Le présent entretien a été présenté le 4 juillet 2016 à l’occasion d’un colloque consacrée à l’inclusion dans la Grande Région. L’équipe rédactionnelle et l’auteur ont essayé d’actualiser les propos ci-dessous rapportés, mais le secteur de l’inclusion est en pleine évolution législative. Les chiffres et état présentés reflètent la situation au 1er janvier 2018.
Ancien éducateur gradué, Gil Steinbach est aujourd’hui chargé de la direction d’un centre d’éducation différenciée. Il revient dans cet entretien sur l’historique du cadre légal ainsi que sur la place de l’éducation différenciée au Luxembourg, dressant par là même le portrait de la prise en charge scolaire et universitaire du handicap au Luxembourg.
L’éducation différenciée, ainsi que tout l’enseignement spécialisé au Luxembourg, dépend du Ministère de l’Éducation nationale. Elle est mise en place par des écoles spécialisées et des équipes multi-professionnelles. Dès la possibilité de scolarisation des enfants porteurs de handicap, ces derniers étaient scolarisés dans des écoles spécialisées ou à l’étranger. Ces centres d’éducation différenciée furent repris par l’État en 1989. Suite à une loi de 1994, fut aussi possible une intégration totale ou partielle dans l’enseignement ordinaire mais aussi une intégration partielle dans l’enseignement spécialisé. Actuellement, 1% des élèves scolarisés le sont dans des écoles spécialisées et une centaine sont scolarisés à l’étranger. À travers les chiffres donnés par l’auteur s’esquisse le paradigme d’un État européen en matière de handicap.
Gil Steinbach ist ehemaliger ausgebildeter Erzieher und Direktor eines Förderschulzentrums. In diesem Beitrag geht er auf die Geschichte des rechtlichen Rahmens sowie den Stellenwert des Förderschulsystems in Luxemburg ein und beschreibt die schulische und universitäre Betreuung von Menschen mit Behinderung in Luxemburg.
Das Förderschulsystem fällt, wie die gesamte Sonderpädagogik in Luxemburg, in den Zuständigkeitsbereich des Ministeriums für Bildung. Es wird von Förderschulen und multiprofessionellen Teams umgesetzt. Sobald Kinder mit Behinderung eine Schule besuchen konnten, wurden sie in Förderschulen oder im Ausland eingeschult. Diese Förderschulzentren wurden 1989 vom Staat übernommen. Durch ein Gesetz von 1994 wurde auch die vollständige oder teilweise Integration in das reguläre Schulsystem möglich, ebenso wie die teilweise Integration in das Förderschulsystem. Aktuell sind 1% der Schüler in Sonderschulen eingeschult und ungefähr 100 Schüler sind im Ausland eingeschrieben. Durch die vom Autor genannten Zahlen zeichnet sich das Paradigma eines europäischen Staates im Bereich der Behinderung ab.
Qu’est-ce que l’éducation différenciée au Luxembourg ?
L’éducation différenciée au Luxembourg est un service qui fait partie du Ministère de l’Éducation nationale, de l’enfance et de la jeunesse. Tout l’enseignement est spécialisé au Luxembourg. Il relève exclusivement de ce ministère et non, comme dans d’autres pays, comme en France ou en Suisse, de plusieurs ministères. Il faut savoir qu’il y a une vingtaine d’années, l’éducation différenciée avait été retirée du Ministère de l’Éducation Nationale pour être affectée à un ministère aux handicapés de la vie. Pendant quatre ou cinq ans, on a lutté pour réintégrer le Ministère de l’Éducation Nationale et depuis, c’est une situation acquise.
Comment s’est développée l’inclusion d’enfants et des adolescents en situation de handicap en milieu scolaire au fil des années ?
Pour un petit rappel historique législatif, il faut remonter à une première loi du 10 août 1912, loi sur l’organisation de l’enseignement primaire, qui est la loi qui a imposé la scolarité obligatoire des enfants au Luxembourg. Elle est considérée comme l’avènement du droit à l’éducation et aussi de l’obligation d’aller à l’école. Cette loi précisait toutefois dès son article 2 que « ne sont pas soumis aux prescriptions de l’article 1 concernant l’obligation scolaire, les enfants atteint de graves infirmités physiques, autres que celles de la vue et de l’ouïe ». Les enfants atteints d’infirmités intellectuelles n’étaient donc pas admissibles à l’école. Cette loi de 1912 est pourtant célébrée, de nombreuses rues portent en son hommage le nom du député l’ayant faite avancer, Pierre Kir. Encore aujourd’hui, on fête parfois l’anniversaire de cette loi scolaire de 1912.
Il a fallu attendre le 13 mars 1973 pour avoir une loi portant création de services d’éducation différenciée. Cette loi a tout simplement repris l’article 2 de la loi de 1912, en le modifiant. Ainsi, la loi de 1973 a introduit l’obligation scolaire pour les enfants porteurs de handicap. En ces temps-là, les enfants étaient admis dans des écoles spécialisées qui étaient soit déjà existantes, soit en cours de création. Une seconde possibilité existait encore : ces enfants pouvaient suivre leur scolarité à l’étranger.
Le 10 janvier 1989, les centres d’éducation différenciée qui avaient été créés dans les années 60, 70 et 80, ont été repris par l’État. Jusqu’en 1989, les écoles communales avaient souvent, à côté de l’enseignement ordinaire, des classes dites « classes spéciales ». Quelques instituteurs ou institutrices enseignants avaient créé, sur leur propre initiative, des classes pour des enfants en situation d’handicap mental, dites d’éducation différenciée.
Avec le recul, on pourrait dire que, dès cette époque, il s’agissait déjà d’inclusion scolaire. C’est seulement en 1989 que l’État a repris ces classes qui existaient, donc dans des écoles communales, pour en faire des centres d’éducation différenciée étatiques. Il faut savoir qu’à l’époque, les enfants venaient non pas seulement d’une seule commune mais d’une zone géographique plus large, les enfants pouvaient être issus de toute la région. Les communes ne voulaient pas supporter tous les coûts engendrés par la création d’une ou plusieurs classes fonctionnant au niveau régional. L’État avait promis en 1973 de reprendre toutes ces initiatives. Ce fut le cas jusqu’en 1989. Toutefois, cette solution du point de vue de l’inclusion scolaire a plus constitué une régression qu’une avancée par rapport à ce qui existait jusque-là.
Il a fallu attendre 1994 pour avoir une loi dite d’intégration scolaire. L’initiative de cette loi appartient aux parents et aux associations de parents d’enfants porteurs de handicap, qui ont poussé le ministre de l’époque à s’exprimer sur l’inclusion scolaire. Cette loi du 28 juin 1994 a ajouté la possibilité de suivre l’enseignement dans une institution spécialisée ou à l’étranger. Deux autres mesures furent ajoutées : d’une part, l’intégration totale dans l’enseignement ordinaire, d’autre part, l’intégration partielle dans l’enseignement ordinaire ainsi que dans l’enseignement spécialisé.
Depuis le 6 février 2009, coexistent trois lois sur l’enseignement fondamental et l’obligation scolaire ; même si en théorie, une seule et unique loi énonçant que tout enfant au Luxembourg doit aller à l’école serait nécessaire. Par « à l’école », on pense à l’enseignement ordinaire et donc, si on se fiait à l’exécution de la loi de 2009, on pourrait abolir les lois de 1973, 1989 et 1994.
La loi du 15 juillet 2011 est venue garantir l’accès aux qualifications scolaires et professionnelles des élèves à besoins éducatifs particuliers permettant des aménagements raisonnables pour ces élèves fréquentant l’enseignement secondaire.
Il y a donc quatre modes de scolarisation des enfants à besoins éducatifs spécifiques : l’intégration totale, l’intégration partielle, la scolarisation au sein d’une école spécialisée de l’éducation différenciée de même que la scolarisation dans une institution spécialisée à l’étranger (à condition qu’une formation équivalente ne puisse se faire au Grand-Duché).
Il n’est donc pas possible au Luxembourg de créer une école privée pour des enfants à besoins éducatifs spécifiques. Ainsi, tous les enfants qui ont des besoins éducatifs spécifiques et qui profitent de l’enseignement à l’éducation différenciée sont scolarisés dans des écoles étatiques.
Une école privée ou conventionnée ne peut proposer une offre pédagogique à des enfants à besoins éducatifs spécifiques. Si on regarde la scolarisation à l’étranger, un certain nombre d’élèves, dont certains à besoins éducatifs spécifiques suivent leur cursus scolaire soit en Belgique, en Allemagne, en Suisse ou même en Angleterre, en fonction des situations ou des attentes des parents.
La loi du 14 mars 1973 portant création de services d’éducation différenciée a été abrogée en 2018 et remplacée par la loi du 20 juillet 2018 portant sur l’inclusion scolaire et la création des centres de compétences en psychopédagogie spécialisée.
Cette loi a aussi mis en place des centres de compétences en psychopédagogie. Ceux-ci sont spécialisés dans l’inclusion dans l’éducation et visent à compenser les initiatives locales et régionales infructueuses. Cette loi a également créé l’« Agence pour la transition vers une vie autonome », qui facilite l’accès au monde du travail des jeunes ayant des besoins éducatifs spéciaux.
Pouvez-vous nous parler des dispositions en vigueur ?
Tous les enfants ont le droit d’aller à l’école et sont soumis à l’obligation scolaire. Concernant les enfants qui fréquentent une école spécialisée, ils ne sont pas recrutés par les écoles elles-mêmes. Une démarche volontaire est nécessaire, d’une part de l’enseignement ordinaire et d’autre part des parents d’élèves afin de faire inscrire leurs élèves ou leurs enfants dans une école spécialisée.
Par la suite, une commission, dénommée « commission médico-psycho-pédagogique nationale » tranche sur la question ou fait une proposition d’orientation sur la base d’un certain nombre de critères, de dossiers et de rapports qui lui sont soumis. Depuis la loi de 1994, la volonté parentale est dominante, ce sont les parents qui en dernier lieu décideront de la scolarisation de leur enfant.
Les principes directeurs qui conduisent notre travail au sein de l’éducation différenciée sont les suivants : subsidiarité, prévention, individualisation, droit des élèves à suivre les programmes réguliers dans les cas où cela est possible. Il y a donc une approche pédagogique allant du concret vers l’abstrait.
En quoi consiste l’éducation différenciée ?
L’éducation différenciée dispose d’une part d’écoles spécialisées. Ces écoles spécialisées se composent de centres d’éducation différenciée et pour les élèves qui ont terminé leur scolarité obligatoire de centres de propédeutique professionnelle sur le plan régional et d’institutions spécialisées sur le plan national.
Il y a donc les instituts nationaux comprenant l’institut pour infirmes, moteurs cérébraux, l’institut pour enfants autistes et psychotiques, l’institut pour déficients visuels, le Centre d’intégration et d´observation scolaire pour les élèves qui ont des problèmes de comportement graves et le Centre de logopédie. Le Centre de logopédie est soumis à une loi antérieure à celle relative à l’éducation différenciée et bénéficie donc d’un régime à part.
L’assistance en classe ou la mise en place d’interventions spécialisées pour soutenir les élèves à besoins éducatifs spécifiques dans l’enseignement ordinaire tombent aussi sous la responsabilité du service d’éducation différenciée.
L’enseignement fondamental luxembourgeois est actuellement divisé en vingt arrondissements d’inspection. Pour chaque arrondissement d’inspection, il y a une équipe d’éducation différenciée qui s’occupe de la mise en place de l’intégration scolaire, en collaboration avec du personnel de l’enseignement fondamental et avec du personnel du Centre de logopédie. Au niveau de l’enseignement secondaire et secondaire technique, il y a une équipe multi-professionnelle sur le plan national qui se compose uniquement de membres du Service de l’éducation différenciée, qui peut s’appuyer sur l’aide du service de psychologie interne au lycée.
Combien d’élèves sont inscrits dans une école spécialisée1?
1 % des élèves de la population scolaire fréquentent les écoles spécialisées de l’éducation différenciée. 1,5 % des élèves sont pris également en charge en ambulatoire. En outre, un accompagnement des parents et d’autres enfants par les équipes multi-professionnelles est également possible. De plus, une centaine d’élèves passent leur scolarité à l’étranger.
La scolarisation d’élèves ayant un handicap nécessite-t-elle un personnel spécialisé ?
Les équipes de l’éducation différenciée sont constituées non seulement d’enseignants (instituteurs ou professeurs) mais aussi d’éducateurs gradués, des éducateurs instructeurs, des psychologues, des assistants sociaux, des pédagogues spécialisés, tout une équipe de psychorééducateurs ainsi que d’orthophonistes. Tous travaillent en équipe pour assurer la scolarisation des élèves.
Annexe
Zusammenfassung:
Das Förderschulsystem ist eine Dienstleistung des luxemburgischen Ministeriums für Bildung, Kinder und Jugend. Das Gesetz vom 10. August 1912 legt das Recht auf Bildung und die Pflicht zum Schulbesuch für alle Kinder fest, mit Ausnahme von Kindern mit geistiger Behinderung, wie in Artikel 2 erwähnt.
Dieser Artikel wurde durch das Gesetz vom 13. März 1973 geändert, womit die Schulpflicht für alle Kinder vorgeschrieben wird. Kinder mit Behinderung können in Sonderschulen oder im Ausland unterrichtet werden. Ab den 1960er Jahren beschleunigte sich die Gründung von Sonderschulzentren. Vor allem in den Regelschulen wurden von den Lehrern auf eigene Initiative hin Förderschulklassen eingerichtet. Diese Zentren und Klassen wurden 1989 vom Staat übernommen. Die schulische Integration wurde durch das Gesetz vom 28. Juni 1994 tatsächlich umgesetzt, da eine vollständige Integration in die allgemeine Schule oder eine Teilintegration sowohl in die allgemeine Schule als auch in die Sonderschule möglich wurde. Drei Gesetze vom 6. Februar 2009 (das Gesetz über die Schulpflicht, das Gesetz über die Organisation der Grundbildung und das Gesetz über Personal und Grundbildung) regeln die Schulpflicht für die Grundschule (im Gegensatz zur Sekundarschule) und brachten zahlreiche Reformen mit einer neuen Struktur mit sich, darunter eine Reform bezüglich zweijährigen Lernzyklen, die eine Anpassung des Unterrichts an die Bedürfnisse der Schüler ermöglicht, sowie neue Methoden wie die Erstellung eines Schulerfolgsplans für jede Einrichtung oder eine Bewertung der Schüler in Bezug auf ein Mindestmaß an Fähigkeiten, die beispielsweise darauf abzielen den Unterricht an die Bedürfnisse des Schülers anzupassen. Das Gesetz vom 15. Juli 2011 ermöglicht die Schaffung von angemessenen Vorkehrungen für Schüler mit besonderen Bedürfnissen, die eine weiterführende Schule besuchen. Mit dem Gesetz vom 20. Juli 2018 wurden die Kompetenzzentren für Pädagogische Psychologie gegründet, die auf die Inklusion in der Bildung spezialisiert sind und erfolglose lokale und regionale Initiativen kompensieren sollen. Mit diesem Gesetz wurde auch die Agentur für den Übergang zu einem autonomen Leben („Agence pour la transition vers une vie autonome“) geschaffen, die jungen Menschen mit sonderpädagogischem Förderbedarf den Zugang zur Arbeitswelt erleichtert.
Es gibt vier Arten der Beschulung von Kindern mit sonderpädagogischem Förderbedarf: Voll- oder Teilintegration, in einer Sonderschule Förderunterricht oder in einer spezialisierten Einrichtung im Ausland, oft in Belgien, Deutschland, der Schweiz oder England. In Luxemburg gehen Kinder mit sonderpädagogischem Förderbedarf auf eine staatliche Schule und nicht auf eine Privatschule. Die Einschulung in eine Sonderschule erfolgt auf freiwilliger Basis seitens des allgemeinen Bildungssystems und der Eltern der Schüler und wird von der nationalen schulmedizinischen Kommission genehmigt. Diese Kommission kann einen Vorschlag zur Orientierung machen, aber es sind die Eltern, die das letzte Wort haben und die den Schulort für ihr Kind wählen, ihr Wille ist also seit dem Gesetz von 1994 vorrangig. Das Förderschulsystem setzt sich aus spezialisierten Schulen und multiprofessionellen Teams zusammen. Auf regionaler Ebene bestehen spezialisierte Schulen aus Förderschulzentren und auf den Beruf vorbereitende Ausbildungszentren („centres de propédeutique professionnelle“) für Schüler, die ihre Schulpflicht erfüllt haben. Auf nationaler Ebene gibt es spezialisierte Einrichtungen: das Institut für Cerebralparese („institut pour infirmes moteurs cérébraux“), das Institut für autistische und psychotische Kinder, das Blinden- und Sehbehinderteninstitut und das Zentrum für schulische Integration und Beobachtung („centre d’intégration et d’observation scolaires“) für Schüler mit schweren Verhaltensstörungen. Es gibt auch ein Zentrum für Logopädie. Die Unterstützung von Schülern mit sonderpädagogischem Förderbedarf in der Regelschule hängt auch vom Förderschulsystem ab. In der Grundbildung bestehen die multiprofessionellen Teams aus 20 Inspektionsteams oder Inspektionsbezirke („arrondissements d’inspection“). Innerhalb jedes Inspektionsbezirks ist ein Bildungsteam des Förderschulsystems für die Umsetzung der schulischen Integration verantwortlich. Auf der Ebene der Sekundarstufe und der technischen Sekundarstufe interveniert ein nationales Team, das sich aus Mitgliedern des Förderschulsystems zusammensetzt, mit Hilfe des internen psychologischen Dienstes des Lycées.
- Les chiffres correspondent à la situation lors de cet entretien. [↩]
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