REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 16 juillet 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M. et Mme Pascal X…, ; M. et Mme X… demandent au Conseil d’Etat :
1°) de réviser la décision du 11 décembre 2000 du Conseil d’Etat statuant au contentieux, en tant qu’elle détermine le montant de l’indemnisation que la société entrepositaire parisienne, garantie par la ville de Paris, a été condamnée à leur verser ;
2°) d’ordonner une mesure complémentaire d’expertise aux fins de corriger les lacunes de l’expertise versée au dossier et de déterminer le montant exact du préjudice qu’ils ont subi ;
3°) subsidiairement, de condamner la société entrepositaire parisienne et la ville de Paris à leur verser la somme de 96 792 205 F augmentée des intérêts et des intérêts capitalisés ;
4°) de condamner la société entrepositaire parisienne et la ville de Paris à leur verser une somme de 15 000 F en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et son protocole additionnel n° 1 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Lenica, Auditeur,
– les observations de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de M. et Mme X… et de Me Foussard, avocat de la ville de Paris,
– les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’aux termes de l’article R. 834-1 du code de justice administrative : « Le recours en révision contre une décision contradictoire du Conseil d’Etat ne peut être présenté que dans trois cas : 1° Si elle a été rendue sur pièces fausses, 2° Si la partie a été condamnée faute d’avoir produit une pièce décisive qui était retenue par son adversaire, 3° Si la décision est intervenue sans qu’aient été observées les dispositions du présent code relatives à la composition de la formation de jugement, à la tenue des audiences ainsi qu’à la forme et au prononcé de la décision » ;
Considérant que lorsqu’il est saisi, postérieurement à la clôture de l’instruction et au prononcé des conclusions du commissaire du gouvernement, d’une note en délibéré émanant d’une des parties à l’instance, il appartient dans tous les cas au juge administratif d’en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision ; que, s’il a toujours la faculté, dans l’intérêt d’une bonne justice, de rouvrir l’instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans la note en délibéré, il n’est tenu de le faire à peine d’irrégularité de sa décision que si cette note contient soit l’exposé d’une circonstance de fait dont la partie qui l’invoque n’était pas en mesure de faire état avant la clôture de l’instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d’une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d’office ; que, lorsqu’il se trouve dans un tel cas, le Conseil d’Etat ne peut se soustraire à l’obligation de rouvrir l’instruction sans méconnaître les règles relatives à la tenue des audiences et à la forme et au prononcé de la décision mentionnées par les dispositions précitées de l’article R. 834-1 du code de justice administrative ;
Considérant que, par un arrêt du 27 octobre 1998, la cour administrative d’appel de Paris a rejeté comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître la requête de M. et Mme X… tendant à ce que la ville de Paris et la société entrepositaire parisienne soient condamnées à les indemniser du préjudice ayant résulté pour eux de l’incendie d’un entrepôt dont ils était locataires 68, quai de la Seine à Paris ; que si, à l’appui du pourvoi en cassation qu’ils ont formé contre cet arrêt, M. et Mme X… ont surtout fait valoir une argumentation relative à la compétence des juridictions administratives pour connaître du litige, ils concluaient également à ce qu’il soit fait droit à leurs conclusions de première instance tendant à l’allocation d’une indemnité de 98 748 242 F ; que, l’affaire ayant été appelée à la séance publique du 15 novembre 2000, le commissaire du gouvernement a conclu à la compétence des juridictions administratives et proposé, au cas où le Conseil d’Etat se prononcerait au fond, d’allouer à M. et Mme X… une indemnité égale au montant du préjudice évalué par l’expert désigné en première instance ; que, par la décision du 11 décembre 2000 dont M. et Mme X… demandent la révision, le Conseil d’Etat a annulé l’arrêt de la cour administrative d’appel et condamné la société entrepositaire parisienne à verser aux requérants une somme de 3 134 100 F augmentée des intérêts légaux à compter du 9 décembre 1994 ;
Considérant que la note en délibéré que M. et Mme X… ont produite le 24 novembre 2000, après la séance publique mais avant la lecture de la décision, a été effectivement examinée par le Conseil d’Etat même si celui-ci ne l’a pas visée dans sa décision ; que si cette note évoquait longuement la question du montant du préjudice subi par les requérants, demandait une nouvelle expertise, la réévaluation des indemnités et la capitalisation des intérêts, elle ne faisait état d’aucune circonstance de fait ou de droit rendant nécessaire la réouverture de l’instruction ; que, par suite, en ne décidant pas, à la réception de cette note en délibéré, de rouvrir l’instruction, le Conseil d’Etat n’a méconnu aucune règle relative à la tenue des audiences et au prononcé de la décision ; qu’aucun des autres moyens invoqués par M. et Mme X… et notamment celui tiré d’une méconnaissance des règles relatives à la réparation intégrale du préjudice ne permet de regarder leur requête comme entrant dans l’un des cas de révision limitativement énumérés par l’article R.834-1 précité du code de justice administrative ; que la requête de M. et Mme X… ne peut, dès lors, qu’être rejetée ;
Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la ville de Paris et la société entrepositaire parisienne, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, soient condamnées à payer à M. et Mme X… la somme qu’ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. et Mme X… est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Pascal X…, à la ville de Paris, à la société entrepositaire parisienne et au ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.