Requête de la société anonyme « La maison des isolants-France » L.M.I tendant à l’annulation d’un jugement du 26 mai 1970 par lequel le tribunal administratif de Caen s’est déclaré incompétent pour connaitre de la requête en indemnité formée par la société à l’encontre de la commune d’Aunay-sur-Odon aux fins d’obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 1.728.080,95 F, ensemble de la décision du maire d’Aunay-sur-Odon du 28 septembre 1967 rejetant la demande d’indemnité formée par la société en réparation du préjudice qui lui a été causé par la mauvaise exécution du contrat de vente d’un terrain et d’installation conclue avec la commune le 10 mai 1961 ;
Vu la loi du 23 décembre 1960 ; l’ordonnance du 31 juillet 1945 ; les décrets des 30 septembre et 30 juillet 1963 ;
Sur la compétence : Considérant que, dans le cadre de la législation sur la décentralisation industrielle et l’aménagement du territoire en vu de favoriser, notamment par la création d’emplois, le développement économique de la commune d’Aunay-sur-Oron, cette collectivité à passé, les 19 mai et 26 octobre 196, avec la société « La maison des isolants-France », un contrat ayant pour objet le transfert à Aunay-sur-Oron des activités que la société exerçait jusqu’alors à Paris ; que, par ce contrat, la société s’est engagée à transférer sur le territoire de la commune l’ensemble de ses moyens de production et à y employer au moins 100 ouvriers ; que la commune lui a vendu à cet effet, d’une part, au prix d’environ 1 F le M2, des terrains dont l’acquisition, opérée par elle, a été déclarée d’utilité publique par arrêtés préfectoraux en date des 22 mars et 21 juin 1961, d’autre part, au prix de leur réalisation, des bâtiments à usage industriel et de bureau qu’elle s’est obligée à construire sur les terrains dont il s’agit. Que la commune s’est engagée en outre à payer les frais de transport du matériel de la société et à faire exécuter à ses frais les divers branchements aux réseaux existants ; que la société a bénéficié également, ainsi que le mentionne le contrat, d’une exonération de la part de la patente pendant 5 ans, décidée par le Conseil municipal dans les conditions prévues par l’article 102 de la loi de finances du 23 décembre 1960, et de très larges facilités de paiement, le prix du terrain et des installations étant payable en 10 annuités, avec intérêt aux taux de 1% à compter de la date de la réception provisoire des travaux ;
Considérant que par le contrat susanalysé la commune d’Aunay-sur-Oron a pris en charge, dans l’intérêt public, et en utilisant des procédés du droit public, la réalisation de l’ensemble des conditions matérielles d’une opération de décentralisation industrielle jugée utile pour le développement communal ; que, ce faisant, elle a assurée l’exécution même d’une mission de service public ; qu’il suit de là que le contrat ayant eu cet objet présente le caractère d’un contrat administratif ; que dès lors, la société « La maison des isolants-France » est fondée à soutenir que c’est à tort que , par l’article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande, au motif que la juridiction administrative était incompétente pour connaitre des difficultés nées de l’exécution dudit contrat ; qu’il convient d’annuler l’article 2 dudit jugement ainsi que l’article 3 qui rejette, par voie de conséquence, les appels en garantie de la commune d’Aunay-sur-Odon en tant qu’ils sont dirigés contre le sieur X…, la société Gobitto, les sieurs Z…, Y… et A… ;
Sur la chose jugée : Considérant qu’il est constant qu’après que le présent litige eut été soumis par la société « La maison des isolants-France » au Tribunal de grande instance de Caen , lequel s’est prononcé à son sujet par un jugement en date du 18 avril 1966 devenu définitif, ladite société et la commune d’Aunay-sur-Oron ont conclu, le 7 février 1967, une convention par laquelle elles ont décidé d’abandonner « la voie judiciaire » et de soumettre leur différend à la juridiction administrative ; qu’il résulte des termes de cette convention, dont elles ne contestent ni la validité ni l’interprétation, que les parties ont alors renoncé d’un commun accord à se prévaloir de la chose jugée résultant du jugement susmentionné du Tribunal de grande instance ; que, dès lors, en admettant que la commune d’Aunay-sur-Oron ait entendu, en se référant audit jugement dans son mémoire en défense, invoquer l’autorité de la chose jugée qui lui serait attachée, ladite commune ne serait pas recevable, en l’absence de l’intervention d’un nouvel accord modifiant île précédent, à opposer une telle exception à la demande de la société ;
Au fond : Considérant que l’état du dossier ne permet pas de se prononcer au fond sur la demande de la société requérante ; qu’il y a lieu de renvoyer les parties devant le tribunal administratif de Caen ;
Sur les dépens de première instance : Considérant que, dans les circonstances de l’affaire, ces dépens doivent être réservés pour y être statué en fin d’instance ; qu’il y a lieu d’annule l’article 4 du jugement intervenu sur ce point ; … Annulation partielle ; renvoi ; dépens de première instance réservés ; dépens d’appel mis à la charge de la commune d’Aunay-sur-Oron.