Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 avril et 11 août 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER EMILE Y…, dont le siège est …, BP 352 au Puy-en-Velay (43012), représenté par son directeur en exercice ; le CENTRE HOSPITALIER EMILE Y… demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 11 février 2003 par lequel la cour administrative d’appel de Lyon a, à la demande des époux Y, 1°) annulé le jugement du 10 février 2000 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand rejetant leur demande tendant à la condamnation du CENTRE HOSPITALIER EMILE Y… à leur verser une indemnité de 500 000 F en réparation du préjudice que leur a causé la faute commise par cet établissement en ne les informant pas, à la suite de deux échographies, que leur enfant pouvait être atteint d’une malformation, 2°) condamné le CENTRE HOSPITALIER EMILE Y… à leur verser la somme de 3 000 euros en réparation du préjudice qu’ils ont subi et 3°) mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER EMILE Y… les frais d’expertise en première instance ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Yves Gounin, Maître des Requêtes,
– les observations de Me Le Prado, avocat du CENTRE HOSPITALIER EMILE X… EN VELAY,
– les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé : … Lorsque la responsabilité d’un professionnel ou d’un établissement de santé est engagée vis à vis des parents d’un enfant né avec un handicap non décelé pendant la grossesse à la suite d’une faute caractérisée les parents peuvent demander une indemnité au titre de leur seul préjudice… ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme Y a donné naissance à un enfant affecté d’une agénésie totale de la main gauche alors que les deux examens échographiques qu’elle avait subis au CENTRE HOSPITALIER EMILE Y…, le premier à dix-neuf semaines de grossesse, le second à trente, n’avaient révélé aucune anomalie du foetus ; que ces échographies avaient été réalisées dans des conditions normales et que leurs résultats n’avaient ainsi pas été affectés d’une marge d’erreur inhabituelle pour ce type d’examen ; que la grossesse s’est déroulée normalement et en l’absence d’antécédents médicaux familiaux laissant suspecter une anomalie du foetus, comme celle, très rare, qui s’est réalisée ; que la cour administrative d’appel de Lyon a commis une erreur de qualification juridique des faits en jugeant que le praticien avait commis une faute qui, par son intensité et son évidence, doit être regardée comme caractérisée au sens des dispositions précitées de la loi du 4 mars 2002 en s’abstenant d’informer les parents que, bien que les échographies n’aient fait apparaître aucune anomalie, leurs résultats étaient affectés de la marge d’erreur habituelle pour ce type d’examen, laquelle est importante pour ce qui est de l’observation de l’extrémité des membres du foetus ; que le CENTRE HOSPITALIER EMILE Y… est dès lors fondé à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;
Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu en application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative de régler l’affaire au fond ;
Considérant, ainsi qu’il a été dit ci-dessus, que M. et Mme Y ne sont pas fondés à soutenir que le CENTRE HOSPITALIER EMILE Y… a commis, dans le suivi de la grossesse, une faute caractérisée de nature à engager sa responsabilité ; que, dès lors, ils ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande tendant à la réparation du préjudice qu’ils estiment avoir subi ;
En ce qui concerne les frais d’expertise exposés en première instance :
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’affaire, de mettre ces frais à la charge du CENTRE HOSPITALIER EMILE Y… ;
Sur les conclusions d’appel de M. et Mme Y tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CENTRE HOSPITALIER EMILE Y… qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. et Mme Y demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon en date du 11 février 2003 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par M. et Mme Y devant la cour administrative d’appel de Lyon est rejetée.
Article 3 : Les frais d’expertise en première instance sont mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER EMILE Y….
Article 4 : La présente décision sera notifiée au CENTRE HOSPITALIER EMILE Y…, à M. et Mme Y et au ministre des solidarités, de la santé et de la famille.