L’analyse des cas concrets qui mettent en rapport les différents pouvoirs démontrent qu’il ne s’agit pas de concrétiser de manière machinale le principe sans prendre en compte les données empiriques qui diffèrent chaque fois. Aucune fonction ne se voit attribuée exclusivement à un seul organe. L’organisation du pouvoir est tissée de rapports complexes qui font ressortir l’impossible existence d’un principe de la séparation des pouvoirs qui serait d’application certaine et ne tolérerait pas les ajustements.
Il s’agit davantage d’avoir des rapports balancés qui permettent, jusqu’à un certain niveau, le partage des compétences, tout en sauvegardant l’organe qui porte la responsaibilité pour la prise d’une décision et qui dont ne peut pas être remplacé par un autre. C’est là la limite de la norme constitutionnelle déduite de l’article 20, alinéa 2 LF et concrétisée par les articles de la Loi fondamentale. C’est ce jeu de contrôle et de concours aux mêmes missions qui est difficile à comprendre si on s’arrête à une présentation illusoire, fallacieuse du principe. L’explication banale et scolaire un organe-une fonction-un pouvoir ne peut guère s’appliquer à la réalité constitutionnelle. Ou alors, le principe de la séparation des pouvoirs ne remplirait plus sa mission de principe d’organisation du pouvoir d’État. Organiser le pouvoir, c’est rationaliser les actions des différents pouvoirs et optimiser les conditions de leur travail. Cela ne veut certainement pas dire qu’il faut construire une structure statique qui ne permettrait aucun mouvement, aucun équilibre. Car l’équilibre suppose le mouvement dynamique.
La simple application des règles du syllogisme juridique (souvent mal compris) ne correspond pas à la nature fonctionnelle du principe de la séparation des pouvoirs. Ce dernier ne doit pas s’en tenir aux présuposés, aux inexactitudes qui accompagnent sa concrétisation. Les définitions dégagées par la Cour tout au long de sa jurisprudence doivent non pas être calquées sur les espèces concrètes, mais suivre un processus d’adaptation nécessaire afin que la solution soit adéquate au problème juridique posé. Certes, les solutions données par la Cour présentent parfois, et même souvent, des failles. Mais l’effort avec lequel le juge constitutionnel allemand tente d’expliquer son raisonnement mérite d’attirer l’attention.