REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat le 10 décembre 1998, présentée par M. Messaoud Y…, élisant domicile chez Me André X…, 4, cours Albert Puget à Marseille (13005) ; M. Y… demande que le Conseil d’Etat annule pour excès de pouvoir le décret du 10 septembre 1998 lui refusant l’acquisition de la nationalité française ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
– le rapport de Mme Jodeau-Grymberg, Maître des Requêtes,
– les conclusions de M. Martin Laprade, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que si en vertu de l’article 21-2 du code civil, l’étranger qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française peut acquérir la nationalité française par déclaration, le premier alinéa de l’article 21-4 du même code dispose que : « Le gouvernement peut s’opposer par décret en Conseil d’Etat, pour indignité ou défaut d’assimilation, à l’acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger dans un délai d’un an à compter de la date du récépissé prévu au deuxième alinéa de l’article 26 ou, si l’enregistrement a été refusé, à compter du jour où la décision judiciaire admettant la régularité de la déclaration est passée en force de chose jugée » ;
Considérant que pour refuser l’acquisition de la nationalité française à M. Y…, le ministre de l’emploi et de la solidarité s’est fondé sur le motif que celui-ci était poursuivi pour importation, acquisition, détention, transport, offre ou cession de stupéfiants et association de malfaiteurs et que ces faits étaient constitutifs d’indignité par leur gravité et leur caractère récent ; que le principe de la présomption d’innocence ne faisait pas obstacle à ce que le gouvernement fasse application des dispositions précitées de l’article 21-4 du code civil, alors même qu’aucune juridiction pénale ne s’était encore prononcée sur les faits reprochés à M. Y…, dès lors que la réalité en était suffisamment établie au vu de l’ensemble du dossier dont disposait l’administration ; que d’ailleurs, par un jugement du tribunal correctionnel de Marseille du 16 juin 1999 devenu définitif, une condamnation pénale a été prononcée à l’encontre de M. Y… à raison des faits susvisés ;
Considérant que si M. Y… soutient que le décret attaqué entraînerait des conséquences excessives pour lui-même et sa famille compte tenu des risques auxquels ils s’exposeraient en retournant en Algérie, ce moyen est sans influence sur la légalité dudit décret qui n’a, par lui-même, aucun effet sur la régularité de son séjour en France ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. Y… n’est pas fondé à demander l’annulation pour excès de pouvoir du décret du 10 septembre 1998 ;
Article 1er : La requête de M. Y… est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Messaoud Y… et au ministre de l’emploi et de la solidarité.