Le principe de la séparation des pouvoirs, tel qu’il est interprété par les juges de Karlsruhe, ne constitue pas un principe qui existe en soi, il « porte » l’ordre constitutionnel de la Loi fondamentale. Le principe de la séparation des pouvoirs est le moyen efficace qui permet et qui conditionne la réalisation et l’existence de cet ordre. C’est la raison pour laquelle le principe déduit de l’article 20, alinéa 2 LF est protégé par « la clause d’éternité » de l’article 79, alinéa 3 LF. C’est la raison pour laquelle la Cour déclare constitutionnelle, en 19701, une loi de révision constitutionnelle problématique, qui prive d’un recours juridictionnel, en le remplaçant « par le contrôle d’organes et d’organes auxiliaires désignés par la représentation du peuple »2, un individu, qui pourrait être une menace pour l’ordre constitutionnel démocratique et libéral. La démocratie allemande est une démocratie militante (streitbare Demokratie) et n’accepterait pas, même au nom d’une des pierres angulaires de son édifice, au nom du principe de la séparation des pouvoirs, d’être rongée de l’intérieur. Afin de préserver la Loi fondamentale de 1949, la Cour est prête à sacrifier, sur l’autel de l’ordre constitutionnel démocratique et libéral, le principe de la séparation des pouvoirs. Après tout, il n’est pas question de doter un organe de compétences intangibles afin qu’il exerce une fonction déterminée. Il convient de réfléchir en termes de freins et de contrepoids qui rendent possible le fonctionnement d’un système où le pouvoir arbitraire, libéré des chaînes du contrôle et de l’équilibre, ne dispose que d’une infime chance de voir le jour.
Conclusion du chapitre 3
Citer : Maria Kordeva, 'Conclusion du chapitre 3, ' : Revue générale du droit on line, 2020, numéro 51046 (www.revuegeneraledudroit.eu/?p=51046)
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