A l’occasion d’un arrêt Ministre de la Défense du 7 octobre 2013 le Conseil d’Etat apporte d’utiles précisions sur les modes de calcul de l’indemnité que peut obtenir, en plus de sa pension militaire d’indemnité, un agent public contaminé par le virus de l’hépatite C lors d’une hospitalisation consécutive à un accident de service. On le sait, depuis l’arrêt d’Assemblée Moya-Caville du 4 juillet 2003, la règle du forfait de pension ne s’applique plus que pour les atteintes à l’intégrité physique couvertes par la rente d’invalidité (n°211106 : AJDA 2003, p. 1598, chron. Donnat et Casas ; RFDA 2003, p. 990, concl. Chauvaux, note Bon.- V. également CE, 21 mai 2008, n°276357, Valois ; CE, 25 juin 2008, n°286910).
Ces principes sont rappelés par le Conseil d’Etat dans la présente affaire :
« En instituant la pension militaire d’invalidité, le législateur a entendu déterminer forfaitairement la réparation à laquelle les militaires peuvent prétendre … dans le cadre de l’obligation qui incombe à l’Etat de les garantir contre les risques qu’ils courent dans l’exercice de leur mission ; que, cependant, si le titulaire d’une pension a subi, du fait de l’infirmité imputable au service, d’autres préjudices que ceux que cette prestation a pour objet de réparer, il peut prétendre à une indemnité complémentaire égale au montant de ces préjudices ».
Les juges précisent ensuite :
« Dans l’hypothèse où le dommage engage la responsabilité de l’Etat à un autre titre que la garantie contre les risques courus dans l’exercice des fonctions, et notamment lorsqu’il trouve sa cause dans des soins défectueux dispensés dans un hôpital militaire, l’intéressé peut prétendre à une indemnité complémentaire au titre des préjudices que la pension a pour objet de réparer, si elle n’en assure pas une réparation intégrale ».
Les modalités de calcul de l’indemnité, dans une telle hypothèse sont les suivantes :
« Il appartient au juge de déterminer le montant total des préjudices que la pension a pour objet de réparer, avant toute compensation par cette prestation, d’en déduire le capital représentatif de la pension et d’accorder à l’intéressé une indemnité égale au solde, s’il est positif ».
Au cas d’espèce, la contamination avait été décelée en août 1994, mais heureusement pour la victime, l’hépatite, peu active, n’a entraîné qu’une asthénie modérée. Un traitement a été mis en œuvre entre juin 2003 et juin 2004 et les experts ont conclu que l’intéressé était guéri à partir du mois de décembre 2004.
Les juges considèrent que la contamination n’a pas entraîné de pertes de revenus et qu’elle n’a pas eu d’incidence sur la carrière professionnelle de l’intéressé. En revanche, le déficit fonctionnel temporaire subi par l’intéressé jusqu’à la date de la consolidation de son état de santé, du fait d’une asthénie modérée, des contraintes inhérentes au traitement qu’il a subi et des répercussions de son état de santé sur sa vie personnelle doit être évalué à 7 000 euros. La victime conserve également, du fait d’une insuffisance thyroïdienne consécutive au traitement, entraînant une incapacité de 5 %, un déficit fonctionnel permanent qui peut être évalué à 5 000 euros. Or, au titre de sa pension d’invalidité versé entre 1998 et 2007 l’agent a perçu la somme de 16 544,21 €, soit davantage que les 12 000 € calculés par les juges. Il en résulte que l’agent ne pourra obtenir d’indemnisation complémentaire à ce titre.
Il en va autrement, en revanche, s’agissant du pretium doloris résultant de biopsies pratiquées en 1996 et en 2001. Ce chef de préjudice n’étant pas couvert par la pension militaire d’invalidité, l’agent se voit donc allouer une indemnité de 1500 €.