REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 6ème et 4ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 6ème sous-section de la Section du contentieux
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 septembre et 2 janvier 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Camille MI. ; M. MI. demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt du 22 juin 2000 par lequel la cour administrative d’appel de Nancy a annulé le jugement du 24 mai 1995 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a condamné l’Etat à lui verser la somme de 40 000 F augmentée des intérêts à compter du 3 novembre 1992, en réparation du préjudice qu’il a subi du fait de l’interdiction de vendre les sangliers qu’il a chassés en 1992 et 1993 ;
2°) de condamner l’Etat à lui payer la somme de 150 000 F augmentée des intérêts au taux légal et des intérêts capitalisés en réparation de son préjudice ;
3°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 15 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de Mme Legras, Auditeur,
– les observations de la SCP Parmentier, Didier, avocat de M. MI.,
– les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi :
Considérant que, par un jugement du 24 mai 1995, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné l’Etat à indemniser M. MI. en se fondant sur le motif tiré de ce que les arrêtés pris par le préfet du Bas-Rhin pour lutter contre une épizootie de peste porcine classique lui avaient fait subir un préjudice grave et spécial et que la responsabilité de l’Etat était engagée à son égard sur le terrain de l’égalité devant les charges publiques ; que, par l’arrêt attaqué, la cour administrative d’appel de Nancy a annulé le jugement au motif que les décisions préfectorales en cause n’étaient pas susceptibles d’engager la responsabilité sans faute de l’Etat ; qu’ainsi que le fait valoir le requérant, les juges d’appel devaient alors, saisis par l’effet dévolutif, examiner les autres moyens qu’il avait présentés à l’appui de sa demande de première instance ; qu’en omettant de le faire, la cour a entaché son arrêt d’irrégularité ; qu’il suit de là que cet arrêt doit être annulé ;
Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de régler l’affaire au fond en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens présentés par le ministre de l’agriculture et de la pêche ;
Considérant que les maladies infectieuses qui peuvent toucher les animaux sauvages et les mesures que sont, dans ces cas, amenées à prendre les autorités compétentes et qui peuvent, comme dans les circonstances de l’espèce, consister, notamment, en une interdiction de commercialiser le gibier abattu, constituent un aléa que doivent, en principe, supporter les personnes titulaires de droit de chasse ; qu’en l’espèce, le dommage qu’a pu subir M. MI., mis dans le cours de l’année cynégétique 1992-1993 dans l’impossibilité de commercialiser les sangliers abattus sur les lots de chasse dont il est titulaire dans la commune de Wissembourg, ne peut être regardé dans le cas d’espèce comme anormal ; que le ministre de l’agriculture et de la pêche est, dès lors, fondé à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg s’est fondé pour accorder une indemnité à M. MI. sur le fait que la responsabilité de l’Etat était engagée sur le terrain de l’égalité devant les charges publiques ;
Considérant, toutefois, qu’il appartient au Conseil d’Etat, saisi de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens présentés par M. MI. devant le tribunal administratif ;
Considérant que si M. MI. soutient, tout d’abord, que les contrôles sanitaires à la frontière franco-allemande n’ont pas été organisés d’une manière efficace, le requérant s’en tient, sur ce point, à des allégations générales qui ne sont étayées par aucun élément précis ; qu’il n’apporte ainsi pas la preuve qui lui incombe du caractère fautif du comportement de l’administration qu’il met en cause ; que, par ailleurs, les diverses mesures prises par le préfet du Bas-Rhin afin de lutter contre l’épizootie de peste porcine classique qui a affecté le nord du département, résultant notamment de ses arrêtés des 6 février, 19 février, 19 mars et 31 mars 1992, alors même qu’elles se sont échelonnées dans le temps et auraient pu être prises dans des délais plus brefs, ne sont pas intervenues dans des conditions telles qu’elles révéleraient une faute de l’Etat ; que, dès lors. M. MI. n’est pas fondé à soutenir que sa responsabilité serait engagée à ce titre ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. MI. devant le tribunal administratif de Strasbourg doit être rejetée ;
Sur les conclusions tendant au remboursement des frais engagés et non compris dans les dépens :
Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l’Etat à payer à M. MI. la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy du 22 juin 2000 et le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 24 mai 199 sont annulés.
Article 2 : La demande présentée par M. MI. devant le tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Camille MI., au préfet du Bas-Rhin et au ministre de l’agriculture et de la pêche.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Camille MI., au préfet du Bas-Rhin et au ministre de l’agriculture et de la pêche.