La répartition des compétences entre les organes investis des pouvoirs législatif et exécutif opérée par la Loi fondamentale attribue « en règle générale le domaine de la politique extérieure et militaire au pouvoir exécutif »1. Le domaine des « relations extérieures » est celui dans lequel le Gouvernement fédéral subit « le moins de contraintes juridiques matérielles »2 quant à son action et dispose d’une large marge de manœuvre décisionnelle. Cependant, il n’est pas question d’une sphère exclusivement exécutive. Le Bundestag a un rôle important dans les processus décisionnels qui touchent à la politique extérieure et militaire de la République fédérale d’Allemagne. Dans ce domaine, l’action exclusive des organes exécutifs fédéraux est illusoire: le Parlement, même s’il ne détient pas le droit d’initiative et n’est pas en mesure de négocier les traités conclus par la République fédérale, bénéficie d’une « faculté d’empêcher »3 la ratification d’un traité international ou bien de décider de ne pas autoriser le Gouvernement à engager des forces militaires allemandes à l’étranger en mettant ainsi le chancelier et ses ministres dans une position inconfortable vis-à-vis des partenaires internationaux, particulièrement s’agissant du système de sécurité collective. Le domaine des affaires étrangères est étroitement lié à celui de la politique militaire : la participation de la République fédérale dans un système de sécurité mutuelle collective4, le déploiement d’armes nucléaires sur le sol allemand ou l’envoi de forces armées à l’étranger soulèvent des interrogations qui traversent les questions militaires afin de se transformer en stratégies de politique internationale. Ce sont des matières relevant de la politique extérieure et militaire, ce qui suppose une vue d’ensemble permettant d’explorer la répartition des compétences entre les différents organes susceptibles d’initier le processus décisionnel ou bien d’y mettre un frein. La collaboration ou le désaccord entre le Parlement et le Gouvernement fédéral, qui agissent de concert, met en exergue le rôle fonctionnel du principe de séparation des pouvoirs en tant que principe organisationnel porteur de la Loi fondamentale supposant l’existence d’une collaboration entre les pouvoirs.
Il convient de se pencher sur la faculté décisionnelle du Gouvernement (§1) avant d’aborder la faculté, dont dispose le Parlement, d’empêcher le cours de la procédure décisionnelle lancée par l’exécutif dans le domaine de la politique extérieure et militaire (§2).
§ 1. Le Gouvernement comme centre décisionnel de la politique extérieure et militaire dans le cadre constitutionnel de la Loi fondamentale.
Dans le domaine de la politique extérieure et militaire, le gouvernement est l’organe qui détient le droit d’initiative et la faculté décisionnelle (A). Malgré la place prééminente de cet organe exécutif, il n’est pas le seul acteur en la matière. Le Parlement dispose de moyens afin d’opérer un contrôle sur les décisions prises par le gouvernement qui s’exprime en sa faculté d’empêcher leur mise en œuvre (B).
A. Le droit d’initiative et la faculté décisionnelle du Gouvernement fédéral.
Article 59, alinéa 2 LF dispose : « Les traités réglant les relations politiques de la Fédération, ou relatifs à des matières qui relèvent de la compétence législative fédérale, requièrent l’approbation ou le concours des organes respectivement compétents en matière de législation fédérale, sous la forme d’une loi fédérale (…) ». À la lecture des premières décisions de la Cour, il est possible de conclure qu’il appartient exclusivement au Gouvernement de « mener la politique extérieure et commerciale », car le Parlement n’est pas expressément doté de « compétences gouvernementales »5.
Par la suite, le juge fait clairement la distinction entre la compétence d’un organe, qui dispose de la liberté décisionnelle, et de la marge de manœuvre limitée d’un autre organe, qui ne se contenterait que d’être associé au processus de prise de décision. Si on reste fidèle à ce raisonnement, il n’est pas possible de contstater, comme la Cour le fait à quelques reprises, que l’article 59, alinéa 2 LF (ou tout autre article qui associe le Parlement à l’activité du Gouvernement dans ce domaine), porte atteinte au principe de séparation des pouvoirs. Cela voudrait dire qu’on appliquerait de manière machinale la règle selon laquelle les compétences sont distribuées de manière exclusive. Or, ce n’est pas le cas. L’article 59, alinéa 2 LF est l’illustration même du système de contrôle réciproque de la Loi fondamentale.
Il faut ici signaler que l’article 59 LF n’est pas le seul article régissant les relations internationales de la Fédération. Avec le développement de l’Union européenne et l’introduction de dispositions constitutionnelles particulières relatives à la participation de la République fédérale à l’Union européenne, par exemple l’article 23 LF6, qui, par la spécificité de l’organisation internationale visée, ne sont pas ou sont indirectement prises en compte.
B. La faculté du Parlement d’empêcher la mise en œuvre des décisions gouvernementales.
Le Bundestag intervient uniquement en tant qu’organe compétent pour contrôler l’action gouvernementale, en aucun cas en tant que décideur ou co-auteur des actes pris par l’organe exécutif. Ainsi, les dispositions constitutionnelles, qui octroient un droit de participation dans le processus décisionnel, ne font que confirmer la règle selon laquelle cette matière est l’apanage du pouvoir exécutif. La position du Gouvernement fédéral n’est pas uniquement déduite du texte de la Loi fondamentale. Elle est également la conséquence de l’interprétation du juge qui développe, à partir de 19847, la théorie de la justice fonctionnelle complétant les dispositions de la Constitution allemande8. Conformément à ce principe jurisprudentiel, les missions constitutionnelles doivent être remplies par l’organe disposant des conditions optimales afin de prendre les décisions dans le domaine en question. Ainsi, dans la sphère de la politique étrangère, le Gouvernement est l’organe le mieux placé, d’après son organisation, composition ainsi que les compétences qui lui sont constitutionnellement attribuées, pour agir et prendre des décisions adéquates. Son « noyau de responsabilité exécutive propre » protège sa liberté d’action contre une éventuelle volonté d’immixtion de la part du Bundestag9. Ce dernier peut être associé au processus décisionnel, mais uniquement avec l’accord du Gouvernement fédéral :
Par cette répartition (Verteilung) des fonctions entre le Gouvernement et le Parlement, la Loi fondamentale n’a pas empêché le Gouvernement d’associer le Bundestag à la conduite des affaires extérieures, et cette collaboration fait l’objet de l’accord sur le concours du Bundestag et le Gouvernement fédéral dans les questions relatives au commerce extérieur du 18 juin 1950. La constitution d’un comité consultatif parlementaire, qui joue le rôle de conseil du Gouvernement à l’occasion de la conclusion d’accords politiques à caractère commercial, ne porte pas atteinte au principe de séparation des pouvoirs (Gewaltentrennung). Au contraire, l’existence d’un tel comité exige la collaboration entre les pouvoirs législatif et exécutif et garantit leur contrôle et équilibre réciproques10.
Le cadre constitutionnel de la Loi fondamentale contient une distinction entre la faculté de statuer, c’est-à-dire prendre les décisions dans le domaine des affaires extérieures, qui appartient au Gouvernement fédéral, et la faculté, dont dispose le Parlement, afin d’empêcher l’application des décisions prises. Mais la place secondaire accordée au Parlement est davantage renforcée par les solutions jurisprudentielles.
§ 2. L’interprétation restrictive du droit de participation du Bundestag à la politique extérieure et militaire.
L’interprétation restrictive de l’article 59, alinéa 2 LF tend à élargir la sphère d’action exécutive par l’exclusion d’une série d’actes qui n’exigeraient pas, selon le juge, la participation ou l’approbation du Parlement (A). Mais la justification et les arguments avancés par la Cour peuvent être sujets à des critiques (B).
A. L’interprétation restrictive de l’article 59, alinéa 2 LF comme moyen de protéger la faculté décisionnelle du Gouvernement.
La jurisprudence constitutionnelle allemande élabore, dans un premier temps, une interprétation restrictive de l’article 59, alinéa 2 LF. Cette interprétation restrictive semble être en faveur du pouvoir exécutif (exekutivfreundlich)11 car elle lui accorde une large marge de manœuvre en excluant la participation ou le concours du Parlement en dehors des cas expressément prévus par la Constitution. Pour la Seconde chambre, le Parlement est, « en principe », identifié à la fonction normative. Il ne doit pas empiéter sur les compétences du Gouvernement fédéral :
Dans la démocratie parlementaire, la compétence normative est en principe réservée (vorbehalten) au Parlement et la fonction exécutive est attribuée au gouvernement et à l’administration. La conduite de la politique extérieure et commerciale fait aussi partie de la fonction exécutive12.
Ou encore :
Une telle compétence exceptionnelle (Ausnahmebefugnis) du pouvoir législatif dans le domaine du pouvoir exécutif est justifiée par l’article 59, alinéa 2 LF dans des limites strictement définies. (…) L’article 59, alinéa 2 LF n’autorise pas le Bundestag à intervenir dans le domaine de compétences du Gouvernement. Le Bundestag reste limité aux possibilités de contrôle ouvertes par la Constitution. Il ne gouverne (regiert) et ne dispose pas de l’administration (verwaltet), mais contrôle le Gouvernement. S’il désapprouve la politique gouvernementale, il peut refuser sa confiance au Chancelier (art. 67 LF) et renverser ainsi le Gouvernement. Mais le Bundestag seul ne peut conduire les affaires politiques13.
Les deux décisions du 29 juillet 195214 donnent la tonalité d’une interprétation restrictive tendant à protéger la liberté d’action du Gouvernement fédéral en la matière. La Seconde chambre de la Cour adopte, dans son interprétation de l’article 59, alinéa 2 LF, en le qualifiant d’ « atteinte au système de la séparation des pouvoirs », une démarche, dont l’objectif est de poser clairement la ligne de partage entre la maîtrise par le Gouvernement des affaires étrangères d’une part, et la participation du Parlement, qui ne peut être entendue que comme une participation exceptionnelle :
Article 59, alinéa 2 LF constitue une atteinte au système de séparation des pouvoirs dans la mesure où, en vertu de cette disposition constitutionnelle, le pouvoir législatif s’immisce (übergreift) dans le domaine du pouvoir exécutif15.
Puisqu’il s’agit d’une atteinte au principe de la séparation des pouvoirs, l’interprétation de l’article 59, alinéa 2 LF doit donc être stricte. La disposition constitutionnelle ne peut aucunement servir au Parlement pour qu’il exerce un contrôle déguisé non-autorisé sur l’action gouvernementale et faire de cette façon intrusion dans le domaine du pouvoir exécutif. Si le Bundestag voulait sanctionner la politique extérieure du Gouvernement, il pourrait mettre en œuvre la motion de censure constructive de l’article 67 LF. L’analyse du juge constitutionnel peut étonner, car la motion de censure constructive16 est un instrument difficile à manier et complètement dépendant de la configuration politique du Bundestag : si le Gouvernement fédéral dispose du soutien de la majorité parlementaire, il est alors exclu que la mise en œuvre de l’article 67 LF soit suivie d’effet. Si l’opposition ne souhaite pas ratifier un traité international, elle n’a aucune chance dans l’hypothèse où la majorité suit le Gouvernement et vote la loi de ratification. L’équilibre semble alors se jouer non pas entre les pouvoirs législatif et exécutif, mais entre le Gouvernement soutenu par sa majorité et l’opposition.
La décision de la Cour du 18 décembre 198417, relative au stationnement d’armes nucléaires sur le sol allemand dans le cadre du programme nucléaire de l’OTAN18, est un parfait exemple de l’élasticité de l’interprétation de la règle de participation du Bundesrat au domaine de la politique extérieure et militaire. Un groupe de députés formule une demande tendant à constater la violation des droits du Bundestag qui résulterait de l’absence d’approbation du Bundestag19 du déploiement d’armes nucléaires sur le territoire de la RFA20. Selon les députés, le Gouvernement ne peut décider de manière autonome de l’autorisation de déploiement d’armes sur le sol allemand. Il faut qu’il obtienne, au préalable, l’approbation du Parlement revêtant la forme d’une loi fédérale. Cette approbation est indispensable, car il ne s’agit pas, selon la fraction, d’un acte unilatéral du Gouvernement fédéral qui échappe à l’exigence d’une loi en vertu de l’article 59, alinéa 2 LF.
La Seconde chambre de la Cour n’accepte pas l’argumentation de la fraction parlementaire et valide l’acte gouvernemental autorisant le déploiement d’armes nucléaires en RFA. En effet, l’interprétation jurisprudentielle de l’article 59, alinéa 2 LF dessine une conception stricte des actes qui tombent dans son champ d’application. Il suffit qu’il s’agisse d’un acte unilatéral émanant du Gouvernement, et la disposition constitutionnelle n’est plus applicable. Mais un acte unilatéral peut aussi être un accord déguisé entre deux parties dans le seul but d’ « éviter » le Parlement. Pour les députés à l’origine du litige interorganique, la déclaration cache un accord passé entre la RFA et le président des États-Unis. Le juge ne suit pas ce raisonnement, car, pour lui, il est question d’un acte unilatéral auquel l’article 59, alinéa 2 LF n’est pas applicable :
L’organisation constitutionnelle de la démocratie ne repose pas sur un droit accordé au Parlement d’entreprendre toutes les actions et prendre les décisions qui sont, par elles-mêmes ou par leurs conséquences, d’une portée étendue ou existentielle (weittragender oder existentieller Bedeutung), ou d’y participer par le biais d’une loi. Le pouvoir exécutif aussi, en particulier le Gouvernement, est configuré (gestaltet) comme un pouvoir “politique” et n’est pas limité, a priori, à la prise de décisions politiques de moindre importance. Selon la Loi fondamentale, toutes les fonctions de la puissance publique sont démocratiquement constituées et légitimées, même si les manières, dont opèrent la constitution et la légitimation démocratiques, sont différentes. La puissance publique est ainsi organisée selon le principe de séparation des pouvoirs. Si, dans le domaine de la politique extérieure, le pouvoir exécutif possède des compétences exclusives concernant les décisions d’une portée étendue, peut-être même existentielles, il ne s’agit en aucun cas d’un déficit démocratique. (…) Le Bundestag, qui désapprouve les décisions gouvernementales, dispose, même dans le domaine de la politique extérieure, de ses compétences de contrôle ; il peut, le cas échéant, élire un nouveau Chancelier fédéral et contribuer au renversement du gouvernement en place ; il peut faire usage de ses compétences budgétaires. L’article 59, alinéa 2 LF ne lui reconnaît pas une compétence d’approbation en ce qui concerne les actes comme celui qui fait objet du présent différend21.
Des notions comme « relations politiques » sont toujours sujettes à une certaine imprécision et leur interprétation peut avoir comme conséquence d’exclure du champ d’application de l’article 59, alinéa 2 LF des traités internationaux, dont l’objet ne serait pas considéré par le juge comme réglant les relations politiques de la Fédération, ou, au contraire d’avoir une interprétation à caractère « expansif » tendant à donner une coloration politique à toute action gouvernementale (mais toute action gouvernementale n’est-elle pas politique ?)22. Cette disposition constitutionnelle est uniquement applicable dans le cas des traités internationaux23, les actes internationaux unilatéraux pris par le Gouvernement fédéral ne sont pas soumis à l’exigence d’une approbation des organes « compétents en matière de législation fédérale ». L’interprétation élastique de l’article 59, alinéa 2 LF met par conséquent en lumière les points de tension entre le Parlement et le gouvernement fédéral dans le domaine de la politique extérieure.
B. Appréciation critique.
Exclure du champ d’application l’accord passé par la République fédérale avec les puissances occupantes ou l’accord commercial franco-allemand suppose la volonté de la Cour de défendre la liberté gouvernementale et de ne pas donner une signification large de la notion « relations politiques » mentionnée à l’article 59, alinéa 2 LF. En 1952, l’article 59, alinéa 2 LF n’est pas applicable aux accords commerciaux conclus entre la RFA et la France, car ils ne répondent à aucune des conditions posées : ils ne sont ni de traités relatifs aux relations politiques de la République fédérale, ni ne concernent une matière relevant de la législation fédérale. L’interprétation restrictive de l’article 59, alinéa 2 LF tend à limiter la participation ou le concours du pouvoir législatif uniquement dans les hypothèses énumérées.
Il en résulte la volonté de préserver la liberté d’action du pouvoir exécutif dans le domaine des affaires étrangères. Font l’objet de participation ou de concours du Parlement les traités relatifs aux relations politiques de la Fédération ou portant sur une matière relevant de la législation fédérale. Ne doivent être assimilés à ce type de traités les accords passés par la Fédération avec les puissances qui occupent le territoire allemand après la fin de la Deuxième guerre mondiale. Si l’interprétation de la Cour allait dans ce sens, cette application élargie aux accords, qui ne sont pas de traités internationaux au sens classique, transformerait l’atteinte tolérable de l’article 59, alinéa 2 LF en « une atteinte inadmissible du principe de la séparation des pouvoirs » (Durchbrechung der Grundsätze der Gewaltenteilung in unzulässiger Weise) et déséquilibrerait la balance entre les pouvoirs au profit du chancelier et du Gouvernement fédéral24. Mais affirmer que l’article 59, alinéa 2 LF constitue une atteinte au principe constitutionnel de séparation des pouvoirs n’est-il pas en contradiction avec la définition générale du principe donnée par la Cour.
Si le juge entend le Gewaltenteilungsgrundsatz comme un système de freins et de contrepoids qui suppose l’interpénétration et le contrôle réciproque des pouvoirs, alors la participation du Parlement au processus décisionnel, maîtrisé par le Gouvernement fédéral, dans le domaine de la politique extérieure et militaire, ne peut être que la concrétisation de la définition générale de la norme déduite de l’article 20, alinéa 2 LF.
Définir quels sont les actes soumis à l’approbation ou exigeant le concours du Bundestag constitue sans doute un défi pour le juge constitutionnel. La solution, quelle qu’elle soit, a des conséquences immédiates sur les rapports entre le Parlement et le Gouvernement fédéral. Il s’agit de procéder à une mise en balance entre les intérêts en présence, et la décision prise n’est jamais sans conséquence directe sur la liberté des organes dont les compétences sont en jeu. Le juge constitutionnel doit faire preuve d’une souplesse remarquable, quitte à faire l’objet de critiques, qui voient dans ses décisions une gymnastique intellectuelle, qui répond, derrière le rideau tissé de règles juridiques, à des questions profondément politiques et qui satisfait tant la majorité parlementaire que le Gouvernement.
- Reinhold Zippelius/Thomas Würtenberger, Deutsches Staatsrecht, 32e édition, C.H. Beck, München, 2008, p. 606 : « Dieses [das Grundgesetz] ordnet die Akte des auswärtigen Verkehrs grundsätzlich dem Kompetenzbereich der Exekutive zu ». Dans le même sens, Werner Heun, Die Verfassungsordnung der Bundesrepublik Deutschland, Mohr Siebeck, Tübingen, 2012, p. 138 : « Traditionell gehören die Außenpolitik und das Militär zum Vorbehaltsbereich der Exekutive ». De manière générale, en langue française, Élisabeth Zoller, Droit constitutionnel, 1e édition, PUF, 1998, p. 432 : « Parmi les attributions traditionnelles du pouvoir exécutif figure la conduite des relations extérieures. Cette attribution correspond à une des premières missions de l’exécutif qui est, comme le soulignait Montesquieu, d’établir la sûreté et d’établir les invasions ». L’évolution du droit international et l’apparition d’une organisation internationale à un degré d’intégration intensive comme l’Union européenne ne répondent plus à cette définition d’une des « premières missions du pouvoir exécutif ». [↩]
- Konrad Hesse, Grundzüge des Verfassungsrechts der Bundesrepublik Deutschland, 20e édition, C.F. Müller, 1999, p. 228 : « (…) in dem Bereich, in dem die Regierung den geringsten Beschränkungen durch materielles Recht unterliegt (…) ». [↩]
- Pour reprendre la terminologie de Montesquieu, De l’Esprit des Lois, Œuvres complètes, vol. ІІ, Éditions Gallimard, p. 1951, Livre XI, chapitre VI, p. 401. Voir également : Jean-Jacques Chevallier, « De la distinction établie par Montesquieu entre la faculté de statuer et la faculté d’empêcher », in Mélanges en l’honneur de Maurice Hauriou, 1929, p. 137-158. [↩]
- Article 24 LF qui rend possible, dès 1949, l’adhésion de la RFA à l’ONU (membre depuis le 18 septembre 1973) et à l’OTAN (membre depuis le 6 mai 1955) dispose que, pour « sauvegarder la paix, la Fédération peut adhérer à un système de sécurité mutuelle collective ; elle consentira à cet effet aux limitations de ses droits de souveraineté qui établissent et garantissent un ordre pacifique durable en Europe et entre les peuples du monde ». [↩]
- BVerfGE 1, 372 « Deutsch-Französisches Wirtschaftsabkommen » du 29 juillet 1952, p. 394 : « In der parlamentarischen Demokratie ist grundsätzlich dem Parlament die Rechtsetzung vorbehalten und der Exektive die Regierung und Verwaltung übertragen. (…) für die Ausschlißlichkeit dieser ausdrücklich statuierten Zuständigkeiten der Regierung (…). Der Bundestag kann diese Funktion der Regierung nicht übernehmen soweit ihm nicht ausdrücklich Regierungsaufgaben zugewiesen sind ». [↩]
- La participation de la République fédérale à l’Union européenne est bien distincte de sa participation à d’autres institutions internationales, comme le montre l’existence des articles 23 LF relatif à l’Union européenne et 24 LF qui règle le transfert par une loi fédérale de « droits de souveraineté » à une organisation internationale, le transfert de droits de souveraineté par les Länder si ceux-ci sont compétents en la matière à des « organisations internationales de voisinage frontalier », la participation de la Fédération à « un système de sécurité mutuelle collective », et l’adhésion à des « convention établissant » des juridictions arbitrales. [↩]
- BVerfGE 68, 1 « Atomwaffenstationierung » du 10 décembre 1984, voir infra section 2. [↩]
- Sur le principe de justice fonctionnelle, on renvoie à la première partie, titre second, chapitre 1er. [↩]
- BVerfGe 68, 1 « Atomwaffenstationierung » du 10 décembre 1984, p. 83. Sur la responsabilité exécutive propre: cette partie, titre 1er, chapitre 1er, section 2. [↩]
- BVerfGE 1, 372 « Deutsch-französisches Wirtschaftsabkommen » du 29 juillet 1952, p. 394-395: « Durch diese Verteilung der Funktionen zwischen Regierung und Parlament hat das Grundgesetz die Bundesregierung nicht gehindert, dem Bundestag Einfluß auf die Führung der auswärtigen Angelegenheiten einzuräumen, wie dies in der Vereinbarung über das Zusammenwirken von Bundestag und Bundesregierung in Außenhandelsfragen vom 18. Juli 1950 vorgesehen ist. Die Bildung des Parlamentarischen Beirats, der die Regierung beim Abschluß handelspolitischer Vereinbarungen berät, widerspricht dem Grundsatz der Gewaltentrennung nicht. Sie fördert vielmehr die Zusammenarbeit von Legislative und Exekutive und sichert Kontrolle und Ausgleich der beiden Gewalten ». [↩]
- Heiko Sauer « Das Verfassungsrecht der kollektiven Sicherheit. Materielle Grenzen und Organkompetenzverteilung beim Wandel von Bündnisverträgen und beim Auslandseinsatz der Bundeswehr », in Hartmut Rensen/Stefan Brinck (dir.), Linien der Rechtsprechung des Bundesverfassungsgerichts erörtert von den wissenschaftlichen Mitarbeitern, Walter de Gruyter, Berlin, 2009, p. 608. [↩]
- BVerfGE 1, 372 « Deutsch-französisches Wirtschaftsabkommen » du 29 juillet 1952, p. 394 : « In der parlamentarischen Demokratie ist grundsätzlich dem Parlament die Rechtsetzung vorbehalten und der Exekutive die Regierung und Verwaltung übertragen. Hierzu gehört auch die Führung der Außen- und Handelspolitik ». [↩]
- BVerfGE 1, 372 « Deutsch-französisches Wirtschaftsabkommen » du 29 juillet 1952, p. 394 : « Eine solche Ausnahmebefugnis der Legislative im Bereich der Exekutive hat Art. 59 Abs. 2 GG in ganz bestimmten Grenzen begründet. (…) hat Art. 59 Abs. 2 GG dem Bundestag kein Recht gegeben, in den Zuständigkeitsbereich der Regierung einzugreifen. Der Bundestag bleibt auf die allgemeinen verfassungsmäßigen Kontrollmöglichkeiten beschränkt. Er regiert und verwaltet nicht selbst, sondern er kontrolliert die Regierung. Mißbilligt er deren Politik, so kann er dem Bundeskanzler das Mißtrauen aussprechen (Art. 67 GG) und dadurch die Regierung stürzen. Er kann aber nicht selbst die Politik führen ». [↩]
- BVerfGE 1, 372 « Deutsch-französisches Wirtschaftsabkommen » du 29 juillet 1952 et BVerfGE 1, 351 « Petersberger Abkommen » du 29 juillet 1952. [↩]
- BVerfGE 1, 351 « Petersberger Abkommen » du 29 juillet 1952, p. 369 : « Art. 59 Abs. 2 GG durchbricht das gewaltenteilungssystem insofern, als hier die Legislative in den Bereich der Exekutive übergreift ». [↩]
- Sur la motion de censure et les rapports entre majorité et opposition parlementaire: supra, chapitre 1er, section 2, § 2. [↩]
- BVerfGE 68, 1 « Atomwaffenstationierung » du 18 décembre 1984. Les circonstances particulières qui entourent cette affaire méritent l’attention : l’époque est celle de la guerre froide que se livrent les États occidentaux et le bloc de l’URSS. Toute décision gouvernementale peut susciter de vives réactions dans ces deux camps et porte le danger potentiel du déclenchement d’un conflit politique ou militaire violent. Il s’agit d’un litige interorganique (article 93, alinéa 1er, point n°1 LF) qui oppose la fraction parlementaire du parti Die Grüne (Les Verts) au gouvernement fédéral. [↩]
- Heiko Sauer, « Das Verfassungsrecht der kollektiven Sicherheit. Materielle Grenzen und Organkompetenzverteilung beim Wandel von Bündnisverträgen und beim Auslandseinsatz der Bundeswehr », in Hartmut Rensen/Stefan Brink (dir.), Linien der Rechtsprechung des Bundesverfassungsgerichts, erörtert von den wissenschaftlichen Arbeitern, Walter de Gruyter, Berlin, 2009, p. 592. Il s’agit de l’exécution de la double résolution (Doppelbeschluss) du Conseil de l’OTAN du 12 décembre 1979, qui fut la réaction du déploiement de raquettes soviétiques à moyenne portée et prévoyait la modernisation de l’arsenal nucléaire de l’OTAN dans l’hypothèse d’un échec des négociations de désarmement menées avec l’URSS. Les négociations subirent un échec et la modernisation du parc nucléaire fut lancée. Il faut signaler que le déploiement d’armes sur le sol de la RFA fut prévu dans l’accord de 1979, approuvée par le Bundestag. Le président des États-Unis, première puissance nucléaire mondiale, pouvait décider de la mobilisation du système d’armements en vue de la protection des membres de l’OTAN. [↩]
- Il faut remarquer que ces manœuvres militaires ont fait l’objet, en 1983, d’un recours constitutionnel individuel (Bundesverfassungsbeschwerde) accompagné d’une demande d’émettre une ordonnance d’urgence permettant de suspendre la disposition de missiles américaines à charge nucléaire et des missiles de bas vol sur le territoire allemand. Voir BVerfGE 66, 39 « Nachrüstung » du 16.12.1983. Il s’agit du résultat d’une résolution des ministres des affaires étrangères et de la défense des États appartenant à l’Organisation du traité de l’Atlantique du Nord prise le 12 décembre 1979 à Bruxelles. Le gouvernement fédéral n’a pas procédé à la demande d’une autorisation de la part du Bundestag afin que la disposition de ces armes sur le territoire de la République fédérale soit effectuée en vertu d’une loi. La Cour ne donne pas suite à la demande formulée et n’édicte pas une ordonnance d’urgence. [↩]
- Il s’agit de raquettes à tête nucléaire Pershing 2 et des missiles Cruise. Les premières Pershing 2 furent déployées en Allemagne dès janvier 1984. Leur « séjour » n’est pas vraiment très long : elles sont démantelées à la suite d’un accord entre l’URSS et les États-Unis du 27 mai 1988. [↩]
- BVerfGE 68, 1 «Atomwaffenstationierung » du 18 décembre 1984, p. 89 : « Die Organisation der grundgesetzlichen Demokratie beruht indes, wie dargelegt, nicht darauf, alle Handlungen und Entscheidungen, die aus sich oder in ihren Folgen von politisch weittragender oder existentieller Bedeutung sind, dem Parlament zuzuweisen oder es daran in Gesetzesform zu beteiligen. Auch die Exekutive, und innerhalb ihrer besonders die Regierung, ist als “politische” Gewalt ausgestaltet und nicht etwa von vornherein auf politisch weniger bedeutsame Entscheidungen beschränkt. Die Staatsgewalt in allen ihren Funktionen ist nach dem Grundgesetz, wenn auch in unterschiedlicher Weise, demokratisch konstituiert und legitimiert und auf dieser Grundlage gewaltenteilig organisiert. Es ist daher keineswegs ein Defizit an Demokratie, wenn die Exekutive im Bereich der auswärtigen Angelegenheiten auch ausschließliche Befugnisse zu weittragenden, möglicherweise existentiellen Entscheidungen besitzt. (…) Dem Bundestag, der solche Entscheidungen mißbilligt, verbleiben – auch in au, swärtigen Angelegenheiten – seine parlamentarischen Kontrollbefugnisse; er kann gegebenenfalls einen neuen Bundeskanzler wählen und damit den Sturz der bisherigen Regierung bewirken; er kann von seinen Haushaltskompetenzen Gebrauch machen – eine Zustimmungskompetenz für Akte der hier in Rede stehenden Art erkennt ihm Art. 59 Abs. 2 Satz 1 GG nicht zu ». [↩]
- Par exemple, les accords de caractère commercial sont en principe exclus du champ d’application de l’article 59 LF. Sur ce point : BVerfGE 1, 372 « Deutsch-französisches Wirtschaftsabkommen » du 29 juillet 1952, p. 381 et suiv. [↩]
- Concernant la négociation et la conclusion d’un traité international, le pouvoir exécutif est certes autonome, mais il est difficile de parler d’un noyau de compétences exclusif. Sa liberté s’arrête là, où apparaît l’exigence d’obtenir l’approbation du Parlement. Bien sûr, ce dernier ne peut décider de son propre chef de modifier le contenu d’un traité déjà conclu. Il ne peut qu’accorder son approbation ou la refuser. Les compétences exclusives du pouvoir exécutif existent seulement dans des domaines dispensés de l’exigence de participation ou de concours du Parlement. Dans ce sens, Susanne Baer, « Vermutungen zu Kernbereichen der Regierung und Befugnisse des Parlaments », Der Staat, 2001, p. 536 : « Das Parlament wirkt an Verträgen und im Rahmen der Art.23 und 24 GG mit. Exklusive Regierungsbefugnisse existieren danach ausdrücklich nur außerhalb von Vertragsschlüssen ». [↩]
- BVerfGE 1, 351 « Petersberger Abkommen » du 29 juillet 1952, p. 369 : « Eine Anwendung des Art. 59 Abs. 2 auf Abmachungen mit den Besatzungsmächten würde also die Durchbrechung der Grundsätze der Gewaltenteilung in unzulässiger Weise erweitern » ; p. 370 : « (…) eine Auslegung des Art. 59 GG, die besatzungsrechtliche Abmachungen aus seinem Geltungsbereich herausnimmt, eine Verschiebung im System des Grundgesetzes zugunsten des Bundeskanzlers und der Bundesregierung darstelle ». [↩]
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