Vu 1°), sous le n° 227000, la requête et les observations complémentaires, enregistrées les 9 novembre 2000 et 25 janvier 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentées pour la SARL LOISIRS 2000, dont le siège social est situé …, représentée par son gérant en exercice et pour la SA CINEMAS FORUM, dont le siège social est situé 1, rue du Maire Massing à Sarreguemines (57200), représentée par son représentant légal en exercice ; la SARL LOISIRS 2000 et la SA CINEMAS FORUM demandent que le Conseil d’Etat :
1°) annule pour excès de pouvoir la décision du 8 juin 1999 par laquelle la commission nationale d’équipement commercial siégeant en matière cinématographique a accordé à la société Multiplex l’autorisation de créer un ensemble de dix salles de spectacles cinématographiques comportant 3 500 places sur le territoire de la commune de Freyming-Merlebach (Moselle) ;
2°) mette à la charge de l’Etat la somme de 5 000 F au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;
Vu 2°), sous le n° 233693, la requête, enregistrée le 14 mai 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour la SARL LOISIRS 2000, représentée par son gérant en exercice et pour la SA CINEMAS FORUM, représentée par son représentant légal en exercice ; la SARL LOISIRS 2000 et la SA CINEMAS FORUM demandent que le Conseil d’Etat :
1°) annule pour excès de pouvoir la décision du 20 février 2001 par laquelle la commission nationale d’équipement commercial siégeant en matière cinématographique a rejeté leur demande tendant à ce que soit prononcé le retrait de sa décision du 8 juin 1999 par laquelle elle a accordé à la société Multiplex l’autorisation de créer un ensemble de dix salles de spectacles cinématographiques comportant 3 500 places sur le territoire de la commune de Freyming-Merlebach (Moselle) ;
2°) annule, par voie de conséquence, la décision du 8 juin 1999 de la commission nationale d’équipement commercial siégeant en matière cinématographique ;
3°) enjoigne à la commission nationale d’équipement commercial siégeant en matière cinématographique d’annuler l’autorisation accordée le 15 février 1999 à la société Multiplex par la commission départementale d’équipement cinématographique de la Moselle ;
4°) mette à la charge de l’Etat la somme de 7 500 F au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de commerce ;
Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 modifiée ;
Vu le décret n° 96-1119 du 20 décembre 1996 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Struillou, Maître des Requêtes,
– les observations de la SCP Tiffreau, avocat de la SARL LOISIRS 2000 et de la SA CINEMAS FORUM et de Me Le Prado, avocat de la SARL Multiplex et la SA Kinémax,
– les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les deux requêtes susvisées présentent à juger des questions semblables ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur les fins de non-recevoir opposées par la SARL Multiplex et la SA Kinémax :
Considérant, en premier lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que la SARL LOISIRS 2000 et la SA CINEMAS FORUM exploitent chacune des salles de spectacles cinématographiques qui sont situées dans la zone d’attraction du projet autorisé le 8 juin 1999 par la commission nationale d’équipement commercial siégeant en matière cinématographique ; que, par suite, la fin de non-recevoir tirée de ce que les sociétés requérantes ne justifient pas d’un intérêt leur donnant qualité pour déférer au juge de l’excès de pouvoir l’autorisation délivrée par la commission nationale le 8 juin 1999 ainsi que la décision du 20 février 2001 par laquelle elle a refusé de procéder au retrait de cette autorisation doit être écartée ;
Considérant, en second lieu, qu’en vertu des dispositions combinées de l’article 20 du décret du 20 décembre 1996 et des articles 17 et 34 du décret du 9 mars 1993 un extrait de la décision de la commission nationale d’équipement commercial accordant l’autorisation demandée doit être publié dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le département ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que la requête tendant à l’annulation de la décision du 8 juin 1999 ait été présentée plus de deux mois après l’intervention de la dernière en date des mesures de publicité prévues par ces dispositions réglementaires ; que la SARL Multiplex et la SA Kinémax ne sont ainsi pas fondées à soutenir que la requête est tardive ;
Sur les conclusions aux fins d’annulation :
Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens des requêtes ;
Considérant qu’en vertu de l’article 36-1 de la loi du 27 décembre 1973, dans sa rédaction résultant de la loi du 5 juillet 1996, la commission départementale d’équipement cinématographique et, sur recours, la commission nationale d’équipement commercial siégeant en matière cinématographique, statuent sur les demandes d’autorisation de création d’équipement cinématographique qui leur sont soumises dans le cadre des principes définis aux articles 1er, 3 et 4 de la loi du 27 décembre 1973 ; qu’aux termes de cet article, la commission statue en prenant en considération les critères suivants : – l’offre et la demande globales de spectacles cinématographiques en salle dans la zone d’attraction concernée (…) ; – la densité d’équipement en salles de spectacles cinématographiques dans cette zone ; nature et composition du parc de salles ; – l’effet potentiel du projet sur la fréquentation cinématographique, sur les salles de spectacle de la zone d’attraction et sur l’équilibre souhaitable entre les différentes formes d’offre de spectacles cinématographiques en salles ; – la préservation d’une animation culturelle et économique suffisante de la vie urbaine et l’équilibre des agglomérations ; – les efforts d’équipement et de modernisation effectués dans la zone d’attraction et leur évolution récente, ainsi que les investissements de modernisation en cours de développement et l’impact du projet sur ces investissements (…) ; qu’aux termes de l’article 14 du décret du 20 décembre 1996, la demande d’autorisation prévue à l’article 36-1 de la loi du 27 décembre 1973 est accompagnée a) de l’indication du nombre de salles et du nombre de places de chacune des salles ; b) de l’indication de l’enseigne ; c) d’une étude destinée à permettre d’apprécier l’impact prévisible du projet au regard des critères prévus au II de l’article 36-1 de la loi du 27 décembre 1973 susvisée et justifiant du respect des principes posés par les articles 1er, 3 et 4 de la même loi. Cette étude : 1° Précise la zone d’attraction de l’ensemble des salles de spectacles cinématographiques et la population par commune dans cette zone ; 2° Inventorie les établissements de spectacles cinématographiques exploités dans cette zone avec l’indication du nombre de places de chacun et évalue la fréquentation dans la zone ; 3° Evalue la recette annuelle brute attendue de l’exploitation de l’ensemble projeté de salles de spectacles cinématographiques ; 4° Evalue l’effet potentiel du projet sur la fréquentation cinématographique et sur les établissements de spectacles cinématographiques de la zone d’attraction ; 5° Evalue l’effet potentiel du projet sur l’équilibre entre les différentes formes d’offre de spectacles cinématographiques en salles ; 6° Analyse les effets sur l’emploi ; 7° Précise le projet de programmation et évalue son apport à l’offre cinématographique dans la zone d’attraction ; 8° Analyse le projet architectural. (…) ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que l’étude jointe par la SARL Multiplex à sa demande d’autorisation de création d’un ensemble cinématographique comprenant dix salles et comptant 3 500 places sur le territoire de la commune de Freyming-Merlebach (Moselle) comportait des indications erronées quant à l’évaluation des recettes annuelles attendues de l’exploitation de l’ensemble projeté, cette évaluation ayant été faite sur la base du nombre attendu d’entrées de spectateurs pour l’ensemble de la zone d’attraction, alors que sont implantés dans celle-ci d’autres établissements de spectacles cinématographiques ; qu’en outre, le caractère sommaire des informations y figurant ne permettait pas d’apprécier l’effet du projet sur les autres établissements cinématographiques de la zone d’attraction et l’équilibre entre les différentes formes d’offres de spectacles cinématographiques en salles ; qu’enfin, l’étude ne procédait à aucune analyse des effets sur l’emploi du futur établissement ; que ces erreurs, insuffisances et contradictions entachant la demande d’autorisation, que l’instruction préalable à la décision de la commission nationale d’équipement commercial n’a que très partiellement rectifiées, ne permettent pas de regarder comme satisfaites les exigences posées par l’article 14 du décret du 20 décembre 1996, afin de permettre à la commission nationale d’apprécier, comme elle doit le faire sous le contrôle du juge, l’impact prévisible du projet dans la zone d’attraction, au regard des critères prévus par l’article 36-1 de la loi du 27 décembre 1973 ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les sociétés requérantes sont fondées à demander l’annulation de la décision du 8 juin 1999 par laquelle la commission nationale siégeant en matière cinématographique a accordé l’autorisation contestée et celle du 20 février 2001 par laquelle elle a refusé de rapporter ladite autorisation ;
Sur les conclusions aux fins d’injonction :
Considérant que l’annulation des décisions du 8 juin 1999 et du 20 février 2001 de la commission nationale a seulement pour effet d’imposer à celle-ci de statuer à nouveau sur le recours formé par le préfet de la Moselle ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu’il soit enjoint à la commission nationale d’annuler la décision de la commission départementale ne peuvent qu’être rejetées ;
Sur les conclusions relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant qu’il y a lieu en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la SARL Multiplex et de la SA Kinémax la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par chacune des sociétés requérantes et non compris dans les dépens et de mettre au même titre à la charge de l’Etat, au profit de chacune de ces deux sociétés la somme de 500 euros ; qu’en revanche, ces dispositions font obstacle à ce que soient mises à la charge de la SARL LOISIRS 2000 et de la SA CINEMAS FORUM, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, les sommes que la SARL Multiplex et la SA Kinémax demandent au même titre ;
D E C I D E :
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Article 1er : La décision du 8 juin 1999 par laquelle la commission nationale d’équipement commercial siégeant en matière cinématographique a accordé à la SARL Multiplex l’autorisation de créer un ensemble de dix salles de spectacles cinématographiques comportant 3 500 places sur le territoire de la commune de Freyming-Merlebach (Moselle) et la décision du 20 février 2001 par laquelle la commission nationale d’équipement a refusé de rapporter sa décision du 8 juin 1999 sont annulées.
Article 2 : La SARL Multiplex et la SA Kinémax verseront ensemble 1 000 euros à la SARL LOISIRS 2000 et 1 000 euros à la SA CINEMAS FORUM sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : L’Etat versera 500 euros à la SARL LOISIRS 2000 et 500 euros à la SA CINEMAS FORUM sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par la SARL LOISIRS 2000 et la SA CINEMAS FORUM est rejeté.
Article 5 : Les conclusions présentées par la SARL Multiplex et la SA Kinémax tendant à ce que les sommes qu’elles demandent au titre des frais engagés par elles et non compris dans les dépens soient mises à la charge de la SARL LOISIRS 2000 et la SA CINEMAS FORUM sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à la SARL LOISIRS 2000, à la SA CINEMAS FORUM, à la SARL Multiplex, à la SA Kinémax, à la commission nationale d’équipement commercial et au ministre de la culture et de la communication.