Section II
Principes généraux du droit administratif
§ 8 La force obligatoire de l’acte administratif
(119) Le régime du droit (Rechtsstaat) s’achève par l’acte administratif, qui, avec sa force obligatoire, est placé dans les rapports à régler entre l’Etat et le sujet. Inconnu au cercle d’idées qui caractérisent le régime de la police, n’étant pas entièrement un jugement ni entièrement un acte de gestion, l’acte administratif doit être étudié dans sa nature particulière, si l’on veut comprendre le droit administratif moderne, car ce droit est dominé par lui.
I. — De la loi civile une obligation de payer est née, de la loi pénale une obligation de se laisser punir. S’il n’y avait pas autre chose, l’autorité compétente exécuterait ces effets de la loi au moyen de la force ; sur son ordre, l’huissier opèrerait une saisie sur le débiteur, l’agent de la police judiciaire conduirait le coupable en prison. Mais nous remarquerons tout de suite, que cela ne représenterait pas la justice ; ce qui manque, c’est le jugement. Avant que la loi soit mise à exécution par le fait, le tribunal, par son jugement, déclare ce qui, dans ce cas, est de droit ; ce qu’il décide est juridiquement obligatoire pour le sujet intéressé. Le jugement lui-même est lié par la loi ; mais, de son côté, le jugement lie le fait de l’exécution : ce qui est dû au sujet, ce qui doit lui arriver de la part de l’autorité n’est plus désormais déterminé directement par la loi, mais par le jugement. Celui-ci, comme l’on dit, a fait jus in concreto.
(120) De même que la valeur de la règle de droit consiste dans l’égalité juridiquement assurée de l’action autoritaire, de même la valeur du jugement réside dans la détermination juridique qu’il donne immédiatement au cas individuel. De même que la règle de droit civil a été rendue applicable à l’administration par l’attribution à la loi constitutionnelle des éléments essentiels de sa force, de même on use, sous le régime du droit, du jugement de droit civil. Faisant abstraction de toutes les particularités du jugement, dont on se réserve de faire un usage spécial, on confère l’essence de sa force juridique à un acte de volonté autoritaire, qui est fait dans l’administration et pour l’administration.
L’acte administratif est un acte d’autorité émanant de l’administration, acte qui détermine, vis-à-vis du sujet, ce qui, pour lui, doit être de droit dans le cas individuel1.
Cet acte est, comme le jugement, une manifestation spéciale de la puissance publique, qui n’émane pas d’un membre quelconque de l’organisation publique. Il est réservé à des magistrats formant une espèce d’aristocratie au milieu de la masse des fonctionnaires ; aux autorités judiciaires (Gerichtsbehörden) correspondent les autorités administratives (Verwaltungsbehörden2).
(121) Dans la justice, ces autorités sont clairement désignées par le nom de juges et de tribunaux. Dans l’administration, c’est une question d’interprétation des règles qui président à la distribution des compétences, que celle de savoir si le pouvoir de décider, de commander, de faire des actes d’autorité, en un mot des actes administratifs, est compris dans une certaine fonction. Il y a des autorités spéciales, compétentes seulement pour certains actes ou pour les actes que comporte une certaine branche d’administration. Mais les lois d’organisation désignent aussi des autorités générales, autorités de l’administration générale du pays (Behörden der allgemeinen Landesverwaltung), autorités de la police du pays (Landespolizeibehörden), qui doivent être compétentes pour faire tous les actes administratifs du degré de la hiérarchie qu’elles occupent et non réservés à une autre autorité.
L’action des autorités administratives étant très variée, on peut se demander, dans le cas spécial, s’il s’agit d’un acte administratif ou non. La présomption (122) est pour l’affirmative. Si ce que l’autorité a fait, d’après sa compétence et d’après le contenu de la volonté exprimée, peut être un acte administratif, il faut le considérer comme tel et lui accorder les effets juridiques qui y sont attachés, sauf la preuve contraire, c’est-à-dire sauf à prouver qu’il ne s’agit que d’une sommation, d’une menace, d’un avertissement. Voilà le principe. Des dispositions expresses permettent de distinguer plus clairement l’acte administratif en le faisant connaître par sa forme, son origine, son contenu.
II. — Le jugement de la procédure civile a son rôle stéréotypé ; l’acte administratif est d’un emploi plus libre et plus varié. Cela répond à la mission qui lui est donnée, celle de placer dans le mouvement de l’administration la détermination juridique des cas individuels.
1) Le jugement du tribunal civil repose toujours sur la loi qu’il applique au cas spécial. On serait tenté d’exiger aussi, pour l’acte administratif, une base pareille ; mais on ne peut pas poser à cet égard une règle générale3.
Il faut distinguer. La détermination par voie d’autorité, vis-à-vis du sujet, de ce qui, dans le cas individuel, doit, pour lui, être de droit, n’est pas comprise dans la réserve de la loi. C’est une émanation de la puissance publique, qui appartient également au pouvoir exécutif. Tout dépend donc du contenu de l’acte (123) administratif. S’agit-il de porter atteinte à la liberté et à la propriété par des commandements, par l’imposition de charges, par des obligations de payer, par une dépossession ou par des restrictions, alors, naturellement, l’acte a nécessairement pour base une loi. Ce n’est pas parce qu’il est décidé, pour le sujet, quelque chose qui, pour lui, doit être de droit ; c’est parce qu’on décide qu’une certaine atteinte doit le frapper. D’autre part, l’acte administratif peut procurer au sujet un avantage, un droit de possession, un droit de jouissance, une somme à toucher. Alors, il n’est plus question de la réserve de la loi, et nous voyons l’acte administratif produire son effet en vertu de sa propre force.
Un acte, qui, par son contenu, n’implique qu’une faveur de ce genre, peut cependant avoir besoin d’une autorisation législative spéciale, quand il s’agit d’une matière, dont une loi s’est déjà emparée ; alors la préférence de la loi est en jeu4.
D’un autre côté, un acte imposant des charges peut être fait sans fondement légal en vertu du consentement de l’intéressé. La réserve de la loi, telle qu’elle est formulée dans les soi-disant droits de liberté, s’entend au profit des individus et produit son effet pour eux : la violation de la réserve à leur détriment est une injustice commise à leur préjudice. Mais ce serait renier la liberté même que de vouloir leur octroyer cette protection malgré eux ; le protégé reste libre de se soumettre, dans une certaine mesure, à des charges personnelles, à des obligations de payer, etc. Il faut donc sous-entendre, dans toutes les réserves constitutionnelles qui interdisent d’imposer aux individus des charges en dehors d’une loi, la clause tacite : à moins que la partie intéressée ne donne son consentement (124). C’est le cas pour les actes administratifs sur soumission. La soumission ne fait que remplacer l’autorisation de la loi ; elle fait disparaître la barrière que, sans cela, la réserve constitutionnelle aurait opposée. L’acte administratif, devenu libre, produit alors son effet par lui-même5.
Ajoutons encore qu’un acte administratif n’a pas besoin d’avoir un titre spécial dans une loi qui l’autorise, quand il ne crée pas de charges et d’obligations nouvelles, mais qu’il se borne à appliquer celles qui existent déjà. Nous appelons cela un acte déclaratif. Il s’agit alors d’un rapport juridique déjà fixé, soit par une loi, soit par un acte administratif antérieur, peu importe : dans l’un et dans l’autre cas, un acte administratif peut intervenir pour déclarer, par voie d’autorité, ce rapport juridique, le développer et en tirer les conséquences.
(125) 2) L’effet du jugement ressemble à celui de la règle de droit. Il donne à celui, pour lequel il est rendu, une détermination juridique, vis-à-vis de la puissance publique, de ce qu’il doit et de ce qu’il peut ; il oblige la justice à s’y conformer dans ses actes d’exécution comme dans ses jugements ultérieurs. C’est une injustice qu’on commet à son égard, en s’en écartant à son préjudice.
De même, l’acte administratif donne au sujet, pour lequel il est fait, une détermination ; seulement ici le contenu de cette détermination est infiniment plus varié.
L’acte administratif ne se borne pas à décider que le sujet sera contraint à quelque chose ou qu’il sera maintenu dans quelque chose, le détail de ces choses ne présentant d’intérêt que pour la partie privée opposée ; ici, tous les détails deviennent immédiatement la matière du rapport juridique avec l’Etat qui statue ; c’est vis-à-vis de l’Etat que le sujet doit faire ou ne pas faire, ou a le pouvoir de faire, de payer ou de toucher une somme, de faire un service, de renoncer à sa propriété, de jouir d’un avantage6. En même temps, la puissance publique est obligée de procurer l’exécution en assurant l’observation et l’exécution de ce qui a été ainsi décidé, aussi longtemps, tout au moins, que l’acte administratif reste en vigueur et pourvu qu’il n’intervienne pas un pouvoir spécial pour arrêter son effet.
Cet effet dépend de l’observation de toutes les conditions et limitations auxquelles l’acte administratif lui-même est soumis. Mais cette dépendance est de la même nature juridique que celle du jugement du tribunal civil. Le jugement qui viole la loi n’est pas (126) valable, il doit être annulé. Mais jusqu’à l’annulation, il faut lui reconnaître son effet. La puissance autoritaire qui y apparaît commence toujours par attester sa légalité. Il en est de même pour l’acte administratif. La non validité n’est qu’un motif pour déclarer l’inefficacité ; elle n’est pas elle-même l’inefficacité. Pour obtenir cette déclaration, il faut suivre les voies indiquées par la distribution des compétences7.
De cette manière, l’acte administratif remplit toute la sphère de l’administration de rapports juridiques bien déterminés, ayant leur cause immédiate dans cet acte même, semblables par la variété de leur contenu aux rapports juridiques du droit civil, par leur forme et par leur nature aux rapports juridiques de la justice.
3) Tous les actes administratifs produisent un ordre juridique pour le cas individuel. Mais, en même temps, ils peuvent se rattacher plus ou moins à un ordre déjà existant. Cela nous amène à distinguer différentes espèces d’actes administratifs.
La classification principale est celle en décisions (Entscheidungen) et dispositions (Verfügungen). Les décisions sont des actes administratifs à contenu juridiquement lié. L’obligation peut provenir d’une règle de droit applicable au cas particulier, ou d’un acte administratif antérieur qu’il s’agit simplement d’exécuter (127), ou d’un droit individuel dont les effets doivent être reconnus et déclarés. Il faut que l’obligation soit complète, de sorte que le nouvel acte administratif par lui-même n’ait rien à ajouter à l’ordre juridique exigé par le cas individuel ; la décision ne dit ce qui doit être de droit qu’en déclarant ce qui est de droit. Les jugements des tribunaux civils, à quelques exceptions près (Comp. § 13, I, ci-dessous), ont partout ce caractère. C’est sur leur modèle que s’est formée l’espèce correspondante d’actes administratifs8.
Tous les autres actes administratifs sont des dispositions. Ils ont ceci de commun, qu’ici l’autorité agit de sa propre volonté pour déterminer les conditions du rapport juridique. Il n’y a pas à distinguer suivant que l’autorité est entièrement libre ou suivant qu’il ne lui est laissé qu’une certaine latitude pour manifester sa volonté dans ces limites.
Cependant, il y a une distinction à faire parmi les dispositions, d’après leur importance quant au rapport qu’elles visent.
La disposition forme l’antithèse absolue de la décision, quand elle crée tout nouvellement un certain rapport juridique entre l’individu qu’elle vise et la puissance publique. Elle correspond alors à ce que, dans le droit civil, nous appelons un acte juridique (Rechtsgeschäft), tel que la convention, le testament, etc. ; on peut l’appeler un acte juridique de droit public9.
(128) Mais toutes les dispositions ne sont pas ainsi placées à l’origine du rapport juridique ; il y en a qui ont seulement pour mission de développer et de réaliser un rapport existant. La disposition peut alors y apporter des changements, des complètements, des annulations etc., toutes choses que l’on pourrait peut-être comprendre encore sous la notion de l’acte juridique. Mais toute ressemblance cesse, quand la disposition ne sert qu’à faire valoir le pouvoir général que, en vertu du rapport existant, l’autorité doit exercer sur le sujet ; ceci n’a pas plus le caractère d’un acte juridique qu’une sommation par laquelle le créancier civil exige une prestation résultant d’un engagement général10. Il y a, dans le droit public, une espèce particulière de rapports qui contiennent, au profit de l’autorité, un pouvoir général : on leur a donné le nom de rapports de sujétion particulière (Gewaltverhältniss)11. L’acte administratif qui est accompli pour faire valoir sur l’individu le rapport de sujétion et pour en tirer les conséquences, s’appelle une instruction. Le principal exemple est l’instruction qui est adressée aux fonctionnaires ; mais ce n’est pas le seul exemple.
III. — La loi peut produire son effet à la manière de la règle de droit, par des règles générales touchant tous ceux que cela concerne.
(129) L’acte administratif n’a pas cette généralité d’effet, quant à si force obligatoire ; c’est là la différence essentielle. Toutes les autres qualités de la force obligatoire de la loi peuvent appartenir à la force obligatoire de l’acte administratif ; mais, dès que l’acte administratif deviendrait capable de produire son effet dans cette forme propre à la loi, il cesserait d’être acte administratif.
L’acte administratif saisit donc le cas individuel à la manière du jugement du tribunal civil. Toutefois, il ne faut pas vouloir l’astreindre trop rigoureusement à une certaine forme. Pourvu qu’il n’ait pas à produire son effet comme une règle de droit, il peut s’attaquer, de différentes manières, au cas individuel qu’il vise.
1) Le jugement civil détermine très exactement le cas en appelant de son nom l’homme pour lequel il intervient. Cela sera également la règle pour l’acte administratif : l’ordre de police, l’imposition de contributions directes, la conscription pour le service militaire procèdent dans cette forme.
2) Le jugement civil étend son effet au-delà de la personne qu’il concerne directement, à son ayant cause : le fait juridique qui se produit dans la sphère du droit civil déplace donc, en même temps, le rapport de droit public qui a été créé par le jugement. L’acte administratif peut, de la même manière, avoir indirectement son effet sur un tiers, quand il crée un droit ou une obligation qui peuvent se transmettre (Cf. § 9 ci-dessous) ; mais c’est une exception rare.
3) L’acte administratif correspond plutôt au modèle de certains actes juridiques du droit civil, lorsque, tout en étant rendu à propos d’un certain individu, il ne vise cependant pas celui-ci en personne ; lorsqu’il ne le vise que comme représentant certaines circonstances extérieures dans lesquelles il est placé, une (130) propriété, une exploitation, une entreprise ; alors, l’acte administratif peut avoir son effet pour n’importe quel autre individu qui le remplacera plus tard. Cet effet successif sur des personae incertae n’est pas la règle (Cf. § 21 notes 10 et 20, ci-dessous.)
4) Il faut encore distinguer le cas, où celui que l’acte administratif concerne est bien une personne certaine, mais désignée indirectement : on ne le détermine qu’après avoir élucidé une certaine relation juridique. Cela arrive surtout pour des actes administratifs concernant des droits réels, comme l’expropriation, l’établissement de servitudes de droit public : ces actes n’ont pas besoin de désigner un propriétaire ou le vrai propriétaire qu’ils touchent ; ils le frappent à travers son immeuble qu’ils désignent. — De même nature est l’acte administratif qui s’adresse à un certain ensemble de personnes pour frapper chacun des individus qui y sont compris : sommation à un attroupement de se retirer, dissolution d’une réunion, d’une association. A vrai dire, c’est une pluralité d’actes administratifs : il en est adressé un à chaque personne désignée par l’ensemble dans lequel elle est comprise ; mais ces actes apparaissent réunis dans un acte collectif12.
5) Cette façon de désigner plus librement les personnes que l’acte administratif concerné atteint son plus haut degré dans le rapport de sujétion particulière. Ici nous trouvons des actes collectifs avec désignation indirecte des individus qu’ils concernent et sans restriction à un ensemble de personnes présentes et définies ; ce sont donc des actes faits pour des personae incertae. Aux individus compris dans le rapport de sujétion, à tous à la fois, des instructions (131) peuvent être données, actes administratifs tirant les conséquences du rapport de sujétion. Ces instructions sont réunies dans des règlements de service, règlements, statuts, et communiquées par voie de publication ou autres moyens propres à les porter à la connaissance des intéressés. Elles sont alors obligatoires pour chaque individu qui est compris actuellement dans le rapport de sujétion ou qui y entrera à l’avenir.
Extérieurement alors, l’acte présente une grande ressemblance avec une règle de droit. Cependant, il n’y a encore là qu’un acte administratif collectif ou, comme on l’a appelé aussi très justement, une disposition générale13. Cette disposition n’opère pas avec la force obligatoire générale de la loi ; elle opère seulement avec la force du rapport particulier de sujétion : elle ne peut avoir d’effet que pour les individus et pour les obligations, qui y sont compris. En ce qui concerne ces obligations, le rapport de sujétion met chacun des individus qu’il comprend en contact avec l’acte administratif qui a été rendu d’avance et qui le touche aussi ; il lui impose comme premier devoir de s’informer de cet acte14. L’effet est le même que si l’instruction lui avait été communiquée directement et comme un acte individuel.
- G. Meyer, Verw. Recht., I, p. 2, appelle acte administratif « le règlement de rapports juridiques individuels ou concrets », en tant que cela a lieu dans l’administration, c’est-à-dire en dehors de la justice. Il distingue alors (p. 31) des actes administratifs de droit international, de droit privé et de droit public. Ces derniers sont des « actes d’autorités » (obrigkeitliche Verwaltungsacte). Ils sont, d’après nous, les seuls qui méritent le nom d’actes administratifs. Comp. v. Kirchenheim, Einf., p. 75. — Pour Jellinek, Gesetz und Verordnung, p. 225 ss., acte administratif est synonyme de toute activité quelconque de l’administration ; ce serait par exemple, un acte administratif, que d’aménager une salle d’école. Nous avons déjà parlé de cette singulière terminologie au § 5, note 19, ci-dessus. [↩]
- « Autorité » n’est pas synonyme de « fonction ». L’autorité suppose une compétence spéciale que l’on peut désigner par droit de commandement, d’autorité, de puissance autoritaire (obrigkeitliche Gewalt), ou toute autre expression analogue. Mais l’autorité n’est pas simplement la fonction munie de cette faculté spéciale : c’est le point de départ de cette faculté, point de départ formé par la fonction, c’est le « lieu » hiérarchique (die Stelle). L’autorité peut être représentée par une seule fonction : le Landrat prussien est une autorité. Elle peut aussi être représentée par un ensemble de fonctions, par une autorité collégiale, comme le Kreisausschuss, ou organisée d’après le système « bureaucratique », comme le Regierungs-president avec ses conseillers : le membre du Kreisausschuss et le conseiller du gouvernement (Regierungsrat) ont des fonctions autoritaires (behördliches Amt) ; ce ne sont pas des autorités : décision de l’Ober Trib., 26 mars 1863 (Recueil de Striethorst, 48, p. 274) : « Une autorité publique est un « lieu officiel » (amtliche Stelle), muni de puissance publique, auquel certaines obligations et prérogatives autoritaires ont été attribuées d’une manière permanente, et qui, quand il se compose de plusieurs personnes, apparaît extérieurement comme une collectivité ou unité représentée par son chef », Se prononcent plus ou moins dans ce sens : Foersternann, Pol. R., p. 97, 99 ; Ober Trib., 8 avril 1861 (Pl. Beschl. ; J. M. BI., 1861, p. 116) ; Jellinek, Gesetz und Verordnung p. 243 ; Laband, Staatsrecht, éd. all. I, p. 339 (éd. fr. II, p. 4) ; Zorn, Staatsrecht, I, p. 208 ; Lœning, Verw. Recht., p. 30. [↩]
- Tout ce qui est valable suppose une règle de droit qui lui sert de base ; c’est là, pour la plupart de nos jurisconsultes, un axiome. Cette base est déclarée indispensable pour l’acte administratif par Lœning, Verw. Recht, p. 241 ; v. Sarwey, Allg. Verw. Recht, p. 27, et autres. Quand on va jusqu’à faire dépendre l’efficacité juridique de l’acte de sa légalité, on s’éloigne même du modèle de la justice ; l’on traite l’acte administratif plutôt comme un acte juridique du droit privé, qui, « lui aussi, ne tire pas sa force de lui-même, mais de la loi ». En ce sens se prononce expressément Rosin, Pol. Verord., p. 15. [↩]
- Tous les actes de permission et de dispense rentrent dans cette catégorie ; comp. surtout nos explications au sujet de la permission de police, § 11 ci-dessous. [↩]
- Exemple principal : la nomination à un emploi public. Grotefend, Preuss. Staatsrecht, I, p. 53, déclare à ce sujet : « Il y a dans la sphère de l’administration publique toute une série de règles de droit qui n’imposent d’obligations qu’à celui qui veut entrer dans le rapport juridique dont il s’agit, par exemple dans la position de fonctionnaire public ». Encore la règle de droit ! Mais ce n’est pas la règle de droit qui impose les devoirs, c’est l’acte de nomination ; et cet acte peut valablement être accompli, sans qu’il y ait une loi qui règle les nominations. Cf. Arch. f. oeff. R., III, p. 49 ss. Est-ce à dire que la soumission de l’intéressé peut légaliser une charge quelconque et une restriction de la liberté qu’un acte administratif pourrait vouloir imposer ? Evidemment non. Pour les conventions de droit civil, il y a aussi certaines limites au-delà desquelles on ne peut pas disposer de sa liberté (Comp. Code civil franç., art. 1780). A défaut d’une loi expresse, ce qui excède ces limites est déclaré nul comme étant contra bonas mores. Le droit public l’admet. Les actes administratifs sur soumission se restreignent aux charges, obligations et cessions que, d’après nos usages, un contrat de droit civil pourrait également imposer. C’est pour cela qu’on les appelle des contrats, quoique, dans leur structure juridique, ils ne soient pas des contrats. Pour les distinguer des vrais contrats de droit civil, on les appelle des contrats de droit public. En tant que le contenu de l’acte ne pourrait pas former la matière d’un contrat civil, la soumission serait considérée comme insuffisante pour remplacer une autorisation de la loi ; par conséquent, l’acte administratif ne serait pas valable. C’est là que réside l’importance de la notion de contrat de droit civil. Comp. § 11, note 3 ci-dessous. [↩]
- Sur les tentatives pour faire, d’après ce contenu, une classification complète des actes administratifs, comp. § 11, note 1, ci-dessous. [↩]
- Le contraire de l’invalidité est la nullité, qui signifie une inefficacité de droit. L’acte d’autorité n’est nul que dans le cas où, en réalité, il n’y a pas d’acte d’autorité, mais seulement l’apparence d’un tel acte. Au jugement nul correspond l’acte administratif constituant « une disposition émanant de personnes absolument incompétentes ». Laband, Staatsrecht, éd. all. I, p. 695, note 1 (éd. fr. II, p. 542, note 1). Rumpelt, dans Fischers Zeitschrift, XXIV, p. 2 (l’auteur trouve la formule trop étroite, mais les exemples qu’il cite s’y laissent tous comprendre). Dans tous les autres cas, l’acte administratif repose sur lui-même ; il s’agit seulement de savoir si des moyens existent pour le détruire, ou, comme dit Laband, loc. cit. : « le décret n’est pas nul en principe, mais il doit être attaqué par un moyen juridique et annulé pour excès de pouvoir ». Nous parlerons de ce moyen ci-dessous, § 12 ss. Du reste, s’il était encore besoin de prouver que l’acte administratif ne tire pas sa force de la loi, on trouverait ici cette preuve. [↩]
- C’est pourquoi on aime à relever une certaine connexité entre la décision et la justice, connexité qui est étrangère à l’acte administratif qualifié de disposition : G. Meyer, dans Woerterbuch, II, p. 669 ss. ; Læning, Verw. Recht, p. 241 ; surtout Bernatzik, Rechtskraft, p. 6 ss. Comp. § 13, I, ci-dessous. — Laband, Staatsrecht, éd. all. I, p. 667 (éd. fr. II, p. 515) : « Il est dans la nature de la décision d’être liée » ; au contraire, « la liberté juridique dans la résolution » caractérise la convention et la disposition comprise par Laband sous le nom d’acte administratif (I, p. 687-1I, p. 530). Quand, plus loin (p. 696-5371, il dit : « au fond, la disposition (le décret) peut être une décision », il semble renoncer à la distinction. [↩]
- Merkel, Encyklop., § 210, Contra Laband, qui, dans Staatsrecht, (1re éd.), II, p. 216, avait proposé la notion de l’acte juridique de droit public : Bernatzik, Rechtskraft, p. 10, note, et G. Meyer dans Annalen, 1878, p. 383. Mais le mot est bien propre à représenter la chose ; nous n’avons pas besoin pour cela d’y attacher une importance supérieure. [↩]
- Pour expliquer la chose par un exemple, la concession d’un chemin de fer serait un acte juridique de droit public ; l’acte qui, plus tard, résoudrait la question de savoir si une certaine ligne y est comprise, serait une décision ; l’injonction de prendre une certaine mesure technique serait une disposition qui fait valoir les obligations résultant de la concession ; ce ne serait donc ni un acte juridique de droit public, ni une décision. Tout cela émane peut-être de la même autorité, dans la même forme, et à la nature commune de l’acte administratif. [↩]
- Comp. sur la notion si intéressante et si importante du « Gewaltverhältniss », § 9, I, no 2 ci-dessus. [↩]
- Sur la différence entre l’acte collectif et la règle de droit : Laband, Staatsrecht, éd. all. I, p. 696 (éd. fr. II, p. 544) ; v. Sarwey, Allg. Verw. Recht, p. 29. [↩]
- Haenel, Staatsrecht, I, p. 235 ; Laband, Staatsrecht., éd. all. I, p, 697 (éd. fr. II, p. 546). Il n’y a pas de décisions générales ; tous les actes administratifs généraux sont des dispositions. [↩]
- Haenel, Studien, II, p. 64, note 1. [↩]
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