RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le pourvoi, enregistré le 14 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présenté par le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés ; le garde des sceaux, ministre de la justice et de libertés demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt n° 09NT01823, 09NT01824 du 14 octobre 2010 par lequel la cour administrative d’appel de Nantes a rejeté sa requête tendant à l’annulation de deux jugements n°08-763 et 08-1310 en date du 27 mai 2009 par lesquels le tribunal administratif de Nantes a annulé différentes décisions prises à l’encontre de M.A…, procédant à son affectation et à son maintien en régime différencié de détention au sein du centre pénitentiaire de Nantes ;
2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Eric Aubry, Conseiller d’Etat,
– les observations de Me Spinosi, avocat de M. B…A…,
– les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à Me Spinosi, avocat de M. B…A…;
1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, que par sept décisions successives prises entre septembre 2007 et mars 2008, le directeur du centre pénitentiaire de Nantes a décidé d’affecter puis de maintenir M.A…, qui y était incarcéré depuis le 30 mai 2007, en régime différencié de détention selon des modalités dénommées par le règlement intérieur de l’établissement » portes fermées » ; que, par un arrêt du 14 octobre 2012, la cour administrative d’appel de Nantes a rejeté l’appel formé par le garde des sceaux, ministre de la justice et de libertés contre les jugements par lesquels le tribunal administratif de Nantes a annulé les sept décisions successives ; que le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;
2. Considérant qu’aux termes de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l’administration : » Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979(…) n’interviennent qu’après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande des observations orales (…) » ;
3. Considérant que si la décision de placement d’un détenu en régime différencié, qui entraîne une aggravation de ses conditions de détention, ainsi que la décision maintenant un détenu dans ce régime, qui lui impose les mêmes contraintes, sont des décisions susceptibles de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir, elles n’entrent toutefois dans aucune des catégories de décisions qui doivent être motivées en application de l’article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des décisions administratives et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public et ne sont pas, par suite, au nombre des décisions mentionnées à l’article 24 de la loi du 12 avril 2000, qui ne peuvent intervenir qu’après que la personne intéressée a été mise à même de présenter ses observations ; que, par suite, le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés est fondé à soutenir qu’en annulant les décisions du directeur du centre de détention affectant et maintenant M. A…en régime différencié de détention au motif qu’elles méconnaissaient les dispositions de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000, la cour administrative de Nantes a méconnu le champ d’application de ces dispositions ; qu’il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre moyen de son pourvoi, que le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés est fondé à demander l’annulation de l’arrêt qu’il attaque ;
4. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de l’Etat, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
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Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes du 14 octobre 2010 est annulé.
Article 2 : L’affaire est renvoyée à la cour administrative d’appel de Nantes.
Article 3 : Les conclusions de M. A…présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la garde des sceaux, ministre de la justice et à M. B… A….