REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 juin et 20 septembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la COMPAGNIE DES TRANSPORTS DE LA ROCHE-SUR-YON, dont le siège est 173, boulevard du Maréchal Leclerc à La Roche-sur-Yon (85000), représentée par son gérant en exercice ; la COMPAGNIE DES TRANSPORTS DE LA ROCHE-SUR-YON demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt du 29 mars 2007 par lequel la cour administrative d’appel de Nantes a rejeté sa requête tendant, d’une part, à l’annulation du jugement du 20 avril 2006 du tribunal administratif de Nantes ayant rejeté sa demande tendant à ce que l’article 9 de la convention de préretraite progressive conclue le 6 mai 2004 avec l’Etat soit déclaré nul et à ce que soit ordonné par voie de conséquence le remboursement de la somme de 34 606 euros versée en application de ces stipulations et, d’autre part, à ce que soit déclaré nul cet article de la convention ;
2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d’appel ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu l’arrêté du 20 avril 1999 fixant les conditions d’adhésion et les droits des bénéficiaires des conventions de préretraite progressive ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Alexandre Lallet, Maître des Requêtes,
– les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la COMPAGNIE DES TRANSPORTS DE LA ROCHE-SUR-YON,
– les conclusions de Mlle Anne Courrèges, Rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la COMPAGNIE DES TRANSPORTS DE LA ROCHE-SUR-YON ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 322-4 du code du travail, alors en vigueur : Dans les cas prévus au présent article, peuvent être attribués par voie de conventions conclues avec (…) les entreprises : / 3° Des allocations en faveur des salariés dont l’emploi à temps plein est transformé, avec leur accord, en emploi à temps partiel, pouvant être calculé sur la période d’application et dans les limites de durée annuelle minimale fixées par décret, au titre d’une convention de préretraite progressive. (…) ; que le II de l’article R. 322-7 de ce code, alors applicable, prévoyait que les conventions de préretraite progressive déterminent le nombre de recrutements de demandeurs d’emploi que l’entreprise s’engage à effectuer en compensation du passage à temps partiel des salariés en préretraite progressive ainsi que le montant de la contribution financière à la charge de l’entreprise, fixée selon les modalités prévues par un arrêté conjoint du ministre chargé de l’emploi et du ministre chargé du budget ; que, sur le fondement de ces dispositions, la COMPAGNIE DES TRANSPORTS DE LA ROCHE-SUR-YON a conclu avec l’Etat une convention de préretraite progressive le 6 mai 2004, prévoyant à son article 9 le versement par l’entreprise au Fonds national de l’emploi d’une contribution financière au taux de 9 % appliqué au salaire journalier de référence de chaque salarié adhérent à la convention multiplié par le nombre de jours de prise en charge en préretraite progressive ;
Considérant que le caractère indivisible d’une clause contractuelle au regard de l’ensemble du contrat ne fait pas obstacle à la recevabilité, devant le juge du contrat, d’une action en nullité introduite par l’une des parties au contrat et tendant à ce que cette seule clause soit déclarée nulle ; que cette indivisibilité implique seulement que, lorsqu’il constate l’existence de vices entachant la validité de cette clause, le juge du contrat se prononce, au besoin d’office, sur les conséquences à en tirer sur le contrat dans son ensemble, après en avoir, le cas échéant, informé les parties en application de l’article R. 611-7 du code de justice administrative ;
Considérant que, pour rejeter comme irrecevables les conclusions de la COMPAGNIE DES TRANSPORTS DE LA ROCHE-SUR-YON dirigées contre le seul article 9 de la convention du 6 mai 2004, la cour administrative d’appel de Nantes s’est fondée sur ce que cette clause n’était pas divisible des autres stipulations de cette convention ; qu’il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu’elle a, ce faisant, commis une erreur de droit ; que son arrêt doit, pour ce motif, être annulé ;
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de régler l’affaire au fond en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant qu’il résulte de ce qui vient d’être dit que le jugement du tribunal administratif de Nantes du 20 avril 2006 qui a opposé à tort la même fin de non-recevoir à la demande de la COMPAGNIE DES TRANSPORTS DE LA ROCHE-SUR-YON doit, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de sa requête d’appel, être annulé ; qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la requérante devant le tribunal administratif de Nantes ;
Considérant, en premier lieu, qu’en vertu de l’article 6 de l’arrêté du 20 avril 1999 fixant les conditions d’adhésion et les droits des bénéficiaires des conventions de préretraite progressive, lorsque l’employeur s’engage à compenser par des embauches l’intégralité des adhésions prévues par la convention, chaque admission en préretraite progressive donne lieu au versement d’une contribution financière dont le taux ne peut être inférieur à 2 % pour les entreprises dont l’effectif est inférieur ou égal à 250 salariés ; que ces dispositions ne faisaient pas obstacle à ce que l’article 9 de la convention litigieuse du 6 mai 2004 prévoie un taux de contribution financière supérieur à 2 % ;
Considérant, en deuxième lieu, que si le Conseil d’Etat statuant au contentieux a, par une décision du 29 novembre 2004, annulé pour incompétence une circulaire du 19 août 2003 qui prévoyait que la contribution financière des entreprises de moins de 250 salariés s’engageant à effectuer 90 % au moins des recrutements prévus par la convention parmi les demandeurs d’emploi rencontrant des difficultés particulières sur le marché de l’emploi devrait s’élever au minimum à 9 %, cette annulation est par elle-même sans incidence sur la validité de l’article 9 de la convention du 6 mai 2004 qui retient, sans que les parties aient entendu faire application de la circulaire en cause, un taux de 9 % ;
Considérant, enfin, que la COMPAGNIE DES TRANSPORTS DE LA ROCHE SUR YON, qui ne soutient pas que le contrat litigieux aurait été conclu dans des conditions de nature à vicier son consentement, ne peut utilement soutenir que le niveau de contribution retenu par l’article 9 de la convention du 6 mai 2004 procèderait d’une erreur manifeste d’appréciation ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la demande de la COMPAGNIE DES TRANSPORTS DE LA ROCHE SUR YON présentée devant le tribunal administratif de Nantes doit être rejetée ; que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance ;
D E C I D E :
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Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes du 29 mars 2007 et le jugement du tribunal administratif de Nantes du 20 avril 2006 sont annulés.
Article 2 : La demande présentée par la COMPAGNIE DES TRANSPORTS DE LA ROCHE-SUR-YON devant le tribunal administratif de Nantes et les conclusions présentées par celle-ci sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMPAGNIE DES TRANSPORTS DE LA ROCHE-SUR-YON et à la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi.