Par principe, les litiges relatifs à l’engagement de la responsabilité des sociétés commerciales, personnes morales de droit privé, sont régis par le droit privé, et relèvent des juridictions judiciaires (CE, Sect., 19 décembre 1969, Etablissements Delannoy, requête numéro 74793 : rec. p. 596), ce qui vaut notamment pour la SNCF lorsqu’elle était encore une société commerciale (CE Sect., 29 juillet 1994, Société d’assurances « Les mutuelles du Mans », requête numéro 140331 : rec. t. 854, même si, en l’espèce, l’action était intentée par une personne privée).
La nature de la personne morale s’apprécie au jour de la commission du délit. C’est la raison pour laquelle le Conseil d’Etat va confirmer la position de la Cour administrative d’appel qui a pris en compte la nature juridique de la SNCF à l’époque des faits, société d’économie mixte, et non son statut actuel d’établissement public industriel et commercial (et inversement : TC, 21 juin 2004, Gaec Hayettes et Compagnie d’assurances les Abeilles c/ Sté France Télécom, requête numéro C3412 : rec. t. 630)
Ce principe ne trouve d’exception que dans les cas où sont en cause des dommages causés par cette personne morale de droit privé dans l’exercice des prérogatives de puissance publique qui lui ont été conférées pour l’exécution de la mission de service public dont elle est investie (CE, Sect., 13 juillet 1968, Narcy, requête numéro 72002 : rec. p. 401. CE Sect., 13 octobre 1978, Adasea Rhône, requête numéro 03335 : rec. p. 368. CE, 6 novembre 1978, Bernardi, requête numéro 02087 : rec. p. 652. TC, 25 janvier 1982, Cailloux c/ Comité national pour la sécurité des usagers de l’électricité (CONSUEL), requête numéro 02206 : rec. p. 449. CE Sect., 23 mars 1983, SA Bureau Véritas, requête numéro 33803 : rec. p. 134). De même, l’activité des établissements publics qui comme la SNCF sont industriels et commerciaux par détermination de la loi, relèvent de la compétence des juridictions judiciaires à la seule exception de ceux relatifs à celles de leurs activités qui ressortissent, par leur nature, de prérogatives de puissance publique (TC, 12 décembre 2005, EURL Croisières lorraines Bergamote c/ VNF, requête numéro 3455 : rec. p. 670). Dans ce cadre, le Tribunal des conflits a déjà eu l’occasion de juger qu’un monopole est bien une prérogative de puissance publique prompte à engager la responsabilité extracontractuelle d’une personne privée chargée d’un service public administratif devant le juge administratif (TC, 23 septembre 2002, Sté Sotrame et Metalforme c/ GIE Sesame vitale, requête numéro 3300 : rec. p. 550).
La démonstration du Tribunal dans la présente affaire va donc consister à mettre en avant que la SNCF a agi en dehors de son monopole. Il constate ainsi qu’il s’agissait de transports destinés à organiser la déportation des personnes d’origine juive, depuis les gares proches des centres de détention administrative jusqu’aux gares desservant les camps de transit à partir desquels elle devaient être transférées vers les camps de concentration. Chaque opération de transport était « unique » et réalisée par la SNCF sur demande de « mise à disposition » ou sur « réquisition » émanant d’une autorité administrative de l’Etat, moyennant le versement d’un prix déterminé en fonction du trajet parcouru et du nombre de personnes transportées, aucune convention spéciale les organisant dans leur ensemble n’ayant été conclue.
Des décisions anciennes avaient eu à réparer des dommages causés par une compagnie de chemin de fer à des tiers, à l’occasion de transports de munitions. Dans ce cas, la compétence du Conseil d’État avait été retenue pour apprécier la responsabilité de l’autorité militaire et celle des tribunaux de droit commun pour apprécier la responsabilité de la compagnie (CE, 17 septembre 1875, Cie chemins de fer Paris à Lyon et à la Méditerranée : rec. p. 1028). Ainsi, le juge va considérer que la SNCF a été placée à la disposition des autorités allemandes entre 1940 et 1944, et sous l’autorité de l’Etat, lui-même à la demande et sous la surveillance des forces d’occupation. Les conditions dans lesquelles ces transports devaient être réalisés, notamment la détermination de la composition des trains, du type de wagons utilisés, de leur aménagement intérieur et de leur dispositif de fermeture, de même que le nombre des victimes transportées et les modalités de leur traitement, étaient fixées par l’occupant et mises en oeuvre par les autorités de l’Etat. Ainsi, si l’Etat n’était pas seul à assumer cette responsabilité, seul le juge judiciaire pouvait connaître de l’engagement de celle de la SNCF.
Enfin, la présence de l’occupant n’est pas sans importance, même si elle n’était que secondaire dans le raisonnement du juge administratif. Il a déjà été jugé que les contrats conclus avec un régime insurrectionnel comme la commune ne sont pas valables (CE, 14 février 1873, Cibille : rec. p. 170). Et les tribunaux judiciaires ont toujours indemnisé les réquisitions faites par l’ennemi, sur le fondement de la gestion d’affaires pendant la guerre de 1870 (Cass. Civ., 6 juin 1893, Fabrique de l’église de Maroué c. Cauret, Lecorre et Delle Duros, S. 1895.1.185), en y voyant « un quasi-contrat de pur droit civil » pendant la grande guerre (Cass. Req., 8 juillet 1918, Ville d’Amiens c. Bertrand, S. 1921.1.5). Aussi, le juge conclut-il, après avoir rappelé l’omniprésence des forces d’occupation comme aiguillon de l’action de l’Etat, que les représentants allemands exerçaient le commandement et la surveillance armée des convois avec, parfois, le concours des forces de sécurité publique.
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