REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 avril et 6 août 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la FEDERATION NATIONALE DES SYNDICATS DE PROPRIETAIRES FORESTIERS SYLVICULTEURS, dont le siège est situé … ; la FEDERATION NATIONALE DES SYNDICATS DE PROPRIETAIRES FORESTIERS SYLVICULTEURS demande au Conseil d’Etat d’annuler pour excès de pouvoir l’article 1er du décret n° 99-112 du 18 février 1999 relatif à l’interdiction et à la réglementation des plantations et semis d’essences forestières et modifiant le code rural ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 ;
Vu la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 ;
Vu la loi n° 95-101 du 2 février 1995 ;
Vu l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
– le rapport de Mme Le Bihan-Graf, Auditeur,
– les observations de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de la FEDERATIONNATIONALE DES SYNDICATS DE PROPRIETAIRES FORESTIERS SYLVICULTEURS,
– les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 126-1 du code rural, dans sa rédaction issue de la loi du 2 février 1995 susvisée : « Afin de favoriser une meilleure répartition des terres entre les productions agricoles, la forêt, les espaces de nature ou de loisirs et les espaces habités en milieu rural et d’assurer la préservation de milieux naturels ou de paysages remarquables, les préfets peuvent, après avis des chambres d’agriculture, des centres régionaux de la propriété forestière et des conseils généraux, définir : 1° Les zones dans lesquelles des plantations et des semis d’essences forestières peuvent être interdits ou réglementés. Les interdictions et les réglementations ne sont pas applicables aux parcs ou jardins attenant à une habitation ( …) » ; que, selon l’article 2 de la loi susvisée du 3 janvier 1992 : « Les dispositions de la présente loi ont pour objet une gestion équilibrée de la ressource en eau./ Cette gestion équilibrée vise à assurer : la préservation des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides ( …) » ; qu’aux termes de l’article R. 126-1 du code rural modifié par le décret attaqué du 18 février 1999 « Les interdictions ou réglementations de plantations et de semis d’essences forestières prévues au 1° de l’article L. 126-1 doivent être justifiées par l’un des motifs suivants : ( …) 4° Atteintes que les boisements porteraient au caractère remarquable des paysages, attesté notamment par une mesure de classement, d’inscription, de protection ou d’identification ; 5° Atteintes aux milieux naturels et à la gestion équilibrée de l’eau, telle que définie à l’article 2 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 » ;
Considérant que si la loi du 2 février 1995 a entendu limiter l’interdiction ou la réglementation des plantations et semis d’essences forestières aux seuls paysages remarquables, elle a également entendu assurer la préservation des milieux naturels présentant un intérêt particulier ; que le décret attaqué, pris pour son application, n’a eu ni pour objet ni pour effet d’étendre les mesures de préservation prévues par la loi à des milieux naturels qui ne présenteraient pas un tel intérêt ; que les interdictions et réglementations prévues à cet effet, soumises au contrôle du juge de l’excès de pouvoir, ne doivent pas être disproportionnées par rapport à l’objectif poursuivi ; qu’en outre, les auteurs du décret ont pu légalement prévoir que les mesures de protection des milieux naturels présentant un intérêt particulier pourraient avoir pour objet d’assurer la gestion équilibrée de l’eau au sens de l’article 2 précité de la loi susvisée du 3 janvier 1992 ;
Considérant que le décret du 18 février 1999 qui, ainsi qu’il a été dit ci-dessus, n’a pas pour effet d’étendre le champ d’application de la loi du 2 février 1995, n’apporte pas au droit de propriété d’autres restrictions que celles que prévoit la loi elle-même ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué violerait les dispositions de l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 ne peut qu’être écarté ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la FEDERATION NATIONALE DES SYNDICATS DE PROPRIETAIRES FORESTIERS SYLVICULTEURS n’est pas fondée à demander l’annulation du décret du 18 février 1999 ;
Article 1er : La requête de la FEDERATION NATIONALE DES SYNDICATS DE PROPRIETAIRES FORESTIERS SYLVICULTEURS est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION NATIONALE DES SYNDICATS DE PROPRIETAIRES FORESTIERS SYLVICULTEURS, au Premier ministre, au ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement et au ministre de l’agriculture et de la pêche.