AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses six branches :
Attendu, selon l’arrêt infirmatif attaqué (Aix-en-Provence, 13 mai 2004), que Mme Sophie X…, de nationalité française, et M. David Y…, de nationalité américaine, se sont mariés aux Etats-Unis le 10 mai 2000, une fille, Charlotte, étant née de cette union le 14 août 2000 aux Etats-Unis ; que la famille vivait aux Etats-Unis lorsqu’en mars 2003, Mme X… est venue en France avec l’enfant pour des vacances, puis a informé son époux, le 31 mars 2003, de son intention de ne pas regagner les Etats-Unis ; que M. Y… a saisi l’autorité centrale américaine d’une demande tendant à l’application de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, afin que soit ordonné le retour immédiat de l’enfant aux Etats-Unis, lieu de sa résidence habituelle ; que le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Draguignan a fait assigner Mme X… cette fin ;
Attendu que Mme X… fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir ordonné le retour immédiat de l’enfant aux Etats-Unis, en violation, selon le moyen :
1 / de l’article 13, b, de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980, le risque grave prévu par ce texte pouvant résulter du seul nouveau changement dans les conditions actuelles de vie de l’enfant ;
2 / de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, selon lequel l’enfant a droit au respect de sa vie privée et familiale, ce qui imposait au juge de prendre en considération la rupture avec son milieu d’intégration en France ;
3 / de l’article 3, 1, de la Convention de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l’enfant, selon lequel l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale, cette prise en considération imposant, en l’espèce, de tenir compte de la rupture de l’enfant avec son nouveau milieu d’intégration ;
4 / des principes généraux du droit international qui consacrent cette même exigence ;
5 / des principes constitutionnels à la lumière desquels les conventions internationales doivent être interprétées, imposant que l’intérêt supérieur de l’enfant soit une considération primordiale dans toute prise de décision le concernant ;
et 6 / sans répondre aux conclusions faisant valoir le risque grave résultant d’un projet d’établissement du père à Saint-Domingue ;
Mais attendu qu’il résulte de l’article 13, b, de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980, qu’il ne peut être fait exception au retour immédiat de l’enfant que s’il existe un risque de danger grave ou de création d’une situation intolérable ; qu’en vertu de l’article 3, 1, de la Convention de New-York relative aux droits de l’enfant, disposition qui est d’application directe devant la juridiction française, ces circonstances doivent tre appréciées en considération primordiale de l’intérêt supérieur de l’enfant ;
Attendu que, sans avoir à répondre à un simple argument, la cour d’appel a souverainement relevé, après l’évocation des conditions de vie de l’enfant auprès de sa mère, qu’aucune attestation ne mettait en évidence une attitude dangereuse du père à l’égard de sa fille, que la preuve était établie qu’il n’était ni alcoolique, ni drogué, que l’état psychologique de l’enfant était satisfaisant, et que son père lui offrait, aux Etats-Unis, des conditions de vie favorables, avec l’assistance d’une personne diplômée d’une école d’infirmière ; qu’il résulte de ces énonciations que l’intérêt supérieur de l’enfant a été pris en considération par la cour d’appel, qui en a déduit, sans encourir les griefs du moyen, qu’il convenait d’ordonner le retour immédiat de l’enfant, en application de la Convention de La Haye ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme X…, épouse Y…, aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze juin deux mille cinq.