Vu, enregistrée à son secrétariat le 30 juin 1995, l’expédition du jugement du 24 mai 1995 par lequel le tribunal administratif de Marseille, saisi par Mme X… d’une demande de réparation des dommages affectant les travaux réalisés sur son immeuble d’habitation, a renvoyé au Tribunal, par application de l’article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence ;
Vu le jugement du 14 avril 1994 par lequel le tribunal d’instance d’Aix-en-Provence s’est déclaré incompétent pour connaître du litige ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Sargos, membre du Tribunal,
– les observations de la SCP Célice, Blancpain, avocat de la Société « Escota »,
– les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la société « Escota », concessionnaire de la construction et de l’exploitation d’autoroutes a, à l’occasion de l’élargissement d’une section de l’autoroute A8, passé le 26 juin 1989 avec Mme X… un contrat aux termes duquel la société, dans le but de lutter contre les nuisances sonores engendrées par l’augmentation de la circulation résultant de l’élargissement de l’autoroute, s’engageait à réaliser sur l’immeuble d’habitation de Mme X…, qui jouxtait cette infrastructure de transport, des travaux de protection acoustique consistant en la pose de caissons, avec réfection des peintures, et le remplacement de deux portes ; que la société « Escota », désignée par la convention précitée en qualité de maître d’ouvrage délégué, a ensuite passé des marchés tendant à l’exécution de ces travaux ; que Mme X…, invoquant des malfaçons affectant les travaux ainsi réalisés sur son habitation, a saisi le tribunal d’instance d’Aix-en-Provence, qui s’est déclaré incompétent au motif que le litige était relatif à un marché public ; qu’ensuite le tribunal administratif de Marseille, saisi par Mme X… d’une requête dirigée contre la société « Escota », a renvoyé au Tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence ;
Considérant que la construction des routes nationales et autoroutes, qui appartient par nature à l’Etat, a le caractère de travaux publics, alors même qu’une personne privée serait concessionnaire de leur construction et de leur exploitation ; que présentent une nature administrative les contrats passés par un tel concessionnaire, fût-ce avec d’autres personnes privées, dès lors que leur objet est d’édifier les ouvrages principaux ou accessoires de l’autoroute ; qu’il en est de même des contrats dont l’objet est de permettre la réalisation des travaux nécessaires pour lutter contre le bruit provoqué par cette infrastructure de transports terrestres, et cela même si ces travaux doivent être réalisés hors de l’emprise de l’autoroute ou sur un immeuble privé ;
Considérant que le contrat passé entre la société « Escota » et Mme X… avait pour objet de permettre à la société de faire réaliser des travaux de protection contre les nuisances sonores générées par la circulation sur l’autoroute ; qu’il s’agissait dès lors d’un contrat administratif et qu’il n’appartient par conséquent qu’aux juridictions administratives de connaître du litige né de malfaçons affectant ces travaux ;
Article 1er : La juridiction de l’ordre administratif est compétente pour connaître du litige opposant Mme X… à la société « Escota ».
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 24 mai 1995 est déclaré nul et non avenu en tant qu’il renvoie au Tribunal des conflits le soin de se prononcer sur la question de compétence posée par la demande de Mme X….
Article 3 : La cause et les parties sont renvoyées devant ce même tribunal.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d’en assurer l’exécution.