluer la nature de son contrôle de conventionnalité. Le contrôle classique et objectif in abstracto est désormais complété par un contrôle plus subjectif et in concreto (CE, Ass., 31 mai 2016, Mme Gonzalez Gomez, req. n°396848, Rec. CE, p. 208, concl. A. Bretonneau, AJDA 2016, p. 1398, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet, D. 2016, p. 1472, note H. Fulchiron p. 1477, note B. Haftel, RFDA 2016, p. 740, concl. A. Bretonneau et p. 754, note P. Delvolvé, RTD civ. 2016, p. 578, obs. P. Deumier ; Voir J. Prévost-Gella, « Contrôle abstrait et contrôle concret : les juges confrontés à l’application de la jurisprudence Gonzalez-Gomez », RFDA 2017, p. 855). Comme peut le noter Jean-Marc Sauvé, « désormais, lorsqu’il contrôle la conventionnalité d’une loi, le juge administratif ne se contente plus de vérifier que cette loi ne méconnaît pas, dans son ensemble, les stipulations internationales. Il procède, dans un second temps, à un contrôle in concreto et vérifie si les situations susceptibles de naître de l’application de cette loi ne sont pas, saisies dans leur particularité, susceptibles de méconnaître des droits et libertés protégés par la convention européenne des droits de l’homme ». Par l’ensemble de ces pouvoirs, le juge administratif assure ainsi une protection plus effective des droits fondamentaux, même dans les cas où l’administration agit dans les hypothèses de compétence liée.
→ L’impact de la transformation progressive des méthodes de jugement des juges ordinaires : un contrôle des finalités de la loi et la commande de l’intervention du législateur à travers le nouveau principe de proportionnalité
Un principe de proportionnalité depuis longtemps présent en droit interne
894 • Cela fait plus d’un siècle que le principe de proportionnalité s’est affirmé en France au service d’une protection efficace des libertés et des droits fondamentaux. Mais le principe n’a jamais été identifié comme un PGD ou comme étant nécessaire pour réguler les interventions de l’Etat. Lorsqu’il utilise le principe, le juge administratif veut, surtout, pondérer les intérêts publics et privés et ainsi protéger les droits et libertés. Le contrôle des mesures de police s’est ainsi construit sur l’idée que toute restriction au nom de l’ordre public apportée à l’exercice des libertés individuelles devait être mesurée et nécessaire (Cf. Les jurisprudences fondatrices : CE, 19 février 1909, Abbé Olivier, req. n°27355, Rec. CE, p. 181 à propos de l’interdiction d’une procession funéraire sur la voie publique ou CE, 19 mai 1933, Benjamin, req. n°17413 et n°17520, Rec. CE, p. 541 à propos de l’interdiction d’une réunion publique). Le Conseil constitutionnel a également appliqué le principe de proportionnalité en prenant appui sur l’exigence de nécessité des peines de l’article 8 DDHC (par ex., CC, n°96-378 DC, 23 juillet 1996, Loi de réglementation des télécommunications, JO, 27 juillet 1996, p. 11400, Rec. CC, p. 99, points n°13 à 18 et CC, n°2001-455 DC,12 janvier 2002, Loi de modernisation sociale, JO, 18 janvier 2002, p. 1053, Rec. CC, p. 49, point n°85 où lorsque plusieurs condamnations pénales sont susceptibles de fonder la condamnation d’un seul et même fait, le sanctions subies ne peuvent excéder le maximum légal le plus élevé). Il l’a reconnu, en ce sens, en matière de droit de grève (CC, n°80-117 DC, 22 juillet 1980, Loi sur la protection et le contrôle des matières nucléaires, JO, 24 juillet 1980, page 1867, Rec. CC, p. 42) ou, de façon plus générale, lorsqu’il contrôle des dispositions législatives qui portent atteinte à des droits et libertés pour préserver l’ordre public (par ex., CC, n° 2015-713 DC, 23 juillet 2015, Loi relative au renseignement, JO, 26 juillet 2015, p. 12751, point n°11) ou lorsqu’il doit concilier plusieurs droits entre eux (CC, n°2004-497 DC, 1er juillet 2004, Loi relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle, JO, 10 juillet 2004, p. 12506, Rec. CC, p. 107, point n°30).
Une nouvelle conception du principe de proportionnalité sous l’influence européenne
895 • Si le principe est donc bien présent en droit français, l’influence européenne transforme profondément sa conception la faisant évoluer vers une approche plus libérale et plus protectrice encore des droits et libertés. Sous l’influence du droit allemand qui autorise le juge à s’éloigner de la loi en cas de contradiction avec les droits fondamentaux présents dans la Loi fondamentale allemande et qui amène le juge à appliquer un contrôle en trois étapes sur la mesure en cause (celle-ci devant tout à la fois être appropriée ou adaptée, nécessaire et proportionnée), le principe tel qu’il est appliqué par les juges européens ne doit pas se limiter à une fonction contentieuse mais doit s’appliquer plus largement à l’ensemble de l’action publique et notamment à l’activité du législateur. C’est en ce sens que le principe est appliqué par le juge européen (notamment sur le fondement de l’article 14 ConvEDH qui prohibe toute forme de discrimination où la Cour applique la notion de « rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens et le but visé » : CourEDH, 23 juillet 1968, Affaire relative à certains aspects du régime linguistique de l’enseignement en Belgique contre Belgique, req. n°1474/62, points n°5 et n°10) comme par le juge de l’Union (art. 5-4 TUE ; mentionné la première fois dans CJCE, 29 novembre 1956, Fédération charbonnière de Belgique contre Haute autorité de la CECA, Aff. n°8/55, Rec. CJCE, p. 304 ; reconnu comme principe général du droit de l’Union dans CJCE, 17 décembre 1970, Internationale Handelsgesellschaft, Aff. n°11/70, Rec. CJCE, p. 1125 et applicable notamment pour préserver les principales libertés économiques : CJCE, 14 mai 1974, Nold contre Commission des Communautés européennes, Aff. n°4/73, Rec. CJCE, p. 491, point n°14). Cette nouvelle application consiste, en réalité, à rechercher in concreto, et donc pas seulement par la confrontation in abstracto des règles, si l’application d’une règle nationale dans un cas déterminé aboutit à une atteinte disproportionnée aux droits et libertés compte tenu du but poursuivi. Autrement dit, cela aboutit à rechercher s’il n’était pas possible d’atteindre ce but avec des mesures plus économes. C’est la fin de la méthode classique du contrôle de la légalité des décisions des juges du fond. Les juges suprêmes dans leur office avaient déjà le pouvoir d’écarter la loi mais c’était en présence de normes explicitement contradictoires. Le nouveau contrôle de proportionnalité va leur permettre désormais de peser les intérêts en présence, de considérer que tel délai de prescription est soit trop long, soit trop court ou encore que telle partie a des droits insuffisamment protégés.
Une nouvelle conception qui aboutit à un contrôle plus intense en droit interne
896 • L’intensification du contrôle de proportionnalité en droit interne s’est d’abord matérialisée par la transposition en droit français du raisonnement en trois étapes emprunté au droit allemand. C’est par la décision Association pour la promotion de l’image en 2011 que le juge administratif, à la suite du juge constitutionnel (CC, n°2008-562 DC, 21 février 2008, Loi relative à la rétention de sureté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, JO, 26 février 2008, p. 3272, Rec. CC, p. 89, point n°13), a transposé le triple test de la mesure adaptée, nécessaire et proportionnée (CE, Ass., 16 octobre 2011, Association pour la promotion de l’image, req. n°317827). Puis c’est le contrôle de proportionnalité in concreto qui s’est imposé dans la jurisprudence de la Cour de cassation puis celle du Conseil d’Etat où les deux juges suprêmes ont écarté, aux cas d’espèce, des dispositions législatives qui ne laissaient aucune marge de manœuvre aux autorités publiques et juridictionnelles parce qu’ils étaient de nature à porter une atteinte excessive au droit au respect de la vie privée et familiale. C’est l’article 161 du Code civil qui prohibe le mariage entre alliés qui est écarté par la Cour de cassation dans la 1ère espèce au motif que la prononciation de la nullité du mariage, célébré sans opposition et ayant uni pendant plus de 20 ans le beau-père et sa bru, constituerait une atteinte injustifiée au droit au respect de leur vie privée (Cass., 1ère civ., 4 décembre 2013, n° de pourvoi : 12-26.066, Bull. Civ. I, n°234, D. 2014, p. 153, point de vue H. Fulchiron, p. 179, note F. Chénedé et p. 1342, obs. J.-J. Lemouland et D. Vigneau, RTDCiv 2014, p. 88, obs. J. Hauser et p. 307, obs. J.-P. Marguénaud). Du côté du juge administratif, c’est l’application des dispositions du Code de la santé publique interdisant l’utilisation des gamètes après le décès de l’un des époux et leur exportation en toute hypothèse qui est écarté par le Conseil d’Etat au motif que cela aurait porté au cas d’espèce une atteinte excessive au droit au respect de la vie privée de la requérante (CE, Ass., 31 mai 2016, Mme Gonzalez Gomez, req. n°396848). Les Cours suprêmes françaises se transforment ainsi en institutions de pleine juridiction sur le modèle des cours européennes et notamment de la Cour fédérale allemande. Certains auteurs parlent même en conséquence de transformation en « Cour nationale européenne des droits de l’homme » (F. Zenati-Castaing, « La juridictionnalisation de la Cour de cassation », RTDCiv 2016, p. 511).
Une nouvelle conception qui se propage au sein des juridictions suprêmes
897 • Il y a eu des applications ultérieures par la 1ère chambre civile de la Cour de cassation (Cass., 1ère civ., 10 juin 2015, n° de pourvoi : 14-20.790, D. 2015, p. 2365, note H. Fulchiron ; Cass., 1ère civ., 6 juillet 2016, n° de pourvoi : 15-19.853, D. 2016, p. 1980, note H. Fulchiron ; Cass., 1ère civ., 5 octobre 2016, n° de pourvoi : 15-25.507, D. 2016, p. 2067, obs. I. Gallmeister ; Cass., 1ère civ., 9 novembre 2016, n° de pourvoi : 15-25.068, D. 2016, p. 2337, obs. I. Gallmeister, AJFam. 2016, p. 601, obs. M. Saulier) qui a aussi montré que l’application du contrôle de proportionnalité n’est pas systématique (Cass., 1ère civ., 1er juin 2017, n° de pourvoi : 16-13.441 à propos d’un mariage de complaisance). Le contrôle s’applique aussi du côté du juge administratif même si l’exercice s’avère difficile (TA Rennes, 11 octobre 2016, req. n°1604451, Mme Monnerais, D. 2016, p. 2392, entretien B. Haftel, D. 2017, p. 729, obs. F. Granet-Lambrechts, p. 781, obs. J.-C. Galloux et H. Gaumont-Prat, RTDCiv 2017, p. 114, obs. J. Hauser ; TA Toulouse, 13 octobre 2016, MmeEmilie F., req. n°1405903, D. 2017, p. 729, obs. F. Granet-Lambrechts, RTDCiv 2017, p. 114, obs. J. Hauser ; Cf. J. Prévost-Gella, « Contrôle abstrait et contrôle concret : les juges confrontés à l’application de la jurisprudence Gonzalez-Gomez », RFDA 2017, p. 855). Le contrôle de proportionnalité in concreto n’a pas épargné le droit pénal. La chambre criminelle écarte ainsi ponctuellement, dans certains cas d’espèce, une norme pénale dont l’application aurait des conséquences contraires à un principe issu de la ConvEDH (Voir, par ex., Cass., crim., 26 octobre 2016, n° de pourvoi : 15-83.774, AJPénal 2017, p. 38, obs. N. Verly, RSC 2016, p. 767, obs. H. Matsopoulou, JCP 2016, G, n°1314, note G. Beaussonie et B. De Lamy à propos d’une journaliste poursuivie pour escroquerie et diffamation, s’étant fait passer pour une militante d’extrême droite en usant d’un faux nom, et de faux profils sur les réseaux sociaux et écrivant un ouvrage à charge sur le Front national. Pour la chambre criminelle, « les agissements dénoncés se sont inscrits dans le cadre d’une enquête sérieuse, destinée à nourrir un débat d’intérêt général sur le fonctionnement d’un mouvement politique, de sorte que, eu égard au rôle des journalistes dans une société démocratique et compte tenu de la nature des agissements en cause, leur incrimination constituerait, en l’espèce, une ingérence disproportionnée dans l’exercice de la liberté d’expression » ; Cf. M. Bouchet, « L’utilisation du contrôle de proportionnalité par la Cour de cassation en droit pénal de fond », RSC 2017, p.495 ou N. Catelan, « Consécration de la proportionnalité in favorem en droit pénal », Lexbase Hebdo 2016, n° 675).
Un nouveau contrôle qui peut laisser place à un certain arbitraire du juge et qui va à l’encontre des règles classiques de la cassation (1)
898 • Il est difficile aujourd’hui d’ignorer le nouveau contrôle de proportionnalité tant la littérature qui en traite est abondante. La majeure partie de la doctrine s’indigne du phénomène, en ce qu’il semble laisser place à l’arbitraire du juge et mettre à mal la sécurité juridique d’ordinaire recherchée par tous mais elle témoigne de l’influence de plus en plus pressante de la jurisprudence européenne. A l’origine, la cassation n’a été conçu que comme une technique permettant de limiter le pouvoir normatif du juge et la fonction de juger ce qui a abouti à l’interdiction formelle d’évoquer le fond, les cours suprêmes étant avant tout des institutions au service du pouvoir (depuis la révolution pour le Tribunal de cassation institué par la loi du 27 novembre 1790, interdiction reprise aujourd’hui pour la Cour de cassation à l’article L. 411-2 COJ ; la construction pragmatique de l’ordre juridictionnel administratif met en évidence une histoire opposée à celle du Tribunal de cassation dans l’approche singulière de la distinction du fait et du droit, le Conseil d’Etat demeure marqué par un contrôle historique des faits, forgé avant qu’il soit érigé au rang de juge de cassation ; la possibilité de règlement au fond du litige dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice de l’article L. 821-2 CJA n’est qu’une conséquence de cette approche originale du fait et du droit). Pour effectuer ce passage « d’institutions au service du pouvoir » à des institutions de pleine juridiction, les juges se défont ainsi de la séparation entre le fait et le droit sur laquelle reposait la cassation jusque-là. C’est le nouveau contrôle de proportionnalité qui amène les juges suprêmes nationaux à connaitre des faits allant ainsi à l’encontre de l’interdit qui fondait jusqu’alors les institutions. Plus précisément, par exemple pour la Cour de cassation, l’exercice de ce nouveau contrôle s’inscrit sous le truchement du droit européen, dans le processus de juridictionnalisation subi par l’institution depuis la seconde moitié du XXème siècle.
Un nouveau contrôle qui peut laisser place à un certain arbitraire du juge et qui va à l’encontre des règles classiques de la cassation (2)
899 • On peut citer dans le processus de juridictionnalisation de la Cour de cassation l’acclimatation de la Cour à l’institution anglo-saxonne de l’amicus curiae, mesure d’instruction qui convie à rechercher le droit dans le fait, l’adoption de la motivation ampliative de ces décisions (art. L. 431-3-1 COJ), la possibilité pour le procureur général de rendre des avis dans l’intérêt de la loi et du bien commun et éclairer la Cour sur la portée de la décision à intervenir (art. L. 432-1 al. 2 COJ) ou encore la reconnaissance, à l’instar des cours suprêmes étrangères et du Conseil d’Etat (CE, 16 juillet 2007, Société Tropic Travaux Signalisation, req. n°291545 précité), du pouvoir de limiter dans le temps les effets de ses revirements de jurisprudence (Cass., Ass. Plén., 21 décembre 2006, n° de pourvoi : 00-20.493, D. 2007, p. 835, note P. Morvan, JCP 2007, G, II, n°10040, note E. Dreyer, et n°10111, note X. Lagarde, RTDCiv 2007, p. 72, obs. P. Deumier, et p. 168, obs. P. Théry). Dans le même ordre d’idée, la loi n°2016-1547 de modernisation de la justice du 18 novembre 2016 a aussi étendu la possibilité pour la Cour de cassation de casser sans renvoi et de régler le litige au fond lorsque l’intérêt d’une bonne administration de la justice le justifie (modification de l’article L 411-3 al. 2 COJ). La disposition est forcément directement inspirée de l’article L 821-2 CJA qui accorde, dans les mêmes termes, cette faculté au Conseil d’Etat, juge de cassation et elle témoigne, comme les précédentes dispositions, d’une évolution profonde de la Cour de cassation dont le pouvoir juridictionnel n’est plus limité par les faits souverainement constatés et appréciés par les juges du fond mais est étendu à l’ensemble des termes du litige. A noter aussi que la Cour de cassation envisage d’« enrichir » la motivation de ses arrêts en mentionnant ses précédents chaque fois que cela « apparaît nécessaire » (par exemple, un arrêt de principe, un revirement, la fin d’une controverse ; voir P. Deumier, « Motivation enrichie : bilan et perspectives », D. 2017, p. 1783 et P. Malaurie, « Sur la motivation des arrêts de la Cour de cassation. Contre leur alourdissement, pour leur sobriété », D. 2017, p.768).
Un nouveau contrôle qui permet de reconquérir une part de souveraineté dans le contrôle de la loi et qui s’avère protecteur des droits des justiciables
900 • Au final, l’intensification du contrôle de proportionnalité va à l’encontre des règles classiques de la cassation et de la conception française des sources du droit mais comme certains peuvent l’affirmer, cette intensification est aussi « légicide » (F. Zenati-Castaing, « La juridictionnalisation de la Cour de cassation », RTDCiv. 2016, p. 511) car le but du contrôle que se sont octroyés le conseil d’Etat et la Cour de cassation est, quelque part, de reconquérir une part de souveraineté durement mis à mal avec les développements conjoints des contrôles de conventionnalité et de constitutionnalité et donc d’évincer la loi quand elle porte atteinte, par ce contrôle, aux droits et libertés que le juge doit garantir. Il y a par ce biais un retour à l’Ancien-Régime qui avait fait les beaux jours des Parlements d’Ancien-Régimeavant que la loi devienne toute puissante en France et que l’ordre des sources du droit issu de la révolution ne laisse qu’une place minime au juge dans la recherche du droit au détriment de la toute-puissance du législateur. La doctrine soulignant, par exemple, « l’auto-réforme de la Cour de cassation est le projet de reconquérir un pouvoir perdu, le retour d’un vieux compte à régler » (F. Zenati-Castaing, « La juridictionnalisation de la Cour de cassation », RTDCiv. 2016, p. 511) ; « c’est le meurtre du père-législateur, la révolte des fils-juge avec l’aide de leur mère (CEDH) » (F. Rouvière, « Le contrôle de proportionnalité dans la balance du juge », RTDCiv. 2017, p. 524). Les juges nationaux, sous l’influence européenne, redéfinissent la place du droit dans notre démocratie amenant à ce que l’Etat national ne soit « plus maitre de son droit » (S. Guinchard, « Convention européenne des droits de l’homme et procédure civile », Répertoire Dalloz de procédure civile, avril 2017). Si cette évolution est appelée de leurs vœux du côté du juge judicaire, le juge administratif ne manque pas de rappeler à la mesure dans l’utilisation de ces nouveaux pouvoirs pour ne pas remettre en cause le principe même de la séparation des pouvoirs et du pouvoir d’appréciation du Gouvernement et du Parlement (J.-M. Sauvé, « Le principe de proportionnalité, protecteur des libertés », www.conseil-etat.fr, 17 mars 2017, l’auteur précisant que « le principe de proportionnalité est indispensable à la garantie de l’État de droit, mais il ne saurait conduire à méconnaître les intérêts généraux dont l’État et les collectivités publiques ont la charge et qui sont, avec les libertés et les droits fondamentaux, les piliers du vivre-ensemble »). Si les juges sont les nouveaux gardiens des droits fondamentaux à l’encontre des autres pouvoirs et précisément vis-à-vis du législateur, il est légitime de s’interroger sur les dangers d’une telle évolution. Une prise de pouvoir n’est jamais en soi protectrice des valeurs démocratiques fut ce pour défendre les droits fondamentaux, la nécessité d’un équilibre entre les pouvoirs doit toujours rester présente. Certains auteurs préconisent le retour du référé législatif pour maintenir cet équilibre qui permettrait de saisir les pouvoirs exécutif et législatif.
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