Par la décision n° 2012-267 QPC du 20 juillet 2012, le Conseil constitutionnel a déclaré la disposition du 1 du I de l’article 1736 du code général des impôts (CGI) conforme à la Constitution.
Cette disposition est issue de la réforme des pénalités fiscales opérée par l’ordonnance n° 2005-1512 du 7 décembre 2005 relative à des mesures de simplification en matière fiscale et à l’harmonisation et l’aménagement du régime des pénalités. Elle prévoit, notamment, « l’application d’une amende égale à 50 % des sommes non déclarées le fait de ne pas se conformer aux obligations prévues à l’article 240 et au 1 de l’article 242 ter et à l’article 242 ter B ».
La disposition qui était contestée par l’auteur de la QPC institue donc une amende fiscale destinée à sanctionner le défaut de déclaration de sommes versées à des tiers. Par exemple, l’obligation prévue par l’article 240 du CGI impose aux « personnes physiques qui, à l’occasion de l’exercice de leur profession, versent à des tiers des commissions, courtages, ristournes commerciales ou autres, vacations, honoraires occasionnels ou non, gratifications et autres rémunérations », de déclarer ces sommes, ainsi que de dévoiler l’identité de leurs bénéficiaires.
L’auteur de la QPC critiquait le 1 du I de l’article 1736 du CGI à l’aune de la jurisprudence qui, de longue date, assimile les sanctions fiscales aux sanctions administratives et leur applique le régime constitutionnel applicable à toute sanction ayant le caractère d’une punition (CC, n° 82-155 DC, 30 décembre 1982, Loi de finances rectificative pour 1982, cons. 33 et 34). Plus précisément, il reprochait à cette amende fiscale de méconnaître les principes de proportionnalité et d’individualisation des peines garantis par l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
Le Conseil constitutionnel a commencé son examen de constitutionnalité par rappeler le contenu et les contours de ces deux exigences constitutionnelles :
« Considérant que l’article 8 de la Déclaration de 1789 dispose : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires » ; que l’article 61-1 de la Constitution ne confère pas au Conseil constitutionnel un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement, mais lui donne seulement compétence pour se prononcer sur la conformité des dispositions législatives soumises à son examen aux droits et libertés que la Constitution garantit ; que, si la nécessité des peines attachées aux infractions relève du pouvoir d’appréciation du législateur, il incombe au Conseil constitutionnel de s’assurer de l’absence de disproportion manifeste entre l’infraction et la peine encourue ; qu’en outre, le principe d’individualisation des peines qui découle de l’article 8 de la Déclaration de 1789 implique qu’une amende fiscale ne puisse être appliquée que si l’administration, sous le contrôle du juge, l’a expressément prononcée en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce ; qu’il ne saurait toutefois interdire au législateur de fixer des règles assurant une répression effective de la méconnaissance des obligations fiscales ».
Ensuite, il a mis en lumière l’objet de l’amende contestée pour souligner que les déclarations de versement dont le défaut est sanctionné sont utiles à l’administration fiscale :
« Considérant qu’en réprimant le manquement aux obligations, prévues à l’article 240, au 1 de l’article 242 ter et à l’article 242 ter B du code susvisé, de transmettre à l’administration fiscale des informations relatives aux sommes versées à d’autres contribuables, la disposition contestée sanctionne le non respect d’obligations déclaratives permettant à l’administration fiscale de procéder aux recoupements nécessaires au contrôle du respect, par les bénéficiaires des versements qui y sont mentionnés, de leurs obligations fiscales » ;
Enfin, le Conseil constitutionnel a rejeté les griefs invoqués en insistant, notamment, sur le fait que l’amende instituée par la disposition contestée est en adéquation avec l’objectif de lutte contre la fraude fiscale qui a valeur constitutionnelle (CC, n° 99-424 DC, 29 décembre 1999, Loi de finances pour 2000, cons. 52.)
« Considérant qu’en fixant l’amende encourue par l’auteur des versements en proportion des sommes versées, le législateur a poursuivi un but de lutte contre la fraude fiscale qui constitue un objectif de valeur constitutionnelle ; qu’il a proportionné la sanction en fonction de la gravité des manquements réprimés appréciée à raison de l’importance des sommes non déclarées ; que le taux de 50 % retenu n’est pas manifestement disproportionné »
Le 1 du I de l’article 1736 du CGI a donc été jugé conforme à l’article 8 de la Déclaration de 1789, ainsi qu’aux autres droits et libertés que la Constitution garantit.