AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
1°) d’annuler l’ordonnance du 24 février 2003 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Versailles, saisi en application de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, a suspendu l’exécution de l’arrêté du maire d’Evry en date du 18 février 2003 portant fermeture de l’établissement à l’enseigne Franprix situé 16 bis Place Jules B… ;
2°) de rejeter la demande de la société L’Olivier tendant à cette suspension ;
3°) de condamner cette société à lui payer une somme de 3000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
elle soutient que la liberté fondamentale invoquée est exercée de façon manifestement illicite ; que la société a méconnu les règles d’hygiène et de sécurité de sorte que la décision est justifiée au fond ; que le détournement de pouvoir n’est pas établi ; que l’article R. 123.52 du code de la construction et de l’habitation n’impose pas dans tous les cas une mise en demeure ; que la décision du maire est suffisamment motivée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 mars 2003, présenté pour la société L’Olivier qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la commune d’Evry à lui payer une somme de 3000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que l’urgence résulte des conséquences économiques et sociales de la décision ; que celle-ci porte une atteinte grave à une liberté fondamentale ; que le détournement de pouvoir est établi ; qu’en l’absence d’urgence le code de la construction et de l’habitation impose une mise en demeure préalable ; que la société s’est conformée aux prescriptions d’hygiène qui lui étaient imposées ; que la décision litigieuse est insuffisamment motivée sur ce point ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 13 mars 2003, présenté pour la commune d’Evry qui reprend les conclusions de sa requête par les mêmes moyens ;
Vu l’ordonnance attaquée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de la construction et de l’habitation, notamment son article R. 123-52 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d’une part, la commune d’Evry et d’autre part, la société L’Olivier ;
Vu le procès verbal de l’audience publique du jeudi 13 novembre 2003 à 11 heures, à laquelle ont été entendus :
– Me Z…, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de Cassation, avocat de la commune d’Evry ;
– Me Y…, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de Cassation, avocat de la société L’Olivier ;
– M. Thierry X…, représentant la commune d’Evry ;
– M. A… X, représentant la société . L’Olivier .
Considérant qu’aux termes de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public (…) aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale ;
Considérant que le maire d’Evry a décidé le 18 février 2003 la fermeture au public de l’établissement à l’enseigne Franprix situé 16 bis place Jules B… ; que cette décision est fondée, d’une part, sur les pouvoirs dévolus au maire pour l’application de la législation relative aux établissements recevant du public, d’autre part, sur les pouvoirs de police générale qu’il exerce pour des motifs d’hygiène ;
Considérant, d’une part, qu’ainsi que l’a relevé le juge des référés du tribunal administratif de Versailles, et que l’ont confirmé les débats tenus au cours de l’audience, les constatations opérées par la commission communale de sécurité lors de sa visite sur place du 18 février 2003 appelaient normalement une mise en demeure de réaliser les différents travaux et contrôles nécessaires dans un délai déterminé, sans révéler une situation d’urgence particulière qui aurait permis au maire, ainsi qu’il l’a fait, d’ordonner la fermeture de l’établissement le jour même de la visite de la commission communale ;
Considérant, d’autre part, que, contrairement à ce qui a été indiqué à l’audience du tribunal administratif, il n’est plus contesté qu’un contrôle sur place a également été réalisé le 18 février 2003 par les services de la direction départementale des services vétérinaires de l’Essonne, de la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales en vue, notamment, de vérifier si l’établissement s’était conformé à la mise en demeure adressée le 24 janvier 2003 par le maire et fondée sur les rapports de la direction départementale de l’action sanitaire et sociale, de la direction des services vétérinaires et du service municipal d’hygiène des 4 et 19 décembre 2002 ; que toutefois la décision de fermeture du 18 février 2003 se borne à indiquer que cette mise en demeure serait restée sans effet sans aucune référence, non seulement au contenu des prescriptions en matière d’hygiène qui demeuraient, selon la commune, inappliquées, mais aussi à l’existence même de rapports relatant les constats opérés le jour même ; qu’elle est ainsi intervenue en méconnaissance de l’obligation de motivation prévue par la loi du 11 juillet 1979 ; qu’eu égard à la teneur des rapports produits au dossier, il n’apparaît pas, là non plus, qu’une urgence particulière ait pu justifier cette méconnaissance de la loi précitée ;
Considérant que les deux illégalités susmentionnées présentent le caractère manifeste requis par l’article L. 521-2 du code de justice administrative ;
Considérant que, s’agissant d’une mesure de protection de la sécurité et de l’hygiène, l’urgence des mesures demandées sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative doit être appréciée en tenant compte non seulement de la situation de l’entreprise requérante mais aussi de l’imminence des risques que ces mesures se proposent de prévenir ; que, compte tenu de l’ensemble des circonstances de l’espèce, telles qu’elles ressortent des pièces du dossier, la condition d’urgence, dont la société L’Olivier doit justifier, est remplie ; que la fermeture de l’établissement commercial en cause décidée le 18 février 2003 constitue une atteinte grave à la liberté fondamentale d’entreprendre dont se prévaut cette société ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la commune d’Evry n’est pas fondée à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée ;
Considérant qu’il y a lieu de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner la commune d’Evry à payer à la société L’Olivier la somme de 3000 euros qu’elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce qu’il soit fait droit à la demande présentée par la commune sur le même fondement ;
O R D O N N E :
——————
Article 1er : La requête de la COMMUNE D’EVRY est rejetée.
Article 2 : La commune d’Evry versera une somme de 3000 euros à la société L’Olivier au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune d’Evry et à la société L’Olivier .
Copie pour information en sera adressée au ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
Fait à Paris, le 14 mars 2003
Signé : Y. Robineau