Contexte : Cet arrêt rendu le 16 janvier 2013 rappelle utilement que la santé n’est pas seulement une affaire de professionnels mais concerne aussi – et peut-être même avant tout- la personne du patient qui « a le droit d’être informée sur son état de santé » (C. santé publ., art. L. 1111-2, al. 1er).
Litige : Un patient est opéré en 1997 pour des lombalgies importantes. En 2002, son médecin l’examine à nouveau car il souffre toujours de lomboradiculalgies bilatérales importantes et persistantes. Le praticien lui fait notamment réaliser un bilan radiologique et une scintigraphie. Une radio est effectuée en 2003 et un contrôle est réalisé un an plus tard en 2004. Le radiologue ayant réalisé le premier examen note dans son compte rendu l’existence d’ « une solution de continuité sur la tige intérieure droite » et celui ayant réalisé le second une « solution de continuité sur la branche droite ». Le patient reproche à ces deux radiologues de ne pas lui avoir indiqué clairement que le matériel d’ostéosynthèse qui lui avait été posé quelques années auparavant était fracturé. Les premiers juges et ensuite la Cour d’appel de Rouen le déboutent de sa demande en réparation en indiquant, en substance, que les médecins qui ont rédigé leur compte-rendu s’adressaient au médecin prescripteur qui devait recevoir ensuite son patient pour examiner avec lui les conséquences des constatations mises à jour par les examens radiologiques.
Solution : La Cour de cassation censure cette analyse. Après avoir visé les articles L. 1111-2 et R. 4127-35 du Code de la santé publique, puis énoncé qu’ « en vertu du premier de ces textes, que l’information des personnes sur leur état de santé incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables et que seules l’urgence ou l’impossibilité d’informer peuvent l’en dispenser, et, (qu’) en vertu du second, que le médecin doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’il lui propose, et que, tout au long de la maladie, il tient compte de la personnalité du patient dans ses explications et veille à leur compréhension », la première chambre civile reproche à la Cour d’appel d’avoir privé sa décision de base légale au regard de ces textes précités, en statuant par des motifs impropres à établir que les radiologues ont satisfaits à « l’obligation, qui leur incombait, et dont la communication du compte-rendu au médecin prescripteur ne les dispensait pas, d’informer M. X…sur les résultats de l’examen, d’une manière adaptée à sa personnalité et à son état ».
Analyse : La position de la première Chambre civile retenue dans cette affaire est parfaitement justifiée au regard de principes qui, après avoir été dégagés par la jurisprudence, ont été repris par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 sur les droits des malades et la qualité du système de santé.
♦ D’abord, elle rappelle implicitement que l’information due au patient ne porte pas seulement sur les risques d’un acte médical projeté mais aussi, comme l’énonce l’alinéa 1er de l’article L. 1111-2 du Code de la santé publique, « son état de santé ». A ce titre, le médecin est tenu de renseigner le patient des résultats des examens radiologiques qui lui ont été prescrits.
♦ Ensuite, elle précise que l’information est due tant par le prescripteur de l’acte médical que par celui qui réalise la prescription (Cass . 1re civ., 14 oct. 1997, n° 95-19609 : Bull. I, n° 278 ; JCP G 1997, II, 22942, note P. Sargos ; JCP G 1997, I, 4068, n° 6, obs. G. Viney ; RTD civ. 1998, p.100, obs. J. Mestre ; Rev. dr. san. soc. 1998, p. 68, note M. Harichaux). En effet, « chacun des praticiens assume ses responsabilités personnelles et veille à l’information du malade » (C. santé publ., art. R. 4127-64).
♦ Enfin, elle indique que l’information doit « loyale, claire et appropriée » à la personnalité et l’état du patient (C. santé publ., art. R. 4127-35, al. 1er. V. Civ. 1re, 21 fév. 1961 : Bull. civ. I, n°115). En l’occurrence, les termes employés dans le compte-rendu n’étaient pas intelligibles pour une personne ne disposant pas de connaissances particulières en matière médicale. Le médecin qui réalise une prescription est ainsi invité à dispenser une double information. Celle qui est destinée au médecin prescripteur doit être scientifiquement précise tandis que celle, qui est destinée au patient, peut être simple et approximative, dès lors qu’elle est adaptée à sa capacité de compréhension.