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CEDH, 10 octobre 2006, Coopérative des agriculteurs de Mayenne et coopérative laitière Maine-Anjou-France, req. n°16931/04

Citer : Revue générale du droit, 'CEDH, 10 octobre 2006, Coopérative des agriculteurs de Mayenne et coopérative laitière Maine-Anjou-France, req. n°16931/04, ' : Revue générale du droit on line, 2006, numéro 59501 (www.revuegeneraledudroit.eu/?p=59501)


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Décision citée par :
  • Christophe De Bernardinis, §2. Des rapports qui ont vocation à devenir directs pour matérialiser une garantie des droits et libertés commune


EN FAIT

Les requérantes, la Coopérative des agriculteurs de la Mayenne et la Coopérative laitière Maine-Anjou, sont des sociétés coopératives agricoles régies par le droit français et dont les sièges se trouvent respectivement à Laval et au Mans. Elles sont représentées devant la Cour par Me J.‑C. Cavaille, avocat à Lyon.

A.  Les circonstances de l’espèce

Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par les coopératives requérantes, peuvent se résumer comme suit.

Entre le 2 et le 13 novembre 1992, la première requérante, la Coopérative des agriculteurs de la Mayenne, fut contrôlée par les services de l’Office national interprofessionnel du lait et des produits laitiers (Onilait) aux fins notamment d’examiner la conformité des activités de cette coopérative avec les règlements communautaires no 804/68 du 27 juin 1968 et nos 856/84 et 857/84du 31 mars 1984 (voir infra, partie « Le droit pertinent »).

Par deux lettres du 29 juillet 1993, la Coopérative des agriculteurs de la Mayenne fut informée de ce que lesdits contrôles avaient mis en évidence des dépassements de quotas de production de lait au cours des campagnes laitières 1988/1989, 1989/1990 et 1990/1991. Par ces mêmes lettres, la requérante fut informée de ce qu’elle devait payer à l’Onilait les sommes de 9 105 335,50 francs français (FRF), 9 322 127,11 FRF et 14 534 813,51 FRF correspondant respectivement à chacune des campagnes contrôlées.

Par trois états exécutoires datés du 8 décembre 1993, le directeur de l’Onilait mit en demeure la Coopérative des agriculteurs de la Mayenne de verser à l’Onilait les sommes précitées.

Le 7 janvier 1994, la Coopérative des agriculteurs de la Mayenne saisit le tribunal administratif de Nantes d’une requête tendant à l’annulation desdits états exécutoires.

Le 9 mars 1994, cette coopérative a apporté sa branche de collecte du lait à une autre coopérative : la Coopérative laitière Maine-Anjou, la seconde requérante.

Le 15 avril 1994, la Coopérative laitière Maine-Anjou intervint dans la procédure précédemment introduite devant le tribunal administratif de Nantes et demanda à ce qu’il soit fait droit, par les mêmes moyens que ceux exposés par la première requérante, aux conclusions de la requête déposée par cette dernière.

Le 30 avril 1994, le directeur de l’Onilait émit un avis d’appel de versement à l’encontre de la première requérante afin d’obtenir paiement de la somme de 24 013 557,93 FRF, cette fois-ci au titre du prélèvement supplémentaire pour la campagne laitière 1991/1992. Le 16 juin 1994, un état exécutoire fut émis par le directeur de l’Onilait aux fins de paiement de ladite somme.

Le 3 juin 1994, les requérantes saisirent le tribunal administratif de Nantes d’une requête en annulation de l’appel de versement du 30 avril 1994. Elles sollicitèrent par la suite également l’annulation de l’état exécutoire du 16 juin 1994.

Par un premier jugement du 20 mai 1998, statuant sur la requête introduite le 7 janvier 1994 en annulation des états exécutoires du 8 décembre 1993, le tribunal administratif de Nantes, admit l’intervention de la seconde requérante et rejeta la requête de la première, notamment aux motifs suivants :

« (…) Considérant que les requêtes (…) présentées pour la Coopérative des Agriculteurs de la Mayenne et pour la Coopérative Laitière Maine-Anjou présentent à juger les mêmes questions et ont fait l’objet d’une instruction commune ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement ;

(…) Considérant que le jugement à rendre (…) est susceptible de préjudicier aux droits de la Coopérative Laitière Maine-Anjou ; que, dès lors, l’intervention de [celle-ci] est recevable ; (…)

Considérant qu’il résulte de l’instruction que l’Onilait a effectuée du 2 au 13 novembre 1992 des contrôles sur la comptabilité des campagnes 1988-1989, 1989‑1990 et 1990-1991 ; que ces contrôles ont fait apparaître des livraisons de lait qui n’avaient pas été déclarées par la Coopérative des Agriculteurs de la Mayenne, lesquelles sont l’objet des recouvrements contestés ; (…)

Sur le moyen tiré du défaut d’indication des bases de liquidation :

Considérant qu’en soutenant que l’Onilait ne lui a pas précisé le montant des dépassements litigieux, la Coopérative des Agriculteurs de la Mayenne doit être regardée comme se prévalant du défaut d’indication des bases de liquidation des créances objet des titres exécutoires attaqués ;

Considérant que si tout état exécutoire doit indiquer les bases de liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis, cette obligation ne joue pas lorsque ces bases ont été, par un acte antérieur, portées à la connaissance du débiteur ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que, contrairement à ce que soutient la Coopérative des Agriculteurs de la Mayenne qui avait reçu d’Onilait notification des quantités de référence attribuées au début de chacune des trois campagnes laitières 1988-1989, 1989-1990 et 1990-1991, cette coopérative avait été informée par cet établissement public, par trois lettres du 29 juillet 1993, des redressements d’assiette opérés consécutivement aux contrôles effectués du 2 au 13 novembre [1992] et des prélèvements supplémentaires en résultant ; qu’il suit de là que la Coopérative des Agriculteurs de la Mayenne dont la qualité d’acheteur, qu’elle ne saurait d’ailleurs sérieusement contester, l’obligeait à déterminer les producteurs dont les livraisons étaient en dépassement, n’est pas fondée à soutenir que les bases de liquidation des créances recouvrées seraient insuffisamment précisées ;

Sur le moyen tiré de ce que les modalités de répercussion du montant du prélèvement supplémentaire sur les producteurs n’étaient pas précisées par un arrêté préfectoral :

Considérant que contrairement à ce que soutient la coopérative requérante, qui ne se prévaut d’aucun texte précis, il ne résulte d’aucune disposition législative ou réglementaire, ni d’aucun autre texte, que les modalités de répercussion sur les producteurs du montant du prélèvement supplémentaire devaient dépendre d’un arrêté préfectoral ; que, dès lors, un tel moyen ne peut, en tout état de cause, qu’être rejeté ;

Sur le moyen tiré d’une inégalité de traitement entre les producteurs :

Considérant que si les dispositions du décret du 17 juillet 1984 reprises par celles du décret du 11 [février] 1991 font en partie dépendre les prélèvements dus par les producteurs en fonction de la situation de l’acheteur dont ils dépendent, la différence qui peut en résulter est inhérente au mécanisme de la formule « B » définie à l’article 5 quater du règlement (C.E.E.) no 804/68 ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que les états exécutoires attaqués, qui procèdent de l’application des prélèvements supplémentaires entraînés par des assimilations de collectes, feraient application de dispositions réglementaires discriminatoires ne peut, en tout état de cause, qu’être rejeté ;

Sur le moyen tiré du non-respect des objectifs communautaires :

Considérant que la coopérative requérante soutient que les titres exécutoires litigieux méconnaîtraient l’objectif de maîtrise de la croissance de la production laitière fixé par la réglementation communautaire aux motifs, d’une part, que les redressements ont été établis tardivement après la réalisation des campagnes, d’autre part, que les titres exécutoires attaqués ne permettent pas de déterminer l’affectation ultérieure des prélèvements ;

Considérant qu’en se bornant à formuler ces critiques dont, au demeurant, les développements qui précèdent montrent le caractère non fondé, la Coopérative des Agriculteurs de la Mayenne ne démontre nullement en quoi les titres exécutoires attaqués seraient contraires aux objectifs communautaires qu’elle allègue ; que, dès lors, ce moyen ne peut, également, qu’être rejeté ; (…) »

Par un second jugement du 20 mai 1998, le tribunal administratif de Nantes statuant sur le recours introduit le 3 juin 1994 conclut au rejet de celui-ci, notamment aux motifs suivants :

« (…) considérant que les requêtes (…) sont dirigées contre les deux actes d’une même procédure de recouvrement engagée par l’Onilait contre la première coopérative (…) et qu’elles ont fait l’objet d’une instruction commune ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement (…)

Sur le moyen tiré d’un défaut d’indication des bases de liquidation de la créance :

(…) Considérant qu’il résulte de l’instruction que l’avis d’appel de versement attaqué se réfère expressément aux dispositions du règlement (C.E.E.) no 804/68 précité, portant organisation des marchés dans le secteur du lait et des produits laitiers, lesquelles constituent la base légale du prélèvement litigieux ; qu’en outre, il indique de manière suffisamment détaillée les éléments chiffrés résultant du dépassement constaté en fin de campagne laitière 1991-1992 et du contrôle opéré en 1992, ainsi que les modalités de calcul de la créance litigieuse, permettant ainsi au débiteur d’en apprécier tant le bien-fondé que le montant ; qu’il suit de là que la Coopérative des Agriculteurs de la Mayenne dont la qualité d’acheteur, qu’elle ne saurait d’ailleurs sérieusement contester, l’obligeait à déterminer les producteurs dont les livraisons étaient en dépassement, et la Coopérative Maine-Anjou, ne sont pas fondées à soutenir que les bases de liquidation de la créance à recouvrer seraient insuffisamment précisées ;

Considérant, en second lieu, que si tout état exécutoire doit indiquer les bases de liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis, cette obligation ne joue pas lorsque ces bases ont été, par un acte antérieur, portées à la connaissance du débiteur ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que l’état exécutoire attaqué a été précédé de l’avis d’appel de versement précité, lequel précisait tant les textes qui constituent la base légale de la créance, que les éléments de calcul de celle-ci ; que, dès lors, l’obligation susrappelée doit être regardée comme s’étant trouvée remplie en l’espèce (…)

Sur le moyen tiré de ce que les modalités de répercussion du montant du prélèvement supplémentaire sur les producteurs n’étaient pas précisées par un arrêté préfectoral :

Considérant que contrairement à ce que soutiennent les coopératives requérantes, qui ne se prévalent d’aucun texte précis, il ne résulte d’aucune disposition législative ou réglementaire ni d’aucun autre texte, que les modalités de répercussion sur les producteurs du montant du prélèvement supplémentaire devaient dépendre d’un arrêté préfectoral ; que, dès lors, un tel moyen ne peut, en tout état de cause, qu’être rejeté ; (…) »

Le 28 août 1998, les requérantes interjetèrent appel à l’encontre des deux jugements du tribunal administratif de Nantes.

Par un premier arrêt du 14 juin 2000, la cour administrative d’appel de Nantes, statuant sur l’appel interjeté contre le premier jugement, rejeta le recours formé par les requérantes, notamment aux motifs suivants :

« (…) eu égard à l’obligation faite à l’Onilait, en application de la réglementation communautaire ainsi que du décret no 91-157 du 11 février 1991, de procéder au recouvrement du prélèvement supplémentaire dû par les acheteurs, les décisions par lesquelles cet établissement met ce prélèvement à la charge des acheteurs, ne peuvent être regardées comme des décisions administratives individuelles défavorables qui doivent être motivées en vertu de l’article 1er précité de la loi du 11 juillet 1979 (…)

Considérant qu’ainsi qu’il a été dit ci-dessus, la Coopérative des Agriculteurs de la Mayenne a été mise à même de contester l’ensemble des éléments du redressement opéré ; que par lettre du 13 mai 1993, l’Onilait lui a communiqué les conclusions résultant du contrôle sur place régulièrement effectué en novembre 1992 par des agents de l’Agence centrale des organismes d’intervention dans le secteur agricole (ACOFA) sur la base du décret no85-367 du 26 mars 1985 et de l’article 19 du décret susvisé du 11 février 1991, et lui a laissé un délai de réponse de quinze jours ; qu’elle a pu présenter ses observations, dont il a été tenu compte pour diminuer le redressement, tout au long de la procédure ; qu’ainsi, en tout état de cause, la Coopérative des Agriculteurs de la Mayenne n’est pas fondée à se prévaloir de ce que le principe du contradictoire ou les droits de la défense auraient été méconnus ; qu’aucun texte de droit communautaire ou de droit interne, ni aucun principe général du droit n’exigeait qu’elle soit informée qu’elle pouvait se faire assister d’un avocat ; que les requérantes ne sont pas fondées à invoquer la méconnaissance des stipulations des articles 6-1, 6-2 et 6-3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qui n’énoncent aucune règle ou aucun principe dont le champ d’application s’étendrait au-delà des procédures contentieuses suivies devant les juridictions, à l’égard de l’Onilait qui n’est pas une juridiction au sens de ces stipulations (…)

Considérant que si l’article 5 quater du règlement no 804/68 du Conseil des communautés européennes dans sa rédaction issue du règlement susmentionné no 856/84 prévoit que, dans le cadre de la formule B dont la France a choisi de faire application, le prélèvement supplémentaire est dû par les acheteurs de lait et que « l’acheteur redevable du prélèvement répercute ce dernier sur les seuls producteurs qui ont augmenté leurs livraisons, proportionnellement à leur contribution au dépassement de la quantité de référence de l’acheteur », ces dispositions n’ont pas pour effet d’imposer aux Etats membres l’instauration d’une procédure de répercussion du prélèvement sous contrôle de l’autorité publique, mais prévoient au contraire qu’il appartient aux acheteurs de procéder à cette répercussion sur les producteurs ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la réglementation française méconnaîtrait le règlement no 856/84 ne peut être accueilli ;

Considérant que le choix par la France de la formule B résulte des dispositions de l’article 5 quater du règlement no 804/68 du Conseil des communautés européennes dans sa rédaction issue du règlement no 856/84 du 31 mars 1984 dont la réglementation française s’est bornée sur ce point à faire application ; que, par suite, les moyens tirés de ce que cette réglementation méconnaîtrait les principes d’égalité et de proportionnalité sont en tout état de cause inopérants ;

(…) Considérant que lorsque le juge administratif est, comme en l’espèce, saisi de conclusions dirigées contre un état exécutoire ou un ordre de recettes, il lui appartient, après avoir contrôlé les faits invoqués et la qualification retenue par l’administration, de décider, selon le résultat de ce contrôle, de maintenir ou de réduire le montant de la somme demandée à l’intéressé et éventuellement de l’en décharger ; qu’en revanche, les dispositions relatives au prélèvement supplémentaire ne l’habilitent pas davantage que l’administration elle-même à en moduler le taux ; que le respect des stipulations de l’article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales n’implique pas non plus que le juge module le montant du prélèvement ; qu’ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance du droit à un procès équitable ne peut être accueilli ; (…) »

Par un second arrêt du 14 juin 2000, la cour administrative d’appel de Nantes, statuant sur l’appel interjeté contre le second jugement, rejeta le recours formé par les requérantes pour des motifs similaires à ceux reportés ci-dessus, ajoutant :

« (…) Considérant que la circonstance que l’arrêté du 20 juin 1992 relatif aux modalités de perception du prélèvement supplémentaire pour la campagne 1991/1992 soit intervenu après l’expiration de cette campagne, ne saurait le faire regarder comme entaché de rétroactivité illégale dès lors que le prélèvement, dont la base est constituée par les dépassements des intéressés au cours d’une campagne et dont l’assiette et le taux avaient été précisés par des arrêtés des 29 mars et 24 juillet 1991 intervenus avant l’expiration de la campagne, ne peut être perçu qu’à l’issue de chaque campagne ;

Considérant que le règlement no 3950/92 du Conseil des communautés européennes en date du 28 décembre 1992 ne s’appliquant qu’à partir de la campagne 1993/1994, le moyen tiré de ce que le décret du 11 février 1991 relatif à la maîtrise de la production de lait de vache méconnaîtrait ce règlement est inopérant dans le cadre du litige en cause relatif à la campagne 1991/1992 (…) »

Le 12 septembre 2000, les requérantes saisirent le Conseil d’Etat d’un pourvoi en cassation des deux arrêts rendus par la cour administrative d’appel de Nantes le 14 juin 2000. Elles firent notamment valoir que le prélèvement litigieux contrevenait aux dispositions de l’article 1 du Protocole no 1.

Par un arrêt du 5 novembre 2003, le Conseil d’Etat joignit les deux procédures litigieuses mais rejeta les requêtes ainsi jointes, aux motifs suivants :

« (…) Considérant que les requêtes susvisées présentent à juger les mêmes questions ; qu’il y a lieu de joindre pour statuer par une seule décision ;

(…) Considérant (…) que pour répondre aux moyens tirés de l’irrégularité de la procédure de vérification menée auprès de la Coopérative des Agriculteurs de la Mayenne, la cour a relevé que celle-ci avait été, conformément au principe général des droits de la défense, mise à même de contester les éléments du redressement opéré par la communication, par lettre du 13 mai 1993 de l’Onilait, des conclusions résultant du contrôle sur place régulièrement effectué en novembre 1992 par des agents de l’Agence centrale des organismes d’intervention dans le secteur agricole et qu’elle a pu présenter ses observations, dont il a été tenu compte notamment pour diminuer le redressement, tout au long de la procédure, qu’elle a écarté les moyens tirés de ce que la réglementation française méconnaîtrait la réglementation communautaire ou qu’elle serait contraire aux principes d’égalité et de proportionnalité ; qu’ainsi la cour a suffisamment répondu aux moyens, non inopérants, présentés devant elle ;

(…) Considérant qu’un état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la dette, alors même qu’il est émis par une personne publique autre que l’Etat pour lequel cette obligation est expressément prévue par l’article 81 du décret du 29 décembre 1962 ; qu’en application de ce principe, l’Onilait ne peut mettre en recouvrement un prélèvement supplémentaire sans indiquer, soit dans le titre lui-même, soit par référence à un document joint à l’état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde pour mettre les sommes en cause à la charge des redevables ; qu’en l’espèce, l’office a satisfait à cette obligation en faisant référence, dans les titres exécutoires contestés, aux lettres du 30 juillet 1993 adressées aux coopératives requérantes qui, dans le cadre de la procédure contradictoire que l’administration était tenue de suivre avant de corriger les bases déclarées, exposaient clairement les bases de la liquidation de la dette et dont les coopératives requérantes ne contestent pas avoir eu connaissance ; que par suite, la cour administrative d’appel de Nantes n’a commis aucune erreur de droit en considérant que les titres attaqués étaient réguliers ; (…) »

B.  Le droit pertinent

1.  Droit communautaire

a)  Règlement (CEE) no 804/68 du Conseil du 27 juin 1968 portant organisation commune des marchés dans le secteur du lait et des produits laitiers

« (…) considérant que le fonctionnement et le développement du marché commun pour les produits agricoles doivent s’accompagner de l’établissement d’une politique agricole commune et que celle-ci doit, notamment, comporter une organisation commune des marchés agricoles pouvant prendre diverses formes suivant les produits ;

(…) considérant que la politique agricole commune a pour but d’atteindre les objectifs de l’article 39 du traité ; que, notamment, dans le secteur du lait, il est nécessaire, afin de stabiliser les marchés et d’assurer un niveau de vie équitable à la population agricole intéressée, que les mesures d’intervention sur le marché continuent à être prises par les organismes d’intervention, tout en étant uniformisées afin de ne pas entraver la libre circulation, à l’intérieur de la Communauté, des produits considérés ;

(…) »

b)  Règlement (CEE) no 856/84 du Conseil du 31 mars 1984 modifiant le règlement (CEE) no 804/68 portant organisation commune des marchés dans le secteur du lait et des produits laitiers

« (…) Considérant que la situation du marché des produits laitiers dans la communauté est caractérisée par des excédents structurels résultant d’un déséquilibre entre l’offre et la demande des produits (…)

Considérant que, après un examen attentif des différentes solutions possibles pour rétablir l’équilibre du secteur laitier, il apparaît que, malgré les difficultés administratives que peut entraîner son application, la méthode à la fois la plus efficace et qui exerce l’effet le moins brutal sur le revenu des producteurs consiste à instaurer, pour une période de cinq ans, un prélèvement supplémentaire sur les quantités de lait collectées au-delà d’un seuil de garantie ;

(…)

Considérant que, compte tenu de la diversité des structures de production laitière dans les différentes régions de la communauté, des problèmes administratifs et des considérations de politique de développement régional, il apparaît nécessaire de créer la possibilité d’une option entre une formule de quantité de référence par producteur et une formule de quantité de référence par acheteur ;

Considérant que, lorsque le prélèvement est dû par l’acheteur, il convient d’assurer que ce dernier en répercute la charge sur les seuls producteurs qui ont augmenté leurs livraisons, proportionnellement à leur contribution au dépassement de la quantité de référence de l’acheteur ;

Considérant que le prélèvement prévu par le présent règlement est destiné à régulariser et à stabiliser le marché des produits laitiers ; qu’il convient dès lors d’affecter le produit dudit prélèvement au financement des dépenses dans le secteur laitier ;

(…)

Article 1er

Le règlement (CEE) no 804/68 est complété par l’article suivant :

« Article 5 quater :

1.  Pendant cinq périodes consécutives de douze mois débutant le 1er avril 1984, il est institué un prélèvement supplémentaire à la charge des producteurs ou des acheteurs de lait de vache. (…)

Le régime de prélèvement est mis en œuvre dans chaque région ou territoire des Etats Membres selon l’une des formules suivantes :

(…)

Formule B :

–  Un prélèvement est dû pour tout acheteur de lait ou d’autres produits laitiers sur les quantités de lait ou d’équivalent lait qui lui ont été livrées par les producteurs et qui pendant la période de douze mois en cause dépassent une quantité de référence à déterminer.

–  L’acheteur redevable du prélèvement répercute ce dernier sur les seuls producteurs qui ont augmenté leurs livraisons, proportionnellement à leur contribution au dépassement de la quantité de référence de l’acheteur. (…) »

c)  Règlement (CEE) no 857/84 du Conseil du 31 mars 1984 portant règles générales pour l’application du prélèvement visé à l’article 5 quater du règlement (CEE) no 804/68 dans le secteur du lait et des produits laitiers

« Considérant que l’article 5 quater du règlement (CEE) no 804/68 a institué un prélèvement dû par tout producteur ou tout acheteur de lait ou d’autres produits laitiers sur les quantités dépassant une quantité annuelle de référence ; que le montant de ce prélèvement doit en principe couvrir le coût d’écoulement du lait excédant la quantité de référence ; que, toutefois, lorsque le prélèvement est perçu au niveau de l’acheteur, son application ne frappe pas nécessairement toutes les quantités de lait livrées par chaque producteur et dépassant une quantité correspondant à celle retenue pour fixer la quantité de référence de l’acheteur ; que, afin d’obtenir une équivalence dans les résultats, il convient de fixer un montant du prélèvement plus élevé lorsqu’il est dû par l’acheteur ;

Considérant qu’il convient de fixer la quantité de référence en prenant comme base la quantité correspondant à l’année civile 1981 (…) augmentée de 1 % ; qu’il convient, toutefois, de permettre aux Etats Membres, pour des raisons concernant leurs conditions de production ou de collecte, de retenir comme base la quantité correspondant à l’année civile 1982 ou l’année civile 1983 affectée d’un pourcentage permettant d’atteindre le même résultat ;

(…)

Article 1er

1.  Le prélèvement visé à l’article 5 quater du règlement (CEE) no 804/68 est fixé à :

–  75 % du prix indicatif du lait, en cas d’application de la formule A,

–  100 % du prix indicatif du lait, en cas d’application de la formule B,

–  75 % du prix indicatif du lait, en cas de vente directe à la consommation. »

d)  Règlement (CEE) no 3880/89 du Conseil du 11 décembre 1989 modifiant le règlement (CEE) no 857/84

Article 1er

« Le règlement (CEE) no 857/84 est modifié comme suit :

1.  A l’article 1er paragraphe 1 premier et deuxième tirets, le chiffre de 100 % est remplacé par celui de 115 %.

(…) »

Article 2

« Le présent règlement (…) est applicable (…) à partir du début de la septième période du régime du prélèvement supplémentaire en ce qui concerne le point 1 de l’article 1er.

(…) »

2.  Droit français

Décret no 84-661 du 17 juillet 1984 relatif à la maîtrise de la production du lait de vache et aux modalités de recouvrement d’un prélèvement supplémentaire à la charge des acheteurs et des producteurs de lait de vache :

Article 1er

« L’office national interprofessionnel du lait et des produits laitiers ci-après dénommé Onilait est chargé, en ce qui concerne le lait de vache :

1.  De déterminer les quantités de référence, au sens de l’article 5 quater du règlement CEE no 804/68 (…) des acheteurs de lait et d’équivalent lait ; les quantités de référence des producteurs livrant leur production à des acheteurs leur sont notifiées par ces acheteurs ;

2.  De déterminer directement les quantités de référence des producteurs commercialisant leur production sans intermédiaire ;

(…)

4.  De procéder au recouvrement du prélèvement supplémentaire institué par les règlements communautaires no 804/68 modifié et no 857/84 (…) »

Article 2

« Le prélèvement supplémentaire mentionné à l’article 1er est dû par tout acheteur de lait ou d’autres produits laitiers sur la quantité de lait ou d’équivalent lait qui lui a été livrée, en dépassement de la quantité de référence qui lui est attribuée par l’Onilait.

L’acheteur redevable du prélèvement répercute ce dernier sur les seuls producteurs qui ont dépassé leur quantité de référence, proportionnellement à leur contribution au dépassement de la quantité de référence de l’acheteur. »

GRIEFS

1.  Invoquant l’article 6 de la Convention, les requérantes se plaignent de ne pas avoir disposé d’un recours de pleine juridiction afin de contester le principe et le montant du prélèvement qui leur a été imposé.

2.  Invoquant l’article 7 de la Convention, les requérantes se plaignent d’avoir été sanctionnées sans, selon elles, que le dépassement des quotas laitiers ait été expressément, et précisément, interdit par la loi.

3.  Invoquant l’article 13 de la Convention, les requérantes se plaignent de ce que le Conseil d’Etat n’aurait pas répondu à leur moyen de cassation tiré d’un défaut allégué d’absence de recours de pleine juridiction afin de contester le principe et le montant de la sanction qui leur a été imposée.

4.  Invoquant l’article 14 de la Convention, ainsi que l’article 1 du Protocole no 12 à la Convention, les requérantes se plaignent tout d’abord de ce que le Conseil d’Etat aurait privilégié la stabilité du marché du lait à la protection de leurs droits. Elles estiment que la sensibilité politique et économique de l’objet du litige les a empêchées, sur un fondement discriminatoire, de bénéficier des garanties d’accès à un tribunal dont jouissent les autres justiciables. Elles contestent également l’application de régimes juridiques distincts et de voies d’exécution différentes, d’une part, à la créance de l’Onilait sur les coopératives requérantes, d’autre part, à la créance des coopératives requérantes sur les producteurs de lait. Elles estiment enfin que le choix par la France de la « formule B » les place dans une situation discriminatoire vis-à-vis des acheteurs des autres pays membres, à l’époque, de la Communauté européenne et ayant choisi la « formule A ».

5.  Invoquant l’article 1 du Protocole no 1, les requérantes se plaignent de la privation totale de leur droit de propriété sur la production de lait excédant la quantité de référence. Elles estiment que cette ingérence est disproportionnée par rapport à l’objectif d’intérêt général que représente la maîtrise de la production laitière. Elles contestent également la pertinence duprincipe visant à sanctionner les acheteurs, lequel sanctionne in fine tous les coopérateurs de la filière (producteurs et acheteurs) alors que seuls certains producteurs seraient fautifs.

EN DROIT

1.  Les requérantes allèguent, tout d’abord, une violation de l’article 6 § 1 de la Convention, dont les dispositions pertinentes se lisent comme suit :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (…) par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (…) »

Elles se plaignent de ne pas avoir disposé d’un recours de pleine juridiction afin de contester le mécanisme de prélèvement litigieux.

La Cour relève d’emblée que les juridictions saisies en première instance et en appel étaient, sans équivoque possible, compétentes pour statuer en fait et en droit et revêtaient dès lors la qualification d’organe de pleine juridiction. Elles avaient d’ailleurs, contrairement aux allégations des requérantes, compétence pour statuer tant sur le principe que sur le montant des prélèvements contestés.

Il s’ensuit que ce grief est manifestement mal fondé et doit être rejeté en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

2.  Les requérantes allèguent ensuite une violation de l’article 7 de la Convention, dont les dispositions pertinentes se lisent comme suit :

« 1.  Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d’après le droit national ou international. De même il n’est infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l’infraction a été commise.

(…) »

Elles contestent la légalité des sanctions qui leur ont été infligées.

Outre le fait que ce grief n’a pas été soulevé devant le Conseil d’Etat, la Cour ne relève en tout état de cause en l’espèce aucune « condamnation » au sens de l’article 7 de la Convention qui n’a, dès lors, pas vocation à s’appliquer aux circonstances de la cause (voir, mutatis mutandis, Erre c. France (déc.), no 35324/02, 8 juin 2004).

Il s’ensuit que ce grief est incompatible ratione materiae avec les dispositions de la Convention au sens de l’article 35 § 3 et doit être rejeté en application de l’article 35 § 4.

3.  Les requérantes allèguent par ailleurs une violation de l’article 13 de la Convention, qui se lit comme suit :

« Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la (…) Convention ont été violés, a droit à l’octroi d’un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles. »

Les requérantes contestent la motivation du Conseil d’Etat qui n’aurait pas répondu à l’un de leurs moyens de cassation tiré d’une violation alléguée de l’article 6 de la Convention.

La Cour note d’emblée que ce grief relève du champ d’application de l’article 6 de la Convention. Maîtresse de la qualification juridique des faits de la cause (Guerra et autres c. Italie, 19 février 1998, § 44, Recueil des arrêts et décisions 1998-I), elle estime que ce grief est à examiner sous l’angle unique de cette dernière disposition de la Convention.

La Cour rappelle ensuite que l’article 6 § 1 de la Convention oblige les tribunaux à motiver leurs décisions, mais qu’il ne peut se comprendre comme exigeant une réponse détaillée à chaque argument (Van de Hurk c. Pays-Bas, 19 avril 1994, § 61, série A no 288). En outre, à la lecture de l’arrêt contesté et au vu notamment du caractère spécifique de la procédure devant la haute juridiction administrative française, la Cour considère qu’il n’apparaît pas en l’espèce que le Conseil d’Etat ait manqué à son obligation de motivation. Elle relève au contraire qu’il a été procédé à un contrôle réel et approfondi des deux arrêts faisant l’objet du pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat.

Il s’ensuit que ce grief est manifestement mal fondé et doit être rejeté en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

4.  Les requérantes allèguent également plusieurs violations de l’article 14 de la Convention, dont les dispositions pertinentes se lisent comme suit :

« La jouissance des droits et libertés reconnus dans la (…) Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur (…) l’origine nationale ou sociale (…), la fortune (…) ou toute autre situation. »

La Cour constate que les requérantes visent également à l’appui de ce grief l’article 1 du Protocole no 12 à la Convention. Elle relève toutefois d’emblée qu’elle n’a pas compétence pour examiner ce grief sous l’angle de ce Protocole, lequel instrument n’a pas été ratifié par la France.

La Cour rappelle ensuite, dans la mesure où est en cause l’article 14 de la Convention, la condition d’épuisement des voies de recours internes prévue à l’article 35 § 1 de la Convention.

En l’espèce, la Cour relève que si le principe d’égalité posé à l’article 40 du Traité de Rome fut rapidement visé par les requérantes dans les moyens qu’elles ont soumis au juge de cassation, aucune démonstration se rapprochant du présent grief n’y fut véritablement développée. La Cour estime dès lors que les conclusions soumises au juge de cassation ne contiennent pas de construction argumentée constituant à proprement parler un grief alléguant que le mécanisme de prélèvement litigieux serait basé sur des fondements discriminatoires.

Il s’ensuit que ce grief doit être rejeté pour non-épuisement des voies de recours internes, en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.

5.  Les requérantes allèguent enfin une violation de l’article 1 du Protocole no 1, qui se lit comme suit :

« Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes. »

Elles estiment que le prélèvement litigieux les a privées d’un bien légitimement acquis et n’est pas nécessaire dans une société démocratique.

Si la Cour a reconnu que de tels prélèvements pouvaient en effet constituer une ingérence dans le droit des producteurs ou des acheteurs au respect de leurs biens (Procola et autres c. Luxembourg, no 14570/89, décision de la Commission du 1er juillet 1993, Décisions et rapports 75), elle estime qu’en l’espèce cette ingérence est, sans conteste, justifiée au regard de l’article 1 du Protocole no 1.

Elle relève en effet tout d’abord que la base légale litigieuse est constituée par des dispositions de droit communautaire (à savoir notamment l’article 1er du règlement (CEE) no 857/84, voir supra, « Le droit pertinent ») qui posent en termes précis le montant du prélèvement contesté, sans que les autorités françaises aient pu disposer d’un quelconque pouvoir d’appréciation sur ce montant.

La Cour rappelle ensuite, quant à la légitimité du but poursuivi, que les organes de la Convention ont déjà eu l’occasion de souligner l’intérêt général d’une maîtrise de la production laitière, politique qualifiée à cette occasion de « cause d’utilité publique, dans la mesure où elle vise à stabiliser ce marché » (Procola et autres, décision précitée). La Cour ajoute que le respect de cette politique par les autorités des Etats membres de l’Union européenne concourt légitimement à l’efficacité de la coopération internationale et à la nécessité d’assurer le bon fonctionnement des organisations internationales (Bosphorus Hava Yolları Turizm ve Ticaret Anonim Şirketi (Bosphorus Airways) c. Irlande ([GC], no 45036/98, CEDH 2005‑VI).

La Cour note enfin et surtout, comme la Commission l’avait elle-même souligné dans la décision Procola et autres, que la stabilisation du marché du lait bénéficie directement aux requérantes et que le système choisi par la France permet de répercuter le prélèvement litigieux sur les producteurs en dépassement.

Partant, la Cour estime que pareille espèce ne fait pas apparaître une insuffisance manifeste dans la protection des droits garantis par la Convention qui pourrait renverser la présomption de protection, par l’ordre juridique communautaire, de ces droits, telle qu’elle a été dégagée par la Grande Chambre de la Cour dans l’affaire Bosphorus Airways (précitée).

Il s’ensuit que ce grief est manifestement mal fondé et doit être rejeté en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

Déclare la requête irrecevable.

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