REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Joint les pourvois n° G 07-15.583 et n° B 07-15.692 ;
Donne acte aux époux X… du désistement de leur pourvoi en ce qu’il est dirigé contre Mme Y… ;
Donne acte à M. Z… du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre Mme Y… ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 février 2007), que, le 7 janvier 1967, les époux X… ont acheté une villa édifiée sur un terrain en forte pente située à Eze-sur-Mer, comprenant trois niveaux, à M. A…, son constructeur ; que les époux X… ont confié à M. A… la réalisation de travaux consistant en l’aménagement d’un appartement au niveau intermédiaire et la construction à ce niveau d’un vaste balcon en porte à faux côté aval ; que des fissures étant apparues, M. B… et M. Z… ont été désignés en qualité d’experts ; qu’après dépôt de leur rapport, la cour d’appel a condamné les héritiers de M. A…, M. C…, architecte ayant conçu le balcon, et M. D…, ingénieur en béton ayant participé à la réalisation du balcon, à supporter le coût des travaux préconisés par les experts et commis ces derniers pour contrôler la bonne fin des travaux ; que les experts ont déposé le 16 janvier 1986 un rapport expliquant l’impossibilité de réunir les sommes nécessaires aux travaux de reprise par suite de la défaillance des héritiers de M. A… et la nécessité de rechercher une solution plus économique comportant un allégement des contreventements en béton armé prévus pour la reprise des fondations par micro-pieux ; que ces travaux ont été réalisés en 1994 ; que, par acte authentique du 26 mars 1999, les époux X… ont vendu la villa à Mme E… ; que celle-ci envisageant d’aménager sa villa par la création d’un escalier et d’un ascenseur monte-charge destinés à relier par l’intérieur les deux niveaux d’habitation, s’est adressée à des hommes de l’art, lesquels ont pressenti que les fissures affectant le bâtiment provenaient d’une défectuosité des fondations, qu’une expertise a été confiée à M. F… ; que par acte du 13 octobre 2002, Mme E… a assigné les époux X… sur le fondement de la garantie des vices cachés ; que, par acte des 10 et 15 mars 2004, les époux X… ont appelé en garantie les experts ; que M. Z… a soulevé la fin de non recevoir tirée de la prescription de l’action en garantie ;
Sur le premier moyen du pourvoi n° B 07-15.692 :
Attendu que M. Z… fait grief à l’arrêt de rejeter cette fin de non recevoir, alors, selon le moyen, que l’action en responsabilité dirigée contre un expert judiciaire pour des faits se rapportant à l’exercice de ses fonctions se prescrit par dix ans à compter de la fin de sa mission ; qu’en écartant la fin de non recevoir opposée par M. Z… à l’action en responsabilité exercée contre lui par les époux X… par une assignation en garantie délivrée le 10 mars 2004, quand la mission de M. Z…, expert judiciaire auteur d’un premier rapport au mois de mars 1977, désigné une seconde fois par un arrêt du 2 juin 1981 de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, avait pris fin avec le dépôt de son rapport le 16 janvier 1986, soit plus de dix ans avant l’action en responsabilité exercée contre lui, la cour d’appel a violé l’article 6-3 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires, dans sa rédaction, applicable à la cause, issue de la loi n° 2004-130 du 11 février 2004 ;
Mais attendu que, lorsque la loi réduit la durée d’une prescription, la prescription réduite commence à courir, sauf disposition contraire, du jour de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder le délai prévu par la loi antérieure ; que la cour d’appel a exactement retenu que la prescription de l’action en responsabilité n’avait couru qu’à compter de la réalisation du dommage résultant pour les époux X… de l’assignation délivrée le 13 octobre 2002 par Mme E…, qui engageait l’action en garantie pour vices cachés et que la fin de non recevoir devait être rejetée ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi n° B 07-15.692, ci-après annexé :
Attendu qu’ayant relevé sans violer l’article 16 du code de procédure civile qu’il existait d’autres pièces, et notamment le propre rapport de M. Z…, du 16 janvier 1986, dont il résultait que celui-ci, chargé d’une mission de bonne fin, n’avait pas respecté ses propres préconisations, entérinées par la cour d’appel, en escomptant à tort une stabilisation pérenne du bâtiment, pour proposer des travaux de confortement au rabais sur des remblais au lieu d’ancrer les fondations aval sur le sous-sol stable, la cour d’appel a retenu, abstraction faite d’un motif erroné mais surabondant relatif à l’opposabilité du rapport de M. F…, que cette faute était directement à l’origine des désordres constatés en 2000 ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi n° G 07-15.583 :
Vu l’article 1382 du code civil ;
Attendu que pour condamner M. Z… à ne garantir les époux X… qu’à concurrence de la moitié des condamnations prononcées contre eux, l’arrêt retient que les époux X… ont eux-mêmes concouru à leur propre dommage en ne révélant pas à leur acquéreur l’existence de la procédure antérieure et la cause possible des fissures récurrentes, et en ne lui donnant pas les informations pertinentes, les privant par leur propre faute du bénéfice de la clause de non garantie et qu’en raison des fautes respectives ainsi commises, le recours en garantie formé par les époux X… contre M. Z… serait limité à la moitié des condamnations prononcées contre les époux X… ;
Qu’en statuant ainsi, sans rechercher si le manquement contractuel qu’elle relevait constituait une faute quasi délictuelle à l’égard de M. Z…, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a condamné M. Z… à garantir les époux X… à concurrence de la moitié des condamnations prononcées contre eux, l’arrêt rendu le 13 février 2007, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne M. Z… aux dépens des pourvois ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne M. Z… à payer aux époux X… la somme de 2 500 euros ; rejette les demandes des époux X… ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé à l’audience publique du vingt-deux octobre deux mille huit par M. Cachelot conseiller le plus ancien faisant fonction de président, conformément à l’article 452 du code de procédure civile.