Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 février et 9 juin 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DES COTES-D’ARMOR, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DES COTES-D’ARMOR demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt du 14 octobre 2005 par lequel la cour administrative d’appel de Nantes a rejeté sa requête tendant à l’annulation du jugement du 2 juin 2004 du tribunal administratif de Rennes le condamnant à verser diverses sommes à la société Corre et à la société Generali Dommages en réparation des préjudices qu’elles ont subis en raison du comportement du jeune Ludovic L., alors pris en charge par les services de l’aide sociale à l’enfance du département ;
2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de la société Corre et de la société Generali Dommages la somme de 2 800 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l’action sociale et des familles ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Xavier Domino, Auditeur,
– les observations de Me Odent, avocat du DEPARTEMENT DES COTES-D’ARMOR,
– les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par deux arrêtés des 28 avril et 30 novembre 2000, le président du conseil général des Côtes d’Armor a, à la demande des parents du jeune Ludovic , alors âgé de 16 ans, temporairement admis celui-ci dans le service de l’aide sociale à l’enfance du département pour deux périodes successives, dont la dernière devait prendre fin le 25 juin 2001 ; que, dans la nuit du 18 au 19 septembre 2000, le jeune homme a volé un véhicule appartenant à la société Corre avec lequel il a ensuite provoqué divers dommages dont la réparation a été assurée par cette société, qui a été partiellement indemnisée par son assureur, la société Zurich France, aux droits de laquelle est ultérieurement venue la société Generali Dommages ;
Considérant que le DEPARTEMENT DES COTES D’ARMOR se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 14 octobre 2005 par lequel la cour administrative d’appel de Nantes a rejeté sa requête tendant à l’annulation du jugement du 2 juin 2004 par lequel le tribunal administratif l’a condamné à payer les sommes de 1 298,92 euros et 10 373,70 euros, respectivement aux sociétés Corre et Generali Dommages, à raison des préjudices qu’elles ont subis du fait du comportement du jeune Ludovic ;
Considérant, en premier lieu, qu’il ressort des motifs de l’arrêt attaqué que la cour administrative d’appel a constaté que la société Corre avait, après avoir subi divers dommages causés dans les circonstances rappelées ci-dessus, été partiellement indemnisée du préjudice qu’elle avait subi par la société Zurich France, aux droits de laquelle est ultérieurement venue la société Generali dommages ; qu’ainsi le moyen tiré de ce que la cour n’aurait pas répondu au moyen soulevé devant elle et tiré de ce que les sociétés en cause n’auraient pas subi de préjudice manque en fait ;
Considérant, en second lieu, qu’aux termes de l’article 46 du code de la famille et de l’aide sociale alors en vigueur, dont les dispositions ont été reprises à l’article L. 222-5 du code de l’action sociale et des familles : Sont pris en charge par le service de l’aide sociale à l’enfance sur décision du président du conseil général : 1° Les mineurs qui ne peuvent provisoirement être maintenus dans leur milieu de vie habituel (…) » ; que la décision par laquelle le président du conseil général admet la prise en charge d’un mineur par le service de l’aide sociale à l’enfance du département a pour effet de transférer à ce dernier la responsabilité d’organiser, diriger et contrôler la vie du mineur pendant la durée de sa prise en charge ; qu’en raison des pouvoirs dont le département se trouve ainsi investi lorsque le mineur est placé dans un service ou établissement qui relève de son autorité, sa responsabilité est engagée, même sans faute, pour les dommages causés aux tiers par ce mineur ; que cette responsabilité n’est susceptible d’être atténuée ou supprimée que dans le cas où elle est imputable à un cas de force majeure ou à une faute de la victime ; qu’ainsi, après avoir constaté qu’il n’était fait état, en l’espèce, d’aucune de ces dernières circonstances, la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit en reconnaissant la responsabilité sans faute du DEPARTEMENT DES COTES D’ARMOR ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le DEPARTEMENT DES COTES D’ARMOR n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu’être rejetées ;
D E C I D E : ————– Article 1er : La requête du DEPARTEMENT DES COTES D’ARMOR est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée au DEPARTEMENT DES COTES-D’ARMOR, à la société Corre et à la compagnie d’assurances Generali dommages.