Le Tribunal des conflits; — Vu les lois des 16-24 août 1790, 28 pluviôse an VIII, 21 avril 1810, 27 juillet 1880, art. 43, 44 et s., 24 mai 1872, et le règlement d’administration publique du 26 octobre 1849; — Considérant que, par décret du 28 mars 1898, l’établissement d’un chemin de fer, destiné à relier la mine de Champigneulles au canal de la Marne au Rhin, a été déclaré publique, par application de l’art. 44 de la loi du 27 juillet 1880; que la société concessionnaire de cette mine a été autorisée à construire ce chemin de fer, et qu’il lui a été interdit par le cahier des charges annexé audit décret d’organiser un service public de transport; que la même société a été autorisée, par une décision du ministre des travaux publics du 28 janvier 1899, à établir une estacade sur les bords du canal, et, par un arrêté préfectoral, à élever une palissade au même point; — Considérant que le sieur de Richard d’Aboncourt a saisi successivement le tribunal civil de Nancy et le conseil de préfecture de Meurthe-et-Moselle d’une demande en dommages-intérêts à raison du préjudice à lui causé par l’établissement de ce chemin de fer, et provenant, notamment, du bruit et des poussières, et en suppression de diverses installations, telles qu’entonnoir et cône mobile servant au chargement des bateaux, ainsi que palissade en bois placée sur l’estacade; que le tribunal civil de Nancy, par jugement définitif, en date du 6 août 1901, s’est déclaré incompétent; que le conseil de préfecture, au contraire, par arrêté du 24 avril 1902, a retenu sa compétence et rejeté au fond la requête; mais que, saisi de l’affaire, le Conseil d’Etat a, par décision du 2 décembre 1904, prononcé l’incompétence du conseil de préfecture, et annulé, en conséquence, l’arrêté précité; qu’ainsi les deux juridictions se sont respectivement déclarées incompétentes pour connaître de la demande; que, de cette double déclaration, il résulte un conflit négatif, et qu’il y a lieu de régler la compétence; — Considérant que, s’agissant d’un chemin de fer minier autorisé et construit dans les conditions de la loi du 27 juillet 1880, en vue de l’intérêt exclusif de la société concessionnaire de la mine de Champigneulles et pour faciliter son exploitation, ce chemin, qui n’avait pas été créé par une concession de la puissance publique, constituait, non un travail public, mais une propriété privée, avec les conséquences qui en résultent à l’égard des tiers lésés; que, dès lors, le tribunal civil de Nancy, en refusant de statuer sur la demande de Richard d’Aboncourt, a méconnu sa compétence;… — Art. 1er. Est considéré comme non avenu le jugement du tribunal civil de Nancy, en date du 6 août 1901, en tant qu’il s’est déclaré incompétent sur la demande formée par le sieur de Richard d’Aboncourt; — Art. 2. La cause et les parties sont renvoyées devant le tribunal civil de Nancy, etc.
Du 3 juin 1905. — Trib. des conflits. — MM. Ruben de Couder, rapp.; Arrivière, comm. du gouv.; Mornard et Sabatier, av.