REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 24 août 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par M. Idir A, demeurant … ; M. A demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler le décret du 8 mars 2007 lui refusant l’acquisition de la nationalité française ;
2°) d’ordonner la production de l’entier dossier ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros en application de l’article L. 7611 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Jérôme Marchand-Arvier, Auditeur,
– les conclusions de M. Frédéric Lenica, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’aux termes de l’article 214 du code civil, dans sa version alors en vigueur : « Le gouvernement peut s’opposer, par décret en Conseil d’Etat, pour indignité ou défaut d’assimilation autre que linguistique, à l’acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger dans le délai d’un an à compter de la date de récépissé prévu au deuxième alinéa de l’article 26… » ; qu’aux termes de l’article 2127 du même code : « Nul ne peut acquérir la nationalité française ou être réintégré dans cette nationalité s’il a été l’objet soit d’une condamnation pour crimes ou délits constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou un acte de terrorisme, soit, quelle que soit l’infraction considérée, s’il a été condamné à une peine égale ou supérieure à six mois d’emprisonnement, non assortie d’une mesure de sursis… » ; Sur la légalité externe : Considérant que la circonstance que l’ampliation du décret attaqué ne comporte pas la signature de ses auteurs est sans influence sur la légalité de ce décret, dès lors qu’il ressort des pièces du dossier que l’original est revêtu de ces signatures ; Considérant que le récépissé de la déclaration souscrite par M. A en vue d’acquérir la nationalité française lui a été délivré le 10 mars 2006 ; que le décret portant opposition à son acquisition de la nationalité française a été pris le 8 mars 2007, soit dans le délai d’un an prévu à l’article 214 du code civil ; que la circonstance qu’il n’a été notifié à l’intéressé que le 2 juillet 2007 est sans incidence sur sa légalité ; Sur la légalité interne : Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. A a commis, les 27 et 29 juillet 2004, des actes de rébellion puis de violence sur personne dépositaire de l’autorité publique suivie d’incapacité n’excédant pas huit jours ; qu’il a commis, le 1er avril 2005, des menaces ou actes d’intimidation pour déterminer une victime à ne pas porter plainte ou à se rétracter et a volontairement exercé des violences ayant entraîné une incapacité de travail n’excédant pas huit jours ; que la circonstance que les condamnations prononcées à raison de ces agissements soient inférieures au quantum prévu par l’article 2127 du code civil ne fait pas obstacle à ce que le Gouvernement prenne le décret attaqué ; que le principe de la présomption d’innocence, rappelé à l’article 6 § 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ne faisait pas obstacle à ce que les auteurs du décret regardent l’intéressé comme indigne d’acquérir la nationalité française en application de l’article 214 du code civil, quand bien même les faits commis par le requérant le 1er avril 2005 n’auraient fait l’objet que d’une simple mise en cause ; qu’en estimant qu’eu égard à la nature des faits reprochés à l’intéressé, à leur répétition et à leur caractère récent, M. A ne pouvait être actuellement regardé comme digne d’acquérir la nationalité française, le Gouvernement n’a pas fait une inexacte application des dispositions de l’article 214 du code civil ; que M. A ne saurait utilement se prévaloir ni de ses attaches familiales, la nationalité étant par elle-même sans incidence sur la vie familiale, ni de son insertion professionnelle ; que, par suite, et sans qu’il y ait lieu d’ordonner la communication demandée, M. A, n’est pas fondé à demander l’annulation du décret lui refusant l’acquisition de la nationalité française ; que ses conclusions à fin d’application de l’article L. 7611 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Idir A et au ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement.