Même si la justice constitutionnelle est un phénomène relativement nouveau dans l’histoire constitutionnelle allemande : avant 1949, on ne peut signaler que la tentative avortée de la Constitution de l’église Saint-Paul du 28 mars 1849 de doter le Tribunal d’Empire (Reichsgericht) de compténces qui rappellent celles de la Cour constitutionnelle fédérale1, ou l’existence de la Cour d’État (Staatsgerichtshof) créée par la Constitution de Weimar de 19192, la Cour de Karlsruhe a su s’imposer en tant qu’institution incontournable du paysage politique allemand3. Par le passé, le contrôle des normes que l’on lie aujourd’hui à la mission de la justice constitutionnelle ne fut pas la question centrale «en tant que telle ». Il s’agitssait, sous le Saint Empire romain-germanique, de « trancher soit des conflits entre des instances politiques éminentes », soit « une question de responsabilité (spécialement ministérielle) »4. Selon l’affirmation triviale, le juge constitutionnel représente un organe spécial qui ne s’inscrit pas dans le schéma classique de la séparation des pouvoirs, car habilité par le constituant à contrôler l’œuvre du législateur démocratique. Le contrôle des lois est certes la mission la plus visible et médiatisée des tribunaux constitutionnels, mais il ne s’agit que d’une partie seulement des compétences qui leur sont attribuées. Ainsi, la Loi fondamentale dote la Cour constitutionnelle fédérale d’un vaste éventail de compétences : « la garantie des rapports constitutionnels entre la Fédération et les Länder et des Länder entre eux », « la garantie des rapports constitutionnels entre les organes politiques de l’État (litiges interorganes) », « la garantie des droits fondamentaux », « la justice électorale garantissant la sincérité de la représentation politique », enfin, « la protection de la constitution contre ses ennemis politiques ».
La signification première de la justice constitutionnelle réside dans la garantie juridictionnelle des « éléments structurels fondamentaux » de l’État moderne, c’est-à-dire : la forme de celui-ci, la distribution des pouvoirs, la primauté normative de la Constitution, les libertés accordées aux citoyens et aux individus, la représentation démocratique, la défense de l’ordre libéral et démocratique contre ses ennemis. Il s’agit par conséquent pour l’État de protéger « ses propres présupposés », l’organisation des fonctions étatiques et par là « les bases mêmes, les fondations » de l’État5.
La Cour constitutionnelle fédérale fait partie du pouvoir de rendre la justice6. Il s’agit d’un « véritable » tribunal7 qui peut être saisi dans le but de résoudre un différend, mais l’échelle de son examen juridictionnel, ce sont les dispositions constitutionnelles. La Cour de Karlsruhe « s’est très vite imposée comme une institution majeure dans l’architecture constitutionnelle allemande après 1945 »8.
La justice constitutionnelle a un rôle particulier dans « l’ensemble de la séparation des pouvoirs », car elle permet de garantir le respect de la primauté de la Constitution par le législateur9. Mais, par ses autres compétences, par exemple la saisine possible dans le cas d’un différend entre deux organes constitutionnels, elle participe davantage à la concrétisation du Gewaltenteilungsgrundsatz.
Au premier abord, il n’est pas facile d’admettre le contrôle effectué par une juridiction sur la loi du législateur démocratique. Mais il ne s’agit que d’un aperçu superficiel, car la justice constitutionnelle n’a nullement la fonction d’un censeur de la loi, elle ne se situe pas au-dessus de la Constitution, elle exerce les compétences que cette dernière lui attribue afin de garantir un ordre juridique constitutionnellement conforme. La prétendue incompatibilité de la justice constitutionnelle avec le principe de séparation des pouvoirs ne réside pas dans ses compétences. La difficulté se situe au niveau de la légitimation du juge10 et de la tendance à politiser ses décisions11. Afin de tenter de saisir la place qu’occupe le juge constitutionnel dans le schéma de la séparation des pouvoirs, il convient de se pencher sur le problème de la compatibilité de cette « fonction » avec le principe ainsi que sur les difficultés susceptibles d’être posées par les questions de légitimation du juge constitutionnel (§1). Dans le système de freins et de contrepoids de la Loi fondamentale, la justice constitutionnelle représente une garantie de l’équilibre institutionnel en permettant de sanctionner le non respect des éléments constitutifs du principe normatif de la séparaion des pouvoirs par le biais du contrôle de la loi et du litige interorganes (§2).
§1. La qualité d’organe constitutionnel de la Cour et sa légitimation démocratique.
Appartenant au pouvoir de rendre la justice, la Cour n’était pas qualifiée par le constituant de 1949 d’organe constitutionnel, à l’instar des autres pouvoirs publics de la Fédération : le Bundestag, le Bundesrat, le gouvernement fédéral ou le président fédéral. Dès 1952, la juridiction constitutionnelle s’auto-qualifie d’« organe constitutionnel » en s’érigeant ainsi au niveau des pouvoirs politiques (A). La portée des décisions rendues par les « deux caméras du cœur républicain »12 exigent un degré de légitimation suffisant (B).
A. La (nécessaire) auto-qualification d’organe constitutionnel.
Dans les premières années de son existence, la Cour constitutionnelle fédérale ne fut pas entendue comme un organe constitutionnel suprême, placé à côté du Parlement, du Bundesrat, du gouvernement ou du président fédéral. La Loi fondamentale elle-même ne qualifie nulle part la Cour d’organe constitutionnel. Elle « la désigne expressément comme un organe de la Rechtsprechung, comme un organe juridictionnel, mais la Cour devait, au-delà, s’autointerpréter comme un “Verfassungsorgan”, comme l’un des “pouvoirs publics constitutionnels” pourrait-on traduire en français ; il s’agissait d’affirmer son identité de rang avec les autres organes constitutionnels dont elle avait à trancher les litiges, sa légitimité à décider souverainement sur des cas politiques de nature constitutionnelle et de donner à ses pouvoirs une base juridique d’où la Cour pouvait affirmer une “maîtrise” spécifique sur leur exercice (…) »13. La Cour définit les organes constitutionnels comme ceux, « dont la genèse, l’existence et l’activité constitutionnelle constituent l’État et garantissent son unité »14. Rattachée au ministère fédéral de la justice, la Cour ne disposait pas de budget autonome, les juges étaient considérés comme des fonctionnaires et le tribunal – géré par le ministère. Dans un mémoire (Status-Denkschrift) du 27 juin 195215, adressé au président fédéral Theodor Heuss, au Bundestag, au Bundesrat et au gouvernement fédéral, la Cour se qualifia elle-même de « gardien suprême de la Constitution » (oberste Hüter der Verfassung)16 et d’ « organe constitutionnel doté, en vertu de la lettre et de l’esprit de la Loi fondamentale et de la loi sur la Cour constitutionnelle fédérale, de la plus haute autorité ». En conséquence, elle ne peut être soumise « ni à un autre organe fédéral, ni à une administration fédérale »17. Cette auto-qualification « paternaliste » et « terminologiquement injuste » du juge constitutionnel comme « gardien suprême de la Constitution » peut induire en erreur et laisser croire que la Cour se situe quelque part à côté ou même au-dessus de la Constitution elle-même18.
Contrairement à la Cour, le Conseil constitutionnel français, que la Constitution du 4 octobre 1958 « insitutait comme l’un des pouvoirs publics constitutionnels », se fait « juridiction » par auto-interprétation19, car « nul mot » du texte de 1958 « n’indiquait qu’à cet organe était attaché la qualité de juridiction »20. La composition et la place du Conseil constitutionnel français paraissent aux antipodes de celles de la Cour constitutionnelle fédérale. Les articles consacrés au Conseil ne se trouvent pas dans le titre VIII de la Constitution relatif à l’autorité judiciaire, comme c’est le cas de la Loi fondamentale dont le titre IX « Du pouvoir judiciaire » englobe tant des dispositions concernant les juridictions ordinaires que des dispositions qui traitent de la Cour constitutionnelle fédérale21.
En France, la justice constitutionnelle n’a pas eu son heure de gloire. Créé dans le but de protéger le domaine du pouvoir exécutif d’un Parlement trop envahissant et pallier ainsi les insuffisances institutionnelles dont souffraient les républiques précédentes, le Conseil constitutionnel peut difficilement être qualifié de juridiction constitutionnelle. Depuis 1958, certains progrès modérés sont perceptibles. Le dernier en date, la révision du 23 juillet 2008, qui insère dans la Constitution du 4 octobre 1958, l’article 61-1 C relatif à la question prioritaire de constitutionnalité22, fait entrer dans le système constitutionnel français, enfin, le contrôle de constitutionnalité des lois a posteriori. Hélas, cette innovation ne permet pas un renforcement effectif de l’institution française. Bien au contraire, sous certains égards, la procédure de la question prioritaire de constitutionnalité tend à diminuer le rôle du Conseil dans le processus de contrôle de la loi. Car, aujourd’hui, les juridictions ordinaires – administratives et judiciaires – acquièrent une importance non négligeable en la matière. Le Conseil d’État ou la Cour de cassation, dans leurs ordres de juridiction respectifs, décident de transmettre la question relative à la constitutionnalité d’une loi qui remplit les conditions posées par l’article 61-1 C et la loi organique du 10 décembre 2009. La décision de non-transmission équivaut à une déclaration de constitutionnalité de la loi loi visée puisque le refus de soumettre la question au Conseil constitutionnel n’est suceptible d’aucun recours et la loi sera applicable au litige concret et restera en vigueur. Le monopole du contentieux constitutionnel commence à s’éffriter à cause du contrôle de constitutionnalité bis exercé par les juges ordinaires. Malgré les efforts pour tranformer le Conseil en une juridiction constitutionnelle, rien n’est encore fait pour pallier l’absence de compétences de juriste de ses membres, qui transparaît souvent dans les décisions lacunaires et expéditives, qui ne donnent pas une pleine satisfaction à celui qui décide de s’aventurer dans les méandres de la jurisprudence constitutionnelle française. Ses « membres »23 sont, dans la majorité des cas, en fonction des affinités politiques. Les autorités dotées du pouvoir de nomination – le président de la République (qui nomme également le président du Conseil qui dispose d’une voix prépondérante en cas de partage des voix), les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat24 – choisissent les candidats parmi des conseillers, des collaborateurs ou des hommes politiques qui gravitent dans l’orbite du pouvoir25. Certes, il y a eu d’excellents « membres », comme Georges Vedel26, qu’on pourrait volontiers qualifier de « juges », mais il s’agit d’une partie infime de la grande masse de ceux ayant fait partie de cette institution.
Comparés aux « membres » du Conseil désignés par les autorités politiques sans qu’il y ait une exigence quant aux compétences juridiques des candidats, les juges constitutionnels allemands sont de véritables « professionnels » du droit. Le § 3 de la loi sur la Cour constitutionnelle fédérale donne une réponse : tous les juges doivent avoir l’aptitude à exercer la fonction de juge27. La Cour est exclusivement composée de juristes professionnels, et la qualité de juge à la Cour n’est compatible qu’avec la fonction de professeur des universités28. La qualification juridique, dont ils doivent attester, est peut-être une des raisons de la qualité rédactionnelle et argumentative des décisions de la Cour. Même si parfois l’argumentaire des juges est loin d’être satisfaisant, on observe une réelle tentative d’explication, plus ou moins réussie, de la solution prise. De plus, les juges de Karlsruhe sont légitimés par une procédure d’élection qui participe à la volonté de transparence du processus de désignation.
B. La légitimation démocratique des juges composant la Cour constitutionnelle fédérale.
La Cour est composée de seize juges divisés en deux chambres29. Ils30 sont sont élus sur nomination du président fédéral, à la suite d’un consensus entre les grands partis politiques31, conformément à l’article 94, alinéa 1er LF, « pour moitié par le Bundestag et pour moitié par le Bundesrat ». Il s’agit d’une procédure qui déroge à la procédure de désignation ordinaire des juges des cours suprêmes fédérales de l’article 95, alinéa 2 LF32. Ce mode de désignation des juges vise à doter la Cour, « au vu de l’ampleur de ses compétences et de son pouvoir », d’une légitimité démocratique33, qui opère dans le respect de la « parité fédérale »34 : les juges ne sont pas directement élus par le peuple, mais par ses représentants et par les représentants des gouvernements des Länder au niveau fédéral. En vertu de la même disposition, une partie des juges doit être des juges fédéraux, l’autre partie peut être composée « d’autres membres » qui ne peuvent pas être membres du Bundestag ou du Bundesrat, membres du gouvernement fédéral ou « aux organes correspondants d’un Land35. L’incompatibilité entre la fonction de juge à la Cour et les autres hautes fonctions de l’État : député, membre d’un gouvernement ou du Bundesrat est censé garantir » la neutralité politique et l’indépendance des juges » en concrétisant le principe de la séparation des pouvoirs déduit des articles 92 et 97 LF36.
S’agissant de l’élection des juges par le Bundestag, la constitutionnalité des modalités de cette élection fut l’objet d’un recours devant la Cour qui répondit que la procédure du § 6 de la loi sur la Cour constitutionnelle fédérale37, selon laquelle les juges sont élus, de manière indirecte, par une commission spéciale composée de douze députés représentant les différents partis politiques siégeant au Bundestag, est conforme à l’article 94, alinéa 1er LF38. L’argumentation de cette décision est étonnante, notamment eu égard à une décision de la Cour ayant précédé de quelques mois la solution donnée en juin 2012. Certes, elle n’a pas pour objet les modalités d’élection de ses juges, mais souligne l’importance de la séance plénière au cours de laquelle des débats sont menés et différentes thèses – confrontées, ce qui permet aux électeurs d’avoir une idée plus claire de la décision prise par cet organe. Dans une décision du 28 février 201239, relative au mécanisme européen de stabilité financière, la Cour déclare que « les débats publics démontrant des arguments et des contre-arguments font partie intégrante du parlementarisme démocratique » avant de conclure que « les décisions d’une importance capitale » doivent être le résultat d’une procédure qui permet aux citoyens d’avoir une image claire de la nécessité et de l’étendue des mesures prises40. L’élection des juges constitutionnels par le Bundestag ne répond pas à ces crtières de publicité et de confontation d’arguments en séance plénière. Pourtant, élire des juges à la Cour est une décision d’une importance capitale, et l’explication selon laquelle les citoyens ne témoignent pas d’un intérêt manifeste pour le processus ne peut convaincre. L’article 94, alinéa 1er LF n’introduit pas la possibilité d’une élection qui serait le résultat d’un comité restreint au sein duquel les partis politiques représentés en fonction du nombre de sièges dont ils disposent au Bundestag. Ce mode d’élection41, à huis clos, sans débats42, ne correspond pas à l’esprit du « parlementarisme démocratique » mentionné par la Cour dans sa décision du 28 février 2012. Du côté de la doctrine, des voix se sont élevées pour contester la constitutionnalité de la procédure du § 6 de la loi sur la Cour constitutionnelle fédérale43. Le président du Bundestag, Norbert Lammert, dit ainsi regretter la décision qui déclare l’élection indirecte des juges par le Bundestag coforme à l’article 94, alinéa 1er LF44.
Est-ce concevable de confier l’élection des juges à la Cour constitutionnelle fédérale à une commission parlementaire ? En transférant cette compétence à un tel comité restreint, le législateur fédéral ne s’est-t-il pas privé d’un droit qui lui est constitutionnellement garanti : celui d’élire la moitié des juges constitutionnels ? Afin de répondre à cette question, il convient de se demander quel est le degré de légitimité des décisions prises par les commissions parlementaires. Même si les députés, qui composent ces commissions, représentent fidèlement la répartition des fractions politiques du Bundestag, ils ne peuvent jamais n’être qu’une image réduite du parlement, et ne peuvent décider pour le parlement tout entier. Les discussions en commission, soustraites au regard public, ne peuvent point remplacer les débats en séance plénière, ni le vote qui s’en suit. En avançant ces arguments, le § 6 de la loi sur la Cour constitutionnelle fédérale ne peut être déclaré conforme à l’article 94, alinéa 1er LF qui a le mérite de la clarté. Si le constituant avait voulu ouvrir la possibilité d’une élection indirecte par une commission parlementaire, s’il avait voulu laisser le choix au parlement, pourquoi n’aurait-il pas introduit, afin de dissiper le doute, la phrase suivante : « Le Bundestag ou une commission parlementaire élisent la moitié des juges constitutionnels ». Mentionner le Bundestag et ses commissions n’aurait pas été une originalité : il existe des dispositions constitutionnelles qui en sont l’exemple. On comprend parfaitement le refus de la Cour de déclarer l’inconstitutionnalité du § 6. La loi sur la Cour constitutionnelle fédérale date de 1951. Si le constitant de 1949 ne pouvait pas avoir une vision prémonitoire et résoudre a priori le problème de l’élection indirecte. L’article 94, alinéa 1er LF ne fait pas partie des articles couverts par la « clause d’éternité » de l’article 79, alinéa 3 LF et rien n’empêche « son ajustement » à la loi et à la pratique constitutionnelle « acceptée par la Cour ».
Le principe de séparation des pouvoirs représente un système de freins et de contrepoids, une articulation complexe entre les différents organes investis des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. La Cour constitutionnelle fédérale fait partie de ce jeu institutionnel45 dont le but est la modération du pouvoir d’État et la protection de la liberté. Elle devient le contrepoids nécessaire à l’équilibre institutionnel par son rôle dans les litiges interorganiques.
§2. La garantie juridictionnelle du principe de séparation des pouvoirs par la Cour constitutionnelle fédérale.
Les compétences de la Cour ((« We are under the Constitution ; but the constitution is what the judges say it is ! », cette constatation est de Charles Even Hughes fut à deux reprises juge à la Cour suprême des États-Unis (1910-1916 et 1930-1941 [la deuxième fois il fut également Chief Justice]), cité par Andreas Voßkuhle, « Artikel 93 », in Hermann von Mangoldt/Friedrich Klein/Christian Starck (dir.), Grundgesetz Kommentar, vol. 3, 6e édition, Franz Vahlen Verlag, 2010, p. 685. )) énumérées à l’article 93 LF46 constituent un large éventail mettant en œuvre non seulement le contrôle de la conformité des actes étatiques à la Constitution, mais confient à la Cour la mission de résoudre les conflits entre organes constitutionnels ou entre la Fédération et les Länder47. Ses décisions sont censées donner une solution à des problèmes juridiques concrets. Sa qualité d’organe constitutionnel ainsi que les effets produits par sa jurisprudence démontrent l’élément politique inhérent à son activité juridictionnelle48.
L’article 93, alinéa 1er LF introduit la possibilité de saisir la Cour constitutionnelle fédérale en cas de litiges relatifs à l’interprétation de la Loi fondamentale, impliquant les organes fédéraux « ou d’autres parties investies de pouvoirs propres » et mettant en cause les « droits et obligations », qui leur incombent soit « par la présente Loi fondamentale, soit par le règlement intérieur d’un organe fédéral suprême »49. Cette possibilité, ouverte à un des organes suprêmes de la Fédération ou d’autres « parties », a un rapport direct avec la mise en œuvre du principe de séparation des pouvoirs, car, en déclenchant la procédure du différend interorganique (Organstreitverfahren)50, un organe peut rétablir la balance entre les pouvoirs déséquilibrée par un autre organe qui se serait accaparé de compétences qui ne sont pas les siennes, ou qui aurait omis d’agir en déployant pleinement les moyens constitutionnels dont il dispose51. L’originalité du litige interorganique est donc son lien étroit avec le système de freins et de contrepoids. Le juge constitutionnel veille au respect de cet équilibre institutionnel voulu par la Loi fondamentale qui octroie aux organes fédéraux suprêmes des attributions précises afin qu’ils accomplissent leurs missions constitutionnelles. Une des armes, mises à dispositions des organes ou parties investis de pouvoirs propres est le différend interorganique – le recours au juge doit présenter une garantie suffisante pour le respect de l’équilibre entre les pouvoirs de sorte qu’aucun pouvoir ne se permette de priver un autre des compétences nécessaires à l’accomplissement de ses missions (B). Dans l’exercice de son contrôle, le juge constitutionnel doit sauvegarder la liberté de l’action politique des organes constitutionnels (A).
A. Les limites du contrôle opéré par le juge constitutionnel : sauvegarder la liberté d’action politique des organes constitutionnels.
Les procédures de contrôle de la constitutionnalité de la loi ou des décisions prises par le gouvernement permettent au juge constitutionnel de garantir l’équilibre entre les organes investis des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. Mais ce contrôle fait l’objet d’un grand nombre d’interrogations, car il s’agit d’admettre qu’un organe juridictionnel s’érige en censeur de l’œuvre du législateur bénéficiant de la légitimité démocratique directe ou bien tend à s’immiscer dans la sphère d’action gouvernementale. Il faut par conséquent trouver un juste milieu permettant un contrôle efficace sans pour autant porter atteinte à la liberté d’exercice des compétences constitutionnelles des organes politiques. Sauvegarder la balance entre l’étendue du contrôle de la Cour et le domaine fonctionnel des pouvoirs législatif et exécutif n’est pas chose aisée. La limite entre l’examen du juge, qui tend à purger le texte d’éventuelles inconstitutionnalités ou de constater son incompatibilité avec la Loi fondamentale, et la tentantion d’opérer un contrôle de l’opportunité politique de l’acte, est très fine. La technique de l’autolimitation du juge (judicial self-restraint) fait montre de sa volonté de ne pas usurper par le biais du contrôle la prise de la décision qui appartient à un autre organe52. « Le principe du judicial self-retraint vise à préserver le libre espace d’action politique garanti par la Constitution aux autres organes constitutionnels »53. Cependant, cette limitation, dont le but est la garantie de la liberté d’action politique, ne représente pas une « auto »-limitation, car cela signifierait que la Cour est maître de ses propres compétences et peut en disposer de manière discrétionnaire en décidant, dans certains cas de figure, de moduler l’étendue de son contrôle afin de ne pas porter atteinte à la liberté politique d’un autre organe. La limitation résulte de « la qualité d’organe faisant partie du pouvoir de rendre la justice de la Cour ainsi que des standards d’examen mis à sa disposition »54. Le juge doit accomplir la mission qui lui est constitutionnellement attribuée, en n’essayant pas, dans un domaine déterminé, de « substituer ses considérations à celles (…) des organes politiques compétents de la Fédération »55.
B. Le litige interorganique comme moyen juridictionnel de protection des compétences constitutionnelles des « organes suprêmes » ou la politisation de la procédure de l’article 93, alinéa 1er, n°1 LF.
Par la procédure de l’article 93, alinéa 1er, n°1 LF, la Cour constitutionnelle fédérale peut être saisie afin de livrer son interprétation sur « l’étendue des droits et obligations d’un organe fédéral suprême ou d’autres parties investies de droit propres, soit par la présente Loi fondamentale, soit par le règlement intérieur d’un organe fédéral suprême » ((Article 93, alinéa 1er LF : « La Cour constitutionnelle fédérale statue 1. sur l’interprétation de la présente Loi fondamentale, à l’occasion de litiges sur l’étendue des droits et obligations d’un organe fédéral suprême ou d’autres parties investies de pouvoirs propres, soit par la présente Loi fondamentale, soit par le règlement intérieur d’un organe fédéral suprême », complété par § 63 et suiv. de la loi relative à la Cour constitutionnelle fédérale (Bundesverfassungsgerichtsgesetz) du 12 mars 1951. )). Il s’agit d’un litige constitutionnel « typique » auquel peuvent être partie « président fédéral, le Bundestag, le Bundesrat, le gouvernement fédéral, les fractions parlementaires ou les partis politiques »56. Une « partie » des organes cités peut être à l’origine du litige, car elle peut faire prévaloir les droits de la totalité de l’organe auquel elle appartient. Ainsi, l’opposition parlementaire se voit accorder la possibilité de saisir la Cour afin de contrer l’action de la majorité parlementaire soutenant le gouvernement fédéral qui aurait comme résultat la violation des droits du Bundestag. Le différend interorganique a ici la fonction d’un instrument procédural visant à protéger la minorité parlementaire :
Selon la jurisprudence de la Cour constitutionnelle fédérale, le litige interorganique entre une fraction du Bundestag et un autre organe fédéral suprême sert, entre autres, à protéger la minorité parlementaire incarnée par la fraction.57
Les « organes suprêmes » ou les « parties invesites de droit propres » ne sont pas « titulaires de droits subjectifs », mais exercent des « compétences »58 qui leur ont été objectivement attribuées par le texte constitutionnel. Cependant, l’aspect subjectif du litige n’est pas absolument exclu, car l’expression « droits et obligations » introduit également le côté subjectif de la procédure. Il n’est par conséquent pas seulement question du « droit constitutionnel objectif », mais aussi de « la position juridique subjective » de la partie à l’origine de la saisine59. La finalité du litige interorganique n’est pas la protection isolée des compétences d’un organe déterminé. Il s’agit de préserver le maintien de l’équilibre institutionnel et de garantir l’ordre fonctionnel de la Loi fondamentale contre « les prétentions excessives d’un organe constitutionnel »60, dont les actes tendraient à élargir sa sphère d’action en balayant toutes les limites posées par le principe normatif de la séparation des pouvoirs. La finalité de l’article 93, alinéa 1er, n°1 LF est objective car elle vise à préserver la répartition des compétences constitutionnelles.
Ainsi, l’article 93, alinéa 1er, n°1 LF permet à la fois le retour à l’équilibre institutionnel créé par la Loi fondamentale entre les organes suprêmes et prend en compte la menace que représente la configuration politique propre au régime parlementaire pour le principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs. L’identité de l’obédience politique du gouvernement fédéral et de la majorité parlementaire tend à placer le Bundestag dans une position subordonnée en le transformant en un agent d’exécution de la volonté gouvernementale. Ouvrir le litige interorganique à la minorité parlementaire permet sinon de complétement éviter le danger, du moins de doter l’opposition d’un moyen peu ou prou efficace permettant de protéger les droits et obligations constitutionnels du Bundestag.
La formulation employée par l’article 93, alinéa 1er, n°1 LF peut induire en erreur : la Cour est saisie afin de donner une interprétation de l’ « étendue des droits et obligations », mais les conséquences de cette saisine ne sont pas claires. S’agit-il d’une simple interprétation qui ne signfie pas vraiment une sanction de l’organe ou la partie qui aurait franchi ses compétences. Dans cette hypothèse la décision du juge intervient en tant que solution abstraite qui ne produit pas d’effet sur le litige concret. Ou bien, l’interprétation de la Cour doit-elle être suivie d’effet ? Dans ce cas de figure, l’action visée par la saisine doit cesser immédiatement afin que l’équilibre institutionnel soit préservé. Il est clair, à la lecture des §§64 et 6761 de la loi sur la Cour constitutionnelle fédérale, que l’interprétation n’a pas une dimension abstraite, détachée de l’espèce, mais sert à résoudre le problème juridique concret posé à la Cour : dans le cadre du litige interorganique, elle « décide non pas d’une question juridique abstraite, mais d’un différend juridique concret », car « chaque litige constitutionnel a pour objet un rapport juridique constitutionnel »62.
- Le modèle de la Cour constitutionnelle fédérale n’est pas le « modèle » kelsénien, mais bien le Reichsgericht de la Constitution du 23 mars 1849 : Olivier Jouanjan, « Une origine des “droits fondamentaux” en Allemagne : le moment 1848», RDP, 2012, p. 766 et suiv. : « Ces droits [fondamentaux] seront garantis par une juridiction constitutionnelle bien plus inspirée par la Constitution de 1849 que par le “modèle kelsénien”, Kelsen ne jouan aucun rôle dans la discussion parlementaire de 1949 ni, d’ailleurs, à cette époque, dans la discussion doctrinale allemande. Le recours constitutionnel individuel (Verfassungsbeschwerde) prend modèle sur le recours imaginé en 1849 (…) ». [↩]
- Heinrich Triepel, « Wesen und Entwicklung der Staatsgerichtsbarkeit », in VVDStRL, n°5, 1929, p. 2 et suiv. ; voir églament, dans le même numéro, la contrinution de Hans Kelsen, p. 30 et suiv. [↩]
- Sur la politisation de la Cour : Konrad Hesse, « Verfassungsgerichtsbarkeit im geschichtlichen Wandel », JZ, 1995, p. 266 et suiv. Par les décisions rendues, la Cour devient la pièce incontournable de la scène politique allemande. Deux exemples parmi d’autres : en 2011 les juges ont déclaré non-conforme à la Loi fondamentale le seuil de 5% qui devait être obtenu par les partis concourant aux élections européennes (BVerfGE 129, 300 « Fünf-Prozent-Sperrklausel EuWG du 9 novembre 2011), ce qui permit, en 2014, d’envoyer au Parlement européen le premier député allemand portant l’étiquette du NPD (Nationaldemokratische Partei Deutschlands, Parti national-démocrate d’Allemagne). Ce même NPD, sur lequel pèse l’épée de Damoclès, dont la frappe dépend aussi de la Cour. En vertu de l’article 21, alinéa 2 LF (« Les partis qui, d’après leurs buts ou d’après le comportement de leurs adhérents, tendant à porter atteinte à l’ordre constitutionnel libéral et démocratique, sont inconstitutionnels. La Cour constitutionnelle fédérale statue sur la question de l’inconstitutionnalité »), la demande d’interdiction du parti est actuellement pendante à Karlsruhe. [↩]
- Olivier Jouanjan « Aperçu d’une histoire des fonctions de justice constitutionnelle en Allemagne (1815-1933) », in Constance Grewe/Olivier Jouanjan/Éric Maulin/Patrick Wachsmann (dir.), La notion de « justice constitutionnelle », Dalloz, coll. Thèmes et commentaires, 2005, p. 14 : « C’est alors une justice qui tranche dans des conflits politiques majeurs et extrêmement tendus, une justice en ce sens extraordinaire, mais aussi exceptionnelle en ce sens qu’elle est rare ». [↩]
- Olivier Jouanjan « Aperçu d’une histoire des fonctions de justice constitutionnelle en Allemagne (1815-1933) », in Constance Grewe/Olivier Jouanjan/Éric Maulin/Patrick Wachsmann (dir.), La notion de « justice constitutionnelle », Dalloz, coll. Thèmes et commentaires, 2005, p. 16. [↩]
- Ingo von Münch/Ute Mager, Staatsrecht I (Staatsorganisationsrecht unter Berücksichtigung der europäischen Bezüge), 7e édition, Verlag Kohlhammer, Stuttgart, 2009, p. 300 : « Art. 92 GG weist das Bundesverfassungsgericht als Teil der rechtsprechenden Gewalt aus » ; Gerd Roellecke, « Aufgaben und Stellung des Bundesverfassungsgerichts im Verfassungsgefüge », in Josef Isensee/Paul Kirchhof (dir.), Handbuch des Staatsrechts der Bundesrepublik Deutschland, t. 3 (Demokratie-Bundesorgane), 3e édition, C.F. Müller, Heidelberg, 2005, p. 1206 : « Das Grundgesetz betrachtet das Bundesverfassungsgericht als Teil der rechtsprechenden Gewalt ». [↩]
- Gerd Roellecke, « Aufgaben und Stellung des Bundesverfassungsgerichts im Verfassungsgefüge », in Josef Isensee/Paul Kirchhof (dir.), Handbuch des Staatsrechts der Bundesrepublik Deutschland, vol. 3 (Demokratie-Bundesorgane), 3e édition, C.F. Müller, Heidelberg, 2005, p. 1207 : « (…) echtes Gerciht (…) ». [↩]
- Olivier Jouanjan, « Modèles et représentations de la justice constitutionnelle en France : un bilan critique », Jus politicum, n°2, 2009, p. 1. [↩]
- Udo Di Fabio, « Gewaltenteilung », in Josef Isensee/Paul Kirchhof (dir.), Handbuch des Staatsrechts der deutschen Bundesrepublik, vol. 2 (Verfassungsstaat), 3e édition, C.F. Müller, Heidelberg, 2004, p. 627 : « (…) nimmt im Ensemble der Gewaltenteilung (…) deshalbt eine besondere Stelleung ein, weil sir di Pflicht des Gesetzgeber zur Beachtung der verfassungsmäßigen Ordnung (Art. 20 Abs. 3 GG) kontrolliert und demnach auch Parlamentsgesetze für verfassungswidrig und damit regelmäßig für nichtig erklären kann (Art. 100 Abs. 10 GG). [↩]
- Christoph Möllers, Die drei Gewalten : Legitimation der Gewaltengliederung in Verfassungsstaat, Europäischer Integration und Internationalisierung, op.cit., p. 138 : « (…) Ein Gericht, das in einem exklusiven verrechtlichen Verfahren individualisierte Fälle entscheiden soll, kann Gesetze außer Kraft setzen und damit Entscheidungen von einer Reichweite treffen, die eigentlich demokratischer Legitimation bedürfte. Ein Gerichtsverfahren, das auf individuelle Legitimation ausgerichtet ist, erzeugt demokratische Entscheidungswirkungen. Ist dies zu rechtfertigen ? Oder ist die verfassungsrechtliche Einrichtung der Verfassungsgerichtsbarkeit nicht von vornherein ein Verstoß gegen die Idee der Gewaltengliederung, also ein zwar legaler, aber nicht überzugend legitimierter Akt ? Diese Frage kann nur mit einem Blick auf verschiedene Aufgaben von Verfassungsgerichten geklärt werden ». [↩]
- Ernst Wolfgang Böckenförde, « Verfassungsgerichtsbarkeit : Strukturfragen, Organisation, Legitimation », NJW, 1999, p. 12 : « Verfassungsgerichtsbarkeit kann daher nicht in der Weise ein von politischen Dissoziationen und den damit verbundenen Problemen abgetrennter Bereich sein, wie es der Idee nach die normale an festgelegte Gesetze gebundene Gerichtsbarkeit ist ». [↩]
- Michael Stolleis (dir.), Herzkammern der Republik. Die Deutschen und das Bundesverfassungsgericht, C.H. Beck, München, 2011. [↩]
- Olivier Jouanjan, « Modèles et représentations de la justice constitutionnelle en France : un bilan critique », Jus politicum, 2009, p. 7. [↩]
- Richard Thoma, « Bemerkungen des Bundesverfassungsgerichts zu dem Rechtsgutakten », JöR, 1957, p.198 : « Jene Organe, deren Entstehen, Bestehen und verfassungsmäßige Tätigkeit recht eigentlich den Staat konstituieren und seine Einheit sichern, sind Verfassungsorgane ». [↩]
- Le document fut préparé par le juge Gerhard Leibholz et approuvé par le plénum de la Cour (Ernst Benda/Eckart Klein /Oliver Klein, Verfassungsprozeßrecht, 3e édition, C.F. Müller, Heildelberg, 2012, p. 57. [↩]
- La queurelle sur le « gardien de la constitution » est mythique. D’une part, Kelsen, « Wer soll der Hüter der Verfassung sein » (1929), in du même Der Hüter der Verfassung, Mohr Siebeck, Tübingen, 2008, p. 58 (Qui doît être le gardien de la Constitution ?, tr.fr. Sandrine Baume, Michel Houdiard Éditeur, 2006) soutenant que la meilleure garantie de la constitution est la justice constitutionnelle, alors que deux ans plus tard Carl Schmitt, Der Hüter der Verfassung (1931), 4e édition, Duncker & Humblot, démonta les idées kelsénienne en faisant du chef de l’État « meilleur gardien ». Voir, en langue française, l’ouvrage collectif sous la direction d’Olivier Beaud et de Pasquale Pasquino, Controverse sur le gardien de la Constitution, Éditions Panthéon Assas, 2007. [↩]
- Le Status-Denkschrift est publié au JöR, 1957, p. 144-148 : « (…) nach Wortlaut und Sinn des Grundgesetzes und des Gesetzes über das Bundesverfassungsgericht zugleich ein mit höchster Autorität ausgestattetes Verfassungsorgan (…). (…) das Bundesverfassungsgericht weder einem anderen Bundesorgan noch einer Bundesbehörde unterstellt sein kann ». [↩]
- Andreas Voßkuhle, « Artikel 93 », in Hermann von Mangoldt/Friedrich Klein/Christian Starck (dir.), Grundgesetz Kommentar, vol. 3, 6e édition, Franz Vahlen Verlag, 2010, p. 678 : « « Das Bundesverfassungsgericht steht nicht etwa neben oder gar über dem positiven Verfassungsgesetz, wie seine paternalistische und zumindenst terminologisch missverständliche Selbstcharakterisierung als “oberster Hüter der Verfassung” suggerieren könnte ». [↩]
- L’auto-qualification du Conseil n’est pas très audacieuse. En 1962 (CC du 16 janvier 1962, Loi d’orientation agricole), on lit qu’aux décisions du Conseil s’attache l’autorité de la chose jugée. [↩]
- Olivier Jouanjan, « Modèles et représentations de la justice constitutionnelle en France : un bilan critique », Jus politicum, 2009, p. 8 : des comptes rendus du Comité consultatif constitutionnel « résulte clairement que les participants à la rédaction du texte avaient nettement envisagé la question de la qualité juridictionnelle du Conseil et pris position par la négative ». [↩]
- Il est intéressant de remarquer que, dans le projet de Cheerenhimsee, la Cour constitutionnelle fédérale faisait l’objet d’un chapitre distinct de celui consacré au pouvoir judiciaire. Sur ce point : Gerhard Leibholz/Hermann von Mangoldt (éd.), Enstehungsgeschichte der Artikel des Grundgesetzes, JöR, n°1 (N.F), 1951, p.664 : « Außer dem Abschn. IX “Die Rechtspflege” hatte der Ch.E. noch einen besonderen Abschn. VIII “Das Bundesverfassungsgericht” hinter dem Abschn. VII “Bundesregierung” eingeschaltet, weil es der Herrenchiemseer Konvent für angebracht hielt, dadurch die grundsätzliche Bedeutung dieser Institution hervorzuheben und die Gleichberechtigung dieses höchsten Organs der dritten Gewalt mit den anderen Gewalten sichtbar zu machen. Das GG ist dieser Anordnung nicht gefolgt, sondern hat die Vorschriften über das Bundesverfassungsgericht in den Absch. IX mitaufgenommen. Durch die Nennung des Bundesverfassungsgerichts an erster Stelle sollte dabei seine besondere “Dignität” zum Ausdruck kommen ». [↩]
- Article 61-1 C : « Lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé ». La disposition fut complétée par la loi organique portant application de l’article 61-1 du 10 novembre 2009 et la procédure est entrée en vigueur le 1er mars 2010. [↩]
- Article 56 C : « Le Conseil constitutionnel comprend neuf membres, dont le mandat dure neuf ans et n’est pas renouvelable ». [↩]
- La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 permet au parlement de s’opposer, à la majorité des trois cinquième des suffrages exprimés, à une nomination. [↩]
- Sur tous ces points, voir le témoignage de Dominique Schnapper, Une sociologue au Conseil constitutionnel, Éditions Gallimard, 2010. Sociologue, Schnapper fut nommée membre par le président du Sénat, Christian Poncelet, et siégea au Conseil dans la période 2001-2010. « Quelques soient les discours, les nominations justifiées par le seul argument de la compétence sont rares. Sur une cohorte totale de 66 conseillers nommés, on a vu le petit nombre de juristes universitaires, auxquels il faudrait ajouter secrétaires généraux des assemblées parlementaires et quelques conseillers d’état dont la compétence est grande, mais, même dans ces cas, la nomination est plus souvent liée à l’activité politique qu’à la seule maîtrise juridique des dossiers. Le résultat est qu’à quelques exceptions près – on évoque toujours, et à juste titre, Georges Vedel – on nomme des proches ou des collaborateurs, que la compétence des personnes et l’intérêt de l’institution ne sont pas les critères premiers, et que dominent, de manière inévitable, les raisons politiques à court terme » (p. 212). [↩]
- Nommé par le Valéry Giscard d’Estaing, Vedel fut membre du Conseil de 1980 à 1989. [↩]
- Aux termes du § 3, alinéa 2 de la loi les juges « doivent avoir l’aptitude à exercer la fonction de juge conformément à la loi allemande sur le statut des juges (nach dem Deutschen Richtergesetz) » ou, en ce qui concerne le territoire de la RDA dans la période avant le 3 octobre 1990, avoir l’aptitude de juriste diplômé (die Befähigung als Diplomjurist) et avoir exercé en tant que juriste. Les autres conditions posées par le § 3 de la loi : les juges doivent également « avoir accompli leur quarantième année » (müssen das 40. Lebensjahr vollendet haben), « être éligibles au Bundestag » (zum Bundestag wählbar sein), et avoir déclaré par écrit vouloir être « membre de la Cour constitutionnelle fédérale » (« sich schriftlich bereit erklärt haben, Mitglied des Bundesverfassungsgerichts zu werden»). [↩]
- § 3, alinéa 4 de la loi dispose que « une activité autre que celle d’un professeur de droit, est incompatible avec la fonction de juge constitutionnel » (Mit der richterlichen Tätigkeit ist eine andere berufliche Tätigkeit als die eines Lehrers des Rechts an einer deutschen Hochschule unverinbar). Le président actuel de la Cour, Andreas Voßkuhle, est professeur de droit public à l’Université de Fribourg-en-Brisgau. Parmi les juges qui ont laissé leur empreinte sur la jurisprudence constitutionnelle, le nombre de professeurs de droit est impressionnant : Gerhard Leibholz, Ernst-Wolfgang Böckenförde, Konrad Hesse ne sont que quelques noms qui illustrent cette constellation de professeurs-juges. [↩]
- Le nombre de juges constitutionnels n’est pas fixé par le texte de la Loi fondamentale. [↩]
- Qui ne sont pas de juges constitutionnels fédéraux, mais, en vertu du § 98, alinéa 1er de la loi sur la Cour constitutionnelle fédérale, des juges de la Cour cosntitutionnelle fédérale (Richter des Bundesverfassungsgerichts). Dans ce sens, Klaus Schlaich/Stefan Korioth, Das Bundesverfassungsgericht. Stellung, Verfahren, Entscheidungen, 9e édition, C.H. Beck, München, 2012, p. 27 : « Der Titel der Richter lautet : “Richter des Bundesverfassungsgerichts” (vgl. § 98 I BVerfGG). Die üblich gewordene Bezeichnung “Bundesverfassungsrichter” ist nicht schön und falsch. Auch viele Richter nennen sich selbst so ». [↩]
- Stefan Ruppert, « § 6 », in Dieter Umbach/Thomas Clemens/Franz-Wilhelm Dollinger (dir.), Bundesverfassungsgerichtsgesetz. Mitarbeiterkommentar und Handbuch, 2e édition, C.F. Müller, Heidelberg, 2005, p. 209: « (…) durch das Wahlverfahren Kandidaten zu wählen, die nicht auschließlich als Vertrer einer bestimmten Partei zu betrachten sind. Man suchte nach einem breiten Konsens (…) ». [↩]
- Aux termes de l’article 95, alinéa 2 LF les juges de la Cour fédérale de justice, de la Cour fédérale administrative, de la Cour fédérales des finances, de la Cour fédérale du travail et de la Cour fédérale du contentieux social « sont nommés par le minitre fédéral compétent pour la matière considérée, conjointement avec une commission chargée de l’élection des juges, composée des Länder compétents pour la matière considérée et d’un nombre égal de membres élus par le Bundestag ». [↩]
- Andreas Vosßkuhle, « Artikel 94 », in Hermann von Mangoldt/Friedrich Klein/Christian Starck, Grundgesetz Kommentar, vol. 3, 6e édition, Verlag Franz Vahlen, München, 2010, p. 792 : « Getragen ist die Regelung von der Intention, den Mitgliedern des Bundesverfassungsgerichts im Hinblick auf ihre Kompetenz- und Machfülle eine besondere demokratische Legitimation zu verleihen ». [↩]
- Andreas Vosßkuhle, « Artikel 94 », in Hermann von Mangoldt/Friedrich Klein/Christian Starck, Grundgesetz Kommentar, vol. 3, 6e édition, Verlag Franz Vahlen, München, 2010, p. 792 : « Durch das Zusammenwirken von Bundestag und Bundesrat “in föderativer Parität” soll sichergestellt werden, dass die politischen Mehrheitsverhältnisse auf Bundes- und Landesebene gleichermaßen Berücksichtigung finden ». [↩]
- Article 94, alinéa 1er LF : « La Cour constitutionnelle fédérale se compose de juges fédéraux et d’autres membres. Les membres de la Cour constitutionnelle fédérale sont élus pour moitié par le Bundestag et pour moitié par le Bundesrat. Ils ne peuvent appartenir ni au Bundestag, ni au Bundesrat, ni au gouvernement fédéral, ni aux organes correspondants d’un Land ». [↩]
- Andreas Vosßkuhle, « Artikel 94 », in Hermann von Mangoldt/Friedrich Klein/Christian Starck, Grundgesetz Kommentar, vol. 3, 6e édition, Verlag Franz Vahlen, München, 2010, p. 796 : « Zur Sicherung ihrer politischen Neutralität und der richterlichen Unabhängigkeit (…). Die Regelung konkretisiert den bereits in Art. 92 und Art. 97 ausgeformten Gewaltenteilungsgrundsatz, dem zufolge die Rechtsprechung auf Grund ihres Kontrollauftrags von Einwirkungen anderer Gewalten jenseits der Gesetzesbindung weitgehend abgeschirmt sein soll ». [↩]
- § 6 dispose que l’élection des huit juges par le Bundestag est le résultat d’une « élection indirecte » (« Die vom Bundestag zu berufenen Richter werden in indirekter Wahl gewählt »). [↩]
- BVerfGE 131, 230 « Bundesverfassungsrichterwahl » du 19 juin 2012 déclare l’élection indirecte des juges constitutionnels par le Bundestag conforme à la Loi fondamentale. [↩]
- BVerfGE 130, 318 « Stabilisierungsmechanismusgesetz » du 28 février 2012. [↩]
- BVerfGE 130, 318 « Stabilisierungsmechanismusgesetz » du 28 février 2012, p. 344 : « Öffentliches Verhandeln von Argument und Gegenargument, öffentliche Debatte und öffentliche Diskussion sind wesentliche Elemente des demokratischen Parlamentarismus. (…) Entscheidungen von erheblicher Tragweite muss deshalb grundsätzlich ein Verfahren vorausgehen, das der Öffentlichkeit Gelegenheit bietet, ihre Auffassungen auszubilden und zu vertreten, und das die Volksvertretung dazu anhält, Notwendigkeit und Umfang der zu beschließenden Maßnahmen in öffentlicher Debatte zu klären (…) ». [↩]
- L’élection indirecte par le Bundestag ne fut pas prévue dans le projet initial de la loi sur la Cour constitutionnelle fédérale. C’est le SPD qui proposa ce mode d’élection. Sur ce point : Stefan Ruppert, « § 6 », in Dieter Umbach/Thomas Clemens/Franz-Wilhelm Dollinger, Bundesverfassungsgerichtsgesetz. Mitarbeiterkommentar und Handbuch, 2e édition, C.F. Müller, Heidelberg, 2005, p. 209 : « Das in Absatz 1 normierte Prinzip der indirekten Wahl war im ursprünglichen Gesetzentwurf nicht vorgesehen und geht auf einen Vorschlag der SPD zurück ». [↩]
- Stefan Ruppert, « § 6 », in Dieter Umbach/Thomas Clemens/Franz-Wilhelm Dollinger, Bundesverfassungsgerichtsgesetz. Mitarbeiterkommentar und Handbuch, 2e édition, C.F. Müller, Heidelberg, 2005, p. 209 : « Die gegen das Prinzip der indirekten Wahl erhobene verfassungsrechtliche Kritik argumentiert mit dem Wortlaut des Art. II 2 GG und dem Grundsatz, daß wesentliche Entscheidungen durch das Plenum des Bundestages selbst zu treffen seien. Begründet wird dies entweder mit dem aus dem Verwaltungsrecht stammenden Grundsatz, daß Zuständigkeitsübertragungen lediglich mit Erlaubnis des Kompetenzgebers, hier also des Verfassungsgebers, zulässig seien oder mit der Forderung nach einem Plenarvorbehalt, der beinhaltet, daß demokratisch besonders bedeutsame Entscheidungen durch das Plenum selbst getroffen werden ». [↩]
- Voir, par exemple : Klaus Schlaich/Stefan Korioth, Dans Bundesverfassungsgericht. Stellung, Verfahren, Entscheidungen, 9e édition, C.H. Beck, München, 2012, p. 29, et les références citées: « Tandis que l’élection par le Bundesrat désigne les juges en séance plénière, l’élection du Bundestag est le résultat, contrairement à la lettre de l’article 94, alinéa 1er, deuxième phrase LF, d’une commission parlementaire, l’élection est donc indirecte » (« Während der Bundesrat im Plenum wählt, erfolgt die Wahl des Bundestags entgegen dem Wortlaut des Art. 94 I S. 2 GG durch einen Wahlausschuß, also indirekt »). L’autonomie institutionnelle, dont bénéficie le Bundestag, ne peut justifier le choix de ce mode d’élection. La compétence du Bundestag de se doter de son propre règlement intérieur (Geschäftordnungskompetenz) est une compétence « interne », elle concerne les décisions prises pour l’organisation, les affaires internes du Bundestag. L’élection de juges constitutionnels n’est pas couverte par l’autonomie du Bundestag, car ce dernier est en l’espèce « organe créateur » (Kreationsorgan) pour un autre organe constitutionnel, et sa décision produit des effets « à l’extérieur » (nach außen). Pour Schmidt-Bleibtreu/Hopfauf, « Artikel 94 », in Schmidt-Bleibtreu/Klein, Grundgesetz Kommentar, 10e édition, Luchterhand, 2004, p. 1740, il est souhaitable d’envisager une modification de l’article 94, alinéa 1er LF afin d’ancrer dans le texte constitutionnel la possibilité pour le Bundestag (et pourquoi pas pour le Bundesrat ?) d’élire les juges de manière indirecte : « Gleichwohl wäre (…) eine Änderung des Art. 94 Abs. 1 GG wünschenswert, die ausdrücklich die indirekte Wahl der vom Bundestag zu wählenden Richter für zulässig erklärt und die aufgeworfenen Zweifel beseitigt ». [↩]
- [1] Dans une tribune du 17 octobre 2012, publiée dans la rubrique Staat und Recht de la version électronique de la Frankfurter Allgemeine Zeitung (http://www.faz.net/aktuell/politik/staat-und-recht/bundesverfassungsgericht-erste-wahl-11929376.html#Drucken), Norbert Lammert, président du Bundestag (CDU), critique vivement la décision de la Cour en étayant l’incohérence des arguments utilisés par la Deuxième chambre. En effet, au mois de février, à l’occasion de la décision sur le mécanisme européen de stabilité, les juges soulignaient l’importance de la séance plénière supposant la confrontation d’idées et la publicité des débats. En juin, l’élection indirecte des juges par une commission parlementaire créée à cet effet est compatible avec le texte, pourtant très clair, de l’article 94, alinéa 1er LF. Lammert fait référence au commentaire de l’actuel président de la Cour constitutionnelle, Andreas Voßkuhle, qui, dans son commentaire sous l’article 94 LF, émet des critiques quant à la constitutionnalité du § 6 de la loi sur la Cour constitutionnelle fédérale. Voir Andreas Vosßkuhle, « Artikel 94 », in Hermann von Mangoldt/Friedrich Klein/Christian Starck, Grundgesetz Kommentar, vol. 3, 6e édition, Verlag Franz Vahlen, München, 2010, p.793: « Von nicht unerheblichen Teilen der Literatur wird diese Regelung zu Recht für verfassungswidrig gehalten ». Pour Voßkuhle, la Loi fondamentale distingue clairement entre la formation du Bundestag en tant qu’assemblée et les différentes commissions parlementaires : « Da die Verfassung selbst an verschiedener Stellen (vgl. z. B. Art. 42 Abs. 3, 43 Abs. 1 und 2, 46 Abs. 1) zwischen dem Bundestag un den Ausschüssen differenziert, kann Art. 94 Abs. 1 S. 2 nur dahingehend verstanden werden, dass dem Plenum der Abgeordneten die Wahl der Richter vorbehalten sein soll. Eine weitergehende Kompetenzdelegation des Parlaments auf Teile seiner selbst widerspricht darüber hinaus der Bedeutung dieser Entscheidung und damit dem Erfordernis “funktionsadäquater demokratischer Legitimation” ». Contra : Stefan Ruppert, « § 6 », in Dieter Umbach/Thomas Clemens/Franz-Wilhelm Dollinger, Bundesverfassungsgerichtsgesetz. Mitarbeiterkommentar und Handbuch, 2e édition, C.F. Müller, Heidelberg, 2005, p. 210, qui utilise comme argument pour la constitutionnalité du § 6 de la loi les mêmes articles de la Loi fondamentale en livrant une toute autre lecture. Selon lui, le pouvoir constituant, auteur de la Loi fondamentale, ne fait pas de différence qualitative entre le Bundestag et ses commissions. Par ailleurs, l’élection indirecte ne pose pas de problème, elle est justifiée par la pratique acceptée par la Cour constitutionnelle elle-même : « Das Prinzip der indirekten Wahl des § 6 verstößt nicht gegen den Wortlaut des Art. 94 GG. In Abgrenzung zu der Formulierung in Art. 94 I 2 GG (“vom Bundestage gewählt”) verwendet das Grundgesetz etwa in den Art. 42 III, 43 I und 46 I GG die Formulierung “die Bundestag und seine Ausschüsse”. Daraus kann aber nicht abgeleitet werden, der Verfassungsgeber habe strikt zwischen solchen Aufgaben unterschieden, die dem Bundestag zugewiesen werden sollen und anderen Aufgaben, die der Ausschuß erledigen könne. (…) Nicht zuletzt besteht bei der indirekten Wahl der Bundesverfassungsrichter eine mehr als fünfzigjährige und vom Bundesverfassungsgericht akzeptierte Praxis ». Ces explications ne sont pas convaincantes. S’il n’y avait aucune différence qualitative entre le Bundestag, qui se réunit en séance planière, et ses commissions, alors pourquoi ne pas envisager une commission qui voterait les lois sans qu’il y ait besoin de procéder à un vote en séance plénière ? Que la Cour ait acceptée cette pratique de l’élection indirecte d’une partie de ses membres n’est pas chose étonnante. Car on imagine assez difficielement l’hypothèse dans laquelle la Cour invalide l’élection d’une partie des juges qui la composent et ébranler ainsi son fondement démocratique : l’inconstitutionnalité prononcée du § 5 voudrait dire que tous les juges élus par le Bundestag depuis 1951 étaient illégitimes car le résultat d’une procédure non-conforme à l’article 94, alinéa 1er LF. Consciente de ce danger pour sa propre légitimité, la Cour a certes délcaré le § 6 constitutionnel, mais a tout de même souligné que le législateur était libre de modifier le mode d’élection dees juges élus par le Bundestag. [↩]
- Christoph Schönberger, « Anmerkungen zu Karlsruhe », in Matthias Jestaedt/Oliver Lepsius/Christoph Möllers/Christoph Schönberger, Das entgrenzte Gericht. Eine kritische Bilanz nach sechzig Jahren Bundesverfassungsgericht, Suhrkamp Verlag, Berlin, 2011, p. 16 : « Diese neuartige Efahrung verstärkte die Suche nach Gegengewichten. Das Bundesverfassungsgericht schien ein solcher Widerpart zu können ». [↩]
- Tel n’est pas le cas des autres hautes juridictions. [↩]
- Cette compétence s’inscrit parfaitement dans le cadre fédéral de la RFA et ne peut faire l’objet de plus amples développements. Sur les différends Fédération/Länder (die Bund-Länder-Streitigkeiten): Ernst Benda/Eckart Klein, Verfassungsprozeßrecht. Ein Lehr- und Handbuch, 2e édition, C.F. Müller, Heidelberg, 2001, p. 435-456. [↩]
- Gerhard Leibholz/Hermann von Mangoldt (éd.), Enstehungsgeschichte der Artikel des Grundgesetzes, JöR, n°1 (N.F), 1951, p. 665 : « Es [das Bundesverfassungsgericht] entscheidet zwar als Gericht nur über Rechtsfragen. Seine Entscheidungen haben jedoch (…) größte politische Auswirkungen, so daß seine Tätigkeit eine Gerichtsbarkeit mit politischem Akzent ist ». [↩]
- Article 93, alinéa 1er LF : « La Cour constitutionnelle fédérale statue 1. sur l’interprétation de la présente Loi fondamentale, à l’occasion de litiges sur l’étendue des droits et obligations d’un organe fédéral suprême ou d’autres parties investies de pouvoirs propres, soit par la présente Loi fondamentale, soit par le règlement intérieur d’un organe fédéral suprême (…) », complété par § 63 et suiv. de la loi relative à la Cour constitutionnelle fédérale (Bundesverfassungsgerichtsgesetz) du 12 mars 1951. [↩]
- Dans la littérature, parmi d’autres: Bodo Pieroth, « Artikel 93 », in Hans Jarass/Bodo Pieroth, Grundgesetz für die Bundesrepublik Deutschland. Kommentar, 8e édition, C.H. Beck, München, 2006 [12e édition, 2012], p. 870 : « Bundesorganstreitigkeit » (litige entre organes fédéraux) ; Konrad Hesse, Grundzüge des Verfassungsrechts der Bundesrepublik Deutschland, op.cit., p. 282 : « Organstreitigkeiten » (litiges interorganiques). En langue française : Armel Le Divellec, « Des conflits constitutionnels dans un “État constitutionnel” : le mécanisme des “litiges entre organes” devant la Cour constitutionnelle fédérale d’Allemagne », in Jacky Hummel (dir.), Les conflits constitutionnels, Presses universitaires de Rennes, 2010, p. 99-119. [↩]
- § 64, 1er alinéa de la loi relative à la Cour constitutionnelle fédérale (BVerfGG) dispose : « Der Antrag ist nur zulässig, wenn der Antragsteller geltend gemacht, daß er oder das Organ, dem er angehört, durch eine Maßnahme oder Unterlassung des Antragsgegners in seinen ihm durch das Grundgesetz übertragenen Rechten und Pflichten verletzt oder unmittelbar gefähredet ist ». [↩]
- Sur l’(auto)-limitation du juge constitutionnel allemand, voir Klaus Schlaich/Stefan Korioth, Das Bundesverfassungsgerciht. Stellung, Verfahren, Entscheidungen, 9e édition, C.H. Beck, München, 2012, p. 341-342. Voir églament : Hans-Peter Schneider, « Verfassungsgerichtsbarkeit und Gewaltenteilung. Zur Funktionsgerechtigkeit von Kontrollmaßstäben und Kontrolldichte verfassungsrechtlicher Entscheidung », NJW, 1980, p. 2103 et suiv. [↩]
- BVerfGE 36, 1 « Grundlagenvertrag » du 31 juillet 1973, première phrase du résumé de la solution de la Cour : « Der Grundsatz des judicial self-restraint zielt darauf ab, den von der Verfassung für die anderen Verfassungsorgane garantierten Raum freier politischer Gestaltung offenzuhalten » ; dans le même sens BVerfGE 59, 360 « Schülerberater » du 9 février 1982, p. 77, qui utilise le terme de « retenue » : (…) la Cour constitutionnelle fédérale doit faire preuve d’une grande retenue lors du contrôle des règles relatives à la politique scolaire des Länder » (« […] muß sich das Bundesverfassungsgericht bei der verfassungsrechtlichen Beurteilung schulrechtlicher Regelungen der Bundesländer große Zurückhaltung auferlegen »). [↩]
- Klaus Schlaich/Stefan Korioth, Das Bundesverfassungsgerciht. Stellung, Verfahren, Entscheidungen, 9e édition, C.H. Beck, München, 2012, p. 342 : « Die “Beschränkung”, die dem BVerfG obliegt, ist diejenige auf seine Gerichtsförmigkeit und auf die ihm zur Verfügung stehenden Kontrollmaßstabe ». [↩]
- BVerfGE 66, 39 « Nachrüstung » du 16 décembre 1983, p. 61 : « (…) es ist nicht Aufgabe des Bundesverfassungsgerichts (…) seine Einschätzungen an die Stelle der Einschätzungen (…) der zuständigen politischen Organe des Bundes zu setzen » ; BVerfGE 68, 1 « Atomwaffenstationierung » du 14 décemnre 1984, p.97 : « La Cour constitutionnelle fédérale n’a pas à procéder à un examen (…) afin de savoir si des considérations politiques visées sont opportuns ou inopportuns, car elle ne dispose pas de standards juridiques permettant ce contrôle ; ces questions relèvent de la responsabilité politique » (« Das Bundesverfassungsgericht hat […] nicht nachzuprüfen, ob Einschätzungen und Wertungen dieser Art zutreffend oder unzutreffend sind, da es insoweit rechtlicher Maßstäbe ermangelt ; sie sind politisch zu verantworten »). [↩]
- § 63 de la loi relative à la Cour constitutionnelle fédérale : « Antragsteller und Antragsgegner können nur sein : der Bundespräsidetn, der Bundestag, der Bundesrat, die Bundesregierung und die im Grundgesetz oder in den Geschäftsordnungen des Bundestages und des Bundesrates mit eigenen Rechten ausgestatteten Teile dieser Organe ». Sur ce point, Christian Pestalozza, Verfassungsprozeßrecht, 3e édition, C.H. Beck’sche Verlagsbuchhandlung, München, 1991, p. 104-105 : [↩]
- BVerfGE 68, 1 « Atomwaffenstationierung » du 18 décembre 1984, p. 77 : « Nach der Rechtsprechung des Bundesverfassungsgerichts dient das Organstreitverfahren zwischen einer Fraktion des Bundestages und einem anderen obersten Bundesorgan unter anderem dem Schutz der in der Fraktion verkörperten Parlamentsminderheit » ; BVerfGE 45, 1 « Haushaltsüberschreitung » du 25 mai 1977, p. 29 : « Diese Befugnis, Rechte des Bundestages selbst gegen dessen Willen vor dem Bundesverfassungsgericht geltend zu machen, bringt auch den Minderheitsschutz zur Geltung, der vor der Verfassung nach dem Wortlaut und der Entstehungsgeschichte des Art. 93 Abs. 1 Nr. 1 GG intendiert ist ». [↩]
- Wolfgang Löwer, « Zuständigkeiten und Verfahren des Bundesverfassungsgerichts », », in Josef Isensee/Paul Kirchhof (dir.), Handbuch des Staatsrechts der Bundesrepublik Deutschland, t. 3 (Demokratie-Bundesorgane), 3e édition, C.F. Müller, Heildelberg, 2005, p. 745-746 : « Organe sind aber nicht Träger subjektiver Rechte ; ihnen sind vielmehr Kompetenzen (…) zugewiesen ». [↩]
- Christian Pestalozza, Verfassungsprozeßrecht, 3e édition, C.H. Beck’sche Vermagsbuchhandlung, München 1991, p. 113 : « “Rechte und Pflichten” heißt, daß nicht um lediglich objektives Verfassungsrecht gestritten werden darf ; es muß um “subjektive” Rechtspositionen gehen ». [↩]
- Wolfgang Löwer, « Zuständigkeiten und Verfahren des Bundesverfassungsgerichts », », in Josef Isensee/Paul Kirchhof (dir.), Handbuch des Staatsrechts der Bundesrepublik Deutschland, t. 3 (Demokratie-Bundesorgane), 3e édition, C.F. Müller, Heildelberg, 2005, p. 745-746 : « (…) diese Funktionenordnung gegen die excedierende Kompetenzeinspruchsnahme eines Verfassungsorgans zu sichern, nicht zum Schutz des “beeinträchtigten Organs” (….) ». [↩]
- En vertu du §64 de la loi sur la Cour constitutionnelle fédérale dispose que la demande est recevable si le demandeur allègue qu’une « mesure ou une ommission d’agir » (« eine Maßnahme oder Uniterlassung ») du défendeur constitue « une violation ou une menace directe de ses droits et obligations » (« in seinem […] Rechten und Pflichten verletzt oder unmittelbar gefährdet ist ») ; §67 porte sur la décision de la Cour qui « établit si la mesure existante ou l’ommission d’agir du défendeur porte atteinte à une disposition constitutionnelle » (ob […] die beanstandene Maßnahme oder Unterlassung des Antragsgegners gegen eine Bestimmung des Grundgesetzes verstößt ») qui doit être « indiquée » (« ist zu bezeichnen ») dans la décision. [↩]
- Il s’agit d’une jurisprudence constante : BVerfGE 45, 1 « Haushaltsüberschreitung » du 25 mai 1977, p.29 : « Das Bundesverfassungsgericht entscheidet im Organstreit nicht über eine abstrakte Rechtsfrage, sondern über den konkreten Rechtsstreit ». Dans le même sens, déjà, BVerfGE 1, 208 « 7,5%-Sperrklausel » du 5 avril 1952, p. 221 : « Eine Verfassungsstreitigkeit hat ein verfassungsrechtliches Rechtsverhältnis zum Gegenstand ». [↩]
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