Vu LA REQUÊTE présentée pour le sieur Vesin, industriel…, et tendant à ce qu’il plaise au Conseil annuler un ordre de versement d’une somme de 24.980 fr. 15 délivré par le ministre des Finances le 31 juill. 1923 en vertu d’un arrêté de débet du ministre de la Guerre du 12 mars 1923 non antérieurement notifié, et, en tant que de besoin, ledit arrêté de débet; Vu le décret du 11 juin 1806 et la loi du 24 mai 1872;
Sur les conclusions dirigées contre la lettre du 31 juill. 1923 de l’agent judiciaire du Trésor public : — Cons. que cette lettre contient une simple invitation au sieur Vesin de payer la somme mise à sa charge par l’arrêté de débet du 12 mars 1923; qu’elle ne constitue pas une décision pouvant faire l’objet d’un recours devant le Conseil d’Etat;
Sur les moyens tirés de ce que le requérant n’aurait pas commis de fraudes dans l’exécution de son marché des 29 mars et 19 mai 1917, et, subsidiairement, de ce que les fraudes en les supposant établies n’auraient pas été préjudiciables à l’Etat : — Cons. qu’aux termes des dispositions de l’art. 433 du Code pénal, les individus chargés de fournitures pour le compte des armées, coupables de fraudes sur la nature, la qualité ou la quantité des choses fournies, seront punis d’un emprisonnement de six mois au moins, de cinq ans au plus, et d’une amende qui ne pourra excéder le quart des dommages-intérêts, ni être moindre de cent francs;
Cons. que, par jugement du premier conseil de guerre de Lyon du 11 nov. 1919, le sieur Vesin a été déclaré « coupable de fraudes sur la nature et sur la qualité des choses fournies, notamment en rendant illusoire les opérations. du contrôle militaire par la substitution de tubes de métal soigneusement finis aux tubes prélevés par ledit contrôle en vue de la vérification »; qu’à raison de ces faits, il a été condamné, après cassation du jugement du 11 nov. 1919 en ce qui concerne l’application de la peine seulement, par jugement du deuxième conseil de guerre de Lyon, du 31 mars 1920, à cinq ans d’emprisonnement et à 36.000 francs d’amende, le conseil de guerre ayant fixé à la somme de 153.400 fr. 50 le préjudice causé par les fraudes;
Cons. qu’à raison de l’autorité de la chose jugée par le conseil de guerre le 11 nov. 1919 et le 31 mars 1920, le sieur Vesin n’est recevable ni à soutenir qu’il n’a pas commis de fraudes dans l’exécution de son marché, ni à prétendre subsidiairement que ces fraudes n’ont pas causé de préjudice à l’Etat;
Sur le moyen tiré de ce que l’arrêté de débet attaqué aurait été pris en violation de l’art. 12, § 1, des clauses administratives du marché: — Cons. que si, aux termes de l’art. 12, § 1, des clauses administratives du marché, les rebuts prononcés par l’établissement destinataire doivent avoir lieu au plus tard dans les trois mois à partir de la dernière livraison, cette disposition ne saurait être invoquée dans le cas où le fournisseur s’est rendu coupable de fraudes dans l’exécution de son marché;
Sur les autres moyens de la requête : — Cons., d’une part, qu’en admettant que l’administration ait causé au sieur Vesin un préjudice, en lui livrant des tôles d’acier défectueuses et en n’exécutant pas l’engagement pris envers lui par un agent de l’Etat, d’ailleurs sans qualité pour le représenter, de ne plus rien lui réclamer après le règlement de l’arrêté de débet du 6 avr. 1922, ce préjudice ne saurait être évalué à une somme supérieure à celle que, conformément à la décision du conseil de guerre de Lyon, l’Etat aurait été en droit de lui réclamer, en sus des sommes déjà mises à sa charge par les deux arrêtés de débet du 6 avr. 1922 et du 12 mars 1923;
Cons., d’autre part, que le sieur Vesin n’est pas recevable à critiquer, pour obtenir une réduction de la somme mise à sa charge par l’arrêté de débet du 12 mars 1923, le règlement de compte du métal fourni par l’administration qui a donné lieu, au premier arrêté de débet du 6 avr. 1922, non attaqué dans le délai légal;… (Rejet).