Section II
Les obligations spéciales
§ 43. Le service forcé et le service des fonctionnaires d’honneur
(14) L’entrée au service de l’Etat comme fonctionnaire de profession constitue la forme universelle de droit public, en vue de faire naître toute sorte d’obligations de servir d’un contenu quelconque. Le service forcé et le service d’honneur ne trouvent d’application, à côté de cela, que d’une manière restreinte et pour des obligations de servir ayant des objets déterminés. Il y a aussi une catégorie à part, d’un caractère tout à fait exceptionnel et pour ainsi dire anormal, que nous appellerons obligations mixtes ; elles forment une espèce de transition entre le service d’honneur et le service professionnel ; il en sera parlé au n. III du présent paragraphe.
I. — L’obligation de service forcé est une obligation de servir selon le droit public, imposée d’autorité, indépendamment du consentement du sujet intéressé. Cela constitue une atteinte à la liberté ; il faut, à raison de la réserve constitutionnelle, un fondement légal.
Notre législation de l’Empire fournit ces fondements pour le service militaire forcé, et pour le service judiciaire des jurés et des échevins. Nous en tirerons, en première ligne, les éléments qui serviront à expliquer notre institution juridique quant à la naissance et à l’extinction de l’obligation de servir1.
(15) 1) La loi, en donnant à l’administration le pouvoir d’imposer d’autorité des obligations de servir pour certains buts, détermine, conformément à ces buts, le cercle des personnes auxquelles l’obligation pourra être imposée, et la mesure de cette obligation, à savoir son contenu et sa durée ; elle fixe donc, en même temps, les principes d’après lesquels cette obligation prendra fin.
Le cercle des personnes à obliger est délimité, comme pour toutes les obligations de servir dépendant du droit public, avant tout par la condition de la nationalité de l’Etat, ce qui signifie, pour nos exemples principaux, la qualité d’allemand d’Empire. D’autres qualités sont aussi exigées en vue de garantir la capacité spéciale pour faire le service dont il s’agit : un certain âge, absence de défauts corporels ou moraux, etc. Enfin le cercle se restreint par des exemptions reconnues en faveur de certaines personnes, capables en principe, mais qui doivent être ménagées pour différents motifs dont on a cru devoir tenir compte. Ces motifs sont très largement admis pour le service judiciaire ; ils sont relativement rares pour le service militaire.
Il y a des listes permanentes sur lesquelles sont inscrits tous les sujets qui pourront être requis pour chaque service ; ces listes font ainsi connaître la totalité du personnel disponible. Ces listes sont publiées, et les intéressés pourront faire valoir leurs observations afin de les faire rectifier. D’un autre côté, les individus qui devraient être compris sur ces listes pourront être obligés de se présenter à certaines époques dans des bureaux déterminés ; ou bien des restrictions pourront leur être imposées dans le choix de leur séjour, dès avant le moment où toutes les conditions seront remplies pour exiger d’eux le service effectif. Cela a pour but d’assurer, à l’avance, la créance future (16) de l’Etat contre eux, l’obligation de servir qui sera constituée plus tard.
Tout cela n’a qu’un caractère préparatoire ; il n’existe encore aucune obligation de servir, ni en vertu de la loi dont les définitions semblent s’appliquer à tel sujet déterminé, ni par l’inscription sur la liste. Aussi ces personnes ne sont-elles pas encore soumises à un pouvoir général, en vertu duquel elles seraient à la disposition de l’administration ; elles ne sont soumises qu’à certaines obligations et restrictions particulières et qui ne vont pas plus loin que la loi ne l’ordonne directement ; ce sont des charges auxiliaires qui leur sont imposées.
2) L’obligation de servir est imposée par un décret de l’autorité, rendu contre l’individu imposable par un acte administratif qui est appelé élection ou conscription. Au cas de service forcé, — que nous visons ici, — il y a des commissions spéciales constituées à cet effet. Le décret contient une application de la loi, c’est-à-dire l’affirmation que les conditions légales sont remplies ; mais il aboutit en même temps à une appréciation de l’intérêt public, d’après lequel ces personnes sont requises pour le service public à l’exclusion d’autres individus également imposables, ou de préférence à ceux-ci. A l’égard de l’individu intéressé, l’élection ou la conscription ne produit son effet, comme tous les actes administratifs, qu’au moment de la notification dûment effectuée. C’est à ce moment que prend naissance l’obligation de servir.
Avec la notification de l’obligation imposée, on pourra faire enjoindre en même temps l’ordre d’en commencer l’accomplissement, l’appel pour l’entrée en service ; la notification peut même être faite directement sous forme d’un commandement, d’un appel de ce genre. Mais il se peut aussi que le commandement soit réservé et ne soit émis que plus tard et (17) séparément. C’est le premier acte pour lequel il soit fait usage de l’obligation de servir.
La désobéissance à ce commandement, le refus d’entrer en service à l’époque prescrite sont soumis à une répression pénale ; ils font de plus encourir des dommages-intérêts, c’est-à-dire le paiement des frais occasionnés par ce fait illégal ; enfin, quand il s’agit du service militaire, on vaincra cette résistance par l’emploi de la force : le débiteur sera amené manu militari.
3) Avec l’entrée dans le service, l’accomplissement de l’obligation commence ; le rapport juridique fait apparaître alors son caractère plein et entier. L’entrée au service est, de la part de l’obligé, essentiellement un fait matériel qui n’a en soi rien d’un acte juridique. Elle consiste purement et simplement dans la présentation (Gestellung) de la personne de l’obligé ; elle peut se faire spontanément ou par voie de contrainte, peu importe ; il suffit du fait de la comparution de l’obligé devant l’autorité qui dirige le service dû, et de la possibilité ainsi procurée à cette dernière de disposer effectivement de sa personne. L’entrée au service s’achève alors, grâce à cette mise à la disposition, par l’enrôlement de l’obligé dans l’entreprise publique à laquelle il doit servir, dans l’organisation de la justice ou de l’armée. A cette occasion maintenant, la prestation de serment aura lieu. Cependant, les effets juridiques de l’entrée en service ne s’attachent pas à la prestation du serment ; elle s’attache uniquement au fait de l’enrôlement.
L’entrée en service a donc le caractère juridique d’une prise de possession par l’autorité de l’individu qui doit servir. Ce débiteur est placé par là sous cette dépendance juridique spéciale qu’on a pris l’habitude d’appeler rapport de sujétion particulière. C’est le pouvoir du préposé hiérarchique, qui, en conséquence, (18) agit sur lui avec ses ordres et ses moyens de discipline. Le caractère de ce pouvoir sera plus ou moins fortement prononcé selon la nature des services qu’il s’agit de faire fournir et de diriger.
Il trouve son expression la plus énergique dans les institutions du service militaire. Avec l’enrôlement effectif dans l’armée, il se produit une obligation de service actif d’une sévérité particulière2. Elle semble presqu’absorber l’individualité entière du débiteur, qui désormais est censé appartenir à une classe à part, à l’état de soldat ; l’obéissance absolue qui est due aux supérieurs, une contrainte par des moyens de discipline extrêmement rigoureux, un droit pénal spécial applicable en vertu de ce changement de status, tout cela concourt à caractériser la situation juridique exceptionnelle qui lui est faite ; nous reviendrons sur les détails au § 45, I, ci-dessous.
Pour le juré et l’échevin, le service actif signifie un rapport de sujétion spéciale qui ne se fait presque pas sentir. Ce qui donne son importance marquante à l’entrée dans cette situation, c’est plutôt la naissance d’une fonction dont le débiteur est investi à ce moment même. Le juré, l’échevin qui ne se présente pas à l’audience fixée n’a jamais eu de fonction ; il ne l’acquiert qu’au moment où commence l’audience à laquelle il assiste pour accomplir son devoir. C’est à ce moment aussi qu’il prête serment. Sa fonction s’éteint avec la clôture de cette audience, sauf à revivre, quand il lui faudra revenir pour servir encore dans une autre audience3.
(19) Dans l’exercice de cette fonction, c’est-à-dire dans l’accomplissement de son service actif, le juré ou échevin est soumis à la direction du juge qui préside ; puisqu’il s’agit d’une activité juridictionnelle qui, par sa nature, est matériellement indépendante, cette direction ne porte que sur la forme extérieure de sa conduite. Il n’y a pas de moyens de contrainte disciplinaire spécialement prévus pour cette espèce de service. Il suffit de la pénalité dont le débiteur est menacé pour le cas où il voudrait « se dérober à ses devoirs », puisqu’il s’agit d’un service forcé ; si le débiteur est venu et reste, la police de l’audience est là pour garantir qu’il remplira convenablement la fonction.
Mais, malgré toutes ces différences quant à la formation des détails, le service actif du juré et de l’échevin d’une part, le service actif du soldat, de l’autre, représentent cependant, dans le développement consécutif des institutions du service forcé, la même suite de degrés, caractérisés par les mêmes idées juridiques.
4) Le service actif, cela se conçoit, ne tient pas ses débiteurs dans une activité ininterrompue. Mais une interruption passagère n’empêche pas le service de (20) continuer. Même pendant les minutes de récréation, le juré, l’échevin conserve sa fonction et reste soumis à la direction du président ; même pendant la nuit et pendant les heures de repos, ou quand il est en permission, le soldat est en service actif et sous les drapeaux. Le pouvoir hiérarchique n’est pas interrompu, même quand il laisse flotter un peu les rênes. Ainsi tout cela est juridiquement sans importance et ne fait pas l’objet de règles fixes.
Mais le service actif peut prendre fin, tout en laissant subsister l’obligation de servir. Cela a lieu pour des causes déterminées.
Parmi ces causes, il faut citer en première ligne, les cas où le temps pour lequel le service actif est dû est écoulé. Tous les services forcés ont cela de commun, d’être limités à un certain délai ; la charge à imposer a toujours sa mesure. Cette mesure peut être calculée d’après un délai fixe, ou d’après la durée d’une certaine affaire ou d’un groupe d’affaires à gérer. Passé ce délai, le débiteur doit être libéré, soit seulement du service actif auquel il a été appelé, soit même de l’obligation entière de servir. Mais, quelle que soit la cause qui doive mettre fin à un service actif, elle n’aura jamais son effet directement et de plein droit : on ne peut être affranchi d’un rapport de sujétion spéciale que par la mainlevée accordée par le maître. L’acte de l’autorité, par lequel se termine le service actif, s’appelle le renvoi (Entlassung). Si la loi a ordonné, dans l’intérêt du débiteur, qu’à tel ou tel moment son service actif doit être terminé, cela doit être entendu non pas comme une fin qui aurait lieu directement, mais comme un droit, pour l’intéressé, d’obtenir son renvoi.
Ce renvoi se fait d’une manière expresse pour le service militaire ; quant au service judiciaire des jurés et échevins, il est contenu dans la déclaration du président que l’audience est levée.
(21) Si, avec ce renvoi, la session du jury n’est pas encore terminée, si l’échevin n’a pas encore fait le nombre de séances qui lui ont été légalement imposées, si le soldat n’est pas encore complètement libéré, l’obligation de servir continue. C’est une obligation en non activité qui peut revivre, une obligation latente, ou, pour parler la langue du droit civil, une obligation à terme. Le fait qu’elle existe ne s’affirme pas seulement par la possibilité d’un rappel au service actif. Pour garantir l’accomplissement de ce devoir, des obligations auxiliaires sont établies. C’est ainsi, par exemple, que le juré est obligé, pendant la session, de faire acte de présence toutes les fois qu’il s’agit de former à nouveau le jury. Et, dans une mesure beaucoup plus large, le soldat renvoyé dans la réserve ou dans la Landwehr est soumis à des devoirs et des restrictions : il lui est prescrit de se présenter en personne devant les autorités à des époques déterminées ; le droit d’émigrer ne lui est accordé que sous certaines conditions, etc.4. Ces devoirs et restrictions ressemblent à ceux qui sont imposés en vue de l’obligation de servir future, par mesure préparatoire ; ils sont naturellement plus intenses, parce que l’obligation de servir est née, que le service actif a eu lieu, et a donné à cet individu une certaine valeur pour cette grande entreprise de l’Etat. Mais, juridiquement, l’analogie est complète : le service actif une fois terminé, il n’y a plus de rapport de sujétion spéciale, en vertu duquel toutes sortes de prescriptions pourraient être données au débiteur. Il n’y a plus de pouvoir du supérieur. L’individu soumis à l’obligation de servir ne doit désormais que ce qui lui est prescrit par la loi, pas plus. Telle est la situation.
5) L’obligation de servir elle-même prendra fin par (22) l’accomplissement de la mesure dans laquelle elle a pu être imposée ; elle s’éteindra aussi à la suite de certains faits qui ont le caractère de causes irrégulières, tels que l’incapacité ou l’indignité qui surviennent, ou des droits à la libération d’une part, des pouvoirs d’exemption de l’autre5.
Si l’obligation de servir doit s’éteindre pendant la durée du service actif, elle ne produira toujours effet que par le renvoi déclaré par l’autorité. S’il s’agit d’une obligation de servir en non activité, les causes qui y mettent fin peuvent avoir libre cours pour produire leur effet. C’est pour le législateur une question d’opportunité que de savoir s’il faut exiger, pour qu’elles opèrent ainsi, une reconnaissance formelle, c’est-à-dire un acte administratif prononçant la libération.
6) Quand le service actif est terminé, quand l’obligation de servir est éteinte, la possibilité d’être soumis à l’obligation par un nouvel acte de conscription ou d’imposition reste ouverte. Du moins, en principe. Mais la cause qui a éteint l’obligation peut avoir éteint, en même temps, la capacité juridique d’y être soumis de nouveau (incapacité physique, indignité). Et le fait d’avoir « fait son temps » peut, d’après la loi qui sert de base nécessaire à tout ce système de services forcés, libérer soit pour toujours, soit, du moins, pour un certain temps. Ces charges, comme nous l’avons dit, sont toujours mesurées. Pratiquement, ce sont seulement, les services judiciaires qui, après un certain répit, peuvent revenir sur le même individu et l’obliger à recommencer.
(23) II. — Dans l’organisation de nos autorités administratives, et même dans celle du pouvoir judiciaire ainsi que de l’armée, de nombreuses fonctions sont prévues, destinées à être acceptées par les particuliers pour l’accomplissement d’un devoir civique — devoir garanti par le droit, ou devoir simplement moral. Nous les appelons fonctions d’honneur.
C’est également une fonction d’honneur, qui est remplie par le juré ou par l’échevin, pendant qu’ils accomplissent leur obligation en service actif (comp. la note 3 ci-dessus, p. 18). Ici nous ne parlerons que de fonctions d’honneur permanentes, déférées aux individus en toute forme, comme cela a lieu pour les fonctions de profession.
Celui qui accepte une pareille fonction est soumis, en même temps, aux devoirs correspondant à cette fonction. Il se crée, pour lui, une obligation de droit public de servir la communauté à laquelle cette fonction appartient : Etat, cercle, commune.
Cette obligation, dans la manière dont elle se forme comme dans celle dont elle prend fin, diffère tant du service forcé du droit public, que du service professionnel.
1) Toutes les fonctions qui doivent s’exercer ainsi pour l’Etat sont réglées par la loi. Un fondement légal, pour couvrir l’atteinte à la liberté, ne serait pas, il est vrai, absolument nécessaire, puisque, d’après les principes généraux, il pourrait toujours être remplacé par l’acceptation volontaire. Mais, d’un côté, il s’agit ici partout de fonctions investies d’un pouvoir d’autorité, et, à raison de l’effet juridique que doit produire l’activité qui émane d’elles, la loi, comme nous l’avons vu, s’est emparé de leur organisation (comp. t. 1er, p. 16 et p. 117, note 18). D’un autre côté, il semble que, dans l’opinion qui a prévalu, l’Etat, en bonne règle, doit se procurer les services dont il pourra (24) avoir besoin, par des fonctions professionnelles ou par des contrats de louage du droit civil ; il ne doit donc être permis de faire usage de services d’honneur, même volontairement acceptés, que dans les cas pour lesquels la loi l’autorise.
Pour les communautés inférieures, au contraire, des fonctions d’honneur, même sans fondement légal, se présentent en grand nombre ; pour elles, on considère comme plus convenable de faire appel aux vertus civiques des citoyens.
Les exemples les plus importants nous sont fournis par les fonctions d’honneur de nos lois d’organisation d’administration propre et, dans la sphère de la législation d’Empire, par les fonctions des juges de commerce6 et des officiers de la réserve et de la Landwehr7.
Dans les cas où la loi a réglé ces fonctions d’honneur, elle fixe spécialement les conditions de capacité. La nécessité d’avoir la nationalité de l’Etat va de soi ; mais, en outre, on exige d’ordinaire que l’individu appartienne à la communauté inférieure ou à la classe d’intéressés auxquelles devra profiter l’activité de ce fonctionnaire. Que ces conditions soient réunies chez une certaine personne, cela aura une importance juridique en ce sens que la validité de l’attribution de la fonction en dépend ; et, quand il s’agit d’une fonction qu’on peut être contraint d’accepter, en ce sens aussi que cette contrainte est rendue possible.
Pour le cercle de personnes ainsi délimité, il se (25) forme de nouveau une qualité commune : la capacité d’être obligé. Mais cette capacité a un caractère juridique tout autre que dans le cas précédent (no I, 1 ci-dessus, p. 15) ; ici, l’obligation de servir qu’elle prépare se forme tout autrement.
2) L’obligation de servir qui incombe aux fonctionnaires d’honneur se forme par l’attribution de la fonction. Cela s’effectue dans la forme d’un acte administratif ordinaire, émanant du prince ou d’une autorité. Cette manière de déférer la fonction s’appelle la nomination8.
La nomination, selon la règle générale des actes administratifs, ne produit son effet que par la notification faite à la personne nommée. Mais l’efficacité de l’acte administratif dépend d’une autre condition. La loi ne donne pas d’autorisation d’imposer ces fonctions d’honneur contre la volonté de l’individu : il n’existe pas de service forcé dans le sens de celui dont nous venons de parler au n. I ci-dessus9. Dès lors, l’imposition de l’obligation de servir ne peut se faire valablement qu’avec son consentement. Ce consentement, c’est l’acceptation de la fonction. Il se peut que des déclarations expresses et des délais soient prescrits ; sans cela, l’acceptation pourra aussi se faire tacitement.
Pour que cette condition soit remplie et que la déclaration de consentement soit faite, il y aura, (26) pour la personne visée, des motifs de différente nature sur lesquels on pourra compter : vertu civique, sentiment monarchique, ambition. Il est possible que la loi se contente de ces motifs. Toutefois, dans la plupart des cas, notamment quand il s’agit de faire usage de la fonction d’honneur pour former des autorités administratives, — ce qui a pris tant d’importance dans nos législations récentes, — la loi établit une obligation formelle d’accepter et admet des moyens de contrainte pour amener cette acceptation. Le refus, quand il n’est pas fondé sur des excuses reconnues légitimes, est menacé de certains préjudices : des amendes peuvent être infligées, ou bien les impôts dus par l’individu récalcitrant seront, à titre de peine, augmentés dans une certaine proportion10.
La fonction d’honneur ne devient pas, pour cela, un service forcé. L’obligation de service forcé, comme nous l’avons vu, se forme sans le consentement du débiteur ; ici, au contraire, l’obligation de servir n’est pas imposée d’autorité ; mais une pression est exercée pour amener le consentement nécessaire pour faire naître l’obligation de servir. Si cette pression ne produit pas son effet, l’obligation de servir ne nait pas11.
(27) Toutefois, cette différence, qu’il y ait obligation d’accepter ou non, sera d’une certaine importance pour la procédure à suivre dans la nomination. S’il n’existe pas d’obligation, on ne risquera jamais une nomination sans s’être assuré à l’avance qu’elle aura son effet. Au besoin, on fera toujours des constatations préalables pour savoir si la personne visée est disposée à accepter ou non12. La nomination, quand elle a lieu, se fait alors toujours dans la supposition du consentement donné ; par suite, dans l’intention d’être immédiatement valable et définitive, sans réserve d’aucune condition. Au contraire, quand la loi établit une obligation formelle d’accepter, la nomination se fait sans préparatifs, dans l’attente que la personne ainsi requise voudra, par la déclaration de son acceptation, remplir son devoir et échapper aux conséquences fâcheuses dont le refus est menacé. Elle contient elle-même la menace tacite de ces conséquences ; elle exerce ainsi, d’ordinaire, par sa simple apparition une pression suffisante. Il en résulte qu’elle ne se fait pas avec la constatation que cet élément nécessaire de sa validité existe déjà et avec l’affirmation d’un effet juridique définitif : l’acceptation à déclarer est encore prévue par elle comme condition de cet effet. Tant que cette condition n’est pas remplie, la personne visée par l’acte de nomination ne subit pas encore son effet. Il se peut que, en cas de refus, la nomination, d’après la prescription de la loi, tombe immédiatement et d’elle-même ; ou bien il est (28) ordonné qu’elle doit être considérée comme nulle, quand l’acceptation n’a pas été déclarée dans un certain délai. Lorsque rien n’a été prescrit à cet égard, la nomination subsiste comme une offre de contracter jusqu’à ce qu’elle soit retirée, ce qui pourra aussi se faire sous la forme de la nomination d’un autre individu. En tout cas, la personne en question n’a jamais été, en vertu de cette nomination, chargée d’une obligation de servir13. Dans le premier cas, — où il n’y avait pas d’obligation formelle d’accepter, — cette personne a été chargée de l’obligation par l’acte de nomination, même si elle déclare immédiatement qu’elle refuse ; en effet, l’acte administratif de l’autorité agissant dans la sphère générale de sa compétence, lorsqu’il veut produire son effet sans réserve, constate lui-même l’existence des conditions mises pour sa validité. C’est à la personne nommée d’attaquer l’acte, par les moyens ordinaires, en vue d’établir l’illégalité de l’acte et d’en provoquer l’annulation (Comp. t. 1er, § 8, II, no 3, p. 126).
3) Par la notification de la nomination, ou, si la nomination a été faite dans l’attente d’une acceptation future, par cette acceptation déclarée, la personne nommée est investie de la fonction et chargée en même temps de l’obligation de servir. L’époque à laquelle se produira cet effet peut, dans un intérêt de conformité et d’ordre, être remise à une certaine date ultérieure où se fera simultanément l’échange des titulaires des différentes fonctions. Mais toujours, les deux choses commencent ensemble et à la fois : la fonction et l’obligation de servir. C’est ce qui fait la différence entre le service forcé qui n’entraîne aucune fonction, (29) c’est-à-dire aucune qualité juridique de représenter l’Etat (service militaire), ou qui ne la fait naître que pour les courts moments de l’activité effective du débiteur (service judiciaire des jurés et échevins). C’est ce qui fait également la différence avec le service professionnel, qui met le débiteur à la disposition de l’Etat pour toutes les fonctions d’une certaine espèce et peut, en attendant, être créé d’une manière générale et abstraite14. Ici, la fonction et l’obligation de servir coïncident. Le fonctionnaire d’honneur n’est tenu de servir que par la fonction qu’il accepte, et pour cette fonction qui est censée être digne de son sacrifice15.
La distinction que nous avons dû faire pour les services forcés, entre un service actif et une obligation (30) de servir plutôt latente, ne pourra s’appliquer ici qu’avec des modifications considérables.
Ici, le service actif comprendrait aussi le temps de l’exercice effectif de la fonction. Mais, comme nous l’avons fait remarquer pour le juré et l’échevin, on comptera encore comme service actif les moments pendant lesquels la séance a été interrompue afin de permettre au personnel de se reposer, ainsi que les vacances qu’on consent au soldat à titre de permission. Ce relâchement relatif est d’une importance beaucoup plus considérable pour le fonctionnaire d’honneur, dont l’état et position sociale sont en dehors de ces fonctions. Tout en conservant cette fonction comme une qualité et un pouvoir qui lui sont inhérents d’une manière permanente, il jouit de la facilité d’en interrompre l’exercice pratique pour des espaces de temps considérables.
Il y a des fonctionnaires pour lesquels ces interruptions comptent cependant comme service actif, celui-ci étant censé continuer purement et simplement. Tel est le cas, par exemple, pour les maires des petites communes et pour les chefs de cantons (Amstvorsteher). Ces fonctionnaires d’honneur sont préposés à un ensemble d’affaires qu’ils se proposent eux-mêmes de traiter avec une certaine suite, se remettant chaque fois à l’œuvre spontanément, ou qu’ils peuvent être appelés à chaque moment à gérer par suite d’un ordre de service qui leur est donné. D’autres fonctionnaires ressemblent plutôt aux jurés et échevins, en ce qu’ils sont seulement mis en mouvement par une autorité dirigeante qui les convoque pour un temps restreint, après de longs intervalles d’inactivité. Ici on n’admet pas qu’il y ait une simple continuation du service actif ; on ne lui attribue que le temps qui s’écoule entre une convocation et un renvoi. Tel est le cas, par exemple, pour les juges de commerce, les membres (31) des conseils du cercle (Bade), les membres des comités du cercle (Prusse), enfin les officiers de la réserve et de la Landwehr. Ici on serait tenté d’identifier tout à fait la situation juridique du fonctionnaire d’honneur avec celle du juré et de l’échevin renvoyés à la clôture de l’audience et attendant une nouvelle convocation en vertu de leur obligation de servir qui n’aura pas encore été épuisée. La terminologie de la législation militaire semble même favoriser directement cette manière de voir, en comptant le soldat qui a fait son service actif ainsi que l’officier de réserve, tous les deux indistinctement, dans « l’état de congé » ; il y a des « hommes de l’état de congé » et des « officiers de l’état de congé ». Toutefois, il ne faut pas trop insister sur cette expression. D’abord, il ne s’agit pas d’un congé ordinaire ou d’une simple permission, cela est évident ; nous avons vu qu’en pareil cas le service actif est censé continuer. Pour les individus des deux classes de l’état de congé, au contraire, le rapport de sujétion spéciale est altéré ; il y a entre eux cette différence que, pour les simples soldats, pour les hommes en état de congé, ce rapport de sujétion est, pour le moment, complètement fini, sauf à revivre. Pour les officiers de la réserve et de la Landwehr, il n’en est pas de même. Ils diffèrent du soldat ainsi que du juré et de l’échevin par ce fait, — qui leur est commun avec les juges de commerce, avec les membres du comité du cercle, etc. — : leur fonction ne finit pas avec leur service actif, la qualité et la capacité de représenter l’Etat dans ce cercle d’affaires leur reste, la convocation à un nouveau service actif n’est pas l’attribution d’une fonction nouvelle ; c’est l’ordre d’exercer à nouveau celle dont ils sont restés investis.
Il en résulte deux conséquences :
Le fonctionnaire qui n’est pas en service actif, et qui fait un acte de sa fonction, agit peut-être contre les (32) règles de la discipline et en sera responsable ; mais son acte sera valable en principe.
Le fonctionnaire en « état de congé » n’est pas tout à fait exempt du rapport de sujétion ; si, d’ordinaire, il ne reçoit plus d’ordre de service tant que dure cet état, il reste cependant soumis au pouvoir disciplinaire qui peut toujours lui demander compte de sa conduite en dehors des actes du service proprement dits16.
(33) Dès lors, pour cette seconde catégorie de fonctionnaires d’honneur, ce qu’on veut opposer à leur état de service actif n’en est pas aussi éloigné et se caractérise plutôt comme un relâchement temporaire, comme une interruption partielle du pouvoir hiérarchique.
4) Conformément à la nature spéciale de la fonction d’honneur, l’obligation de servir ici ne prendra effectivement fin que dans la forme d’une extinction simultanée de cette obligation et de la fonction. Il n’y a pas de stades intermédiaires.
La cause ordinaire qui mettra fin à la fonction (34) d’honneur, c’est l’expiration du temps fixé. Cette espèce d’obligation de servir, tout comme le service forcé, étant une charge spéciale, est, en principe, imposée seulement pour un temps déterminé ; peu importe que l’obligation n’existe ici qu’en vertu d’une acceptation, qui peut-être est tout à fait libre de contrainte ; l’Etat ne veut pas qu’on abuse de la bonne volonté. L’arrivée du terme peut produire son effet directement ; cela aura surtout lieu lorsque le renouvellement des fonctionnaires est fixé d’une manière générale à certaines dates d’après le calendrier. D’ordinaire, pour que l’obligation s’éteigne, le pouvoir hiérarchique, une fois constitué sur l’individu, nécessite, ici comme ailleurs, un acte de renvoi émanant de l’autorité. L’arrivée du terme final prévu ne confère qu’un droit d’exiger cet acte17.
La fonction d’honneur pourra aussi finir pour des causes spéciales, auxquelles celles reconnues pour le service d’Etat professionnel ont servi de modèle : destitution par condamnation judiciaire, révocation pour incapacité de servir, etc. (comp. § 44, III, n. 2. ci-dessous)18.
(35) Si l’individu ne présente plus les conditions de capacité légale qui avaient été exigées pour la nomination, la fonction d’honneur ne cesse aussi que par le renvoi. Pour le service forcé, nous avons vu qu’il fallait distinguer : l’obligation finit de plein droit à la suite d’une incapacité légale survenue ; mais il faut un acte de renvoi, quand cela se produit pendant que l’obligé se trouve en service actif, à cause du rapport de sujétion qu’il faut alors résoudre. Or le fonctionnaire d’honneur, comme nous venons de le dire, se trouve toujours dans ce rapport de sujétion, complet ou modifié, peu importe. De là la différence.
III. — Il existe encore un cas spécial d’obligation de servir, dépendant du droit public, dont nous voudrions traiter après ce qui a été exposé sur la fonction d’honneur, parce qu’il s’expliquera plus facilement par le rapprochement de ces idées. Il y a des fonctionnaires publics qui exercent leur fonction avec une obligation de servir dépendant du droit civil et en vertu d’un contrat de louage de service.
Encore ce contrat n’existe-t-il pas entre ces fonctionnaires et l’Etat ou une autre personne morale du droit public qui pourrait le remplacer ; le créancier du service, le patron, c’est un simple particulier, un (36) propriétaire, un entrepreneur industriel, une société par actions.
Les exemples principaux sont : les agents de la police des chemins de fer au service des sociétés privées de chemin de fer, le personnel des gardes forestiers et des gardes chasse en service privé, les représentants des propriétaires dans la fonction de chef administratif de grande propriété exempte (Gutsvorsteher)19. Dans tous ces cas, il y a contrat de louage de services conclu entre les parties dans les formes ordinaires du droit civil et soumis aux modes d’extinction correspondants. Et toutefois, tous ces individus sont considérés comme des fonctionnaires publics ; en particulier, les prescriptions pénales concernant la résistance aux fonctionnaires publics et les délits professionnels des fonctionnaires publics sont applicables. A première vue, cela paraît être en contradiction flagrante avec toutes les idées qui sont à la base de notre théorie sur la fonction publique et sur l’obligation de servir qui y correspond. En réalité, la chose s’explique très simplement par le fait qu’ici une fonction publique et une obligation de servir selon le droit public se joignent spontanément au rapport de service et de mandat d’après le droit civil, et que cela s’effectue dans des formes dépendant du droit public et présentant, quoique d’une manière moins précise et moins complète, (37) les traits bien connus de nos institutions de droit administratif20.
1) La fonction publique, dans tous ces cas, n’est jamais attribuée directement par le contrat de louage d’ouvrage. Bien que le contrat soit en lui-même parachevé et conclu valablement, les parties ne pourront jamais, par leur seule volonté, lui donner l’effet d’une fonction publique. La fonction ne s’y attache qu’après coup et par un acte distinct de l’autorité publique. Cet acte se présente sous la forme d’une confirmation ou d’une acceptation de l’individu engagé, à l’effet de lui déférer la fonction dont il doit, être investi. Il se joint à la prestation du serment de cet individu pour la fonction et peut directement trouver dans cette prestation du serment sa seule expression ; la prestation (38) de serment constitue alors la forme de l’attribution de la fonction21.
La délation de la fonction se fait en vertu d’une loi qui l’autorise ; en effet, cette attribution d’une fonction à un employé privé a lieu avec l’intention d’investir celui-ci d’un pouvoir de contrainte envers d’autres sujets ; cela ne peut se faire qu’en vertu d’une loi.
Cet acte suppose le contrat de louage de services ; il en dépend comme d’une condition ; mais il ne le modifie pas et ne le rend pas plus efficace, ni plus valable qu’il ne l’est par lui-même. Il arrivera souvent que ce contrat est conclu sous la condition expresse ou tacite que la délation de la fonction s’y joindra. En dehors de ce fait d’être réciproquement la condition l’un de l’autre, les deux actes juridiques n’ont aucun rapport entre eux.
2) L’employé est, en vertu de son contrat de louage de services, obligé, en droit civil, de gérer pour le mieux les affaires qui lui sont confiées, en particulier, en se servant de la puissance qui résulte pour lui de sa fonction publique. Dans tout ceci, même en ce qui concerne l’exercice du pouvoir de sa fonction, il est soumis aux instructions et injonctions de l’autre contractant selon l’obligation de servir qui lui incombe d’après le droit civil.
Mais par là sa situation juridique n’est pas encore suffisamment déterminée. La thèse d’après laquelle il n’y a pas de fonction publique sans obligation de servir selon le droit public, reçoit aussi son application dans ce cas. L’obligation de servir en droit public signifie un rapport d’obligation vis-à-vis de l’Etat ou d’une communauté équivalente. Dès lors, il (39) faut que ces employés soient, en même temps, dans un deuxième rapport d’obligation22. Ce rapport ne sera pas toujours clairement déterminé. D’ordinaire, il suffira du rapport d’obligations, d’après le droit civil, vis-à-vis du patron dont l’intérêt ira de concert avec celui de l’Etat, pour maintenir l’employé dans la bonne voie, même en ce qui concerne l’exercice des pouvoirs de la fonction. L’Etat, de son côté, a des pouvoirs suffisants vis-à-vis du patron pour l’inciter à remédier aux inconvénients qui pourraient se présenter. Mais il exerce, en outre, sur la personne de l’employé même, un pouvoir de commandement direct et de discipline. Que les lois de l’Etat le lient dans ce qu’il aura à faire, pour l’accomplissement de son service, cela n’a rien d’extraordinaire ; tel serait aussi le cas, si le rapport de service dépendait purement du droit (40) civil. Mais l’employé est encore soumis, en ce qui concerne la fonction publique, à l’ordre que l’autorité dirigeante lui fera parvenir, soit comme disposition générale, soit comme ordre individuel, avec cet effet que ces ordres l’emportent sur les injonctions de son patron selon le droit civil. L’observation tant des prescriptions légales, que des ordres qu’elle donne est assurée par l’autorité au moyen de peines disciplinaires analogues à celles dont elle use vis-à-vis d’autres fonctionnaires ; tout au moins pour les cas extrêmes et quand il s’agit de contraventions graves contre ses devoirs, cette autorité aura le droit de renvoyer le fonctionnaire comme tel ; cela veut dire le droit de lui retirer le pouvoir de sa fonction dont il avait été investi23. Le rapport de service de droit civil n’est pas touché directement ; une pareille mesure pourra seulement produire son effet sur ce rapport par suite d’une condition résolutoire qui y avait été ajoutée, ou comme motif pour les intéressés de faire le nécessaire en vue de faire cesser ce rapport.
3) De là apparaît clairement la nature spéciale du rapport de service de droit public, qui ici accompagne partout le rapport de droit civil. Ce rapport est, en général, calqué sur le modèle de la fonction d’honneur. Le fonctionnaire, il est vrai, touche son salaire ; il le touche grâce à un autre rapport juridique dans lequel il est placé ; cependant, comme cet autre rapport constitue un véritable contrat de louage d’ouvrage (41) d’un caractère bilatéral, il répugne à notre sentiment naturel de parler ici de fonction d’honneur. Mais il ne s’agit ici que de l’identité des formes juridiques, et cette identité ne saurait être méconnue.
Comme pour la fonction d’honneur acceptée, l’obligation de servir selon le droit public est créée par un acte administratif avec consentement de l’obligé. Que ce consentement ait été amené sous l’influence d’un contrat de louage conclu avec un autre et soit déclaré valablement dans cette conclusion même, cela ne doit pas être considéré comme impliquant une différence essentielle. L’obligation de servir selon le droit public coïncide ici encore avec la fonction et consiste, depuis le commencement jusqu’à la fin, exclusivement dans l’obligation de remplir les devoirs de cette fonction. C’est avec la fonction que l’obligation de servir est créée ; c’est avec la fonction qu’elle se termine. Il n’y a pas de fonctionnaires de ce genre qui soient mis en disponibilité ; du moins, il n’y a pas de fonctionnaires qui soient disponibles moyennant une obligation de servir du droit public. Qu’ils commencent par une obligation de servir de droit civil et que cette obligation de droit civil puisse, en principe, subsister même après la révocation de la fonction, cela reste encore en dehors de ce que nous avons à examiner ici.
Enfin ces fonctions ont ceci de commun avec la fonction d’honneur, qu’elles sont conférées à terme. Le service d’Etat à titre professionnel étant à vie et, d’ordinaire, ce rapport ne pouvant être dissous de la part de l’Etat que pour des causes spéciales (Comp. § 44 ci-dessous), il est, au contraire, de la nature de la fonction d’honneur de se terminer après un certain délai (Comp. nos développements ci-dessus II n. 3 du présent paragraphe, p. 28 et s.). Ici le terme de la fonction est fixé de telle manière que son existence dépend de celle du rapport de service contractuel auquel elle (42) s’attache24. Ce dernier, tombant sous l’application du § 622 du Code civil All., pourra prendre fin à l’expiration de chaque trimestre moyennant une dénonciation de six semaines. Les parties contractantes pourront en disposer autrement ; il y a toujours, en ce qui concerne le rapport entre l’Etat et le fonctionnaire, ce résultat, qu’il dépend, quant à sa durée, de causes extérieures.
- Loi militaire du 2 mai 1874 ; loi sur l’organis. judic., §§ 31-57, § 84-97. [↩]
- Laband, St. R., édit. all. II, p. 643 (éd. franç. V, p. 261) : « un devoir du sujet, élevé à une puissance extraordinaire ». [↩]
- C’est seulement brevitatis causa que la loi sur l’organisation judiciaire parle partout de la convocation, de la récusation, exemption, comparution des « échevins » ou « jurés ». Il aurait fallu dire : « des personnes requises pour faire le service d’échevin ou de juré ». Un « juré », qui est condamné à une amende parce qu’il ne s’est pas présenté, et, qui, par conséquent, ne pouvait pas être assermenté, n’a pas été « juré », cela va sans dire. Il résulte de la nature de ce rapport avec la fonction que ni le juré ni l’échevin ne sont des fonctionnaires. Ils « pourvoient » à la fonction, d’après les termes de la loi sur l’organisation judiciaire, §§ 31, 84 ; mais ils ne sont pas pourvus de la fonction. Cette fonction ne leur est pas déférée pour être attachée à leur personne comme une qualité et capacité personnelle ; elle reste au palais de justice, pour leur être confiée seulement pendant les heures qu’ils ont à passer là. Cette idée a trouvé une expression peu précise quand on dit que c’est la courte durée de la fonction qui les empêche d’être des fonctionnaires : Hälschner, Stf. R., II, 2 p. 1033 et note 3. Mais il est absolument inexact de vouloir expliquer l’absence de la qualité de fonctionnaire par le fait qu’il s’agit ici d’un service forcé : Olshausen, St. G. B., II, p. 1380, no 8 c ; Laband, St. R., édit. all. I, p. 414 (éd. franç. II, p. 117). Sinon, du temps de la théorie de Gönner, où tout service de l’Etat était considéré comme une obligation incombant aux sujets, il n’y aurait pas eu de fonctionnaires du tout. [↩]
- Loi militaire de l’Emp. du 2 mai 1874, § 57. [↩]
- On a l’habitude de mentionner, dans cette énumération, en premier lieu : la mort de l’individu obligé de servir ; c’est encore, à mon avis, une de ces petites exactitudes si prétentieuses et si inutiles ; a-t-on jamais cru que cette obligation pouvait passer à l’héritier ? [↩]
- Loi d’organis. jud., § 111-117. [↩]
- Ordonnance sur l’armée, § 51 ss ; ordonnance sur la marine, § 61 ss. — La législation de l’Empire nous présente encore de nombreuses fonctions d’honneur dans le système de l’assurance ouvrière. Elles sont essentiellement formées d’après le modèle des « fonctions d’administration propre » créées par les législations particulières. Comp. sur ces fonctions : Rosin, R. der Arbeiterversicherung III, p. 646, 696. [↩]
- Pour les fonctions d’administration propre, la nomination est quelquefois remplacée par l’élection ; comp. § 58, II, no 1 ci-dessous. [↩]
- Il existe une exception remarquable dans le droit Prussien pour la fonction d’honneur de chef d’une propriété exempte (Gutsvorsteher ; Kr. O., § 31 ss.). Cette fonction s’attache, en vertu de la loi, à la personne du propriétaire ; la confirmation par l’autorité n’est qu’une condition de forme pour que l’effet de la loi ait lieu. Le propriétaire ainsi désigné est immédiatement lié par la fonction, et l’obligation de servir prend naissance, à moins qu’il ne s’en décharge en offrant un remplaçant capable. [↩]
- Prusse, Kr. O., § 8 ; Bade, Loi du 5 oct. 1863, § 3 ; Krank. Kass. Ges. de 1892, § 34, al. 2 ; Unfall. Vers. Ges., § 24, al. 2 ; Inval. Vers. Ges. 74, al. 2, § 90. — La législation administrative de la France, en général, n’aime pas établir une contrainte pour l’acceptation de fonctions d’honneur ; comp. ma Theorie des Franz. V. R., p. 284. [↩]
- En ce sens, Loening, V. R., p. 138. Dans la note il relève aussi avec raison la différence qui en résulte pour l’obligation de servir du juré et de l’échevin imposée directement. De même : Olshausen, Stf. G. B., II, p. 1378 (au § 359 n. 2). D’ordinaire, il est vrai, on place ces fonctions d’honneur avec contrainte d’accepter tout simplement parmi les services forcés : Gareis, Allg. St. R., p. 148 ; v. Sarwey, Württ. St. R., I, p. 230 ; G. Meyer, St. R., p. 705. Non seulement cela efface le caractère juridique qui distingue notre institution de l’autre ; mais encore cette institution elle-même se trouve par là scindée en deux. En effet, les fonctions d’honneur sans contrainte d’accepter étant cependant de nature essentiellement identique, répugnent naturellement à se laisser ainsi associer aux services forcés ; ainsi, elles ne trouvent plus de place dans le système. Il faut convenir que la contrainte d’accepter est, pour la notion de la fonction d’honneur, un accessoire sans conséquence. [↩]
- C’est ainsi qu’on procède surtout pour la nomination des juges de commerce. La nomination d’un officier de réserve suppose même un consentement déclaré par écrit : Ordonnance sur l’armée, § 13, n. 2. [↩]
- Dès lors, ici, la déclaration décisive d’acceptation ou de refus ne peut toujours intervenir qu’après la notification de la nomination : V. Brauchitsch, Preuss. V. Ges., I, p. 25, no 22 ; O. V. G., 9 juin 1885. [↩]
- Jellinek, Subj. öff. Rechte, p. 174, formule très bien la différence qui existe ici en disant : « Les fonctionnaires ainsi créés (c’est-à-dire nommés) ne sont pas, en vertu d’un rapport de sujétion spécial, investis d’une fonction quelconque ; ils sont directement appelés dans une fonction déterminée ». [↩]
- Laband, St. R., édit. all. II, p 454 (édit. franç. IV, p. 341) argumente directement de la manière suivante : « Le service des juges de commerce n’est pas un service professionnel. Leurs fonctions sont honorifiques, c’est-à-dire gratuites. Par suite, les règles concernant l’avancement, le déplacement ou la mise en non activité ne leur sont pas applicables ». Cela répond parfaitement à la connexité étroite qui existe entre l’obligation de servir et la fonction distincte et déterminée. Il nous semble cependant que Laband abonde ici dans notre sens. La nature de la fonction d’honneur n’exclut pas aussi catégoriquement toute possibilité d’avancement et de déplacement. Cette exclusion, il est vrai, sera la règle, parce que, d’ordinaire, tout changement de fonction fera du service autre chose que ce que le fonctionnaire pourra être censé avoir voulu accepter. Cependant, il y a des fonctions, comme celles des officiers de réserve, qui sont considérées comme se valant réciproquement et qui sont aussi organisées, en même temps, par degrés de rangs superposés, en sorte que celui qui en accepte une, sert « à l’avancement ». En effet, l’officier de réserve pourra certainement être promu à un grade supérieur, sans qu’il y ait besoin d’un consentement nouveau d’un autre côté, on est libre de le déplacer dans un autre régiment de la même arme. Par contre, des « déplacements dans une autre arme » ne doivent être proposés en haut lieu qu’avec le consentement de la personne intéressée : Ordonnance sur l’armée du 28 sept. 1875, II, § 28, no 8. [↩]
- L’officier de réserve en présente l’exemple le plus important. Il nous semble que toutes les difficultés qu’on a éprouvées pour expliquer la véritable nature juridique de cette fonction ne pourront trouver de solution satisfaisante que dans cette manière d’envisager les choses.
Laband, St. R., édit. all. II, p. 671 (éd. franç. V, p. 309 ss.), a, le premier, développé une doctrine systématique sur cette matière. D’après lui, l’officier de réserve ne ferait que remplir, dans une forme modifiée, son obligation légale de servir, et ressemblerait en cela au volontaire d’un an. Mais il n’est pas possible, à mon avis, de mettre sur le même pied ces deux catégories si différentes.
L’essence de la notion d’officier de réserve est que celui-ci a été chargé d’une fonction publique ; il est fonctionnaire. — Laband, l. c., édit. all., p. 671, note 2 (éd. franç. V, p. 310, note 1) et G. Meyer dans Annalen 1876, p. 669, et 1880, p. 350 discutent sur le point de savoir si ce titre lui revient ou non ; la chose est indifférente pour notre question — le volontaire d’un an, en principe, n’a pas de fonction. Mais, enfin, il est possible de lui en attribuer une ; tout en restant volontaire d’un an, il peut être promu au grade de sous-officier. Supposons que cela ait lieu et qu’il soit investi de cette fonction. Alors ce volontaire d’un an, en effet, ne fait que remplir son obligation légale de servir dans une forme modifiée. On en tire la conséquence suivante : puisqu’il n’y a là qu’une modification de son service légal, on le nomme sous-officier sans lui demander son consentement. S’agit-il, au contraire, de nommer ce même individu officier de réserve, on a, d’après les règlements, besoin de son consentement. On donne comme motif qu’il s’agit de devoirs spéciaux qui incombent aux officiers de réserve, devoirs « auxquels ils se soumettent volontairement » (Motifs du projet de la loi de contrôle, Imprimés du Reichstag II, Sess. 1874, no 13, p. 6). Dès lors, l’obligation légale ne continue pas ; elle est remplacée. La même chose aura lieu, si ce même individu, avant la fin de son service légal, est nommé officier de carrière. D’après la doctrine de Laband, cet officier de carrière devrait aussi n’avoir qu’une obligation légale qu’il remplit avec une modification. — Le volontaire d’un an, nommé sous-officier, après avoir terminé, pour cette fois, son service actif, garde son obligation de servir ; il conserve aussi sa qualification ; lorsqu’il sera convoqué à nouveau, il sera encore sous-officier. Mais, dans l’intervalle, il n’est pas sous-officier ; il n’a pas de fonction propre qu’il emporterait, lorsqu’il quitte les drapeaux, car il n’en est investi que pendant le temps qu’il est en service actif, absolument comme le juré et l’échevin. L’officier de réserve, au contraire, reste officier, même en rentrant dans « l’état de militaire en congé » ; la fonction lui est inhérente. De là le droit de porter l’uniforme, le droit d’être obéi par les militaires inférieurs ; de là surtout la continuation du pouvoir disciplinaire propre à cette espèce de fonctionnaires (Ordonnance du 2 mai 1874). C’est en vain que l’on cherche à se soustraire à la logique de ces faits en affirmant qu’il ne s’agit ici que de « devoirs d’état » ; en effet, l’état d’officier n’est autre chose que la communauté de l’obligation de servir dans cette forme ; l’obligation d’avoir une conduite irréprochable, qui est l’objet de la surveillance des cours d’honneur, ne forme qu’un côté de cette obligation de servir, comme Laband lui-même l’a très bien exposé pour les autres fonctionnaires de l’Etat (St. R., éd. all. II, p. 687, I, p. 445 ; éd. franç., V, p. 333, II, p. 156), — Le volontaire d’un an, qui, son service actif terminé, transfère son domicile dans un autre Etat de l’Empire, entre, d’après le principe de la réciprocité pour le service militaire (Militärische Freizügigkeit), dans le contingent de sa nouvelle demeure ; les termes restant à échoir de son service actif seront confondus dans ce dernier. Il emporte seulement la qualification, qu’il aura acquise, d’être sous-officier. Il en est tout autrement de l’officier de réserve. Il reste, même au cas de changement de domicile, au service de l’Etat dont le chef l’a nominé officier ; un déplacement dans l’autre contingent ne pourrait se faire que par une démission et une nomination nouvelle. S’il n’y avait pour lui que l’obligation légale de servir, cette obligation suivrait les règles de la réciprocité militaire ; les simples « modifications dans la manière de la remplir » n’y changeraient rien, comme le démontre l’exemple du volontaire d’un an sous-officier.
Nous relèverons tout à l’heure encore une autre différence entre le service forcé du volontaire d’un an et la fonction d’honneur de l’officier de réserve. [↩]
- En droit prussien, le principe qu’aucune obligation de fonctionnaire ne prend fin par elle-même, quand le temps est écoulé, mais qu’il faut toujours un renvoi formel (A. L. R., II, 10 § 94, 97), a été déclaré applicable aux fonctions d’honneur : v. Brauchitsch, Preuss. V. Ges., I, p. 564, note 16. — Revenons encore une fois à l’officier de réserve dont le service a été appelé un « service légal avec modifications » (note 16 ci-dessus). L’obligation légale prend fin directement par l’effet de l’arrivée du terme, à moins que ce moment n’arrive pendant que l’obligé est convoqué pour le service actif. Par conséquent, le réserviste, même celui qui a obtenu la qualification de sous-officier, est libéré directement, lorsque la fin de son temps est arrivée. L’obligation de l’officier de réserve, au contraire, d’après le principe établi par A. L. R., II, 10, § 94 pour tous les fonctionnaires, ne finit jamais que par l’effet d’un renvoi. Dans le cas d’un renvoi prématuré, l’obligation légale, comme pour l’officier de carrière, pourrait revivre : Ordonnance sur l’armée, § 25. [↩]
- Une suspension (Comp. § 44, no 2 ci-dessous) est aussi admise pour la fonction d’honneur; cela veut dire que la fonction et l’obligation de servir sont provisoirement privées d’effet, toutes les deux à la fois, comme cela convient à ce genre de service. — Loening, V. R., p. 141, indique comme cause spéciale mettant fin à la fonction d’honneur la « déclaration unilatérale de se démettre de sa fonction » ; il ajoute : « Les lois, qui soumettent à une pénalité le refus non justifié d’accepter une fonction d’honneur, déclarent également punissable la démission non justifiée ». Si cela veut dire qu’on puisse à tout moment renoncer à la fonction par une simple déclaration, de la même manière que cela a lieu pour la démission du service d’Etat des fonctionnaires professionnels (comp. § 44, II, no 3), cela serait évidemment inexact : le fonctionnaire d’honneur est toujours lié pour un certain temps. Quand il a le droit, après un certain délai, de se démettre de sa fonction — comme dans le cas, cité par Loening, de la Kr. O. Pruss., § 8, — cela ne signifie pas que la fonction s’éteint par l’effet de sa déclaration ; cela veut dire qu’il a le droit d’exiger que sa démission soit acceptée. [↩]
- Oppenhopp, Stf. G. B., sous le § 359 no 38, 39, 42 ; Olshausen, Stf. G. B., sous le § 359, no 15, à I et II ; v. Brauchitsch, Preuss. V. Ges., I, p. 70 note 121, p. 73 note 131. On rencontre encore des institutions de cette nature dans l’administration des postes ; O. Tr., 3 février 1862 (Str. 44, p. 188) : « un postillon est, pendant qu’il fait le service de la poste, fonctionnaire public. Cette qualité relative de fonctionnaire n’empêche pas d’admettre que ce même individu soit placé, à d’autres égards et vis-à-vis du maître de poste qui l’a engagé, dans un rapport de droit privé, dans un rapport de domesticité ». Dans le même sens, R. G., 30 oct. 1886 (Samml. 37, p. 65) caractérise la situation double du postillon : il est « serviteur privé » du maître de poste, et « fonctionnaire » de l’Etat. [↩]
- Loening, V. R., p. 115, vise ces cas quand il dit : « Même des personnes qui sont placées dans un rapport de service de droit privé avec l’Etat ou seulement avec des personnes privées, peuvent être des fonctionnaires ». Toutefois, il est inexact de dire qu’un rapport de service de droit privé serait ici possible vis-à-vis de l’Etat lui-même. Que ces individus, malgré leur obligation de servir de droit civil, soient des fonctionnaires publics, cela s’explique uniquement par le fait que, à côté de leur rapport de service de droit privé, il existe encore, vis-à-vis de l’Etat, un rapport analogue qui est de droit public. Mais ce parallélisme n’est cependant possible qu’à une condition, c’est que le rapport de droit civil existe vis-à-vis d’un patron autre que l’Etat. Il n’est pas possible qu’un même individu ait, vis-à-vis du même patron, c’est-à-dire vis-à-vis de l’Etat, deux rapports de service, l’un de droit civil et l’autre de droit public. Ici nous dirons : ou l’un ou l’autre ; ou bien il y a rapport de droit civil, et alors cet individu n’est pas fonctionnaire public ; ou bien il y a rapport de droit public, alors il est fonctionnaire, mais alors le rapport de service de droit privé, que nous supposons dans cette analyse, n’existe pas. Laband qui, dans St. R., édit. all., I, p. 406, note 2 (éd. franç., II, p. 105 note 1) réfute la thèse de Loening, observe avec raison : « Il est aussi contraire à l’usage de donner le nom de fonctionnaires à des individus qui sont entrés avec l’Etat dans un rapport purement contractuel de droit privé ». Mais, dans la même note, Laband refuse aussi ce caractère de fonctionnaire « au personnel engagé par des personnes privées et investi de fonctions de police ». Ici cependant, il nous semble que l’usage est très clairement fixé pour attribuer ce nom de fonctionnaire. [↩]
- Schwappach, Forstverwaltungskunde, p. 140, 149 ; Günther, Das preuss. Feld. u. Forss. Pol. Ges. V., 1er avril 1880, p. 101 ; Koch, Deutschlands Eisenbahnen, 2e éd., I, p. 9, note 17 ; Pruss., Kr. O. § 33. [↩]
- Laband, St. R., éd. all., I, p. 406, note 2 (éd. franç., p. 105, note 1) fait à Loening le reproche de confondre, chez ces fonctionnaires, le rapport de fonction et le rapport de service. Mais il nous semble que, de son côté, Laband pousse trop loin la distinction entre ces deux choses. Il dit que ces individus ont des devoirs de la fonction et des droits de la fonction, que ces droits et devoirs n’ont « aucune connexité avec l’obligation de servir, mais seulement avec l’exercice de la fonction ». Nous voulons bien distinguer les devoirs de la fonction de l’obligation de servir, en tant que ces devoirs ne sont autre chose que l’obligation de servir ayant reçu sa détermination et devenue, par cela même, plus rigoureuse. Mais un devoir de fonction en dehors de tout rapport avec une obligation de servir, cela n’existe pas ; qui dit devoir de fonction, dit aussi obligation de servir. — La manière dont les idées sont liées ici se trouve exprimée très clairement et très justement chez Bessel-Kühlwetter, Preuss. Eisenbahn. R., II, p. 41 : « Les fonctionnaires de la police des chemins de fer privés sont placés, en premier lieu, dans un rapport de droit privé avec la société du chemin de fer ». Mais « une loi attribue à ces fonctionnaires, au moins pour une partie relativement minime de leur activité, le pouvoir de police ; or, comme tout pouvoir public émane de l’Etat, la personne qui en est investie ne peut l’exercer qu’au service de l’Etat ; il faut donc qu’elle soit, en ce qui concerne ces fonctions, serviteur indirect de l’Etat, quoique, d’une manière générale, elle soit considérée comme personne privée ». — Dans le même sens, Haushofer, Grundzüge des Eisenbahnwesens, p. 148 : « Les agents de police des chemins de fer privés sont des serviteurs publics, des fonctionnaires auxiliaires de l’Etat ». [↩]
- Bessel-Kühlwetter, Preuss, Eisenbahnrecht, II, p. 59, constate surtout comment ici un double pouvoir disciplinaire se produit : un pouvoir conventionnel de droit privé appartenant à la société de chemin de fer, et le pouvoir de droit public de l’autorité qui représente l’Etat, l’un et l’autre s’exerçant d’une manière indépendante. — Le double rapport de service apparaît surtout très clairement dans le remplaçant du chef de propriété exempte, d’après la Kr. O. Pruss., § 31 ss. ; v. Brauchitsch, Verw. Ges., I, p. 73, note 131. [↩]
- V. Brauchitsch, Preuss.Verw. Ges. I, p. 70 : « De même que pour le chef de propriété exempte la possession de cette propriété, de même pour son remplaçant le mandat du propriétaire est la condition indispensable de l’existence légale de sa qualité de fonctionnaire. Avec la cessation de ce mandat disparaissent de plein droit tous les droits et devoirs d’accomplir les fonctions de chef de propriété exempte ». [↩]
Table des matières