Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 décembre 2003 et 13 avril 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-CORSE, représenté par le président du conseil général dûment habilité à cet effet et domicilié en l’Hôtel du département, rond-point du Général Leclerc à Bastia (20405 Cedex) ; le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-CORSE demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 16 septembre 2003 par lequel la cour administrative d’appel de Marseille a procédé à la liquidation de l’astreinte qu’elle a prononcée à son encontre par un arrêt du 18 juin 2002 et l’a condamné à verser la somme de 7 100 euros à Mme Y et la somme de 14 200 euros au budget de l’Etat ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré présentée le 20 décembre 2005, présentée pour Mme Y ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de Mme Isabelle Lemesle, Maître des Requêtes,
– les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat du DEPARTEMENT DE LA HAUTE-CORSE et de Me Odent, avocat de Mme Y,
– les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par un arrêt du 18 juin 2002 devenu définitif, la cour administrative d’appel de Marseille a d’une part, confirmé l’annulation, prononcée par le tribunal administratif de Bastia le 20 janvier 2000, de l’arrêté du président du conseil général de Haute-Corse en date du 10 juillet 1998 mutant d’office Mme Y, d’autre part enjoint au département de réintégrer Mme Y dans son emploi de directeur des interventions sanitaires et sociales, sous astreinte de 50 euros par jour après un délai de deux mois ; que, par un second arrêt du 18 juin 2002, la même cour a confirmé l’annulation, prononcée par le tribunal administratif de Bastia le 8 mars 2001, de l’arrêté du 5 avril 2000 du président du conseil général de Haute-Corse réitérant la même mutation d’office ; que, par l’arrêt attaqué du 16 septembre 2003, la cour a procédé d’office à la liquidation de l’astreinte prononcée par le premier de ses deux arrêts du 18 juin 2002, en condamnant le département à verser la somme de 7 100 euros à Mme Y, et la somme de 14 200 euros au budget de l’Etat ;
Considérant que lorsque, comme en l’espèce, une juridiction a prononcé une injonction à peine d’astreinte à l’encontre d’une personne publique, faute pour celle-ci de justifier avoir exécuté la décision juridictionnelle dans le délai imparti, cette juridiction peut ensuite liquider d’office l’astreinte sans être tenue, en l’absence de toute pièce nouvelle versée au dossier, de solliciter les observations de l’une ou l’autre des parties autrement qu’en les convoquant régulièrement à l’audience qui doit précéder la décision de liquidation de l’astreinte ;
Considérant qu’en vertu des dispositions combinées des articles R. 711-2 et R. 611-3 du code de justice administrative, les parties doivent être averties du jour de l’audience par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ; qu’il ressort du dossier que les lettres recommandées datées du 6 juin 2003 informant les avocats des parties de l’audience du 24 juin 2003 n’ont été distribuées que le 27 juin 2003 ; qu’aucune pièce du dossier n’indique que l’avocat du DEPARTEMENT DE LA HAUTE-CORSE, qui n’était pas présent ou représenté au cours de l’audience, ait été averti de celle-ci autrement que par l’envoi de ladite lettre recommandée, en dépit de la grève qui perturbait alors la distribution postale dans la ville de Bastia où se situe le cabinet de cet avocat ; qu’ainsi le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-CORSE est fondé à soutenir que l’arrêt attaqué a été rendu en méconnaissance des droits de la défense et à demander pour ce motif son annulation ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de Mme Y la somme que demande le département requérant en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que la somme que Mme Y demande soit mise à la charge du département ;
D E C I D E :
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Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille du 16 septembre 2003 est annulé.
Article 2 : L’affaire est renvoyée à la cour administrative d’appel de Marseille.
Article 3 : Le surplus des conclusions du DEPARTEMENT DE LA HAUTE-CORSE et les conclusions présentées par Mme Y tendant à la liquidation de l’astreinte et à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au DEPARTEMENT DE LA HAUTE-CORSE, à Mme Y, au président de la cour administrative d’appel de Marseille et au ministre d’Etat, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire.