REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu 1°), sous le n° 336268, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 février et 3 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour le SYNDICAT MIXTE D’ETUDES ET DE PROGRAMMATION DU SCHEMA DE COHERENCE TERRITORIALE DE L’AGGLOMERATION CHARTRAINE, dont le siège est 3, rue Charles Brune, BP 90085 à Lucé (28112 Cedex), représenté par son président en exercice ; le SYNDICAT MIXTE D’ETUDES ET DE PROGRAMMATION DU SCHEMA DE COHERENCE TERRITORIALE DE L’AGGLOMERATION CHARTRAINE demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler pour excès de pouvoir la décision du 30 septembre 2009 par laquelle la Commission nationale d’aménagement commercial a accordé à la SAS Sodichar l’autorisation requise en vue de créer un ensemble commercial de 15 131 m² de surface de vente comprenant un hypermarché à l’enseigne Leclerc de 9 750 m², une galerie marchande de 3 800 m², un magasin spécialisé dans le matériel informatique de 720 m² à la même enseigne et un magasin spécialisé dans l’habillement de 861 m², sur le territoire de la commune de Barjouville ;
2°) de mettre solidairement à la charge de la SAS Sodichar et de l’Etat la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu 2°), sous le n° 336414, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 février et 7 mai 2010, présentés par la SAS DISTRIBUTION CASINO, dont le siège est 1, Esplanade de France à Saint-Etienne (42100) ; la SAS DISTRIBUTION CASINO demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler pour excès de pouvoir la décision du 30 septembre 2009 par laquelle la Commission nationale d’aménagement commercial a accordé à la SAS Sodichar l’autorisation requise en vue de créer un ensemble commercial de 15 131 m² de surface de vente comprenant un hypermarché à l’enseigne Leclerc de 9 750 m², une galerie marchande de 3 800 m², un magasin spécialisé dans le matériel informatique de 720 m² à la même enseigne et un magasin spécialisé dans l’habillement de 861 m², sur le territoire de la commune de Barjouville ;
2°) de mettre solidairement à la charge de l’Etat et de la SAS Sodichar la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu 3°), sous le n° 336668, la requête, enregistrée le 15 février 2010 au secrétariat du Conseil d’Etat, présentée par l’ASSOCIATION EN TOUTE FRANCHISE DE L’EURE-ET-LOIR, dont le siège est 73, rue Henri Dunant à Chartres (28000), représentée par sa présidente en exercice, par M. Alain A, demeurant … et par la SARL MACLEDEFA, dont le siège est 23, rue de la Pie à Chartres (28000), représentée par sa gérante ; l’ASSOCIATION EN TOUTE FRANCHISE DE L’EURE-ET-LOIR, M. A et la SARL MACLEDEFA demandent au Conseil d’Etat d’annuler pour excès de pouvoir la décision du 30 septembre 2009 par laquelle la Commission nationale d’aménagement commercial a accordé à la SAS Sodichar l’autorisation requise en vue de créer un ensemble commercial de 15 131 m² de surface de vente comprenant un hypermarché à l’enseigne Leclerc de 9 750 m², une galerie marchande de 3 800 m², un magasin spécialisé dans le matériel informatique de 720 m² à la même enseigne et un magasin spécialisé dans l’habillement de 861 m², sur le territoire de la commune de Barjouville ;
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de commerce ;
Vu le décret n° 66-137 du 7 mars 1966 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de Mme Joanna Hottiaux, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,
– les observations de Me Georges, avocat du SYNDICAT MIXTE D’ETUDES ET DE PROGRAMMATION DU SCHEMA DE COHERENCE TERRITORIALE DE L’AGGLOMERATION CHARTRAINE,
– les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à Me Georges, avocat du SYNDICAT MIXTE D’ETUDES ET DE PROGRAMMATION DU SCHEMA DE COHERENCE TERRITORIALE DE L’AGGLOMERATION CHARTRAINE,
Considérant que les requêtes enregistrées sous les n° 336268, 336414 et 336668 sont dirigées contre la même décision de la Commission nationale d’aménagement commercial ; qu’il y a donc lieu de les joindre pour y statuer par une même décision ;
Sur les fins de non-recevoir opposées par la SAS Sodichar :
Considérant que la SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE, exploitant un hypermarché à Lucé dans la zone de chalandise du projet contesté, justifie d’un intérêt lui donnant qualité pour agir contre la décision susvisée de la Commission nationale d’aménagement commercial ayant autorisé la SAS Sodichar à créer une ensemble commercial à l’enseigne E. Leclerc à Barjouville ;
Considérant que l’ASSOCIATION EN TOUTE FRANCHISE DE L’EURE-ET-LOIR qui, en vertu de l’article 2 de ses statuts a pour objet de représenter et défendre les intérêts des commerçants indépendants, M. A, qui exploite une boucherie à Chartres et la SARL MACLEDEFA, qui exploite une boutique de prêt-à-porter dans la même ville, ont qualité leur donnant intérêt à agir contre la décision attaquée ;
Sur les interventions :
Considérant que la commune de Fontenay-sur-Eure, la communauté de communes du Bois Gueslin ainsi que la communauté d’agglomération Chartres Métropole, la chambre de métiers et de l’artisanat d’Eure-et-Loir et le syndicat mixte de transports urbains du bassin chartrain ont intérêt à l’annulation de la décision du 30 septembre 2009 de la Commission nationale d’équipement commercial ; que leur intervention est, par suite, recevable ;
Considérant, en revanche, qu’eu égard au caractère national de son champ d’intervention, à la généralité de son objet social et aux missions qui lui sont conférées par le décret du 7 mars 1966, l’Assemblée permanente des chambres de métiers ne justifie pas d’un intérêt pour intervenir ; que son intervention est, par suite, irrecevable ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 752-6 du code de commerce : Lorsqu’elle statue sur l’autorisation d’exploitation commerciale visée à l’article L. 752-1, la commission départementale d’aménagement commercial se prononce sur les effets du projet en matière d’aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs (…) ; qu’aux termes de l’article R. 752-16 du même code : (…) Pour les projets d’aménagement commercial, l’instruction des demandes est effectuée conjointement par les services territorialement compétents chargés du commerce ainsi que ceux chargés de l’urbanisme et de l’environnement (…). ; qu’aux termes de l’article R. 752-51 du même code : (…) Le commissaire du gouvernement recueille les avis des ministres intéressés, qu’il présente à la commission. Il donne son avis sur les demandes examinées par la Commission nationale d’aménagement commercial au regard des auditions effectuées. ;
Considérant qu’il résulte de ces dispositions qu’il incombe au commissaire du gouvernement de recueillir et de présenter à la Commission nationale d’aménagement commercial les avis de l’ensemble des ministres intéressés avant d’exprimer son propre avis ; que le ministre chargé du commerce est au nombre des ministres intéressés au sens de l’article R. 752-51 du code de commerce ; que la circonstance que le commissaire du gouvernement appartienne, en vertu de l’article R. 751-10 du code de commerce, à ses services ne dispense pas ce dernier de recueillir et présenter l’avis de ce ministre avant de donner son propre avis sur les demandes examinées par la commission nationale ; que, dès lors, en statuant sur la demande de la SAS Sodichar sans que le commissaire du gouvernement lui ait présenté l’avis du ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, en charge du commerce, la Commission nationale d’aménagement commercial a entaché la procédure suivie d’une irrégularité de nature à entraîner l’illégalité de la décision litigieuse ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les requérants sont fondés à demander l’annulation de la décision attaquée ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge du SYNDICAT MIXTE D’ETUDES ET DE PROGRAMMATION DU SCHEMA DE COHERENCE TERRITORIALE DE L’AGGLOMERATION CHARTRAINE, de la SAS CASINO DISTRIBUTION FRANCE, et de l’ASSOCIATION EN TOUTE FRANCHISE, de M. A et de la SARL MACLEDEFA qui ne sont pas, dans la présente instance, des parties perdantes, le versement d’une somme au titre des frais exposés par la SAS Sodichar et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le SYNDICAT MIXTE D’ETUDES ET DE PROGRAMMATION DU SCHEMA DE COHERENCE TERRITORIALE DE L’AGGLOMERATION CHARTRAINE et la SAS DISTRIBUTION CASINO, et de mettre à la charge de l’Etat et de la SAS Sodichar la somme de 1 500 euros chacun à répartir en parts égales entre ces deux requérants ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les interventions de la commune de Fontenay-sur-Eure, de la communauté de communes du Bois Gueslin, du Syndicat mixte des transports urbains du bassin chartrais, de la communauté d’agglomération Chartres Métropole et de la chambre de métiers et de l’artisanat d’Eure-et-Loir sont admises.
Article 2 : L’intervention de l’assemblée permanente des chambres des métiers n’est pas admise.
Article 3 : La décision du 30 septembre 2009 de la Commission nationale d’aménagement commercial est annulée.
Article 4 : La SAS Sodichar et l’Etat verseront chacun une somme de 1 500 euros à répartir à parts égales entre le SYNDICAT MIXTE D’ETUDES ET DE PROGRAMMATION DU SCHEMA DE COHERENCE TERRITORIALE (SMEP) et la SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE, en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions de la SAS Sodichar tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée, au SYNDICAT MIXTE DETUDES ET DE PROGRAMMATION DU SCHEMA DE COHERENCE TERRITORIALE (SMEP), à la SAS DISTRIBUTION CASINO France, à l’ASSOCIATION EN TOUTE FRANCHISE, à M. Alain A, à la SARL MACLEDEFA, à la SAS Sodichar, à la commune de Fontenay-sur-Eure, à la communauté de communes du Bois Gueslin, à la communauté d’agglomération Chartres Métropole, au Syndicat mixte des transports urbains du bassin chartrain (SMTUBAC), à l’Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat, à la chambre de métiers et de l’artisanat d’Eure-et-Loir et à la Commission nationale d’équipement commercial.
Copie en sera adressée pour information à la commune de Barjouville.