Pendant l’époque de la monarchie limitée allemande, les assemblées représentatives étaient le moyen de la société civile de limiter la toute puissance du monarque qui détenait l’intégralité du pouvoir d’État. Le débat portait sur la question de savoir si ces organes représentatifs pouvaient être dotés de compétences positives propres ou étaient cantonnées à un espace négatif. Aujourd’hui, avec l’affirmation du principe démocratique ancré dans l’article 20, alinéa 2 LF, les interrogations sont différentes. La structure du régime démocratique de la Loi fondamentale repose sur le principe selon lequel « toutes les fonctions du pouvoir d’État » sont démocratiquement « légitimées et constituées » en vertu du principe de séparation des pouvoirs1. Si, dans le constitutionnalisme du XIXe siècle, les assemblées parlementaires furent des organes aux compétences négatives qui n’étaient pas destinées à gouverner de manière effective, les fondements démocratiques du droit constitutionnel positif font du parlement l’organe de décision central dont émane l’instrument normatif principal de la puissance publique : la loi.
Le principe démocratique constitue la base des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. Il n’y a donc pas de différence qualitative entre les différents types de légitimation des organes investis des trois pouvoirs. Cependant, le Parlement, étant le seul organe constitutionnel à bénéficier d’une légitimité démocratique directe, immédiate, occupe la place centrale dans le système institutionnel de la Loi fondamentale. L’amalgame traditionnel tend à confondre l’organe « parlement » avec la fonction législative. L’identifier exclusivement à la production de la loi est cependant trompeur. Certes, il s’agit de l’organe qui, par l’acte final d’adoption de la loi, domine la procédure et permet sa finalisation. Mais dans l’accomplissement de cette mission, le Bundestag n’est pas seul, il le partage avec l’exécutif. Si, en la matière, le Bundestag dispose du véritable pouvoir décisionnel, de la faculté de statuer en adoptant ou abandonnant un texte ayant la vocation à devenir une loi, les organes exécutifs se contentent de compétences limitées.
Les compétences constitutionnelles du Parlement ne s’épuisent pas dans l’accomplissement de la fonction législative. Le deuxième volet de son action est celui du contrôle exercé sur le gouvernement fédéral. Mais ici, les rôles sont inversés : le Parlement perd sa qualité de « décideur » et se transforme en « contrôleur », c’est-à-dire un acteur secondaire chargé d’opérer un contrôle sur l’action politique du gouvernement fédéral sans pour autant empiéter sur le domaine de « responsabilité exécutive propre » de celui-ci.
L’interprétation du principe de séparation des pouvoirs livrée par la Cour constitutionnelle fédérale permet, sinon de complètement comprendre les mécanismes régissant les rapports entre les organes investis des pouvoirs législatif et exécutif, au moins de tenter une explication des lignes directrices présidant à leur fonctionnement.
Il convient d’aborder le rôle prépondérant du Parlement dans la fonction législative (section 1) afin de pouvoir ensuite se concentrer sur le contrôle parlementaire opéré sur gouvernement fédéral (section 2).
- Hans Hugo Klein, « Aufgaben des Bundestages », in Josef Isensee/Paul Kirchhof (dir.), Handbuch des Staatsrechts der Bundesrepublik Deutschland, vol. 2, 1e édition, C.F. Müller, Heidelberg, 1987, p. 342 : « Die Struktur der vom Grundgesetz verfaßten Demokratie beruht darauf, daß die Staatsgewalt in allen ihren Funktionen (…) demokratisch konstituiert und legitimiert und auf dieser Grundlage gewaltenteilug organisiert ist ». [↩]