Certaines décisions juridictionnelles ne peuvent que décevoir. Tel est le cas de la décision du 22 décembre 2015 par laquelle le Conseil constitutionnel a statué sur la conformité à la Constitution des dispositions législatives nouvelles relatives à l’« état d’urgence » telles que révisées par la loi du 20 novembre 2015 (Loi n° 2015‑1501 du 20 novembre 2015 prorogeant l’application de la loi n° 55‑385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence et renforçant l’efficacité de ses dispositions).
M. Cédric D. a été l’objet d’une assignation à résidence édictée à son encontre par le ministre de l’Intérieur le 25 novembre 2015. Cette mesure a été l’objet immédiat d’un recours en « référé-liberté » (Article L.521‑2 du code de justice administrative) devant le juge des référés du Tribunal administratif de Melun territorialement compétent (Article R.312‑8 du code de justice administrative).
Sa demande sera rejetée par une ordonnance « au fond » du 3 décembre 2015 (TA Melun, ord., 3 décembre 2015, Cédric C., n° 15‑09659) qui fera elle-même l’objet d’un appel devant le juge des référés du Conseil d’État (Article R.523‑3 du code de justice administrative). Il sera, à cette occasion, soulevé une question prioritaire de constitutionnalité, qui sera renvoyée au Conseil constitutionnel par une décision rendue en formation solennelle de Section du 11 décembre 2015 après une audience du même jour (CE Sect., 11 décembre 2015, Cédric C., n° 395.009).
Le Conseil constitutionnel se devait donc de statuer sur la constitutionnalité des dispositions nouvelles de l’article 6 de la loi du 3 avril 1955 dans leur rédaction issue de la loi du 20 novembre 2015. Il prendra soin, in limine litis, de préciser les limites de sa saisine, ce qu’il fait chaque fois qu’une question prioritaire de constitutionnalité peut soulever des difficultés à ce titre (M. Disant, Droit de la question prioritaire de constitutionnalité, Lamy, p. 308 et s), comme s’il souhaitait mettre en avant dans cette espèce sensible une volonté affichée de « judicial self restraint ».
La Haute juridiction jugera, sans réelle surprise, que les dispositions qui lui ont été transmises étaient conformes à la Constitution et aux droits et libertés qu’elle garantit avec une célérité exceptionnelle pour une décision statuant sur une question prioritaire de constitutionnalité (saisine du 11 décembre, audience du 17 décembre, lecture du 22 décembre 2015) qui n’est d’ordinaire réservée qu’au profit des lois de finances ou aux textes les plus importants sur un plan politique –et dont la saisine est « pressentie »– pour lesquelles l’examen anticipé de constitutionnalité permet de préparer le travail des conseillers avant même l’adoption formelle de la loi (P. Giro, « Les méthodes de travail des juridictions constitutionnelles : Rapport français », AIJC 1992 p. 249, O. Dutheillet de Lamothe, « Les méthodes de travail du Conseil constitutionnel », <http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/root/bank_mm/pdf/Conseil/20070716Dutheillet.pdf>).
Si le juge constitutionnel a ainsi écarté facilement les griefs tirés de la violation de la « réserve de loi » (Article 34 de la Constitution), du droit au recours (Article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen) ou du droit à une vie privée et familiale (CC, 13 août 1993, « Maîtrise de l’immigration », n° 93325 DC), les principaux griefs se focalisaient sur la violation de l’article 66 de la Constitution, qui confère à l’Autorité judiciaire la sauvegarde de la liberté individuelle, et sur celui de l’atteinte à la liberté d’aller et venir par la mesure de police administrative que constitue l’assignation à résidence d’une personne.
1°) Le Conseil constitutionnel avait préalablement tranché la question fondamentale de la compatibilité du principe même de l’existence d’un régime d’exception qualifié d’« état d’urgence » par une « grande décision « déchue » » du 25 janvier 1985 (CC, 25 janvier 1985, « Loi relative à l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie », n° 85‑187 DC). Dans cette décision, les sages avaient statué sur deux points principaux.
Dans un premier temps, il a été jugé que l’entrée en vigueur de la Constitution du 4 octobre 1958 n’avait pas abrogé implicitement le régime institué par la loi antérieure relative à l’état d’urgence (S. Ferrari, « De l’art du trompe-l’œil : l’abrogation implicite de la loi par la Constitution au service d’un continuum constitutionnel », RFDC 2010 p. 497). Il a été précisé à cette occasion que si le Constituant avait bien prévu un régime spécial pour l’« état de siège » (en omettant de porter une appréciation sur l’« état de guerre » et sur le régime des pleins pouvoirs institués par l’article 16 de la Constitution), il n’avait pas pour autant exclu la présence d’autres régimes purement légaux (Sur une reprise de cette logique par le juge constitutionnel : cf. CC, 21 février 2013, Association pour la promotion et l’expansion de la laïcité, n° 2012‑297 QPC).
Dans un second temps, il avait entre-ouvert la voie du contrôle a posteriori des lois promulguées à l’occasion d’une nouvelle loi qui la « modifient, la complètent ou affectent son domaine ». D’une efficacité limitée, mais néanmoins toujours applicable (Voir par exemple : CC, 13 décembre 2012, « Loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 », n° 2012‑659 DC), ce dispositif initié par une lacune des textes sera très largement supplanté par le mécanisme de la question prioritaire de constitutionnalité résultant de la réforme constitutionnelle de 2008 (Loi constitutionnelle n° 2008‑724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République). Toutefois, et ce point est ici procéduralement utile, en l’absence de toute déclaration formelle de constitutionnalité de la loi du 3 avril 1955, qui résulterait des motifs et du dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, il était possible de soulever devant le juge ordinaire une question prioritaire de constitutionnalité (Article 23‑2 de l’ordonnance organique n° 58‑1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel).
Il résultait nécessairement ainsi de cette décision que la marge d’appréciation du Conseil constitutionnel était inévitablement limitée puisque s’il pouvait être saisi de la loi du 3 avril 1955 dont son entier, seules les dispositions nouvelles, postérieures à sa décision du 1985 pouvaient être discutées utilement devant lui. Ainsi, le principe même de l’instauration d’un « état d’urgence » avait déjà été implicitement validé par la haute juridiction et il semblait vain, en l’absence de changement du texte constitutionnel sur ce point, d’espérer une évolution jurisprudentielle.
Par voie de conséquence, si, sur un plan juridique, un tel examen se révélait utile au cas particulier du justiciable à l’origine de la présente procédure, force est de constater que son intérêt réel était bien en deçà de ce que pouvait en attendre ledit justiciable et les observateurs puisque seul le régime « nouveau » de l’assignation à résidence pouvait être utilement argué d’inconstitutionnalité ce qui réduisait très fortement la portée de la décision rendue.
2°) On relèvera immédiatement la conception particulièrement restrictive de la notion de « privation de liberté », au sens des dispositions de l’article 66 de la Constitution, que retient le juge de l’aile Montpensier du Palais royal car elle n’excède pas … douze heures. Cette conception, très regrettable selon nous, n’est pour autant pas une innovation puisque par une décision du 9 juin 2011 (CC, 9 juin 2011, « Loi relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité », n° 2011‑631 DC) il avait été déjà refusé cette qualification à une mesure d’assignation à résidence délivrée à l’encontre d’un étranger en situation irrégulière en instance d’éloignement et qui pourrait être placé en centre de rétention administratif. Cette position a été même été confirmée récemment (CC, 27 février 2015, M. Pierre T. et autre [Sanctions disciplinaires des militaires – Arrêts simples], n° 2014‑450 QPC) à l’encontre des « arrêts simples » prononcés par l’autorité militaire (Article L.4137‑2 1° du code de la défense).
Si une telle analyse peut, sur un plan théorique, être parfaitement acceptable, elle demeure sur le plan pratique totalement en porte-à-faux avec l’incidence de telles décisions. En effet, une mesure d’assignation à résidence qui proscrit tout déplacement porte nécessairement atteinte à la liberté individuelle et la limitation à douze heures quotidienne n’est pas si éloignée du régime de « semi-liberté carcérale » (Article 132‑26 du code pénal) que l’on n’oserait pas toutefois qualifier de « mesure non privative de liberté ».
On notera que la jurisprudence européenne est à cet égard plus soucieuse de réalisme puisque l’assignation à domicile assortie d’une interdiction de circuler constitue, selon la Cour de Strasbourg, une privation de liberté (Cour EDH, 28 novembre 2002, Lavents c. Lettonie, n° 58442/00) ce qui n’est pas le cas si l’assignation vise un « lieu » et non un « local » (Cour EDH, 9 février 2006, Freimanis et autre c. Lettonie, n° 73443 et 74860/01). Or ici, la jurisprudence parisienne sous-entend qu’une assignation à résidence peut ne pas être une telle mesure et que donc le recours au juge judiciaire ne s’impose pas et cela indépendamment de toute réalité. Il est parfois bien tentant d’aller chercher à Strasbourg ce qui n’est pas à Paris (Cf. M. Jéol, conclusions sur Cass. Ass. plén., 30 juin 1995, Belhomme, n° 94.20‑302).
En réalité, le Conseil constitutionnel se trouvait « piégé » par ses pratiques jurisprudentielles héritées de l’ère antérieure à 2008 où seul le contrôle a priori, abstrait, était pratiqué. Admettre qu’une telle mesure puisse avoir des effets pratiques contraires à ceux de sa décision de 2011 en matière de libertés impliquait de distinguer les droits applicables aux seuls étrangers en situation irrégulière et ceux des autres personnes ce qui était directement contraire au principe constitutionnel d’égalité (Article 1er de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen). Ainsi, sa jurisprudence, qui fait ici office de critère de répartition des compétences entre l’Autorité judiciaire, juge des mesures privatives de liberté, et le juge administratif, juge de la légalité des autres mesures administratives de restriction des libertés, imposait de fait la solution retenue même si l’on pouvait espérer mieux d’un « tribunal constitutionnel des conflits »…
En effet, laisser au juge administratif le soin de contrôler de telles mesures implique d’user des voies de droit existantes. Or le référé-suspension (Article L.521‑1 du code de justice administrative) implique un « moyen sérieux en l’état de l’instruction » et le référé-liberté (Article L.521‑2 du code de justice administrative) implique une « atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ». Les obstacles procéduraux sont donc conséquents car démontrer un « moyen sérieux » implique ici de connaître a minima certains éléments connus du seul ministre de l’Intérieur et la gravité et le caractère « manifestement » illégal d’une mesure fondée sur l’application directe de la loi serait également délicat à démontrer. C’est en réalité le contrôle du juge au fond (CE, 19 mai 1933, Benjamin) qui est le plus à même d’être efficace au prix d’une instruction plus complète et donc, plus longue. De plus, si le juge administratif a déjà, par le passé, démontré son aptitude à juger des requêtes en excès de pouvoir en quelques jours, la création des référés « nouveaux » le 1er juin 2001 a mis un terme à ce palliatif procédural même si le délai de jugement peut être pris en compte dans le cadre de l’examen d’un référé en ce qui concerne l’urgence à statuer (CE ord., 28 février 2001, Union syndicale « Groupe des 10 », n° 229.881).
On relèvera que l’état du droit antérieur à la loi du 20 novembre 2015 prévoyait que l’absence de jugement de la légalité des mesures privatives de liberté établies dans le cadre de l’« état d’urgence » impliquait leur caducité (Rédaction originelle de l’article 7 de la loi du 3 avril 1955). Il n’est désormais plus prévu de sanction dans le cas d’un jugement au fond qui s’avérerait tardif… hormis, implicitement le recours en responsabilité de l’État fondé sur la jurisprudence Magiera (CE Ass., 28 juin 2002, Magiera) pour défaut de célérité dans l’action de la Justice.
C’est ici une certaine conception « napoléonienne » de la police administrative (Ch. Vautrot-Schwarz (dir), La police administrative, Puf, 2014, 320 p.) qui est confirmée. L’administration active, qui seule connaît l’intégralité des motifs pouvant justifier une mesure d’assignation à résidence, peut ici adopter des mesures attentatoires aux libertés alors que la graduation des régimes (« états de crise » au sens de la loi (Article 11 de la loi organique n° 2009‑403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34‑1, 39 et 44 de la Constitution) entre « état d’urgence », « état de guerre », « pouvoirs exceptionnels de l’article 16 de la Constitution » ou « circonstances exceptionnelles » aurait pu justifier un aménagement similaire des réponses juridictionnelles sous les auspices des lignes directrices posées par le juge constitutionnel.
3°) Ainsi, les décisions portant assignation à résidence constituent des mesures de police administrative à finalité individuelle selon le Conseil d’État (CE Ass., 16 décembre 1955, Dame Bourokba, Rec. p. 596). Dans ce cadre, il appartient au Parlement d’assurer la conciliation entre les risques pesant sur l’ordre public et les droits fondamentaux constitutionnels suivant une jurisprudence aussi classique que constante du Conseil constitutionnel (Par exemple : CC, 13 mars 2003, « Loi pour la sécurité intérieure », n° 2003‑467 DC).
On rappellera que si de telles mesures se doivent normalement d’être motivées (Article 1er de la loi n° 79‑587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public, futur article L.211‑2 du code des relations entre le public et l’administration), la situation d’urgence dans lesquelles elles sont adoptées y fait obstacle (Article 4 de la loi du 11 juillet 1979 précité futur article L.211‑6 du code) tout comme celle-ci neutralise toute possibilité de procédure contradictoire (Article 24 de la loi n° 2000‑321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, futur articles L.121‑1 et 2 du code).
Si la définition même de la police administrative implique un caractère préventif des mesures adoptées, les conditions de mise en œuvre de l’« état d’urgence » sont peu contrôlables en pratique puisque sa prorogation au delà d’un délai de 12 jours relève de la loi. Or cette dernière ne peut voir sa constitutionnalité discutée devant le juge administratif que par le cadre étroit de la question prioritaire de constitutionnalité. Or, compte tenu des textes applicables et de sa jurisprudence (CC, 25 janvier 1985, « Loi relative à l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie », op. cit), on voit mal le Conseil constitutionnel censurer spontanément une erreur d’appréciation du législateur sur le principe même de l’instauration ou de la prorogation des mécanismes prévus par la loi de 1955. Le Conseil d’État fournit toutefois des éléments justifiant une éventuelle censure à ce titre dans un avis du 11 décembre 2015 (CE Ass. gén., 11 décembre 2015, Avis sur le projet de loi constitutionnelle de protection de la Nation, n° 390.866, cette revue (<https://www.revuegeneraledudroit.eu/?p=23244>) ce qui pourrait être préfigurateur d’une évolution de la jurisprudence de son voisin en cas d’abus manifeste.
Sur la forme, les conditions d’intervention d’une mesure de police administrative individuelle obéissent à un régime connu qui sont ici difficilement contestables sauf erreur grossière de l’autorité gouvernementale ou préfectorale (champ d’application de l’état d’urgence, homonymie, etc). En faisant porter sur le seul juge administratif le contrôle des mesures « limitatives » de libertés, le juge constitutionnel commet, selon nous, une triple carence dans son office.
En premier lieu, et le Conseil constitutionnel ne pouvait l’ignorer, le juge administratif est prompt en de telles circonstances à accroître la marge d’appréciation de l’administration active (CE, 28 février 1919, Dol et Laurent) en particulier en matière de référé. Son contrôle sur les récentes assignations à résidence semble confirmer cette analyse même si rien n’interdit un jugement très accéléré au fond… suivant un contrôle de proportionnalité plein et entier.
En deuxième lieu, le juge administratif n’est que peu guidé par les considérants de la décision du juge constitutionnel. Compte tenu du contexte très particulier de cette affaire, il aurait été préférable que ce dernier détermine avec plus de précisions les éléments que le juge des référés administratifs se doit de contrôler en toutes circonstances à l’égard de telles décisions. Un vade mecum complet, sous forme de très nombreuses réserves d’interprétation, aurait été bienvenu sans que cela ne puisse être regardé comme une évolution majeure de ses méthodes de travail.
En troisième lieu, le renvoi aux procédures de référé aurait également justifié de plus amples précisions afin de « forcer » les juges ordinaires à neutraliser en tant que de besoin la jurisprudence traditionnelle du Conseil d’État sur les limites à l’office du juge des référés (CE, 30 décembre 2002, Ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement, n° 240430). Ainsi, il aurait pu être jugé que la contestation d’une mesure d’assignation à résidence devant le juge des référés constituait une situation d’urgence qui était non seulement présumée (Ph. Cossalter, « Le contrôle par le juge des référés de la légalité des assignations à résidence dans le cadre de l’état d’urgence », cette revue (<https://www.revuegeneraledudroit.eu/?p=23098>) mais que cette dernière était irréfragable épargnant aux requérants une éventuelle argumentation sur ce point. De même, il aurait pu être précisé que toute disproportion dans la mesure de police adoptée constituait nécessairement une « atteinte grave à une liberté fondamentale » manifestement illégale ou un « moyen sérieux » et que la suspension se devait d’être prononcée sauf circonstances particulières propres à l’espèce considérée (Cf. le raisonnement tenu dans la décision sur les peines planchers qui normalement s’appliquent sauf si le juge, par une décision spéciale, entend y déroger : CC, 9 août 2007, « Loi renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs », n° 2007‑554 DC).
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La décision du Conseil constitutionnel, qui s’établit dans un courant jurisprudentiel bien établi, est donc ambivalente.
Sur le plan procédural, elle démontre que les sages ont parfaitement pris conscience des enjeux de certaines questions prioritaires de constitutionnalité et que le calendrier de procédure peut être accéléré en tant que de besoin lorsque cela est requis. Une telle solution n’allait pas forcément de soi et conforte le mécanisme atypique de la question prioritaire de constitutionnalité qui peut s’exercer désormais dans l’extrême urgence.
Sur le fond, elle déçoit profondément car le Conseil constitutionnel est loin de remplir un rôle de gardien efficace des libertés au cas présent. Mais pouvait-il en être autrement ? Le décalage opéré ici est patent et on regrettera amèrement que le Conseil, prisonnier de sa propre jurisprudence et de son office, n’ait pas voulu exceptionnellement aller au delà compte tenu des circonstances. Il y avait là matière à une « grande décision » pour assurer l’effectivité des libertés en définissant avec une précision accrue les modalités de contrôle des mesures de police administrative. L’« effet cliquet » (CC, 11 octobre 1984, « Entreprises de presse », n° 84‑181 DC) qui s’attache à une garantie croissante des libertés aurait pu recevoir ici un nouveau terrain d’application au profit d’une « jurisprudence cliquet ».